Date de début de publication du BOI : 31/12/2007
Identifiant juridique :

B.O.I. N° 133 du 31 DECEMBRE 2007


INTRODUCTION


1.Tirant les conséquences des arrêts du Conseil d'Etat du 30 décembre 2003 n° 249047 Coréal Gestion et n° 233894 X... (cf. instruction administrative 13 O-2-05 n° 8 du 12 janvier 2005), l'article 113 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 (JO du 31 décembre 2005 - cf. annexe 1) a réformé le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation prévu à l'article 212 du code général des impôts.

Ainsi, les nouvelles dispositions de l'article 212 précité visent désormais tous les intérêts dus par une entreprise à une entreprise liée directement ou indirectement au sens du 12 de l'article 39 du code général des impôts. L'exception dont bénéficiaient les sociétés ayant la qualité de société mère au sens de l'article 145 du code déjà cité est supprimée.

A l'occasion de cette refonte du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation, l'article 113 de la loi de finances introduit une mesure d'assouplissement, codifiée au I de l'article 212 du code général des impôts, en autorisant désormais les entreprises dont le taux d'intérêt servi aux entreprises liées est d'un montant supérieur au taux d'intérêt prévu au 3° du 1 de l'article 39 du même code à apporter la preuve que ce taux n'est pas excessif au regard du taux du marché.

Cette refonte de l'article 212 déjà cité se traduit surtout par l'adoption de nouveaux critères caractérisant la sous-capitalisation. Ainsi, une entreprise n'est plus considérée comme sous-capitalisée au regard de son seul ratio d'endettement, mais également en fonction de l'importance des intérêts dus à des entreprises liées par rapport au résultat dégagé par l'entreprise (ratio de couverture d'intérêts), tout en tenant compte du montant net d'intérêts dus par des entreprises liées (ratio d'intérêts servis par des entreprises liées).

Toutefois, afin de ne pas pénaliser certains acteurs économiques dont l'activité même réside dans le financement des entreprises (établissements de crédit et centrales de trésorerie) ou certaines opérations ponctuelles de crédit-bail, le II de l'article 212 prévoit d'exclure, sous certaines conditions, les intérêts dus à des entreprises liées dans le cadre de ces activités. En outre, pour s'adapter au plus près à la réalité du groupe économique auquel appartient l'entreprise, les nouvelles dispositions de l'article 212 instituent un mécanisme de preuve contraire pour les entreprises qui seraient présumées sous-capitalisées au regard des trois ratios précités.

L'article 113 de la loi de finances pour 2006 prévoit, par ailleurs, que lorsque l'entreprise est sous-capitalisée au regard des trois ratios et n'est pas en mesure d'apporter la preuve contraire, la déduction des intérêts excédant le plus élevé de ces trois ratios est dorénavant différée au titre des exercices ultérieurs, sous certaines limites, et non plus écartée.

Enfin, pour tenir compte des spécificités propres au régime de l'intégration fiscale prévu à l'article 223 A du code général des impôts, l'article 113 déjà cité modifie les dispositions de l'article 223 B du même code en vue de transférer la déduction des intérêts différés pendant la période d'appartenance au groupe au niveau du résultat d'ensemble.

Sauf mention contraire, les articles et annexes mentionnés sont ceux du code général des impôts.


TITRE 1 :

CHAMP D'APPLICATION



CHAPITRE 1 :

ENTREPRISES CONCERNÉES



Section 1 :

Sociétés soumises à l'impôt de plein droit ou sur option y compris les établissement stables de sociétés étrangères


2.Les dispositions de l'article 212 s'appliquent aux sociétés et organismes soumis de plein droit ou sur option à l'impôt sur les sociétés. Sont notamment visés par les dispositions de l'article 212 les sociétés et groupements qui ont opté pour leur assujettissement à cet impôt dans les conditions de l'article 239.

Cas particulier des établissements stables

3.Lorsqu'un établissement français d'une société étrangère remplit les conditions pour être soumis à l'impôt sur les sociétés tant au regard des critères internes retenus par la jurisprudence (cf. sur ces critères la documentation administrative 4 H-1412 en date du 1er mars 1995) que ceux définis par les conventions fiscales internationales, il convient d'appliquer les dispositions de l'article 212 pour déterminer le bénéfice imposable de cet établissement.

Toutefois, outre les dispositions de l'article 212, il est rappelé que la répartition de l'endettement entre le siège étranger et l'établissement français d'une même entreprise doit en tout état de cause rester conforme au principe de territorialité, tel que posé par le I de l'article 209 et l'article « bénéfices des entreprises » des conventions fiscales (article 7 du modèle de l'OCDE) et ses commentaires relatifs à la détermination des bénéfices imputables aux établissements stables (cf. également instruction administrative 13 O-2-05 du 12 janvier 2005).

Par ailleurs, si l'entreprise dont émane l'établissement a financé les sommes avancées à ce dernier en usant de ses seuls fonds propres, les intérêts dus par cet établissement à son siège étranger ne sont pas déductibles (cf. réponse à M. Georges Mesmin JOAN du 19 janvier 1981 p. 245 n° 31725 et documentation administrative 4 H 1414 n os40 et 41 en date du 1 er mars 1995).

Pour plus de précisions sur l'application des dispositions de l'article 212 aux établissements stables, cf. n os 81 et suivants.


Section 2 :

Sociétés soumises aux dispositions du I de l'article 238 bis K du code général des impôts


4.En application du I de l'article 238 bis K, la part de bénéfice correspondant aux droits détenus dans une société ou un groupement mentionnés aux articles 8, 8 quinquies, 239 quater, 239 quater B, 239 quater C ou 239 quater D est déterminée selon les règles applicables pour la détermination de l'impôt sur les sociétés lorsque ces droits sont inscrits à l'actif d'une personne morale passible de l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun.

Dans ces conditions, les dispositions du nouvel article 212 ont vocation à s'appliquer pour déterminer la part de résultat dont est attributaire chaque associé soumis à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun.

Pour plus de précisions sur l'application des dispositions de l'article 212 à ces sociétés et groupements, cf. n os 140 et suivants.


CHAPITRE 2 :

SOMMES ET INTERETS SOUMIS AUX LIMITATIONS DE L'ARTICLE 212 DU CGI


5.Les dispositions de l'article 212 s'appliquent aux intérêts rémunérant toutes les sommes mises ou laissées à disposition d'une entreprise par une entreprise qui lui est liée directement ou indirectement au sens du 12 de l'article 39.

6.Par commodité, l'emploi dans la présente instruction des expressions « avances » et « entreprise liée » sans autre précision renverra respectivement à l'ensemble des sommes définies aux points n os7 à 14 , et à l'existence d'un lien de dépendance, tel que défini aux points n os16 et suivants.


Section 1 :

Sommes laissées ou mises à disposition par des entreprises liées



Sous-section 1 :

Nature des sommes



  A. PRINCIPE


7.Par sommes laissées ou mises à la disposition de l'entreprise par des entreprises liées, il convient d'entendre pour l'application de l'article 212, non pas les seuls apports de fonds consentis par les sociétés liées mais, plus généralement, le montant de toute créance sur l'entreprise rémunérée par des intérêts ou assimilés.

Par conséquent, les précisions apportées par la documentation administrative 4 C 551 en date du 30 octobre 1997 sur la nature des sommes visées par les dispositions de l'article 212 demeurent applicables sous réserve que le prêteur soit une entreprise liée au sens du 12 de l'article 39 (cf. sous-section 2).


  B. CAS PARTICULIERS



  I. Situation des instruments financiers hybrides


8.Sont qualifiés de titres hybrides les instruments financiers dont les caractéristiques combinent à la fois certaines particularités des capitaux propres, telles que l'absence de date de remboursement prédéfinie ou la faculté pour l'émetteur de suspendre leur rémunération en l'absence ou en cas d'insuffisance de bénéfice, avec des caractéristiques propres aux dettes, telles que le versement d'une rémunération à un taux fixe ou variable prédéfini dès l'émission, l'absence de droits de vote et de droit au boni de liquidation.

9.Pour l'application des dispositions du nouvel article 212, il convient, lorsque l'analyse au cas par cas des caractéristiques du titre permet de conclure à la déductibilité des intérêts dus dans les conditions de droit commun, c'est-à-dire à leur assimilation fiscale à des dettes, de considérer que les sommes ainsi mises à disposition sont susceptibles d'entrer dans le champ du dispositif de sous-capitalisation chaque fois que l'entreprise qui les détient est liée directement ou indirectement à leur émetteur.


  II. Financement par le biais d'un fonds commun de placement


10.Il est rappelé qu'en application des dispositions de l'article L. 214-20 du code monétaire et financier, le fonds commun de placement, qui n'a pas la personnalité morale, est une copropriété d'instruments financiers et de dépôts dont les parts sont émises et rachetées à la demande des porteurs à la valeur liquidative majorée ou minorée selon le cas des frais et commissions. En outre, ce statut juridique s'accompagne d'un régime fiscal particulier, notamment en matière d'imposition des revenus (cf. documentation administrative 4 K 1712 en date du 1 er novembre 1995).

Ce statut juridique et fiscal aboutit à faire du fonds commun de placement un groupement de personnes qui, bien que non doté de la personnalité morale, n'en constitue pas moins, au point de vue fiscal, une véritable entité. Dans ces conditions, les sommes mises à disposition d'une société par un fonds commun de placement seront soumises aux dispositions de l'article 212 sous réserve que ce fonds soit lié directement ou indirectement au sens du 12 de l'article 39 avec cette société.


  C. EXCLUSIONS


11.Sont écartées du dispositif de l'article 212, les avances :

- accordées par des entreprises liées fournisseurs ou clients dans le cadre de relations commerciales normales ;

- consenties par des établissements de crédit à des sociétés liées dans des conditions identiques à celles accordées à leurs autres clients ;

- non rémunérées accordées à des sociétés relevant de l'article 8.


  I. Les prêts et avances accordés par des entreprises liées fournisseurs ou clients dans le cadre de relations commerciales normales


12.La doctrine mentionnée au point n° 9 de la documentation administrative 4 C 551 en date 30 octobre 1997 est reconduite dans les mêmes conditions pour l'application des nouvelles dispositions de l'article 212 aux créances de nature commerciale détenues par des entreprises liées (cf. sous-section 2, sur la définition de la qualité de prêteur).

Dès lors, les dispositions de l'article 212 ne sont pas applicables aux avances et intérêts versés dans le cadre de relations commerciales lorsque les sommes avancées à l'entreprise correspondent à des modalités de règlement d'opérations purement ou essentiellement commerciales dans lesquelles les entreprises liées interviennent à titre de clients ou de fournisseurs ordinaires de l'entreprise, c'est-à-dire de la même manière que les autres clients ou fournisseurs avec qui cette entreprise traite habituellement.

Ainsi, ces dispositions sont subordonnées au respect des deux conditions posées au n° 9 de la documentation administrative 4 C 551 , à savoir :

- l'acompte versé par l'entreprise liée cliente ou le crédit consenti par l'entreprise liée fournisseur doit être purement ou essentiellement commercial et conforme aux usages de la profession ; les intérêts doivent être alloués aux entreprises liées clientes ou fournisseurs dans les mêmes conditions qu'aux clients et fournisseurs ordinaires de l'entreprise 1  ; leur versement doit être stipulé dans le contrat qui constate la commande, la livraison ou l'octroi du crédit et qui génère la créance commerciale de l'entreprise liée à l'égard de la société ;

- les intérêts et dettes commerciales doivent être enregistrées distinctement en comptabilité.


  II. Les prêts consentis par des établissements de crédit à des sociétés liées


13.Les limitations du nouvel article 212 ne sont pas applicables aux intérêts dus par une entreprise en rémunération des prêts qui lui sont accordés par un établissement de crédit lié, sous réserve que :

- d'une part, le montant des sommes prêtées à l'entreprise liée n'excède pas celui qui aurait été prêté à une entreprise tierce exerçant la même activité industrielle ou commerciale compte tenu notamment de ses capacités de remboursement ;

- d'autre part, que le taux de rémunération de ces sommes ne dépasse pas celui effectivement appliqué par l'établissement de crédit à l'ensemble de sa clientèle d'entreprises non liées pour des crédits de même nature.

Cette mesure s'applique aux établissements de crédit au sens de l'article L. 511-9 du code monétaire et financier (cf. pour plus de précisions n os38 et 39 ). Il est rappelé que ces dispositions s'appliquent également aux établissements de crédit associés, n'ayant pas la qualité d'entreprises liées, pour la détermination du taux d'intérêt plafond prévu au 3° du 1 de l'article 39.

Cette mesure s'applique enfin, dans les mêmes conditions, aux établissements de crédit liés lorsqu'ils sont agréés dans un Etat de l'espace économique européen ayant signé avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale, sous réserve que l'entreprise bénéficiaire des sommes justifie de son agrément en qualité d'établissement de crédit.


  III. Les avances non rémunérées accordées à des sociétés relevant de l'article 8


14.Il est rappelé que constitue un acte anormal de gestion le fait pour une entreprise de consentir des avances sans intérêts à un tiers, y compris s'il s'agit d'une filiale, sans aucune contrepartie. Toutefois, il résulte de la jurisprudence (Cf. arrêt de la CAA de Douai en date du 12 décembre 2006 n° 00-583, 2e ch., SA Slevmi) que lorsqu'une société mère accorde des avances sans intérêts à une de ses filiales relevant du régime des sociétés de personnes prévu à l'article 8, l'avantage résultant de la renonciation à percevoir des intérêts n'a aucun effet fiscal à hauteur du pourcentage de capital détenu par celle-ci, dès lors que cet avantage est imposable chez la société mère en application des dispositions de l'article 238 bis K, et n'est par conséquent imposable que dans la mesure où il profite également aux autres associés de la filiale.

S'inspirant de cette jurisprudence, il sera admis pour l'application des dispositions de l'article 212 que les avances accordées par les associés d'une entreprise relevant du régime de l'article 8 ne donnent pas lieu à rémunération :

- si chaque associé a apporté, tout au long de l'exercice de la société relevant de l'article 8, un montant d'avances non rémunérées à proportion de ses droits dans la société : cette condition sera considérée comme remplie dès lors que les associés ayant accordé des avances non rémunérées à proportion de leurs droits représentent au moins 99 % du capital de cette société ;

- et si les avances ainsi accordées ne sont pas à nouveau mises à disposition par cette société à une autre entreprise qui lui est liée au sens du 12 de l'article 39.

Il est précisé que, conformément au point n° 91 , ces avances sont maintenues dans la composante dettes pour le calcul du ratio d'endettement global de l'entreprise.