B.O.I. N° 75 du 20 AVRIL 2001
BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS
7 A-1-01
N° 75 du 20 AVRIL 2001
7 E / 13 - A 4321
DROITS D'ENREGISTREMENT ET TAXE DE PUBLICITÉ FONCIÈRE.
PAIEMENT FRACTIONNÉ ET DIFFÉRÉ DES DROITS.
DÉCISION DE DÉCHÉANCE. VOIE DE RECOURS.
COMPÉTENCE DES TRIBUNAUX JUDICIAIRES.
ARRET ET ORDONNANCE DES COURS ADMINISTRATIVES D'APPEL
DE PARIS (20 JUILLET 1999) ET BORDEAUX (30 MAI 2000) ; JUGEMENT DU TRIBUNAL
ADMINISTRATIF DE CAEN (16 SEPTEMBRE 1999).
(L.P.F., art. L 199)
[Bureaux J 1 et J 2]
ANALYSE DES ARRÊT, JUGEMENT ET ORDONNANCE (textes reproduits en annexe) :
La décision par laquelle est prononcée la déchéance du paiement différé ou fractionné accordé pour le règlement de droits d'enregistrement ou de la taxe de publicité foncière ne constitue pas un acte détachable de la procédure d'assiette et de recouvrement des impositions qu'elle concerne.
Par suite, une telle décision n'est pas susceptible d'un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif, mais d'un recours de plein contentieux devant le juge judiciaire, seul compétent en cette matière selon les dispositions de l'article L. 199 du Livre des procédures fiscales.
OBSERVATIONS :
Les arrêts, jugement et ordonnance commentés infirment la doctrine administrative exprimée à la documentation de base 7 A 4321, n° 63 , selon laquelle la décision de déchéance d'un crédit de paiement relatif à des droits d'enregistrement ou à la taxe de publicité foncière est susceptible d'un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif.
Analysant ladite décision comme un acte non détachable de la procédure d'imposition, le juge administratif en déduit que celui-ci ne peut être critiqué que devant le juge judiciaire, compétent pour cette catégorie d'impôt en vertu des dispositions de l'article L. 199 du Livre des procédures fiscales, dans le cadre d'un recours de plein contentieux.
Il conviendra désormais d'adopter cette analyse comme règle de conduite.
En conséquence les deux derniers paragraphes de la documentation de base 7 A 4321, n° 63 précitée sont rapportés.
La lettre prononçant la déchéance devra ainsi mentionner que le débiteur aura la possibilité de contester le bien-fondé et la régularité de la décision de déchéance après la mise en recouvrement des impositions correspondantes, dans le cadre d'une réclamation présentée selon les formes prévues par les articles L. 190 et suivants du Livre des procédures fiscales.
La décision de rejet, implicite ou expresse, de cette réclamation pourra ensuite être déférée au tribunal de grande instance compétent.
Les affaires de cette nature seront instruites et jugées selon les règles applicables au contentieux du recouvrement.
Annoter : D.B. 7 A 4321, n° 63 .
Le Chef de Service
Philippe DURAND
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ANNEXE
Arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 20 juillet 1999
« La Cour administrative d'appel de Paris,
VU la requête, enregistrée le 10 novembre 1997 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris, présentée pour Mme Eugénie X... demeurant ..........et pour M. Laurent X... demeurant ...........par Me Thibault, avocat ; les Consorts X... demandent à la cour d'annuler l'ordonnance n° 9710296/2 du 11 septembre 1997 par laquelle le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande d'annulation des décisions en date du 22 mai 1997 par lesquelles le receveur principal de Neuilly-sur-Seine a prononcé la déchéance du paiement différé des droits de succession dont ils sont redevables ;
Les Consorts X... soutiennent que le tribunal administratif s'est déclaré à tort incompétent au profit du tribunal de grande instance, dès lors qu'ils contestent non le montant de droits mais la décision ayant prononcé la déchéance du paiement différé des impositions ;...
VU l'ordonnance attaquée ;
VU, enregistré comme ci-dessus le 12 février 1999, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'il résulte de l'article 404 B de l'annexe III au code général des impôts que l'exigibilité immédiate de droits de succession dont le paiement a été différé est la conséquence directe de la cession de biens concernés sans qu'une décision de l'administration ait à intervenir ; que, par suite, les correspondances attaquées ne sont pas détachables de la procédure d'authentification de la créance de l'Etat réalisée par l'émission de deux avis de mise en recouvrement les 7 et 17 août 1997, qui ne peuvent être contestés que dans le cadre d'une procédure contentieuse portant sur l'exigibilité de droits réclamés, laquelle ne peut être portée que devant la juridiction judiciaire, seule compétente pour en connaître ; .....
VU les autres pièces du dossier ;
...
Considérant que si les Consorts X... demandent l'annulation des lettres du 22 mai 1997 par lesquelles le receveur des impôts de Neuilly-sur-Seine leur a fait connaître la suite défavorable qu'il entendait réserver à leurs observations relatives aux lettres en date du 17 mars 1997 par lesquelles il les avait informés de l'exigibilité immédiate de droits de succession suspendus, les correspondances attaquées avaient pour seul objet d'informer les requérants qu'en raison de la déchéance du régime de paiement différé de ces droits, un avis de recouvrement authentifiant la créance allait leur être adressé ; qu'ainsi, bien que le receveur ait cru devoir à tort mentionner que sa décision pouvait être déférée au tribunal administratif, les lettres litigieuses avaient le caractère d'un acte non détachable de la procédure de recouvrement, non susceptible de faire l'objet d'un recours distinct indépendamment de la contestation du bien-fondé des droits, dont le contentieux ressortit à l'autorité judiciaire ; qu'il suit de là que les requérants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le tribunal administratif a rejeté leur requête ;
...
DECIDE
Article 1er : La requête des Consorts X... est rejetée.
... ».
Ordonnance de la Cour administrative d'appel de Bordeaux du 30 mai 2000
« Le Président de la 3ème chambre de la Cour administrative d'appel de Bordeaux,
Vu les requêtes enregistrées au greffe de la Cour administrative d'appel de Bordeaux le 26 octobre 1999, présentées pour Mme Arlette X... , demeurant.......... ;
Mme X... demande à la Cour :
- d'annuler l'ordonnance en date du 21 septembre 1999 par laquelle le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses requêtes aux fins d'annulation, de sursis à exécution, et de suspension pour une durée de trois mois de la décision du receveur principal des impôts de Royan, en date du 18 juin 1999, prononçant la déchéance du régime de paiement différé des droits de mutation dont elle est débitrice à la suite du décès de Mme Renée Y... épouse Z... ;
- d'annuler ladite décision administrative ;
- d'en prononcer le sursis à exécution ;
- d'en ordonner la suspension pour une durée de trois mois ;
Vu l'ordonnance attaquée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
...
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L 9 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : « .....les présidents de formation de jugement des cours administratives d'appel peuvent, par ordonnance ... rejeter les requêtes ne relevant manifestement pas de la compétence des juridictions administratives, ... » qu'aux termes de l'article L 199, deuxième alinéa du livre des procédures fiscales : « En matière de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes ou contributions, le tribunal compétent est le tribunal de grande instance " ;
Considérant que pour les motifs retenus par le premier juge dans l'ordonnance attaquée 1 , les juridictions administratives sont manifestement incompétentes pour connaître du litige qui oppose Mme X... aux services fiscaux de la Charente-Maritime ; qu'il suit de là que les requêtes présentées pour Mme X... ne peuvent qu'être rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent, ainsi que l'a jugé à bon droit l'ordonnance contestée ;
ORDONNE
Article 1er : Les requêtes de Mme Arlette X... sont rejetées ».
Jugement du Tribunal administratif de Caen du 16 septembre 1999
« Le Tribunal,
Vu, sous le n° 99-346, la requête enregistrée au greffe du tribunal le 8 mars 1999, présentée par M. Robert X... , demeurant....... ; il demande l'annulation d'une décision en date du 15 février 1999 par laquelle le directeur des services fiscaux du Calvados l'a déchu du droit au paiement différé des droits de succession dus suite au décès de son père en janvier 1983 ;
Vu la communication en date du 16 août 1999, faite en application de l'article R. 153-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, du moyen susceptible d'être relevé d'office par le tribunal, tiré de l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître du litige ;
Vu la décision attaquée ;
Vu l'ensemble des autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
...
Considérant que par décision en date du 15 février 1999, le directeur des services fiscaux du Calvados a informé M. X... que, à l'occasion de la vente au 17 janvier 1989 d'une parcelle comprise dans la succession ouverte par le décès de son père en 1983, la nue-propriété de cette parcelle, qu'il détenait, avait été réunie à l'usufruit de celle-ci, détenue par sa mère, et qu'il se trouvait par suite, par application de l'article 403 de l'annexe III au code général des impôts, déchu du bénéfice du paiement différé de la totalité des droits de succession qui lui avait été accordé le 28 septembre 1983 en vertu des dispositions de l'article 397 de l'annexe III au code général des impôts ;
Considérant que cette décision n'est pas détachable de la procédure de recouvrement d'une imposition dont le contentieux appartient, en application de l'article L. 199 du code général des impôts, à la juridiction judiciaire ; que dès lors, la requête par laquelle M. X... demande l'annulation de cette décision portant déchéance ne peut qu'être rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
DECIDE :
Article 1er : la requête de M. Robert X... est rejetée.
... ».
1 Motifs de l'ordonnance déférée.
« Considérant qu'aux termes de l'article L 199 du livre des procédures fiscales : « en matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées, les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif ... En matière de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes ou contributions, le tribunal compétent est le tribunal de grande instance... ».
Considérant que les requêtes de Mme X... sont dirigées contre une décision du receveur principal des impôts de Royan du 18 juin 1999, prononçant sur le fondement de l'article 403 de l'annexe III au code général des impôts, la déchéance du régime, prévu par l'article 1717 du code, de paiement différé des droits d'enregistrement exigibles en raison d'une mutation par décès ; qu'en application de l'article 403 susmentionné, cette déchéance a eu pour conséquence l'exigibilité immédiate des impositions et elle s'est traduite par l'émission d'un avis de mise en recouvrement le 2 juillet 1999, puis par la notification, le 26 juillet 1999, d'une mise en demeure tenant lieu de commandement de payer ;
Considérant que la décision attaquée ne constitue pas un acte administratif détachable de la procédure d'assiette et de recouvrement des droits d'enregistrement dont le contentieux ressortit à la compétence du tribunal de grande instance en vertu des dispositions précitées de l'article L 199 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, elle n'est pas susceptible d'un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif, en dépit des mentions en sens contraire que le receveur des impôts a fait figurer au bas de la décision ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la juridiction administrative est manifestement incompétente pour connaître des requêtes de Mme X... ».