Date de début de publication du BOI : 01/10/1996
Identifiant juridique : 13E3334
Références du document :  13E3334

SOUS-SECTION 4 PRESCRIPTION


SOUS-SECTION 4

Prescription



  A. DÉLAIS PRÉVUS PAR L'ARTICLE L. 236 DU LIVRE DES PROCÉDURES FISCALES


1Les alinéas 2, 3 et 4 de l'article L. 236 du Livre des procédures fiscales énoncent :

« Citation doit être délivrée dans un délai de trois ans à compter de la date du procès-verbal constatant l'infraction.

Toutefois, lorsque la personne est en état d'arrestation, la citation doit être faite dans le délai d'un mois à partir de l'arrestation.

L'inobservation de ces délais entraîne la nullité de la procédure ».

En vérité l'inobservation des délais susvisés entraîne la prescription de l'action fiscale, plutôt que la nullité de la procédure.

2Le délai de trois ans prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 236 résulte de l'article 9 de la loi de Finances rectificatives pour 1979. Il était fixé, auparavant, à un an.

La Cour de cassation considérait alors ce délai d'un an, ou celui d'un mois, comme un délai de prescription susceptible d'être interrompu, et non comme un délai de déchéance stricto sensu.

Hormis le cas où le contrevenant est en état d'arrestation, la prescription de l'action correctionnelle en matière de contributions indirectes obéit désormais entièrement aux règles du droit commun.

3Le point de départ du délai imparti à l'Administration, pour citer le prévenu est la date à laquelle le procès-verbal a,été rédigé et clos et a ainsi reçu sa perfection (Cass. crim., 20 février 1974, RJ n° 1, p. 34 ; Bull. crim. 74, p. 185 : Jurisprudence constante, cf. ci-dessus E 3332, n°s 4 et suiv. ).

Le procès-verbal visé doit être régulièrement établi à des fins fiscales par des agents qualifiés.

Les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 236 du livre des procédures fiscales aux termes duquel « lorsque la personne est en état d'arrestation, la citation doit être faite dans un délai d'un mois à partir de l'arrestation », ne trouvent leur application qu'en cas d'arrestation motivée par l'infraction fiscale poursuivie (cf. Cass. crim., 27 juin 1956, RJCI 48, p. 373, Bull. crim. 497, p. 908).

Comme cela a déjà été précisé (cf. ci-dessus E 3332, n° 6 ) le délai est calculé de quantième à quantième, à partir de la date de rédaction du procès-verbal ou de l'arrestation, ce jour étant exclu tandis que le dernier est compté.


  B. SUSPENSION DE LA PRESCRIPTION PAR UNE INFORMATION JUDICIAIRE


4Lorsqu'une information est ouverte par le ministère public, le délai d'assignation de trois ans ou d'un mois imparti à l'Administration ne commence à courir qu'à compter du jour de la clôture de l'instruction (Cass. crim., 16 mai 1931, BCI 13, p. 1 56 et arrêts cités).

Mais la déchéance n'est suspendue qu'à la condition que l'information judiciaire régulière soit ouverte et qu'elle porte sur les faits mêmes qui constituent l'infraction fiscale (cf. ci-dessus E 3332, n°s 7 et suiv. ).

Il est recommandé, toutefois, de délivrer l'assignation, autant que possible, sans tenir compte de cette suspension, dans les trois ans de la date du procès-verbal ou dans le mois de l'arrestation.


  C. INTERRUPTION DE LA PRESCRIPTION PAR UNE ASSIGNATION

(cf. E 3333 )



  I. Prescription triennale de droit commun


5La chambre criminelle de la Cour de cassation, dont la jurisprudence s'est fixée en un sens opposé à l'opinion de la majorité des auteurs, considère que l'interruption des courtes prescriptions instituées par les lois spéciales, fait revivre, non le délai particulier à la matière, mais le délai de droit commun édicté par l'article 8 du Code de Procédure pénale (cf. par ex. Cass. crim., 2 août 1912, BCI 12, p. 104 ; Bull. crim. 446, p. 821 ; Cass. crim., 15 mars 1956 ; RJCI22, p. 303 ; Cass. crim., 10 juin 1960 ; RJCI 58, p. 167 ; Cass. crim., 8 mars 1972 ; RJ n° 1, p. 10 et les arrêts cités sous la note n° 4).

Compte tenu des dispositions de l'article 9 de la loi de Finances rectificative pour 1979 (loi n° 79-1102 du 21 décembre 1979) qui a porté à trois ans le délai prévu au premier alinéa de l'ancien article 1869 du CGI devenu L. 236 du Livre des procédures fiscales, cette jurisprudence ne présente désormais un intérêt, en matière de contributions indirectes, que dans le cas où le contrevenant est en état d'arrestation, La délivrance d'une assignation dans le délai de trois ans, ou dans celui d'un mois, édicté par l'article L. 236, fait donc ouvrir un nouveau délai de trois ans qui est le délai de prescription des délits correctionnels.

Les contraventions en matière de contributions indirectes étant assimilées aux délits correctionnels (cf. art. L. 235 du Livre des procédures fiscales) les dispositions de l'article 8 du Code de Procédure pénale leur sont en effet applicables (cf. Cass. crim., 26 mai 1964, RJCI 14, p. 45 ; Bull. crim. 183, p. 393). Il s'ensuit qu'à dater de la délivrance d'une assignation, l'action fiscale est à l'abri de la prescription pendant un délai de trois ans.

L'article 801 du Code de Procédure pénale dispose que tout délai prévu par ce code pour l'accomplissement d'un acte ou d'une formalité expire le dernier jour à 24 heures mais que s'il expire normalement un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.

Il est à noter que cette règle harmonise les dates d'expiration des délais de procédure pénale avec celles fixées en matière de procédure civile (nouveau Code de procédure civ., art. 642).

En conséquence le délai de trois ans visé à l'article 8 du même code qui court à partir de la délivrance de l'assignation décernée en application de l'article L. 236 du Livre des procédures fiscales obéit à cette règle régissant la date d'expiration des délais de procédure.


  II. Effet interruptif in rem (à l'égard des faits)


6L'effet interruptif de prescription des actes d'instruction ou de poursuite se produit in rem et non in personam c'est-à-dire à l'égard des faits eux-mêmes et non des individus poursuivis. L'interruption de la prescription a, en effet, un caractère absolu et impersonnel, Il s'ensuit que les actes d'instruction et de poursuites dirigés contre un prévenu sont opposables à ses coprévenus. Spécialement, l'assignation délivrée sur et aux fins d'un procès-verbal à l'un des contrevenants a pour conséquence d'interrompre à l'égard de tous les autres, surtout s'ils sont nommément désignés dans le corps de l'acte, la déchéance de trois ans, ou d'un mois, prévue par l'article L. 236 du Livre des procédures fiscales (Cass. crim., 20 mars 1974, RJ n° 1, p. 46 ; Bull. crim. 118, p. 308 ; Jurisprudence constante, cf. les nombreux arrêts cités au recueil précité de jurisprudence et Cass. crim., 31 octobre 1981, Aff. X... et autres, BODGI 2 L-6-82, P, n° 80/92-872).

Ce n'est que dans l'hypothèse où les prévenus seraient demeurés totalement étrangers aux faits rapportés dans le procès-verbal que la citation délivrée à leur coprévenu ne leur serait pas opposable (cf. Cass. crim., 24 mai 1960, RJCI 56, p. 159 ; Bull. crim. 283, p. 583 ; Cass. partielle, 26 mai 1961, RJCI 24, p. 78).

Il résulte de cette jurisprudence que des poursuites peuvent être engagées contre des contrevenants plus de trois ans après la date de rédaction et de clôture du procès-verbal constatant les infractions qui leur sont reprochées, dans la mesure où une précédente assignation a été délivrée dans le délai légal à un premier prévenu, à raison d'infractions différentes, mais connexes, constatées dans le même procès-verbal. La première assignation a, en effet, fait courir un nouveau délai de trois ans, à l'égard de tous les contrevenants, même ceux non visés par cette première assignation 1 .


  III. Citation devant un tribunal incompétent

(cf. ci-dessus E 3331, n°s 15 à 18 )


7La citation donnée dans les délais légaux, même devant un juge incompétent, interrompt la prescription, dès l'instant qu'elle relate l'objet de la poursuite (Cass. crim., 13 mars 1967, RJCI 1re partie, p. 18 ; Jurisprudence constante, cf. nombreux arrêts cités au recueil de jurisprudence qui, de façon permanente, rappellent le principe formulé par l'article 2246 du Code civ.).

Si la citation donnée, même devant un juge incompétent, interrompt la prescription en matière correctionnelle et, spécialement, en l'absence de disposition contraire, dans les poursuites exercées du chef d'infractions au CGI, c'est à la double condition que le prévenu ait eu connaissance de cette citation et qu'il n'ait pu douter de sa réalité (Cass. Crim., 8 février 1961, RJCI 9 p. 27, Bull. crim. 79, p. 151 ; cf. également Cass. crim., 13 mars 1967, RJCI p. 18, Bull. crim. 99 p. 234).


  D. EFFET DE LA PRESCRIPTION


8L'action fiscale pour l'application de sanctions par le tribunal correctionnel s'éteint, conformément aux règles édictées en droit commun, par la prescription (Code de proc. pén., art. 6).

A défaut d'autres actes interruptifs de prescription, l'action engagée par la délivrance d'une assignation est prescrite trois années plus tard.

9Il est rappelé que la prescription en matière répressive est non seulement générale (en principe, elle s'applique à toutes les infractions) mais aussi d'ordre public. En conséquence, lorsqu'elle n'est pas invoquée par le délinquant, le juge doit la constater d'office. Elle peut être opposée en tout état de cause 2 , même pour la première fois en appel et devant la Cour de cassation 3 à condition, bien entendu, que le moyen n'ait pas été antérieurement invoqué et rejeté par une décision passée en force de chose jugée et que la Cour de cassation trouve dans les énonciations de la décision qui lui est déférée les éléments nécessaires pour lui permettre d'en apprécier la valeur 4 .

 

1   Et, le cas échéant, même s'ils ne sont pas désignés dans les procès-verbal ; Cf. Cass. Crim., 9 juin 1910, BCI 15, p. 64 ; Cass. Crim., 2 août 1912, BCI 20, p. 104 ; Cass. Crim., 10 juin 1960, RJCI 58, p. 167.

2   Cass. Crim., 22 février 1955, Bull. Crim. 116.

3   Cass. Crim., 16 février 1964, Bull. Crim. 16.

4   Cass. Crim., 30 avril, RJCI 10, p. 37 ; Bull. Crim. 143, p. 319 ; Cass. Crim., 12 mars 1968, RJCI 1ère partie, p. 12.