Date de début de publication du BOI : 30/10/1999
Identifiant juridique : 12C2211
Références du document :  12C2211

SOUS-SECTION 1 LA SAISIE DE CRÉANCES

2. Procédure de la saisie-attribution.

27.A la différence de la saisie-vente, la saisie-attribution n'a pas à être précédée d'un commandement de payer au débiteur saisi.

Toutefois, le comptable des impôts chargé du recouvrement doit, avant toute poursuite, notifier une mise en demeure par pli recommandé avec avis de réception, avant de procéder, vingt jours après, aux mesures d'exécution forcée (cf. article L 257 du L.P.F.).

Par conséquent, les comptables ne peuvent se dispenser de délivrer une mise en demeure procédant du titre exécutoire et d'attendre l'expiration du délai de 20 jours avant d'agir par voie de saisie-attribution.

En cas de péril pour la créance avant l'expiration de ce délai, une saisie conservatoire pourra être effectuée, sans autorisation du juge (art. L 68).

28.Contrairement à la saisie-arrêt qui avait une nature mixte (première phase conservatoire, seconde phase exécutoire après le jugement de validation), la saisie-attribution est exécutoire en son entier.

29.La procédure de saisie-attribution comporte deux phases :

- l'acte de saisie et les obligations de renseignement du tiers saisi ;

- la dénonciation de la saisie au débiteur saisi.

a. L'acte de saisie-attribution.

30.Le créancier procède à la saisie par acte d'huissier de justice signifié au tiers saisi (art. D 56, 1er alinéa).

1° Forme et contenu de l'acte de saisie-attribution.

31.Outre les mentions prescrites pour tout acte d'huissier de justice (article 648 du nouveau code de procédure civile), l'acte de saisie-attribution doit comporter les énonciations prévues à l'article D 56 :

* l'indication des nom et domicile du débiteur saisi ou, s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;

Il est important que le débiteur puisse être exactement identifié par le tiers saisi.

* l'énonciation du titre exécutoire en vertu duquel la saisie est pratiquée.

Pour le comptable des impôts, il convient de faire mention des avis de mise en recouvrement et mise en demeure notifiés. Si la saisie est effectuée sur le fondement d'un jugement, seul le dispositif est porté à la connaissance du tiers (art. D 3) ;

* le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus, majorées d'une provision pour les intérêts à échoir dans le délai d'un mois prévu pour élever une contestation ;

* l'indication que le tiers saisi est personnellement tenu envers le créancier saisissant et qu'il lui est fait défense de disposer des sommes réclamées dans la limite de ce qu'il doit au débiteur ;

C'est la conséquence de l'effet d'attribution immédiate de la créance au profit du saisissant. Le tiers est ainsi averti de l'indisponibilité qui frappe, entre ses mains, la dette qu'il a envers la partie saisie.

* la reproduction du premier alinéa des articles 43, 44, 60 et 66 du décret (cf. annexes n°s I et II).

Le tiers saisi est informé par ces textes des obligations qui découlent pour lui des effets immédiats de la saisie.

* L'acte indique l'heure à laquelle il a été signifié.

Cette indication n'a pas pour but de classer les saisies opérées le même jour afin de donner priorité à la première puisque les actes de saisie signifiés au cours de la même journée entre les mains du même tiers sont réputés faits simultanément et viennent le cas échéant en concours (cf. art. 43 alinéa 3, infra n° 66). L'indication de l'heure est importante pour déterminer le moment exact où le tiers ne peut plus payer le débiteur saisi et devient personnellement débiteur des causes de la créance.

Elle a aussi un intérêt, en cas de saisie sur un compte de dépôt, pour la contre-passation des opérations réalisées avant l'acte de saisie (cf. infra n° 136 ).

Il est précisé que les anciens textes sur la saisie-arrêt imposaient que l'exploit de saisie contienne élection de domicile dans la commune où demeure le tiers saisi si le saisissant n'y demeure pas. Cette obligation n'a pas été reprise dans la nouvelle procédure. Elle aurait été inutile puisque l'article 2 du décret du 31 juillet 1992 dispose que la remise d'un titre à l'huissier de justice en vue de son exécution emporte élection de domicile en son étude pour toutes notifications relatives à cette exécution.

32. Remarque : Lorsque la saisie-attribution est pratiquée pour le recouvrement d'une créance fiscale les contestations sont soumises aux dispositions du Livre des procédures fiscales relatives aux oppositions à poursuite (art. L 281 et R* 281.1, R* 281-3 à R* 281-5). Par conséquent, les comptables des impôts doivent inviter les huissiers de justice à adapter l'acte de dénonciation à la législation fiscale en insérant les textes relatifs aux délais et formes des voies de recours prévues par le Livre des procédures fiscales.

33. Le défaut de ces mentions obligatoires entraîne la nullité de la saisie-attribution. Toutefois, il s'agit d'une nullité de forme.

En conséquence, elle est soumise aux dispositions des articles 112 à 116 du nouveau code de procédure civile.

En particulier, elle ne pourra être prononcée qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité (cf. art. 114, al. 2 NCPC).

Il en serait ainsi, par exemple, en cas d'absence de désignation ou de désignation incomplète du tiers saisi ou du débiteur saisi, en cas d'absence d'énonciation du titre exécutoire ou de décompte distinct concernant les sommes réclamées.

Il est précisé que l'article 115 du NCPC prévoit que « la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte, si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief ». La régularisation étant rétroactive, la saisie prendra effet à la date de l'acte originaire et non pas à la date de régularisation.

2° Signification de l'acte de saisie-attribution.

34.L'acte de saisie-attribution est signifié au tiers saisi selon les règles de droit commun (art. 653 et suivants du NCPC).

Des particularités subsistent lorsque le tiers saisi est soit un comptable public, soit un tiers ne demeurant pas en France métropolitaine.

→ Signification de l'acte entre les mains d'un comptable public (cf. infra n° 166 ).

→ Signification de l'acte au tiers demeurant hors de France métropolitaine.

35.Le régime de droit commun des significations diffère selon qu'il s'agit de départements ou de territoires d'Outre-Mer. En ce qui concerne les départements d'Outre-Mer, le régime est le même que celui concernant la France métropolitaine, c'est-à-dire qu'il y a lieu de signifier à personne, à domicile ou à résidence. Par contre, en ce qui concerne les territoires d'Outre-Mer, la signification est faite au parquet, selon les modalités prévues aux articles 660 et suivants du NCPC.

→ Date de la signification au tiers saisi.

36.La date de la signification est celle du jour où elle est faite à personne, à domicile, à résidence ou au parquet (article 653 du NCPC).

3° Les obligations à la charge du tiers saisi.

37.La participation du tiers saisi à l'acte de saisie s'inscrit dans un principe général rappelé par la loi du 9 juillet 1991 : « Les tiers ne peuvent faire obstacle aux procédures engagées en vue de l'exécution ou de la conservation des créances. Ils devront y apporter leur concours lorsqu'ils en sont légalement requis » (art. L 24, 1er alinéa).

Le tiers saisi est donc soumis au moment de l'acte à une obligation de renseignement à l'égard du saisissant.

Bien entendu, il sera tenu ensuite au paiement des sommes disponibles dans la mesure de ses obligations envers le saisi.

Le tiers saisi est légalement tenu de déclarer au créancier l'étendue de ses obligations à l'égard du débiteur ainsi que les modalités qui pourraient les affecter et, s'il y a lieu, les cessions de créances, délégations ou saisies antérieures (art. L 44). Le décret d'application précise que le tiers saisi est tenu de fournir sur le champ à l'huissier de justice ces renseignements et de lui communiquer les pièces justificatives (art. D 59).

L'huissier de justice mentionne dans son acte de saisie les déclarations du tiers saisi et la production des pièces justificatives.

38. NOTA : Par dérogation, l'article 5 du décret n° 93-977 du 31 juillet 1993 prévoit un délai de vingt-quatre heures pour le comptable public (cf. infra n°s 162 et suivants  ; saisie entre les mains d'un comptable public).

39. Sanction : Le tiers saisi qui ne fournit pas, sans motif légitime, les informations que la loi l'oblige à communiquer à l'huissier peut être condamné, à la demande du créancier, à payer le montant de la créance cause de la saisie, sans préjudice de son recours contre le débiteur (art. D 60 ; TGI LYON 22 février 1994, Dalloz 1994 IR 126).

Ainsi, un tiers saisi, établissement de crédit, qui avait refusé de communiquer le solde des comptes de son client, s'il ne lui était pas donné le libellé et le numéro d'identification de chacun d'eux, a été condamné au paiement de la somme cause de la saisie, le refus n'ayant pas été considéré comme légitime (TGI CHERBOURG, 8 décembre 1993, Dalloz 1994, 291, note MARTIN).

On peut déduire de cette jurisprudence que, lorsque plusieurs comptes ont été ouverts dans une banque, celle-ci est tenue de déclarer le solde de l'ensemble des comptes, même si l'acte de saisie n'en a visé qu'un seul.

40.Le tiers saisi peut aussi être condamné à des dommages et intérêts en cas de négligences fautives ou de déclarations inexactes ou mensongères.

Ces dispositions ne doivent être mises en oeuvre que dans des cas suffisamment graves caractérisés par une volonté délibérée du tiers saisi de s'opposer à la procédure en toute connaissance de cause.

41.D'une manière générale, il est recommandé d'agir dans un premier temps par la voie d'une demande d'astreinte.

En effet, la loi prévoit que le tiers saisi qui se soustrait à ses obligations peut être contraint d'y satisfaire au besoin à peine d'astreinte (art. L 24).

Dans la plupart des cas, l'huissier de justice qui constate la difficulté entravant le cours des opérations devra s'adresser au juge de l'exécution selon la procédure prévue aux articles 34 et suivants du décret du 31 juillet 1992 (déclaration écrite accompagnée de la présentation du titre et d'un exposé de la difficulté).

b. La dénonciation de la saisie au débiteur saisi.

42.La dénonciation de la saisie-attribution est l'acte par lequel le débiteur saisi est informé de l'existence de ladite saisie diligentée à son encontre.

1° Délai de dénonciation.

43.A peine de caducité de la signification faite au tiers saisi, la saisie doit être portée à la connaissance du débiteur dans un délai de huit jours (art. D 58).

Ce délai est soumis au régime général de computation des délais, visé aux articles 640 et suivants du nouveau code de procédure civile : il court dès le lendemain du jour de la signification de l'acte de saisie au tiers-saisi et expire le huitième jour à vingt-quatre heures sauf prorogation jusqu'au premier jour ouvrable suivant quand son expiration intervient un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé (NCPC, art. 641 et 642).

Sous le régime de la saisie-arrêt, la Cour de cassation avait décidé que les règles relatives aux augmentations de délais (cf. art. 644 et 645 du NCPC) devaient s'appliquer à la dénonciation au débiteur (Cass. civ. 16 juin 1977, Bull. civ. Il n° 156, p 110).

Cette solution doit s'appliquer à la saisie-attribution.

Le délai de huit jours est un délai maximum. Par contre, il n'y a pas de délai minimum de sorte que la dénonciation de la saisie peut avoir lieu aussitôt après la saisie ou tout au moins aussitôt après que l'huissier aura rédigé son procès-verbal de saisie. Il est dans l'intérêt du comptable saisissant de dénoncer la saisie le plus rapidement possible notamment pour interrompre la prescription de la créance (cf. infra n°s 83 et s. ).

Sanction : le non-respect du délai maximum entraîne la caducité de la saisie et non la nullité de l'acte de dénonciation. La saisie-attribution est donc considérée comme non avenue et sans effet sur les sommes visées. Le saisissant sera donc obligé de renouveler l'ensemble de la procédure. Néanmoins, s'agissant d'une caducité qui sanctionne un défaut de diligence du saisissant et non une nullité viciant un acte, l'acte de saisie conserve son caractère interruptif de prescription et ne peut ouvrir droit à l'allocation de dommages-intérêts.

La caducité de la saisie est un moyen de fond. A ce titre, elle peut être invoquée devant le juge de l'exécution à l'appui d'une demande de mainlevée, ou être soulevée en appel, sans qu'il soit nécessaire pour le demandeur de démontrer l'existence d'un grief.

2° Forme et contenu de l'acte de dénonciation.

44.La dénonciation est faite par acte d'huissier de justice. Cet acte doit contenir à peine de nullité (art. D 58) :

- une copie du procès-verbal de saisie ; il ne s'agit pas de la copie intégrale de l'acte de saisie qui a été signifié au tiers puisque cet acte ne comporte pas les indications qui ont pu être ajoutées au jour de la saisie (déclarations faites par le tiers, communication des pièces justificatives, contestations) ;

- l'indication « en caractères très apparents » que les contestations doivent être soulevées, à peine d'irrecevabilité, dans le délai d'un mois qui suit la signification de l'acte de dénonciation et la date à laquelle expire ce délai ;

- la désignation de la juridiction devant laquelle les contestations pourront être portées (le juge de l'exécution du lieu où demeure le débiteur - Art. D 65) ;

L'acte doit également rappeler au débiteur qu'il peut autoriser par écrit le créancier à se faire remettre sans délai par le tiers saisi les sommes qui lui sont dues (cf. infra n° 75 ).

Cette mention qui constitue une dernière offre de solution amiable n'est pas prescrite à peine de nullité.

45. Remarque : Lorsque la saisie-attribution est pratiquée pour le recouvrement d'une créance fiscale les contestations sont, sauf exceptions (cf. infra n°s 85 et s. ), soumises aux dispositions du Livre des procédures fiscales relatives aux oppositions à poursuite (art. L 281 et R* 281-1, R* 281-3 à R* 281-5). Par conséquent, les comptables des impôts doivent inviter les huissiers de justice à adapter l'acte de dénonciation à la législation fiscale en insérant les textes relatifs aux délais et formes des voies de recours prévues par le Livre des procédures fiscales.