Date de début de publication du BOI : 06/04/2006
Identifiant juridique :

B.O.I. N° 63 du 6 AVRIL 2006


Section 2 :

Incidences des dispositions de l'article 51 de la loi de finances rectificative pour 2005


53.L'article 51 de la loi de finances rectificative pour 2005 modifie en la forme et au fond les dispositions de l'article 81 A.

54.En la forme, les conditions communes aux exonérations totales et à l'exonération partielle ainsi que les modalités particulières de mise en oeuvre des exonérations totales sont désormais regroupées au I de l'article 81 A. Les conditions particulières relatives à l'exonération portant sur les suppléments de rémunération perçus par les salariés qui effectuent des séjours à l'étranger et ne peuvent se prévaloir du bénéfice d'une exonération totale d'impôt sont visées au II de l'article précité.

55.Au fond, l'article 51 de la loi de finances rectificative déjà cité met les dispositions existantes en conformité avec le droit communautaire et en clarifie la portée (sous-section 1). Il élargit par ailleurs le champ d'application de l'exonération totale d'impôt sur le revenu en fonction de l'activité exercée à l'étranger, aux personnes qui prospectent les marchés étrangers (sous-section 2).


Sous-section 1 :

L'article 51 de la loi de finances rectificative met les dispositions existantes en conformité avec le droit communautaire et en précise la portée



  A. LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 81 A SONT MISES EN CONFORMITE AVEC LE DROIT COMMUNAUTAIRE


56.L'article 51 de la loi de finances rectificative pour 2005 met les dispositions de l'article 81 A en conformité avec le droit communautaire.

57.Il supprime toute référence au critère de nationalité et étend le bénéfice des exonérations d'impôt sur le revenu aux salariés employés par un employeur établi en France, dans un autre Etat membre de la Communauté européenne, en Islande ou en Norvège.

58.Ne peuvent en revanche pas bénéficier du régime, les salariés dont l'employeur est établi au sein de la Confédération Helvétique, dans la Principauté de Monaco, la Principauté d'Andorre ou le Liechenstein.

59.L'employeur s'entend de l'entité juridique à laquelle le salarié est contractuellement lié (cf. supra n° 15 ).

Exemple : Un groupe est constitué de la société mère établie aux Etats-Unis et de deux filiales dont l'une est établie au Canada et l'autre en France. Seuls les salariés qui sont contractuellement liés à la filiale établie en France peuvent bénéficier des dispositions de l'article 81 A.


  B. LA PORTEE DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 81 A EST PRÉCISÉE PAR LA LOI


60.L'absence d'encadrement suffisant par la loi des conditions d'application des exonérations prévues à l'article 81 A était source d'insécurité juridique, comme en témoigne l'abondance de la jurisprudence.

61.L'article 51 de la loi de finances rectificative pour 2005 comble cette lacune en précisant le champ d'application commun à toutes les exonérations et les conditions d'exonération des suppléments de rémunération liés à l'expatriation (II de l'article 81 A modifié).


  I. Le champ d'application commun à toutes les exonérations mentionnées à l'article 81 A est précisé


  1. La loi redéfinit les personnes éligibles aux exonérations...

a) Le bénéfice des exonérations est recentré sur les salariés

62.L'article 51 de la loi de finances rectificative pour 2005 restitue au dispositif sa portée d'origine en recentrant son champ d'application sur les personnes qui exercent une activité salariée, caractérisée par l'existence d'un lien de subordination juridique entre la personne expatriée et l'entreprise qui l'emploie.

63.Il s'agit en pratique des personnes qui sont titulaires d'un contrat de travail. Sont par conséquent exclus du champ d'application du dispositif, non seulement les travailleurs indépendants mais également les mandataires sociaux et notamment ceux dont les rémunérations sont imposées sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires (gérants minoritaires de SARL, présidents-directeurs généraux ou présidents de directoire...), sans être pour autant salariés au sens du droit du travail.

64.Toutefois, conformément à l'engagement pris par le ministre lors des débats parlementaires (cf. JO Déb. Sénat du 19 décembre 2005, p. 9949), il est admis que les mandataires sociaux titulaires d'un contrat de travail à raison de fonctions techniques exercées au sein de l'entreprise, puissent prétendre dans les conditions de droit commun au bénéfice de l'exonération d'impôt sur le revenu à raison des rémunérations perçues au titre de ces fonctions exercées à l'étranger, telle que cette notion est définie ci-dessous (cf. infra n° 69 ). Il est rappelé que la jurisprudence de la Cour de Cassation soumet la validité du cumul d'un mandat social et d'un contrat de travail à des conditions très strictes. En particulier, le cumul n'est autorisé que si le contrat de travail correspond à un emploi effectif, caractérisé par l'exercice, dans un lien de subordination juridique à l'égard de la société, de fonctions techniques distinctes de celles exercées dans le cadre du mandat social et donnant lieu à rémunération séparée.

b) Cas particulier des agents de la fonction publique

65.Leur régime, jusqu'à présent défini par la jurisprudence et la doctrine, résulte désormais de la loi.

• Définition des personnes concernées

66.Les agents de la fonction publique s'entendent des agents publics, c'est-à-dire les agents qui sont employés par une personne publique à laquelle ils sont unis par un lien de droit public (CE, 28 novembre 1969, req. n° 72540 X... ).

En pratique, il s'agit notamment :

- des fonctionnaires civils des administrations de l'Etat, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics, y compris les établissements hospitaliers ;

- des militaires relevant de la loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires ;

- des magistrats de l'ordre judiciaire ;

- des fonctionnaires des assemblées parlementaires ;

- des agents des établissements publics à caractère industriel ou commercial (EPIC) ayant la qualité de fonctionnaire ;

- des agents contractuels exerçant leurs fonctions au sein de la fonction publique d'Etat, des collectivités territoriales ou de la fonction publique hospitalière.

• Modalités d'application de l'article 81 A

67.Dans le prolongement de la doctrine administrative déjà en vigueur (cf. supra n° 16 ), la loi exclut expressément les agents de la fonction publique du bénéfice de l'exonération totale d'impôt sur le revenu accordée en considération de l'exercice de certaines activités (2° du I de l'article 81 A modifié).

68.Les agents de la fonction publique ne peuvent se prévaloir que de l'exonération accordée aux personnes susceptibles de justifier avoir acquitté dans l'Etat d'exercice de l'activité un impôt général sur le revenu au moins égal aux deux tiers de celui qu'elles auraient supporté en France sur la même base d'imposition (1° du I de l'article 81 A modifié) et de l'exonération des suppléments de rémunération liés à l'expatriation, quelle que soit la durée de la mission (II de l'article 81 A modifié).

  2. ...et substitue à la notion d'« étranger » celle d'« exercice d'une activité dans un Etat autre que la France et que celui du lieu d'établissement de l'employeur »

69.Dans le prolongement de la doctrine actuelle, la loi dispose désormais que les exonérations d'impôt sur le revenu s'appliquent aux salaires perçus en rémunération d'activités exercées en tout lieu relevant de la souveraineté fiscale d'un Etat ou territoire 4 autre que la France (cf. supra n° 7 ) ou que l'Etat du lieu d'établissement de l'employeur 5 lorsque celui-ci se situe dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale (cf. supra n° 57 ).

70.Ainsi, une personne fiscalement domiciliée en France, employée par une entreprise établie en Allemagne, sera réputée exercer ses fonctions dans un Etat étranger au sens des dispositions de l'article 81 A si celles-ci se déroulent hors de France (lieu de son domicile fiscal) et d'Allemagne (lieu d'établissement de son employeur).

71.En revanche et conformément aux précisions apportées sur ce point au cours des débats parlementaires (JO débats AN du 8 décembre 2005, pp. 8108 et 8109 et JO débats Sénat du 19 décembre 2005, p. 9950), peu importe, pour l'appréciation des conditions relatives aux exonérations d'impôt sur le revenu prévues à l'article 81 A, notamment celle afférente à la durée d'expatriation qui conditionne l'attribution de l'exonération totale d'impôt (cf. supra), que le salarié ait exercé ses fonctions dans un ou plusieurs Etats étrangers.

Ainsi, une personne qui, au cours d'une période de 12 mois consécutifs, aura travaillé sur des chantiers de construction différents pendant 100 jours dans un Etat et 90 jours dans un autre Etat pourra cumuler ces deux périodes pour établir que la durée de son séjour à l'étranger est effectivement supérieure à 183 jours.


  II. Les conditions d'exonération des suppléments de rémunération liés à l'expatriation sont encadrées par la loi (II de l'article 81 A modifié)


72.Les salariés qui entrent dans le champ d'application de l'article 81 A, sans toutefois pouvoir bénéficier de l'une des exonérations totales d'impôt sur les revenus perçus au titre de l'activité exercée hors de France, ne sont toutefois imposés que sur la rémunération qu'ils auraient perçue si celle-ci s'était déroulée en France, ce qui a pour effet d'exonérer les suppléments de rémunération susceptibles d'être versés au titre des séjours effectués hors de France.

73.La loi (II de l'article 81 A) encadre toutefois le bénéfice de cette exonération en la subordonnant à l'existence de trois conditions qui doivent être simultanément réunies :

- les suppléments de rémunération doivent être versés en contrepartie de séjours effectués dans l'intérêt direct et exclusif de l'employeur ;

- ils doivent être justifiés par un déplacement nécessitant une résidence d'une durée effective d'au moins 24 heures dans un autre Etat ;

- et être déterminés dans leur montant préalablement aux séjours dans un autre Etat et en rapport, d'une part, avec le nombre, la durée et le lieu de ces séjours et, d'autre part, avec la rémunération versée aux salariés compte non tenu des suppléments de rémunération. Le montant des suppléments de rémunération ne peut pas excéder 40% de la rémunération précédemment définie.

  1. Les suppléments de rémunération sont versés en contrepartie de séjours effectués dans l'intérêt direct et exclusif de l'employeur

74.Cette condition implique que le déplacement du salarié dans l'autre Etat soit lié à l'intérêt direct et exclusif de l'employeur. Tout déplacement doit donc être engagé pour des raisons professionnelles qui se rattachent à l'intérêt de son employeur. Elle implique que les déplacements soient exclusivement justifiés par l'intérêt de l'entreprise. Tel n'est pas le cas, par exemple, des jours de congés pris à l'occasion d'un déplacement professionnel.

75.En revanche, conformément à l'engagement pris par le ministre au cours des débats parlementaires (cf. JO débats Sénat du 19 décembre 2005, p. 9950), il est admis que les déplacements au sein du groupe auquel appartient l'entreprise qui emploie le salarié, comme par exemple ceux à caractère commercial, administratif ou institutionnel, les missions d'audit, ou encore les réunions d'information ou ayant pour objet la formation interne, répondent à l'intérêt direct et exclusif de l'employeur.

  2. Les suppléments de rémunération doivent être justifiés par un déplacement nécessitant une résidence d'une durée effective d'au moins 24 heures dans un autre Etat

76.L'existence d'un séjour à l'étranger nécessite que la personne réside au moins 24 heures effectives dans l'Etat où elle est envoyée par l'entreprise pour exercer ses fonctions.

77.Cette durée s'entend de l'intervalle de temps qui s'écoule entre la date d'arrivée dans l'Etat de séjour et la date de départ de celui-ci, ce qui exclut les temps de transports pour s'y rendre et en revenir. La durée doit être ininterrompue.

Dans la situation particulière où le salarié se déplace successivement dans différents Etats sans revenir en France (déplacements inter Etats), la durée de séjour est décomptée à partir de l'arrivée dans le premier Etat et s'achève au départ du dernier Etat.

78.La justification de la durée du séjour à l'étranger, et du respect de la condition des 24 heures consécutives, peut être apportée par tous moyens (notes d'hôtels, notes de frais, cartes d'embarquement ou autres titres de transport....) permettant de constater que la durée de résidence de 24 heures a bien été respectée. Ces pièces doivent pouvoir être produites à la demande du service des impôts dans le cadre de l'exercice de son pouvoir de contrôle.