SECTION 5 PROVISIONS DE PROPRE ASSUREUR
SECTION 5
Provisions de propre assureur
A. PRINCIPES
1 Les provisions de propre assurance ne répondent pas aux conditions visées à l'article 39-1-5° du CGI dès lors que les risques qu'elles ont pour objet de couvrir sont purement éventuels et ne présentent, à la clôture de chaque exercice, aucun caractère de probabilité.
Les montants déduits en vue de la couverture du risque de propre assurance restent à la disposition de l'entreprise sous un compte spécial de sa comptabilité générale. Elles constituent, en fait, un simple emploi de bénéfices normalement imposables.
2 En conséquence, il convient de refuser aux entreprises la possibilité de constituer, en franchise d'impôt, des provisions de propre assureur.
C'est ainsi qu'un entrepreneur de travaux publics tenu à une obligation de garantie ne saurait être autorisé à constituer du chef de cette obligation une provision d'auto-assurance (cf. également sur ce point 4 E 2112 ). Il convient d'observer, à cet égard, que l'entrepreneur a la faculté de se prémunir contre les risques particuliers de sa profession en souscrivant une police d'assurance appropriée. Au surplus, il a été admis, en cas de cessation d'activité, que le montant des primes d'assurances annuelles concernant la garantie des travaux antérieurs, qui viendraient à échéance postérieurement à la date de la cessation, puisse être déduit des résultats (comptable et fiscal) du dernier exercice à titre de charges à payer.
B. ÉVOLUTION DE LA JURISPRUDENCE
3Jusqu'en 1956, la jurisprudence administrative a, sous certaines conditions, autorisé les entreprises à déduire chaque année de leur résultat fiscal les sommes affectées à la couverture des risques pour lesquels elles se constituaient leur propre assureur. Entre autres conditions, il importait notamment que les risques ainsi couverts fissent l'objet d'assurances d'usage courant dans le commerce et l'industrie. Le montant de la provision ne pouvait, par ailleurs, excéder les primes couramment pratiquées par les compagnies d'assurances pour la couverture des risques de cette nature.
4Mais, par deux arrêts du 9 avril 1956, le Conseil d'État a refusé d'admettre la constitution en franchise fiscale des provisions de cette nature (n° 34376, RO, p. 69, en ce qui concerne la charge susceptible de résulter pour un employeur de sa responsabilité civile en cas d'accidents du travail survenus à son personnel ; n° 25244, RO, p. 71, en ce qui concerne le risque de non-recouvrement des créances).
L'administration s'est ralliée à cette position par une décision ministérielle du 16 juillet 1957.
La Haute Assemblée a ultérieurement confirmé cette jurisprudence. Il a ainsi été jugé que les provisions constituées en vue de faire face :
- à un risque d'incendie (CE, arrêt du 20 janvier 1958, n° 36573, RO p. 23) ;
- à un risque d'inondation (CE, arrêt du 22 novembre 1961, n° 49178, 8e s.-s.) ;
- à un risque de vol (CE, arrêt du 25 octobre 1961, n° 43472, 8e s.-s., RO p. 443), ne sauraient être admises en déduction du résultat fiscal même si elles n'excèdent pas le montant des primes exigibles par une compagnie pratiquant l'assurance contre le même risque, car les pertes que ces provisions se proposent de couvrir ne peuvent, à la clôture de l'exercice, ni être regardées comme probables, ni être évaluées avec une approximation suffisante).
5 Remarque : Cette jurisprudence s'applique également dans l'hypothèse d'une provision de propre assureur constituée en vue de faire face aux risques encourus du fait du caractère insuffisant de la couverture des polices souscrites (CE, arrêt du 30 mai 1973, n° 86093, 7e et 9e s.-s.).
C. SORT DES PROVISIONS DE PROPRE ASSUREUR ADMISES EN DÉDUCTION AVANT LA DATE D'EFFET DE LA DÉCISION MINISTÉRIELLE DU 16 JUILLET 1957
6Le sort des provisions de propre assureur constituées avant le 1er janvier 1957 est réglé de façon différente selon que l'entreprise est demeurée son propre assureur ou a souscrit une assurance pour couvrir le risque qui avait donné lieu à la constitution d'une provision de cette nature.
7 Dans le premier cas, les provisions antérieurement constituées peuvent être maintenues au passif du bilan. Mais, en cas de réalisation du risque qu'elles étaient destinées à couvrir, les pertes ou charges en résultant doivent être imputées sur les provisions en cause jusqu'à complète utilisation de ces dernières. Bien entendu, ces provisions doivent être rapportées par le service au résultat fiscal dans la mesure où elles seraient détournées de leur objet, de même que si elles venaient à excéder le montant des risques dont l'entreprise conserve la charge.
8 Précisions : Si les provisions de propre assureur régulièrement constituées par une entreprise d'armement naval, au cours d'exercices arrêtés antérieurement au 1er janvier 1957, pour faire face aux risques de perte de ses navires peuvent être maintenues en franchise d'impôt au passif du bilan dans la mesure où elles ne viennent pas à excéder le montant des risques en cause dont l'entreprise conserve la charge, il n'y a pas lieu de distinguer suivant que ces risques correspondent aux navires mêmes ayant donné lieu à la constitution des provisions ou à de nouveaux navires. Par ailleurs, le montant des risques considérés doit, à la clôture de chaque exercice, être réputé égal à la différence entre la valeur de remplacement des éléments, appréciés à la date de clôture de l'exercice, et les amortissements déjà pratiqués en franchise d'impôt à raison de ces éléments.
Dans le second cas, les provisions constituées deviennent sans objet et doivent être rapportées aux résultats (comptable et fiscal) de l'exercice en cours à la date d'entrée en vigueur de la police d'assurances. Elles peuvent toutefois, lorsque la police d'assurances souscrite comporte une franchise, être maintenues à due concurrence au passif du bilan.
D. EXCEPTIONS
9L'interdiction de constituer en franchise d'impôt des provisions de propre assureur comporte des exceptions d'origine législative concernant les provisions pour risques afférents à des opérations de crédit. Ces dispositions visent, d'une part, les banques et établissements de crédit effectuant des opérations de crédit à moyen et à long terme, d'autre part, les entreprises exportatrices consentant des crédits à moyen terme pour le règlement des ventes et des travaux qu'elles effectuent à l'étranger (cf. 4 E 551 ).