B.O.I. N° 100 du 4 JUIN 2003
BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS
8 A-1-03
N° 100 du 4 JUIN 2003
TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE
REGIME APPLICABLE AUX OPERATIONS REALISEES PAR LES SAFER. EXONERATION
(C.G.I., art. 261-5-1°-d et d-bis)
NOR : BUD L 03 30006 J
Bureaux D1 et D2
PRESENTATION
La loi n°99-574 d'orientation agricole du 9 juillet 1999 (article 114) a élargi le champ d'intervention des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) créées par la loi d'orientation du 5 août 1960 modifiée par la loi du 23 janvier 1990. L'article 8 de la loi de finances pour 2000 exonère de taxe sur la valeur ajoutée les opérations réalisées par les SAFER dans ce nouveau cadre. La présente instruction commente ces dispositions. • |
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Dans le cadre des dispositions en vigueur avant l'adoption de l'article 8 de la loi de finances pour 2000, les SAFER qui agissaient en qualité de marchands de biens bénéficiaient d'un régime particulier d'exonération de leur marge au titre des opérations réalisées, sous réserve qu'elles n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 257-7° du code général des impôts.
L'article 8 de la loi de finances pour 2000 modifie le d bis du 1° du 5 de l'article 261 du code général des impôts pour tenir compte de l'élargissement des missions conférées aux SAFER par l'article 114 de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole publiée au JO du 10 juillet 1999 pages 10231 et suivantes (cf. annexes I et II).
SECTION 1 :
Rappel du dispositif ancien
A. RÈGLES APPLICABLES AVANT LA LOI DU 23 JANVIER 1990
Il résulte de l'article 261-5-1°-d du code général des impôts que lorsqu'elles n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 257-7° de ce code, les opérations immobilières résultant de l'application des dispositions de l'article 15 de la loi n° 60-808 du 5 août 1960 réalisées par les SAFER sont exonérées de la TVA.
Compte tenu des dispositions de cet article et du décret n° 61-610 du 14 juin 1961 modifié qui fixe ses conditions d'application, l'exonération s'applique essentiellement :
- aux cessions d'immeubles ruraux à des agriculteurs ou à des personnes qui les louent à des agriculteurs par bail rural ;
- à certaines cessions de parcelles boisées dans le cadre de conventions passées avec l'Etat ;
- à des cessions aux collectivités locales, établissements publics de coopération intercommunale, associations syndicales de propriétaires autorisées ou forcées, autres organismes publics ou institutions reconnues d'utilité publique de biens fonciers acquis à l'amiable, en vue de faciliter l'aménagement rural et la constitution de réserves foncières, dans la limite de 5 % des superficies que les SAFER acquièrent dans l'année. Les cessions qui excèdent la limite de 5 % ne sont pas exonérées, mais ne font pas perdre le bénéfice de l'exonération aux cessions faites en-deçà de cette limite.
En revanche, l'exonération de l'article 261-5-1°-d du code général des impôts ne peut s'appliquer aux cessions d'immeubles qui ne sont pas inclus dans une exploitation agricole, telles que les carrières.
Ainsi, les dispositions applicables aux opérations réalisées par les SAFER antérieures à la publication de la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990, visaient expressément les biens à usage agricole.
Toutefois, il a été admis que, s'agissant des soldes d'opérations relatifs à des excédents non susceptibles d'usage agricole, l'exonération s'appliquait dès lors que les biens en cause avaient été acquis conformément aux dispositions de la loi n° 60-808 du 5 août 1960.
B. LE RÉGIME RÉSULTANT DE LA LOI DU 23 JANVIER 1990
La loi n° 90-85 du 23 janvier 1990 a modifié le champ d'intervention des SAFER et a prévu un nouveau régime d'exonération de TVA des opérations réalisées par ces sociétés, qui a été transcrit à l'article 261-5-1°-d bis du code (ancienne version).
Toutefois, le régime d'exonération antérieur a été maintenu, à titre transitoire, pour les cessions d'immeubles acquis par les SAFER avant le 26 janvier 1990 (art. 29 de la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990).
I. Immeubles à destination agricole
L'exonération s'applique lorsque les deux conditions suivantes sont remplies.
1. Les cessions doivent avoir pour objet le maintien, la création ou l'agrandissement d'une exploitation agricole.
Bénéficient donc de l'exonération les cessions de terres et bâtiments d'exploitation à usage agricole, ainsi que celles des terres incultes destinées à faire partie d'une exploitation agricole. Pour les terres incultes, cette destination doit être précisée dans l'acte de cession.
En revanche, l'exonération ne concerne pas la cession d'immeubles non affectés à un usage agricole. Tel est le cas, par exemple, des immeubles utilisés comme terrains de camping ou pour le gardiennage de caravanes, des locaux aménagés en gîtes ruraux, des carrières.
Par ailleurs, n'entre pas dans les prévisions de l'article 261-5-1°-d bis, la cession d'immeubles précédemment utilisés à des fins agricoles dès lors qu'elle conduit à une destination autre qu'agricole de ces biens. Il en est ainsi des cessions consenties à des non-agriculteurs et à des personnes autres que celles qui s'engagent à les donner en location par bail rural.
2. Les cessions doivent être assorties d'un engagement de l'acquéreur, pris pour lui et ses ayants cause, de conserver la destination à usage agricole pendant un délai de dix ans à compter du transfert de propriété des immeubles acquis.
Lorsque l'engagement n'est pas respecté, l'acquéreur ou ses ayants cause sont tenus d'acquitter, à première réquisition, les droits de mutation exigibles (cf. BOI 7 C-5-91 du 19 avril 1991).
L'exonération de TVA, prévue par l'article 261-5-1°-d bis dont a bénéficié la SAFER, n'est pas remise en cause si les conditions de cette exonération étaient réalisées au moment de la cession.
II. Parcelles boisées
L'exonération de l'article 261-5-1°-d bis du code général des impôts s'applique aux cessions de parcelles boisées à condition que l'ensemble de ces parcelles n'excède pas dix hectares ou, dans le cas contraire, que la parcelle boisée ne soit pas susceptible d'aménagement ou d'exploitation régulière.
A cet égard, l'acte de cession doit être appuyé d'un certificat délivré par le directeur départemental de l'agriculture et de la forêt attestant que les parcelles boisées ne sont pas susceptibles d'aménagement ou d'exploitation régulière au sens de l'article L. 222-1 du code forestier.
Ces dispositions ont été commentées par une instruction du 29 juillet 1992 (8 A-3-92).
SECTION 2 :
Portée du nouveau dispositif
A. LE NOUVEAU CHAMP D'INTERVENTION DES SAFER
La loi n°99-574 d'orientation agricole du 9 juillet 1999 a modifié le champ d'intervention des SAFER.
Conformément aux dispositions de l'article L. 141-1 du code rural (cf. annexe II), les SAFER ont désormais pour mission d'améliorer les structures foncières par l'installation ou le maintien d'exploitants agricoles ou forestiers, par l'accroissement de la superficie de certaines exploitations agricoles ou forestières, par la mise en valeur des sols, et éventuellement, par l'aménagement et le remaniement parcellaires. Elles peuvent concourir à la préservation de l'environnement. Elles assurent la transparence du marché foncier rural.
Cette disposition, et son décret d'application du 10 juillet 2000 (n° 2000-671 portant modification des dispositions réglementaires du code rural relatives aux SAFER), ont désormais consacré le rôle d'opérateurs fonciers des SAFER, chargées, au titre de leurs missions de service public, de contribuer au volet foncier de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire rural au sens de l'article L.111-2 du code rural.
Pour la réalisation de ces missions, les SAFER peuvent :
1° - acquérir, dans le but de les rétrocéder, des biens ruraux, des terres, des exploitations agricoles ou forestières ;
2° - se substituer à un ou plusieurs attributaires pour réaliser la cession de tout ou partie des droits conférés, soit par une promesse unilatérale de vente, soit par une promesse synallagmatique de vente, portant sur les biens visés ci-dessus, dès lors que la substitution intervient dans un délai maximal de six mois à compter du jour où ladite promesse a acquis date certaine et, au plus tard, au jour de l'acte authentique réalisant ou constatant la vente ;
3° - acquérir, dans le but d'améliorer les structures foncières, des parts de sociétés civiles à objet agricole donnant vocation à l'attribution en propriété ou en jouissance de biens agricoles ou forestiers ou l'intégralité des parts ou actions de sociétés ayant pour objet principal l'exploitation ou la propriété agricole, et notamment, par dérogation aux dispositions du Chapitre II du titre II du livre III du code rural, des parts de groupements fonciers agricoles ;
4° - se livrer ou prêter leur concours, en vertu d'un mandat écrit, à des opérations immobilières portant sur les biens d'autrui et relatives au louage régi par le livre IV du code déjà cité.
Dans les cas visés au 1° et 2° ci-dessus, le choix de l'attributaire se fait au regard des missions mentionnées au L. 141- 1 du code rural (cf. annexe II). L'attributaire peut être tenu au respect d'un cahier des charges. En cas de substitution, le cahier des charges comporte l'engagement du maintien pendant un délai minimal de dix ans de l'usage agricole ou forestier des biens attribués et soumet, pendant ce même délai, toute opération de cession à titre onéreux en propriété ou en jouissance du bien attribué à l'accord préalable de la SAFER.
B. LES NOUVELLES DISPOSITIONS
L'article 8 de la loi de finances pour l'année 2000 codifié à l'article 261-5-1°-d bis du code général des impôts exonère de TVA, sous certaines conditions, toutes les opérations effectuées par les SAFER au titre de l'article L. 141-1 du code rural 1 , lorsqu'elles n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 257-7° du CGI.
Lorsque ces conditions ne sont pas réunies, les opérations concernées suivent le régime de droit commun.
I. L'exonération s'applique lorsque les deux conditions suivantes sont remplies
1. Les cessions effectuées par les SAFER doivent avoir une destination conforme aux dispositions de l'article L. 141-1 du code rural.
2. Les cessions doivent être assorties d'un engagement de l'acquéreur, pris pour lui et ses ayants cause, de conserver aux biens acquis une destination conforme aux dispositions de l'article L. 141-1 du code rural pendant un délai de dix ans à compter du transfert de propriété.
Cette dernière condition n'est remplie que lorsque l'acquéreur des biens a pris l'engagement de conserver la destination des biens pendant dix ans dans un cahier des charges établi par la SAFER.
Pour les mutations constatées à compter de la publication de la présente instruction, la constatation de cette condition résulte de la référence, dans l'acte d'acquisition auquel participe la SAFER, à la souscription d'un tel engagement prévu par le cahier des charges.
A défaut, l'opération est soumise à la TVA dans les conditions de droit commun.
Pour les mutations constatées antérieurement à la publication de la présente instruction, la preuve de la réalité de cet engagement est apportée, sur demande de l'administration fiscale, par la production du cahier des charges comprenant l'engagement de conservation de la destination du bien conformément à ses stipulations pour une durée de dix ans à compter de la date de l'acquisition. A défaut, l'acquéreur dispose d'un délai de six mois à compter de la demande de l'administration pour conclure avec la SAFER un tel cahier des charges comprenant un engagement décennal de maintien de la destination du bien conformément à ses stipulations, avec effet rétroactif à la date d'acquisition.
Il est précisé que, s'agissant des cessions par les SAFER de parts de sociétés donnant vocation à l'attribution en propriété ou en jouissance de biens agricoles ou forestiers, l'engagement porte alors sur les biens auxquels les parts donnent droit et non sur les parts elles-mêmes.
Remarques :
- lorsque l'acquéreur modifie, au cours du délai de 10 ans, la destination des biens acquis, l'exonération dont a bénéficié la SAFER n'est pas remise en cause si cette dernière a constaté, préalablement au changement, la conformité de la nouvelle destination aux dispositions de l'article L. 141-1 du code rural ;
- la mutation à titre onéreux ou à titre gratuit d'un bien acquis auprès d'une SAFER n'entraîne pas la remise en cause de l'exonération dont cette dernière a, le cas échéant, bénéficié si la SAFER constate que le bénéficiaire de la mutation conserve une destination conforme aux dispositions de l'article L. 141-1 déjà cité ;
- lorsque l'acquéreur ne respecte pas l'engagement prévu ci-dessus, l'exonération dont a bénéficié la SAFER au titre de l'opération qu'elle a réalisée est remise en cause. La SAFER doit, dès que l'engagement n'est plus respecté, soumettre cette opération à la TVA dans les conditions de droit commun.
II. Sont notamment exonérées au titre de l'article 261-5-1°-d bis du code général des impôts, dans les conditions prévues au 1 ci-dessus, les opérations suivantes réalisées par les SAFER
1. Les opérations d'achat-revente qui portent sur des biens ruraux, des terres et des exploitations agricoles ou forestières.
Lorsque la mutation porte sur une exploitation agricole, bénéficient notamment de l'exonération les cessions de terres et bâtiments d'exploitation à usage agricole, les terres incultes destinées à faire partie de l'exploitation, mais aussi les immeubles servant à l'habitation de l'exploitant, de sa famille et de son personnel, ainsi que le cheptel et le matériel garnissant la propriété.
Les SAFER peuvent toutefois soumettre volontairement à la TVA la cession du cheptel, celle du matériel garnissant la propriété ainsi que, le cas échéant, celle des éléments incorporels.
2. Les cessions de parcelles boisées réalisées au titre de l'article L. 141-1 du code rural, sans que cette exonération soit subordonnée au respect de conditions particulières de superficie.
3. Les cessions de tout ou partie des droits conférés par une promesse unilatérale de vente ou une promesse synallagmatique de vente, avec ou sans condition suspensive, portant sur des biens ruraux, des terres, des exploitations agricoles ou forestières.
Il en est de même, le cas échéant, des commissions versées par le vendeur ou l'acquéreur à la SAFER qui s'entremet dans la vente qu'il réalise.
4. Les cessions de parts de sociétés civiles à objet agricole dont la possession assure en droit ou en fait l'attribution en propriété ou en jouissance de biens agricoles ou forestiers.
L'engagement prévu à l'article 261-5-1°-d bis de conserver, pendant un délai de dix ans, la destination à usage agricole ou forestier des biens acquis est pris par le cessionnaire des parts dont la possession lui assure la propriété ou la jouissance de ces biens.
5. Les sommes perçues par les SAFER lorsqu'elles s'entremettent, en vertu d'un mandat écrit, dans des opérations immobilières portant sur des biens d'autrui et relatives au louage régi par le livre IV du code rural.
SECTION 3 :
Précisions concernant les conditions du transfert des investissements
Lorsque les conditions de mise en oeuvre de la procédure de substitution prévue par les dispositions de l'article L. 141-1.II.2° du code rural conduisent, in fine, à la réalisation d'une opération de cession directe entre un cédant et un acquéreur autre qu'une SAFER, les règles suivantes sont applicables.
I. Principes
1. Biens immobiliers d'investissements
La cession des immeubles n'est pas soumise à la TVA sauf s'il s'agit de la première mutation dans les cinq ans de l'achèvement (CGI, art. 257-7°).
Le vendeur est tenu, le cas échéant, de procéder au reversement d'une fraction de la taxe ayant grevé la construction ou l'acquisition de l'immeuble dans les conditions prévues à l'article 210-I de l'annexe II au code général des impôts.
Dès lors que les immeubles constituent des immobilisations pour l'acquéreur redevable de la TVA, le vendeur peut lui délivrer une attestation de transfert des droits à déduction dans les conditions prévues au IV de l'article 210 de l'annexe II au CGI précité.
2. Autres biens
La cession de biens autres que les immobilisations de nature immobilière et, notamment, de biens mobiliers d'investissements et de biens en stock est soumise à la TVA dans les conditions de droit commun.
II. Dispense de taxation et de régularisation
Lorsque la cession porte sur l'ensemble d'une exploitation agricole, les dispositions exposées dans la documentation de base DB 3 I 1342, n os43 à 48 sont applicables.
Il en résulte notamment que lorsque le cédant et le cessionnaire sont tous les deux redevables de la TVA, les biens cédés peuvent, selon leur nature, bénéficier des dispenses de taxation ou de régularisation prévues par les n os 44 et 45 2 de la documentation administrative déjà citée, sous réserve du respect des conditions posées par ces commentaires.
En revanche, lorsque la cession ne porte pas sur l'ensemble d'une exploitation agricole, chaque bien cédé suit les règles exposées au I ci-dessus.