SECTION 2 AUTRES PROVISIONS POUR CHARGES DE PERSONNEL
SECTION 2
Autres provisions pour charges de personnel
SOUS-SECTION 1
Provisions pour gratifications au personnel
A. RÈGLES GÉNÉRALES
1Les rémunérations du personnel constituent habituellement des charges annuelles et normales de l'exercice au cours duquel elles sont engagées (cf. CE, arrêt du 8 février 1961, n° 47372).
2Ainsi les dépenses de personnel réglées au cours d'un exercice déterminé peuvent être déduites pour la détermination du résultat fiscal d'un exercice antérieur s'il est établi, d'une manière indiscutable, qu'elles rémunèrent un travail accompli au cours de ce dernier exercice.
Ce lien peut notamment résulter des conventions existant entre l'employeur et son personnel ou d'engagements fermes et irrévocables pris en faveur du personnel avant la clôture de l'exercice.
Cette déduction peut alors être opérée sous la forme de provision lorsque les éléments nécessaires au calcul des rémunérations correspondantes ne sont pas encore connus avec précision.
3Il convient d'observer, par ailleurs, que dans la mesure où l'engagement contractuel de l'entreprise à l'égard de ses salariés est de nature à donner naissance à une véritable créance de ces derniers sur leur employeur, c'est-à-dire lorsque son montant en est exactement déterminé, les gratifications à allouer au titre d'un exercice doivent figurer dans les charges déductibles de cet exercice en tant que charges à payer (cf. ci-avant 4 E 22 ).
B. CONDITION DE DÉDUCTION DES PROVISIONS
I. Engagement ferme et irrévocable
4Le Conseil d'État a refusé la déduction d'une provision constituée en vue de faire face à la charge représentée par l'octroi de gratifications au personnel qui avait été décidé par une assemblée générale des associés dès lors que, d'une part, la délibération de cette assemblée n'emportait pas un engagement irrévocable en faveur du personnel et que, d'autre part, il n'est pas établi que le contenu de cette délibération aurait été, avant la clôture de l'exercice, porté effectivement à la connaissance du personnel dans des conditions telles que l'octroi des gratifications ainsi annoncées serait devenu inéluctable (CE, arrêt du 27 juillet 1979, n° 11716, RJ, II, p. 75).
La Haute Assemblée a également jugé qu'une provision n'avait pu être valablement constituée en franchise d'impôt pour des gratifications à payer au personnel dès lors que cette charge, tout en étant bien précisée et certaine dans son principe, était à la clôture de l'exercice encore indéterminée dans son montant, lequel devait être fixé par une décision ultérieure des gérants (CE, arrêt du 6 février 1961, n° 44779, 7e s.-s., RO, p. 286). Bien que certaine dans son principe, la charge n'a pas été considérée dans cette espèce comme nettement précisée au sens de l'article 39-1-5° du CGI (cf. ci-avant, 4 E 1121 ).
5Il a été jugé qu'à défaut d'engagement ferme, pris antérieurement à la clôture de l'exercice, de verser un complément de rémunération au gérant et au directeur commercial et une participation aux bénéfices au personnel, la circonstance que la société a procédé à des attributions semblables lors des années précédentes ne l'oblige nullement à en poursuivre le versement.
De même l'entreprise ne prend aucun engagement ferme à l'égard de la rémunération à attribuer au gérant lorsque les statuts se bornent à prévoir qu'elle serait fixée d'un commun accord des parties (CE, arrêt du 31 mai 1965, n° 48693, 7e s.-s.).
Des charges de personnel non encore réglées à la clôture d'un exercice ne peuvent être déduites du résultat fiscal de cet exercice qu'à la condition que l'entreprise ait pris à l'égard des salariés intéressés des engagements fermes rendant certaine l'obligation de versement des sommes en cause (CE, arrêt du 25 octobre 1989, n° 66990, 9e et 8e s.-s., SARL KAMARINA II).
L'assemblée générale d'une SARL ne prend pas d'engagement ferme à l'égard du gérant lorsqu'elle décide de lui allouer un complément de rémunération dès lors qu'elle subordonne le règlement de cette somme à l'approbation des comptes de l'exercice et à l'existence d'une trésorerie suffisante (CE, arrêt du 16 décembre 1992, n° 82971, 7e et 9 e s.-s., SARL NOBLACO ; confirmation de l'arrêt du 9 juillet 1986 n° 44724, 8e et 9e s.-s.).
II. Forme de l'engagement
6Le caractère ferme et irrévocable de l'engagement peut résulter des statuts, d'une convention ou d'une décision des organes dirigeants de l'entreprise intervenue antérieurement à la clôture de l'exercice de constitution de la provision, de sorte qu'il en résulte pour elle une dette certaine et nettement précisée (CE, arrêt du 6 février 1961, n° 44779, déjà cité au n° 4 ; dans le même sens CE, arrêt du 6 février 1986 n° 35683).
7Sous la réserve que les instruments de preuve retenus par les contribuables se révèlent compatibles avec les règles de la procédure écrite, ceux-ci disposent d'un choix entier quant aux moyens propres à établir l'existence, le contenu et la date des conventions ou engagements justifiant la déduction de dépenses de personnel non réglées à la clôture d'un exercice. En effet, l'exigence de la part de l'administration d'un élément de preuve particulier aurait pour conséquence de subordonner la déduction des dépenses en cause à des conditions non prévues par la loi. Il appartient à l'administration fiscale d'apprécier au cas par cas la valeur probante des éléments produits par les contribuables, sous le contrôle, le cas échéant, du juge de l'impôt. Cela étant, et s'agissant des seules SARL, qui sont le plus souvent des sociétés de famille voire des sociétés quasi-unipersonnelles à l'égard desquelles l'exigence d'un formalisme excessif pourrait paraître rigoureuse, le Conseil d'État a admis que le supplément de rémunération accordé au gérant en vertu de conventions passées au cours de l'exercice et ratifiées par l'assemblée générale ayant approuvé les comptes de cet exercice puisse être admis en déduction des résultats dudit exercice alors même que son montant aurait été, pour partie, porté en charges à payer (CE, juin 1991, n° 68 103). En revanche, dans le cas d'une rémunération complémentaire décidée par l'assemblée générale des associés d'une SARL en cours d'exercice mais dont l'échéance et le versement ont été subordonnés à la réalisation d'événements futurs et incertains tels que l'approbation des comptes de cet exercice et les limites de la trésorerie, le Conseil d'État (arrêt du 16 décembre 1992 n° 82971, SARL NOBLACO déjà cité) n'a pas admis la déduction de ce complément non encore versé à la clôture dudit exercice et porté en charges à payer (Réponse Herment, Sénat 13 avril 1995, p. 881 n° 7056).