Date de début de publication du BOI : 01/10/1996
Identifiant juridique : 13E2223
Références du document :  13E2223

SOUS-SECTION 3 PÉNALITÉ PROPORTIONNELLE À TAUX VARIABLE


SOUS-SECTION 3

Pénalité proportionnelle à taux variable


1Le premier alinéa de l'article 7 de la loi du 29 décembre 1977 a supprimé la pénalité du quintuple :

- des droits, taxes, redevances, soultes ou autres impositions fraudés ou compromis, prévue aux articles 1791, 1 793 A, 1 797 et 1801 du CGI ;

- de la valeur des appareils, objets, produits, marchandises et vins sur lesquels a porté la fraude, prévue aux articles 1794 et 1804 du même code.

2Il les a remplacés par une pénalité dont le montant est compris entre une et trois fois l'élément à partir duquel les pénalités précitées étaient calculées jusqu'à l'entrée en vigueur de ladite loi.

3Désormais, toutes les contraventions aux lois sur les contributions indirectes sont légalement passibles de l'amende proportionnelle dans les mêmes conditions que précédemment la pénalité du quintuple des droits.

En laissant aux juges le soin d'en déterminer librement le montant entre ces deux limites, le nouveau régime de la pénalité proportionnelle leur permet d'adapter les condamnations à la gravité réelle de l'infraction et d'apporter ainsi plus de souplesse dans la répression.


  A. CARACTERES DE LA PÉNALITÉ PROPORTIONNELLE


4La pénalité à taux fixe du quintuple droit présentait le double caractère de peine et de réparation civile, ce dernier aspect étant toutefois prédominant.

En revanche, si la pénalité proportionnelle à taux variable conserve ce caractère mixte, l'aspect répressif tend désormais à l'emporter.


  I. Caractère répressif


51° La pénalité proportionnelle est prononcée par les tribunaux correctionnels (LPF, art. L 235).

2° Elle est encourue dès que la matérialité de l'infraction est établie, même en l'absence de manoeuvres frauduleuses.

3° Le juge peut, désormais, moduler la pénalité dans les limites prévues par la loi et faire ainsi une plus large place à la personnalité du prévenu.

4° A l'inverse, en cas de récidive, le taux maximal de la pénalité est doublé.

5° Enfin, la réparation financière est assurée par le paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues que le juge est tenu de prononcer en sus de la pénalité proportionnelle.


  II. Caractère de réparation civile


61° La règle de non-cumul des peines prévues aux articles 132-1 à 132-7 du nouveau Code pénal n'est pas applicable (cf. L 2222 n° 15 et E 225 ).

2° Une seule pénalité est prononcée pour une seule infraction quand bien même il y aurait plusieurs personnes poursuivies et condamnées (auteurs, coauteurs, complices...).

3° La pénalité peut atteindre non seulement l'auteur de l'infraction mais encore certaines personnes civilement ou pénalement responsables à raison du fait d'autrui.

4° Le décès du contrevenant n'éteint pas l'action de l'Administration en ce qui concerne la pénalité proportionnelle.

5° L'Administration conserve le droit de transiger avant la mise en mouvement de l'action judiciaire (art. L 248 du LPF) ou après mise en mouvement de ladite action et avant jugement définitif dans les conditions prévues à l'article L 249 du LPF en outre, elle peut accorder après jugement une remise ou modération (art. L 249 du LPF, dernier alinéa).

6° Enfin le recouvrement de la pénalité proportionnelle est assuré par les receveurs de centre des impôts.


  B. CAS D'APPLICATION DE LA PÉNALITÉ PROPORTIONNELLE


7Il convient de distinguer, d'une part, les infractions tombant sous le coup de l'article 1791 du CGI et, d'autre part, celles réprimées par les dispositions spéciales prévues aux articles 1793 A et suivants du CGI. Compte tenu des attributions de la Direction générale des impôts, seules les infractions sanctionnées par les pénalités prévues à l'article 1791 sont examinées ci-après.

1. Infractions visées

8L'article 1791 de portée générale s'applique « à toutes les infractions aux dispositions du livre 1er, première partie, titre III du CGI et des lois régissant les contributions indirectes ainsi que des décrets et arrêtés pris pour leur exécution, à toute manoeuvre ayant pour but ou pour résultat de frauder ou de compromettre les droits, taxes, redevances, soultes et autres impositions établies par ces dispositions ».

Par ailleurs, à raison de dispositions expresses du CGI, les infractions suivantes tombent sous le coup des sanctions édictées par l'article 1791 :

- infractions prévues à l'article 1699 du CGI ;

- infractions aux obligations des assujettis réalisant des opérations portant sur les animaux de boucherie et de charcuterie (CGI. art. 290 quater III) ;

- infractions à l'article 290 quater du CGI relatif à la billetterie de spectacles (CGI. art. 290 quater III).

2. Calcul de la pénalité proportionnelle

9Le montant de la pénalité est compris entre une et trois fois celui des droits, taxes, redevances, soultes et autres impositions fraudés ou compromis.

Ce dernier élément (droits fraudés ou compromis) étant identique à celui à partir duquel les pénalités du quintuple droit étaient jusqu'à présent calculées, il convient de faire application de la doctrine administrative et de la jurisprudence de la Cour de cassation antérieures, directement transposables.

a. Notion de droits fraudés ou compromis

10Par droits fraudés ou compromis, il faut entendre ceux qui auraient dû être acquittés ou garantis et qui ne l'ont pas été à raison de la contravention (déclaration du ministre des Finances, JO Déb. Sénat du 28 mars 1897. p. 634).

b. Détermination des droits fraudes ou compromis

1° Assiette des droits

11Les droits fraudés ou compromis sont liquidés sur la totalité des produits, objets ou marchandises tels qu'ils ont été saisis en contravention.

En matière d'impôt sur les spectacles, en cas d'utilisation de billets non déclarés, les droits fraudés doivent être calculés non seulement sur le prix des billets dont l'utilisation clandestine a été constatée, mais aussi sur celui de tous les billets manquants dans les séries mises régulièrement en service (Cass. crim., 17 décembre 1937, BCI, 1938-2).

Cas particulier. - Infractions visées à l'article 1739 du CGI, relatives aux opérations portant sur les animaux de boucherie et de charcuterie.

Ces infractions tombent sous le coup des sanctions visées à l'article 1791 du CGI (rappel cf. ci-dessus n° 8 ).

Les règles particulières concernant le calcul des droits fraudés (TVA) sont exposées dans la documentation de base 13 N 226 à laquelle il conviendra de se reporter.

2° Rôle des tribunaux répressifs

13Les tribunaux doivent ordonner les mesures d'instruction pour déterminer l'importance des droits fraudés. Ainsi, au cas où il n'aurait pas été possible de recueillir les éléments précis d'évaluation sur le volume et sur la richesse alcoolique des boissons, il leur appartient de déterminer par toutes voies de droit la quantité d'alcool et le minimum de cette richesse alcoolique (Cass. crim., 15 décembre 1916, BCI, 1917-5 ; 25 septembre 1940, BCI, 1941-1). Ils peuvent d'ailleurs, à cet égard, retenir l'évaluation des verbalisants et leur appréciation est souveraine.

14Il a été jugé notamment :

- qu'en cas de refus d'exercice ayant empêché la vérification d'un chargement, les tribunaux sont souverains pour apprécier si l'évaluation faite par les verbalisants du volume et du degré des spiritueux transportés est susceptible d'être acceptée et si, notamment, elle peut servir de base au calcul du double droit de consommation (Cass. crim., 12 novembre 1909 BCI, 24 ; 16 décembre 1927. BCI, 1928-3 ; 27 septembre 1940, BCI, 1941-1) ;

- que les juges sont légalement fondés pour prononcer des condamnations basées sur les droits fraudés par divers prévenus, à s'approprier l'évaluation desdits droits contenue dans les conclusions de l'Administration lorsque cette évaluation n'a fait l'objet d'aucune contestation en cours d'instance (Cass crim, 25 janvier 1956, RJCI, 6, p. 269).

15Cependant, si les tribunaux arbitrent souverainement les quantités qui servent à déterminer le montant des condamnations à prononcer (Crim. rejet, 30 mars 1960, RJCI, 39, p. 106 ; rejet 29 avril 1965, RJCI, 16, p. 57 et la note), encore faut-il, lorsqu'ils repoussent les chiffres exempts de tout arbitraire, retenus par l'Administration dans ses conclusions, qu'ils donnent à l'appui de leur décision, des motifs suffisants ; leur appréciation doit reposer sur les éléments résultant de l'information et des débats. L'évaluation administrative s'impose tout spécialement si le contribuable a mis lui-même les agents dans l'impossibilité de rétablir exactement le montant des droits fraudés (Crim. rejet 20 février 1963 RJCI, 9, p. 37 rejet17 juillet 1968 RJCI, p. 72, CA Montpellier 5 novembre 1970, RJCI, p. 77).

La Cour de cassation a confirmé que tout jugement ou arrêt doit contenir des motifs propres à justifier la décision. Il n'en est pas ainsi lorsque, pour calculer les pénalités applicables à un prévenu en fonction des quantités de vins qu'il a falsifiées et transformées de la sorte en dilutions alcooliques, une cour d'appel, après avoir rejeté - au seul motif que l'intéressé est revenu sur ses aveux - le chiffre retenu par l'Administration eu égard aux aveux du prévenu, énonce qu'il apparaît normal de limiter les pénalités au volume (bien inférieur) des vins sur lesquels ont porté les constatations matérielles des agents. Ces énonciations se bornent en effet à constater la rétractation du prévenu sans en apprécier ni en discuter la valeur. En outre, elle ne font pas ressortir les éléments sur lesquels la Cour d'appel s'est fondée pour retenir une quantité qui ne correspond pas à celle évaluée par l'Administration sur la base des propres déclarations de l'intéressé (Cass. crim. 13 mai 1975 RJCI, 1975, p. 113).


  C. TAUX DE LA PENALITE PROPORTIONNELLE


a. Règles générales

16En substituant aux pénalités à taux fixe du quintuple droit ou de la valeur une pénalité proportionnelle comprise entre un minimum et un maximum le législateur a entendu conférer au juge un pouvoir d'appréciation quant à la gravité de l'infraction et la responsabilité de son auteur.

Désormais, le juge peut déterminer librement le montant de la pénalité entre les deux limites légales de une à trois fois les droits fraudés ou compromis (ou la valeur des objets sur lesquels a porté la fraude).

b. Exceptions

17 Récidive. En cas de récidive, le taux maximal de la pénalité proportionnelle prévue aux articles 1791, 1793 A, 1794, 1795, 1797 et 1804 du CGI est doublé et le juge prononce une sanction comprise entre une et six fois le montant des droits fraudés (ou compromis) ou de la valeur (CGI, art. 1804 A).

Sur la récidive cf. E 224, n°s 3 et suivants.