Date de début de publication du BOI : 20/12/2005
Identifiant juridique :

B.O.I. N° 206 du 20 DECEMBRE 2005


  D. EXIGIBILITÉ


  1. Prestations compensatoires passibles d'une imposition proportionnelle

26.En application du 1° du 2 de l'article 635, les jugements qui donnent ouverture à une imposition proportionnelle doivent être enregistrés dans le mois de leur date.

27.Dès lors, les jugements qui constituent l'acte ou le titre générateur du droit de partage ou du droit de 0,60 % dû en application des dispositions combinées des articles 1133 ter et 1020 doivent être enregistrés dans le mois de leur date.

Il est rappelé qu'il résulte de la combinaison de l'article 1701 et du deuxième alinéa de l'article 1961 que les droits d'enregistrement sont immédiatement exigibles dès le prononcé du jugement, sans qu'il soit besoin d'attendre qu'il soit exécutoire. Cette situation est confirmée par une jurisprudence constante de la cour de cassation 2 . En effet, les décisions de justice forment l'acte justificatif de la créance fiscale, et l'on ne saurait qualifier de condition suspensive au sens de l'article 676 la faculté ouverte aux parties d'interjeter appel ou de se pourvoir en cassation.

Par ailleurs, conformément à l'article 539 du nouveau code de procédure civile, l'appel et son délai n'ont pour effet que de suspendre l'exécution du jugement, et non de le mettre à néant 3 . Tout au plus, le défaut de caractère exécutoire de la décision justifie-t-il l'émission d'un avis de mise en recouvrement collectif aux parties au moment de la prise en charge en recette.

28.Lorsque le jugement ne prévoit pas le versement de la prestation compensatoire, l'acte ultérieur prévoyant le partage de sommes d'argent au moyen de deniers communs ou indivis entre époux séparés de biens pendant le mariage (cf. n° 22 ) devra être enregistré dans le mois de sa date, conformément au 7° du 1 de l'article 635.

29.Par ailleurs, l'acte prévoyant le versement en capital dû en application de l'article 280 du code civil doit être :

- publié dans les deux mois de sa date s'il stipule que ce versement est opéré au moyen d'un immeuble ; il donne lieu à cette occasion à la perception de la taxe de publicité foncière au taux réglé comme il est dit au A ;

- enregistré dans le mois de sa date, conformément au 7° du 1 de l'article 635 s'il opère partage de biens qui avaient été acquis en commun ou en indivision par les époux pendant leur mariage, et demeurés dans cet état postérieurement au divorce. Le droit de partage prévu par l'article 748 est alors exigible.

  2. Prestations compensatoires passibles d'un droit fixe

30.Aucun délai n'est imposé pour l'enregistrement des jugements prévoyant le versement de telles prestations compensatoires (voir toutefois ci-après n° 39 , cas c, et 45).


  E. ASSIETTE (IMPOSITIONS PROPORTIONNELLES)


  1. Dispositions communes

31.Les droits sont assis sur les valeurs qui doivent, en application de l'article 1080 du nouveau code de procédure civile, être mentionnées dans la convention, ou, à défaut d'une telle convention, dans la décision qui prononce le versement de la prestation compensatoire.

32.Par exception aux précisions ci-dessus, le versement d'une prestation compensatoire au moyen de biens en usufruit, doit, pour la liquidation des droits d'enregistrement, être déterminé conformément aux dispositions de l'article 669.

33.La même évaluation s'applique pour la liquidation de l'attribution du droit temporaire ou viager d'usage et d'habitation, dès lors qu'ils s'établissent et se perdent de la même manière que l'usufruit (C. civ, art. 625 - cf. supra). Cependant, dès lors que le bénéficiaire d'un tel droit d'usage ou d'habitation ne peut le céder ni le louer, il apparaît possible d'admettre qu'il soit pratiqué sur cette évaluation légale un abattement de 20 %.

Bien entendu, le contrôle du respect de ces règles d'évaluation ne peut pas être effectué lors de l'enregistrement. Ainsi, à titre de règle pratique, les droits seront liquidés, à défaut d'une précision particulière, sur la valeur des droits démembrés tels qu'ils figureront dans la convention ou dans la décision.

  2. Dispositions propres aux versements de prestations compensatoires rendant exigibles le droit de partage

34.Lorsqu'il est exigible, le droit de partage s'applique que le versement de la prestation résulte d'une convention homologuée par le juge ou d'une décision du juge prise conformément à l'article 274 du code civil.

Il convient toutefois d'apporter les précisions suivantes selon que le versement de la prestation compensatoire est ou non compris dans une convention prévoyant la liquidation et le partage du régime matrimonial :

35.a) le jugement homologue une convention qui prévoit la liquidation du régime matrimonial et le versement de la prestation compensatoire au moyen de biens ou droits compris dans la masse des biens ainsi partagés

Une telle convention constate en effet un partage taxable en application de l'article 748.

Le droit de 1 % est alors assis sur l'actif net ainsi partagé, sans distraction des soultes, et particulièrement de celle résultant de l'attribution à l'un des ex-époux des biens revenant normalement à l'autre par l'effet de la liquidation de la communauté, et qui est compensée par la prestation compensatoire d'égal montant.

36.b) Le jugement n'homologue pas une convention qui prévoit la liquidation du régime matrimonial et le versement de la prestation compensatoire au moyen de biens ou droits compris dans la masse des biens ainsi partagés

Dans ce cas, et dès lors que les biens au moyen desquels la prestation compensatoire est versée sont passibles du droit de partage, celui-ci est assis sur leur valeur. L'acte de partage ultérieur qui reprend dans ses stipulations les biens ou droits versés conformément à ce jugement ne donnera pas lieu à la perception du droit de partage sur la valeur des biens ou droits ainsi versés, par application de la règle selon laquelle la même opération ne peut être frappée deux fois de droits proportionnels d'enregistrement (règle « non bis in idem »).


  F. APPLICATION PRATIQUE : TRAITEMENT DES JUGEMENTS


  1. Nature des jugements pour lesquels le versement de la prestation compensatoire justifie la présentation à la formalité de l'enregistrement

37.A titre préalable, il convient de rappeler que les jugements prévoyant le versement d'une prestation compensatoire, ou qui, plus généralement homologuent une convention prévoyant la liquidation du régime matrimonial des époux n'ont pas à être présentés lorsque l'une des parties bénéficie de l'aide juridictionnelle. Les développements ci-après postulent donc qu'aucune des parties au jugement ne bénéficie de l'aide juridictionnelle.

38.Cela étant, sont présentés à la formalité de l'enregistrement, les jugements qui homologuent une convention prévoyant la liquidation du régime matrimonial et le versement de la prestation compensatoire au moyen de biens ou droits compris dans la masse des biens ainsi partagés. Ces jugements rendent exigibles le droit de partage (cf. ci-dessus, n° 34 ), comme tous les jugements homologuant une convention prévoyant la liquidation et le partage du régime matrimonial.

39.Sont également présentés à la formalité de l'enregistrement les autres jugements qui prévoient le versement d'une prestation compensatoire (peu important que le versement résulte d'une décision prise sur le fondement de l'article 274 du code civil ou de l'homologation d'une convention relative au versement de la prestation compensatoire), au moyen :

a. de biens immeubles ou de droits réels immobiliers, que le jugement ou la convention qu'il homologue précise ou non leur origine ;

b. e deniers dont l'origine commune ou indivise entre époux séparés de biens pendant le mariage est précisée dans le jugement ou la convention qu'il homologue ;

c. d'autres biens ou droits mobiliers que des deniers, lorsque le jugement ou la convention qu'il homologue ne précise pas qu'ils ont un caractère propre et non indivis.

  2. Rôle des greffiers

40.En application des dispositions combinées du 3 de l'article 650 et de l'article 658, l'enregistrement des jugements doit être requis sur la minute par les greffiers à la recette des impôts dans le ressort de laquelle ils exercent leurs fonctions.

41.Pour la réquisition de la formalité, les greffiers continuent à appliquer les mêmes règles que précédemment (cf. DB 7 A 414, numéros 4 et 8 , DB 7 A 4121, n° 15 ).

Cependant, ils peuvent désormais délivrer copie exécutoire de la minute de tous les jugements de divorce (art. 862, deuxième alinéa, modifié par l'article 27 de la loi relative au divorce), sans attendre le paiement des droits d'enregistrement. La preuve du paiement du droit d'enregistrement résulte toutefois toujours de la mention de la quittance de l'enregistrement sur la minute (art. 1704, I).

  3. Rôle des recettes

42.Le recouvrement des droits dus continue, comme par le passé (cf. DB 7 A 4121, numéros 16 à 22 ) à être poursuivi contre les parties.

Bien entendu, en conséquence de la modification de l'article 862, l'avis adressé aux redevables en vue du règlement des droits dus sur le jugement de divorce (DB 7 A 4121, n° 16 ) ne fera plus référence à l'interdiction de délivrer copie. Il est cependant opportun qu'il précise les règles d'exigibilité des droits définies ci-dessus, et les sanctions de droit commun auxquelles les parties s'exposent à défaut de paiement dans le délai d'un mois à compter du prononcé du jugement.

43.A cet égard, la lettre indiquera le tarif exigible compte tenu des éléments relatifs à l'origine des biens figurant dans le jugement ou dans la convention que ce dernier homologue.

44.A défaut de précision (n° 39 , cas a et c), elle indiquera aux parties que les droits d'enregistrement dus sur le versement de la prestation compensatoire sont, compte tenu des présomptions de communauté ou d'indivision des biens des époux prévues respectivement par les articles 1402 et 1538 du code civil, exigibles au taux de 1 % prévu par l'article 748, sauf preuve contraire qu'il leur appartient d'apporter par tous moyens compatibles avec les règles de la procédure écrite.

45.Elle ajoutera que, dans la mesure où cette preuve contraire du caractère propre et non indivis entre époux est apportée, les droits sont dus :

- au taux proportionnel de 0,60 % s'agissant des prestations compensatoires versées au moyen d'immeubles ou de droits réels immobiliers (n° 39 , cas a),

- au droit fixe de 75 € prévu par l'article 1133 ter s'agissant des prestations compensatoires versées au moyen de biens ou droits mobiliers (n° 39 , cas c). Néanmoins, il conviendra de préciser qu'aucun droit ne sera dû si la preuve du caractère propre et non indivis du bien ou droit mobilier est apportée à la recette dans le mois du prononcé du jugement prévoyant son versement. Dans cette hypothèse, la recette renvoie sans délai le jugement au greffe en précisant qu'il est dispensé de formalité.

  4. Conséquences lors de la publication au fichier immobilier

46.Dès lors que les prestations compensatoires exécutées par attribution d'immeubles ou de droits réels immobiliers au sens précité donnent lieu à la perception de droits proportionnels lors de l'enregistrement, et compte tenu du fait qu'elles ne constituent en aucun cas des mutations à titre gratuit, la publication au fichier immobilier de ces opérations ne donne lieu à la perception d'aucune taxe de publicité foncière ou de droit d'enregistrement (art. 665, deuxième alinéa), sous réserve que soit apportée la preuve que les droits d'enregistrement exigibles ont été préalablement acquittés (art. 1701). Cette preuve résulte de la mention de l'enregistrement sur la copie du jugement.

47.A défaut, la formalité de publicité doit être refusée.


  G. ENTRÉE EN VIGUEUR


48.Il a été décidé d'appliquer ces dispositions aux décisions qui prévoient le versement d'une prestation compensatoire prononcées à dater du 1 er janvier 2005, quelle que soit la date d'introduction de l'instance. Il s'agit des jugements de divorce prononcés par le tribunal de grande instance à compter du 1 er janvier 2005 et prévoyant le versement d'une prestation compensatoire. En appel, il s'agit des arrêts prononcés à compter du 1 er janvier 2005, si toutefois aucune prestation compensatoire n'a été fixée au préalable par le tribunal de grande instance.

A cet égard, il est précisé que, à défaut de convention entre les époux, les décisions prévoyant le versement en capital :

- sous forme de somme d'argent, visés au 1 de l'article 275 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi relative au divorce, suivent le régime applicable aux jugements prévoyant le versement sous cette même forme en application du 1° de l'article 274 du code civil dans sa rédaction issue de la loi précitée ;

- le versement en capital sous forme d'abandon de biens en nature, meubles ou immeubles, en propriété, en usufruit, pour l'usage ou l'habitation, visés au 2 de l'article 275 civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi relative au divorce, suivent le régime appliqué aux versements en capital mentionnés au 2° de 274 du code civil dans sa rédaction issue de la loi précitée.

49.Ces dispositions s'appliquent mutatis mutandis aux conversions en capital effectuées en application des articles 276-4 et 280 du code civil intervenant à dater du 1 er janvier 2005.

Documentation de base liée  : 7 A 4121, 7 A 414, 7 F 132. BOI lié  : BOI 7 G 4-01 . Documentation de base supprimée  : 7 G 311, n° 22 à 24.

La Directrice de la Législation Fiscale

Marie-Christine LEPETIT

 

1   Les partages de tels biens sont effectués en application de l'article 1542 du code civil, et relèvent de ce fait des dispositions de l'article 748 (Cass. Comm. N°774 P du 21 avril 1992, Bull. IV n° 172, p. 120).

2   Cf. Cour de Cass. Comm. 26 avril 1968.

3   De même, sont inopérants :

- la suspension du prononcé du divorce à l'exécution de la prestation (qui a pu être prévue par certaines décisions avant le 1 er janvier 2005), la décision par laquelle la prestation compensatoire doit être versée étant une disposition distincte de celle prononçant le divorce,

- le fait que le jugement prévoyant le versement de la prestation compensatoire ne soit pas assorti de son exécution provisoire.