SOUS-SECTION 2 NATURE DES AIDES
III. Classification des aides accordées dans le cadre de décisions normales de gestion
15Les conséquences fiscales des décisions d'octroi d'abandons de créances ou de subventions allouées dans le cadre de décisions de gestion normales diffèrent tant pour l'entreprise qui les consent que pour celle qui en est bénéficiaire selon que l'aide présente un caractère commercial ou financier (cf. ci-après DB 4 A 2163 n°s 1 et suiv. ).
Le caractère de chaque abandon de créance résulte de l'examen - non pas isolément - mais globalement de l'ensemble des éléments de fait ou de droit relevés au moment où l'abandon de créance a été consenti, tels, notamment :
- la nature et le montant de la créance abandonnée ou de la somme versée ;
- les relations existant ou ayant existé entre l'entreprise créancière et l'entreprise débitrice ;
- les motivations réelles ayant conduit à abandonner la créance.
16La détermination de la qualification de l'abandon de créance ne présente pas de difficultés particulières lorsque tous les éléments d'appréciation permettent, en raison de leur homogénéité, de conclure avec certitude au caractère exclusivement commercial ou financier de l'abandon.
Peut ainsi être qualifié de commercial l'abandon d'une créance trouvant son origine dans des relations commerciales entre deux entreprises et consenti soit pour maintenir des débouchés, soit pour préserver des sources d'approvisionnement.
À cet égard, le fait que l'entreprise qui consent l'abandon soit une banque ou un établissement de crédit n'est pas de nature à disqualifier, au regard de l'impôt sur les bénéfices, le caractère commercial de l'abandon.
Un abandon de créance doit être qualifié de financier lorsque simultanément la nature de la créance (prêt, avance...), les liens existant entre l'entreprise créancière et l'entreprise débitrice exclusifs de toute relation commerciale ainsi que les motivations de l'abandon présentent un caractère strictement financier.
17En revanche, la qualification de l'abandon de créance peut être délicate dans les cas où les éléments d'appréciation sont aussi divers qu'hétérogènes en raison, par exemple :
- du fait que l'avantage consenti à une entreprise a consisté dans le versement de subvention ou de sommes « innommées » ;
- de l'existence simultanée de relations commerciales ou financières et d'autres lie-ns entre la société créancière et la société débitrice (relations de mères à filles, sociétés dépendant d'un même groupe, sociétés soeurs...) ;
- de la constatation de relations commerciales ou financières antérieures, intermittentes ou concomitantes.
Dans ces diverses situations le caractère de l'abandon doit être principalement recherché dans les motivations qui ont conduit à abandonner la créance ou à consentir un avantage de trésorerie :
- si ces raisons revêtent un aspect commercial marqué et prédominant, l'abandon est commercial ;
- dans le cas contraire, l'abandon est financier.
18C'est ainsi que dans le cas d'une société française qui avait consenti l'abandon de la totalité de ses créances à la filiale allemande dont elle détenait 97,6 % du capital et qui se trouvait en situation financière difficile, le Conseil d'État a jugé que l'abandon s'inscrivait non dans le cadre de la gestion de ses participations financières mais répondait à des fins relevant essentiellement de son activité commerciale. En effet, par l'aide ainsi accordée, la société française avait cherché à éviter un dépôt du bilan de sa filiale qui aurait risqué de porter atteinte à son crédit et surtout n'aurait pas manqué d'entraver la poursuite de ses activités commerciales en Allemagne dont cette filiale était un instrument (CE, arrêt du 27 novembre 1981, req. n° 16814).
De même, il a été jugé que devaient être considérés comme revêtant un caractère commercial :
- les subventions d'équilibre allouées à une société française au cours de quatre années successives par une société soeur et fournisseur allemand soucieux de conserver des débouchés convenablement assurés par l'activité de la société française (en ce sens, CE, arrêt AGEPAN du 7 mai 1980, req. n° 13493) ;
- les abandons de créances successifs consentis par une société mère suisse à sa filiale française afin que celle-ci puisse rééquilibrer les comptes d'exploitation et poursuivre son activité commerciale de diffusion en France des produits de la société mère (en ce sens, CE, arrêt BULOVA du 25 juillet 1980, req. n° 11169) ;
- les subventions d'exploitation supportées sous forme de prise en charge de dépenses de publicité importantes par les membres d'un groupement d'intérêt économique ayant intérêt, indépendamment de leur qualité d'associé, à voir accroître le volume des ventes du groupement (en ce sens, CE, arrêt TOTAL-GAZ du 9 janvier1981, req. n° 10164) ;
- les sommes versées à une entreprise française exploitant en France un commerce de vente au détail de vêtement par ses deux fournisseurs allemand et belge soucieux de conserver les débouchés convenablement assurés par l'activité de la société française (CE, arrêt AMW FRANCE TEXTER, du 20 octobre 1982, req. n° 23588).
19Au contraire, revêtent un caractère financier l'abandon de créance ou la subvention consentis :
- par une entreprise à une autre entreprise afin de mettre un terme aux relations commerciales qu'elles entretenaient ;
- par une société mère à une filiale en l'absence de relations commerciales significatives. À cet égard, le fait qu'une société mère ou qu'une société d'un groupe assure,. pour le compte de ses filiales ou des autres sociétés du groupe, des services internes d'intérêt commun n'est pas, en principe, de nature à nouer des relations commerciales significatives ;
- par une entreprise participant à une opération d'assainissement financier d'une autre entreprise, de restructuration d'un groupe ou d'un secteur d'activité économique déterminé.