Date de début de publication du BOI : 01/03/1995
Identifiant juridique : 4H1414
Références du document :  4H1414
Annotations :  Lié au BOI 4H-8-07

SOUS-SECTION 4 DÉTERMINATION DU BÉNÉFICE IMPOSABLE EN FRANCE ACTIVITÉ EXERCÉE CONJOINTEMENT EN FRANCE ET À L'ÉTRANGER

DEUXIÈME PARTIE

 Modalités d'application

25Pour déterminer les résultats positifs ou négatifs de l'activité réputée française, du point de vue fiscal, d'une entreprise qui exerce son activité tant en France qu'à l'étranger, il convient d'effectuer la ventilation des résultats globaux de l'entreprise d'après sa comptabilité. Lorsque celle-ci ne permet pas une telle ventilation, l'une des méthodes décrites ci-avant au n°s 13 et suiv. peut être utilisée.

Compte tenu de la nature des opérations effectuées et des conditions particulières d'exploitation, cette ventilation peut porter :

- soit sur des bénéfices ou revenus ;

- soit sur certaines dépenses communes :

- soit enfin sur les pertes ou déficits subis

  A. VENTILATION DES BÉNÉFICES OU REVENUS

26Aux termes de l'article 209-I du CGI, seuls sont imposables en France les bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ainsi que ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions. Dès lors que le bénéfice global d'une entreprise n'est pas réalisé exclusivement sur le territoire national, il doit faire l'objet d'une ventilation.

Remarque : II convient de noter, en ce qui concerne les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, que les dispositions de l'article 57 du CGI permettent d'ajouter aux résultats déclarés pour l'établissement de l'impôt français les bénéfices indirectement transférés à des entreprises étrangères, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente soit par tout autre moyen. Ces dispositions sont étudiées dans la DB 4 A.

Diverses situations peuvent être envisagées.

  I. Entreprise possédant des succursales de vente à l'étranger

27Une entreprise française, possédant des succursales à l'étranger et retraçant dans un bilan unique le résultat d'ensemble de ses opérations, est fondée -pour déterminer son bénéfice imposable en Francs à retrancher de son bénéfice global la fraction dudit bénéfice qui correspond aux opérations effectuées par ses succursales étrangères.

Si l'ensemble des opérations d'achat et de revente des succursales étrangères est effectué à l'étranger, la totalité des bénéfices qu'elles réalisent doit donc être retranchée du résultat.

28Si, par contre, les succursales s'approvisionnent en tout ou en partie auprès de la maison mère française ou d'un de ses établissements français, le bénéfice imposable en France doit nécessairement comprendre les profits réalisés sur la vente des marchandises fournies auxdites succursales. Il faut alors procéder comme si ces ventes avaient été conclues avec des tiers dans des conditions normales et si la comptabilité de l'entreprise française ne permet pas de fixer exactement le montant du bénéfice ainsi réalisé, il y a lieu de le déterminer par comparaison avec des entreprises similaires.

  II. Entreprise possédant un établissement de vente en France et une usine de fabrication à l'étranger

29Seul le bénéfice de vente doit être taxé en France, à l'exclusion du bénéfice de fabrication réalisé par l'établissement étranger.

30Le bénéfice de vente correspond à celui que l'entreprise française réaliserait si, au lieu de se fournir auprès de sa propre usine, elle s'approvisionnait auprès d'usines étrangères indépendantes. Si la comptabilité de l'entreprise n'en fait pas apparaître le montant exact, notamment lorsque les produits fabriqués dans l'usine étrangère sont livrés à la maison de vente française pour un prix conventionnel voisin du prix de vente, ce montant peut être déterminé par comparaison, en fonction soit du montant des ventes effectuées par l'établissement français, soit du nombre, de la quantité ou du volume des marchandises vendues.

  III. Entreprise possédant une usine de fabrication en France et une exploitation ou un établissement à l'étranger

31A l'inverse de la situation précédente, une entreprise qui possède en France une usine de fabrication doit être imposée dans notre pays uniquement d'après le bénéfice provenant de ses opérations de fabrication. Ce bénéfice correspond aux profits que réaliserait ladite usine si elle exportait ses produits à des entreprises indépendantes.

Le Conseil d'État a ainsi jugé qu'une entreprise qui possède en France une usine pour le travail des bois et qui exploite, en outre, un domaine forestier situé à l'étranger et dont les produits sont soit vendus sur place, soit expédiés en France pour y être vendus ou pour alimenter l'usine en matières premières, est imposable en France, non d'après les résultats des opérations commerciales effectuées à l'étranger par l'entreprise forestière, mais seulement à raison des bénéfices provenant des opérations commerciales effectuées en France et se rattachant, tant à l'exploitation du domaine forestier (vente en France de bois bruts), qu'à l'activité de l'usine française. Toutefois, ces bénéfices doivent être déterminés sous déduction des avantages ayant résulté pour l'entreprise française des conditions spéciales d'achat des bois provenant de l'entreprise forestière exploitée hors de France (CE, arrêt du 13 mars 1939, req. n° 40022, RO, p. 139).

  IV. Entreprise possédant son siège et des bureaux d'études en France et livrant des ensembles industriels à l'étranger

32Dans le cas de la livraison à l'étranger d'une usine « clefs en main » par une société française, le bénéfice correspondant à l'ensemble des opérations effectivement réalisées sur place dans le pays d'implantation de l'usine ne doit pas être pris en compte pour la détermination du résultat imposable en France à l'impôt sur les sociétés (CE, arrêt du 23 juin 1978, req. n° 99444, RJ 1978, vol. II, p. 92 ; cf. H 1413, n° 19 ).

  B. VENTILATION DES FRAIS ET CHARGES

33Les frais et charges afférents aux entreprises exploitées en France sont normalement déductibles pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés.

34En revanche, les frais qui se rapportent à des entreprises dont les résultats ne sont pas soumis à l'impôt français ne peuvent venir en déduction des bénéfices imposables en France sous réserve, bien entendu, des dispositions légales particulières relatives, d'une part, aux dépenses exposées en vue de l'implantation d'entreprises à l'étranger (CGI, art. 39 octies, 39 octies A à 39 octies D, cf. 4 H 1415, n° 15 et suiv. et 13 D 25 ), d'autre part, aux sociétés françaises admises, sur agrément, aux régimes du bénéfice mondial ou du bénéfice consolidé (CGI, art. 209 quinquies , cf. H 1415, n° 1 et suiv. ).

Il y a lieu de distinguer, parmi les frais et charges d'un établissement, deux catégories distinctes de dépenses.

35 1. Une première catégorie comprend les dépenses propres à l'établissement qui, directement imputables à celui-ci, sont facilement déterminables. Il en est ainsi, notamment, des dépenses de personnel et de direction propres à l'établissement, des achats de marchandises, matières premières et produits finis, des acquisitions de matériels et outillages directement affectés à l'établissement, de l'amortissement des immobilisations sises au lieu d'implantation de l'établissement, etc.

36 2. Une deuxième catégorie englobe les frais et charges pris en compte par le siège de la direction effective de l'entreprise et qui doivent être, par la suite, partiellement imputés à chaque établissement distinct. La ventilation de ces charges présente des difficultés particulières, soit que leur montant ait été comptabilisé globalement, soit que leur destination apparaisse incertaine.

  I. Dépenses exposées au profit d'un établissement déterminé

37Il convient de n'admettre dans les charges d'un établissement distinct sis en France que celles qui sont engagées dans le seul intérêt de cet établissement.

38Corrélativement, les dépenses exposées en France par une entreprise dans l'intérêt de ses succursales situées hors de France ne sont pas déductibles des bénéfices réalisés dans notre pays.

Ainsi les frais de tenue de comptabilité engagés en France par le siège central d'une société en raison de l'existence de succursales autonomes à l'étranger doivent être imputés à ces succursales et ne peuvent venir en déduction du bénéfice réalisé en France (CE, arrêt du 7 janvier 1942, req. n° 43693, RO, p. 11).

39En raison des principes généraux exposés ci-dessus, une société dont le siège est à l'étranger mais dont l'entreprise est exploitée en France peut déduire de ses bénéfices imposables en France les charges afférentes à son établissement français.

40  Cette possibilité est cependant exclue au cas des versements opérés au profit d'une société étrangère par sa succursale française en rémunération des sommes octroyées par le siège sur ses fonds propres.

En effet, la réponse ministérielle faite à M. Georges Mesmin (déb. AN, JO du 19 janvier 1981, p.245, n° 31725) précise que les versements effectués sous la dénomination d'intérêts ou de redevances par la succursale française d'une société étrangère, en rémunération des sommes que cette société a prélevées sur ses fonds propres, et met sous quelque forme que ce soit à la disposition de sa succursale, ne peuvent être admis en déduction du bénéfice imposable en France ; la succursale n'ayant pas de personnalité juridique distincte ni d'autonomie patrimoniale, ces versements représentent en réalité une partie d'un bénéfice réalisé en France par la société étrangère (voir en ce sens, CAA Paris, 28 mai 1991, n° 2918).

En revanche, la succursale française peut déduire les remboursements effectués au siège de dépenses supportées par celui-ci lorsque celles-ci sont afférentes à la succursale française (voir n° 39 ) ou sont exposées au profit de l'ensemble de l'entreprise (voir n° 43 ).

41   Cas particulier : traitement des intérêts versés par les succursales françaises à des banques étrangères.

En ce qui concerne les banques et les autres établissements financiers et de crédit, il convient de distinguer, dans les relations entre un siège et ses succursales étrangères :

- d'une part, les dotations attribuées aux succursales à titre de quasi-capital ;

- d'autre part, les avances en compte courant inhérentes à la nature même de l'activité des établissements, c'est-à-dire le commerce de l'argent.

Distinction des deux catégories d'opérations

Elle ne peut qu'être faite au cas par cas, en fonction de l'ensemble des caractéristiques de chaque affaire.

Prise en compte des intérêts

Les dotations obéissent aux règles prévues pour toutes les opérations purement financières entre un siège et une succursale. Elles ne peuvent donc pas donner lieu au paiement d'intérêts susceptibles d'être pris en compte pour le calcul des résultats fiscaux.

En revanche, et sous réserve d'être effectuées dans les mêmes conditions que celles qui sont pratiquées entre établissements bancaires non apparentés, les avances sont traitées comme des opérations commerciales.

Ces avances peuvent donc être génératrices d'intérêts. Ces intérêts sont déduits du résultat fiscal de la succursale et intégrés à celui du siège.

Incidence des conventions fiscales

La plupart des conventions internationales permettent d'appliquer les règles ci-dessus.

  II. Dépenses exposées au profit de l'ensemble de l'entreprise

42  Lorsque certaines dépenses ont été supportées par le siège social, dans l'intérêt de l'ensemble de l'entreprise, il y a lieu de procéder à leur répartition.

On trouvera ci-après un certain nombre de solutions concernant la ventilation de frais communs qui, n'étant pas toujours distingués en comptabilité, doivent être évalués au vu des données comptables et compte tenu des conditions particulières d'exploitation.

  III. Frais généraux du siège de l'entreprise, française ou étrangère

43  Lorsqu'une entreprise possède des établissements à la fois en France et à l'étranger, les frais généraux du siège social doivent être répartis entre les différents établissements intéressés. Dans la mesure où l'affectation de ces dépenses communes ne résulte pas des écritures comptables, la part de ces frais imputable aux établissements exploités en France peut être valablement fixée d'après la proportion existant entre le chiffre d'affaires de ces établissements et le chiffre d'affaires global de l'entreprise.

On peut citer parmi les différents frais qui font l'objet de cette ventilation forfaitaire, dès lors qu'ils ont été engagés dans l'intérêt de l'ensemble de l'entreprise :

1 ° Les frais de gestion.

Il s'agit notamment de ceux concernant la gestion du capital et la direction générale de la société (CE, arrêt du 8 mai 1944, req. n°s 66968 et 68362, RO, p. 96) ;

2° Les frais financiers.

Ce sont, par exemple, les intérêts de dettes obligataires, dans la mesure où ces emprunts n'ont pas été contractés en faveur d'un établissement déterminé ou des seules activités du siège.

3° Les frais de fusion.

Au cas particulier le Conseil d'État a jugé :

- que les frais de fusion qu'une société a engagés en France dans l'intérêt commun des magasins de vente qu'elle exploite dans la métropole et de ses succursales autonomes sises en Afrique du Nord, doivent être répartis entre ces établissements, proportionnellement à leur importance relative, bien que ces derniers ne soient pas placés sous le même régime fiscal ;

- et que la quote-part de ces frais afférente à la partie de l'entreprise exploitée en France peut être déduite du bénéfice imposable (CE, arrêt du 14 février 1942, req. n° 64357, RO, p. 54).

4° Les frais de personnel du siège social.

La rémunération du président directeur général d'une société anonyme ayant des succursales à l'étranger doit être regardée comme rétribuant globalement les fonctions de direction assumées par l'intéressé, alors même que celui-ci ne se consacrerait en fait qu'à la direction de l'établissement sis en France et que la rémunération en cause serait calculée en fonction des seuls bénéfices réalisés sur notre territoire. Elle doit donc être ventilée entre les divers établissements de la société au prorata de leurs chiffres d'affaires respectifs. La part imputable aux succursales étrangères se trouve alors exclue des frais généraux, pour le calcul des bénéfices imposables dans notre pays (CE, arrêt du 25 avril 1960, req. n° 45089, RO, p. 60).

44 Cas particulier : gratifications calculées sur les résultats d'ensemble de l'exploitation en France et l'étranger.

Les gratifications qu'une société, ayant son siège social en France, alloue au personnel de ce siège en fonction des résultats globaux obtenus par l'entreprise, tant dans notre pays qu'à l'étranger, constituent des compléments des salaires dont la fraction déductible des bénéfices sociaux, pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés, doit être déterminée, non en proportion de la répartition des résultats entre le secteur « France » et le secteur « Étranger », mais en fonction de la répartition, entre les mêmes secteurs, des salaires principaux dont les gratifications en cause ne sont que l'accessoire c'est-à-dire d'après l'importance du travail fourni par le personnel du siège pour l'un et l'autre de ces secteurs (CE, arrêt du 8 mars 1961, req. n° 48302, RO, p. 323 ; dans le même sens : CE, arrêt du 14 octobre 1960, req. n° 45414, RO, p. 171).