Date de début de publication du BOI : 30/10/1999
Identifiant juridique : 12C2233
Références du document :  12C2233

SOUS-SECTION 3 LA VENTE GLOBALE DU FONDS DE COMMERCE

SOUS-SECTION 3

La vente globale du fonds de commerce

1.Pour parvenir à la vente globale du fonds de commerce de leurs débiteurs, les comptables du Trésor et de la Direction générale des impôts ont alors le choix entre la procédure de droit commun prévue à l'article 15 de la loi du 17 mars 1909 et celle instituée par l'article L 268 du Livre des procédures fiscales.

  A. PROCEDURE PREVUE PAR LA LOI DU 17 MARS 1909

  I. Généralités

2.En raison des éléments qui le composent, le fonds de commerce ne peut faire l'objet en son ensemble, d'une saisie mobilière : en effet, une telle poursuite ne peut atteindre que les éléments corporels.

Il a donc paru opportun au législateur de prévoir des procédures de vente globale qui présentent l'avantage d'éviter le démembrement du fonds qui résulterait de la vente séparée des éléments corporels. La loi du 17 mars 1909 a institué différents cas de vente forcée du fonds de commerce.

3.Les règles sur l'exécution forcée sont contenues dans les articles 15 à 21 de la loi.

  II. Vente globale sur conversion de saisie-vente

4.La vente sur conversion peut être poursuivie soit par la créancier saisissant ou le débiteur (art. 15), soit par les créanciers inscrits sur le fonds (art. 20).

1. Vente à la requête du créancier saisissant ou du débiteur saisi (art. 15).

5.Tout créancier, y compris le Trésor, qui exerce des poursuites de saisie-vente et le débiteur contre lequel elles sont exercées peuvent demander, devant le tribunal de commerce dans le ressort duquel s'exploite ce fonds, la vente du fonds du saisi, avec le matériel et les marchandises qui en dépendent.

a. Conditions d'exercice.

6.La demande en justice, qu'elle soit formée par le créancier ou par le débiteur, suppose l'existence préalable d'une saisie-vente ou d'un procès-verbal de vérification (art. 113 du décret du 31 juillet 1992).

7.La loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution n'a pas modifié les dispositions de l'article 15 de la loi du 17 mars 1909 relative à la vente et au nantissement du fonds de commerce.

8.Par conséquent, il y a lieu de considérer qu'un receveur exerçant des poursuites par voie de saisie-vente peut faire procéder à la vente globale du fonds de commerce appartenant à son débiteur et lui refuser, le cas échéant, l'autorisation de vendre les biens saisis à l'amiable (art. 52 de la loi du 9 juillet 1991).

9.La saisie doit porter sur des biens mobiliers dépendant du fonds. La mise sous la main de la justice des seuls meubles personnels du commerçant ne permettrait ni au créancier ni au débiteur de poursuivre la vente globale du fonds en vertu de la loi du 17 mars 1909 (Cour de PARIS, 21 février 1970, Mémorial des percepteurs 1970, p. 54).

10.La loi du 17 mars 1909 n'ayant imparti aucun délai pour demander la vente en bloc, celle-ci peut être requise devant le tribunal de commerce tant que les objets saisis ne sont pas vendus ou tant que les poursuites individuelles peuvent être exercées contre le débiteur.

b. Engagement de l'instance.

11.La procédure de vente globale est engagée par voie d'assignation devant le tribunal de commerce dans le ressort duquel le fonds est exploité. En cette matière, la compétence territoriale est une compétence exclusive, d'ordre public.

1° Vente demandée par le créancier.

12.L'article 15 (2e et 3e al.) de la loi du 17 mars 1909 précise :

« Sur la demande du créancier poursuivant, le tribunal de commerce ordonne qu'à défaut de paiement dans le délai imparti au débiteur, la vente du fonds aura lieu à la requête dudit créancier, après l'accomplissement des formalités prescrites par l'article 17 de la présente loi.

Il en sera de même si, sur l'instance introduite par le débiteur, le créancier demande à poursuivre la vente du fonds ».

13.Ce texte appelle les observations suivantes en ce qui concerne les pouvoirs du tribunal qui se trouve saisi d'une demande en vente globale en vertu de l'article 15, 2ème et Sème alinéas, dans l'hypothèse notamment où l'administration est partie à l'instance :

* Appréciation du bien-fondé de la demande.

14.Selon la jurisprudence dominante, la conversion de la saisie en vente globale est facultative, le tribunal ayant le pouvoir d'apprécier si la demande présente réellement un avantage pour les créanciers ou le débiteur (Cour de PARIS 21 novembre 1961, DH 1962, somm. 30).

* Délais pour parvenir à la vente.

15.La loi du 17 mars 1909 ne prévoit pas que le tribunal ordonnant la vente forcée fixe un délai dans lequel la vente aura lieu.

Toutefois, la Cour de cassation a décidé que le silence de la loi n'a pas pour effet de priver le juge de la faculté d'impartir, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, un délai pour la réalisation de la vente (Cass. civ. 2 novembre 1955, Bull. civ. II n° 481 p. 297 ; Com. 18 mars 1975, D. somm. 79).

Ce délai est indépendant du délai de grâce visé à l'article 1244-1 du Code civil.

* Délais de paiement.

16.Les tribunaux de l'ordre judiciaire ne peuvent mettre obstacle aux poursuites en recouvrement exercées par le Trésor. Dès lors, le tribunal de commerce, qui ordonnerait la vente globale à la requête de l'administration, sur sa demande principale ou reconventionnelle, cette dernière faisant suite à une assignation formée par le débiteur ou un autre créancier, ne peut accorder au redevable des délais de grâce au sens de l'article 1244-1 du Code civil (Cour de LYON 8 octobre 1955, Mémorial des percepteurs 1956, p. 48 ; Cour d'AIX 5 décembre 1963, Mémorial des percepteurs 1964, p. 51).

Il doit en être de même lorsque la vente est prononcée à la requête d'un autre créancier. En effet, si le juge accordait au débiteur, pour le paiement des dettes autres que les dettes fiscales, un délai de grâce avant l'expiration duquel le créancier ne pouvait poursuivre la vente, le tribunal contreviendrait indirectement à l'interdiction qui lui est faite de s'immiscer dans le recouvrement de l'impôt.

* Ouverture d'une procédure collective en cours d'instance.

17.Il résulte des dispositions de l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985, que le jugement d'ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire arrête ou interdit toute voie d'exécution sur les meubles de la part des créanciers dont la créance a son origine antérieurement à ce jugement.

Dès lors, l'action en vente globale du fonds de commerce ne peut plus être poursuivie.

En outre, le jugement de liquidation entraîne le dessaisissement du débiteur qui ne peut plus poursuivre l'instance. Les droits et actions ne peuvent être exercés, pendant toute la durée de la liquidation, que par le liquidateur (art. 152 de la loi du 25 janvier 1985).

2° Vente demandée parle débiteur.

18.Si, sur l'instance introduite par le débiteur, le créancier ne demande pas à poursuivre la vente, le tribunal statue en vertu de l'article 15, 4ème alinéa, de la loi du 17 mars 1909.

Cet article prévoit que la juridiction consulaire fixe le délai dans lequel la vente du fonds devra avoir lieu à la requête du débiteur, suivant les formalités édictées par l'article 17, et il ordonne que, faute par le débiteur d'avoir fait procéder à la vente dans ce délai, les poursuites de saisie-vente seront reprises et continuées sur les derniers errements.

Le 4ème alinéa de l'article 15 fait obligation au tribunal de commerce d'imposer au débiteur un délai à l'expiration duquel le créancier pourra, à défaut de vente du fonds, reprendre ses poursuites de saisie mobilière.

19.Par conséquent, les poursuites sur les biens figurant au procès-verbal de saisie, dont la conversion est requise par le débiteur, sont momentanément interrompues.

20.Mais rien n'empêche le créancier saisissant, sans attendre l'issue de l'instance en vente globale du fonds de commerce, de poursuivre le débiteur sur ses autres biens ou même de l'assigner en redressement ou liquidation judiciaire.

21.La demande reconventionnelle, prévue à l'article 15, Sème alinéa, peut être utile lorsque l'instance introduite par le débiteur constitue une manoeuvre dilatoire.

22.Bien qu'en théorie toute demande portée devant un tribunal de commerce doive faire l'objet d'une assignation, il est admis par la jurisprudence que la demande reconventionnelle puisse être valablement formée par voie de simples conclusions.

23.Une copie de ces conclusions doit, avant le dépôt au greffe, être notifiée à la partie adverse dans les formes prévues, soit par les articles 753, 814 à 816 du nouveau code de procédure civile si la partie adverse est représentée par un avocat, soit, dans le cas contraire, par celles prescrites par l'article 651 du même code, remarque étant faite que, dans ce dernier cas, la notification des conclusions reconventionnelles peut également être effectuée par acte d'huissier.

Cela étant, il paraît préférable dans cette situation de recourir à la procédure spécifique prévue par l'article L 268 (cf. infra n°s 73 et s. ) et donc de demander le dessaisissement de la juridiction consulaire au profit du président du tribunal de grande instance (cf. infra n°s 78 et s. ).

2. Vente globale à la demande d'un créancier inscrit qui entend s'opposer au démembrement du fonds (art. 20).

a. Notification de la saisie aux créanciers inscrits.

24.L'article 20 de la loi du 17 mars 1909 a pour but de protéger les créanciers inscrits contre le démembrement du fonds.

25.Cette protection est assurée par la notification de la vente mobilière, faite dix jours au moins avant sa date, aux créanciers qui se seront inscrits quinze jours au moins avant cette notification. Celle-ci consiste en la dénonciation du procès-verbal de saisie au domicile élu dans les inscriptions.

26.Il convient donc de s'assurer, avant de faire procéder à la vente séparée des éléments corporels du fonds de commerce, que l'huissier chargé d'instrumenter a bien procédé à toutes les notifications prescrites.

27.Le défaut de notification peut entraîner la condamnation du créancier poursuivant la vente séparée au paiement de dommages-intérêts, si les créanciers inscrits prouvent qu'ils ont subi un préjudice.

b. Exercice de l'action à la diligence du créancier inscrit.

28.Pendant le délai de dix jours susvisé, prévu à peine de déchéance, les créanciers inscrits ont la faculté d'assigner le créancier poursuivant et le propriétaire du fonds devant le tribunal de commerce pour demander la vente globale. La procédure est celle fixée par les articles 15 et suivants de la loi du 17 mars 1909.

L'administration considère que cette possibilité est ouverte aux comptables des impôts qui ont procédé à la publicité du privilège du Trésor auprès du greffe du tribunal compétent.

  III. Autres cas de vente globale prévue par la loi du 17 mars 1909

29.L'article 16 de la loi du 17 mars 1909 permet au créancier nanti sur le fonds, ce qui est exceptionnellement le cas du comptable des impôts, de poursuivre la vente globale huit jours après sommation de payer faite au débiteur ou au tiers détenteur du fonds et demeurée infructueuse.

30.L'article 18 précise enfin que le tribunal, saisi d'une demande en paiement d'une créance se rattachant à l'exploitation du fonds, peut ordonner la vente du fonds à la requête du créancier qui en fait la demande.

  IV. Le jugement

1. Enonciations principales.

31.En vertu des dispositions de l'article 15, 5ème, 6ème, 7ème et 8ème alinéas, qui sont applicables à tous les cas de réalisation forcée du fonds de commerce exposés ci-dessus, le dispositif du jugement ordonnant la vente nomme, s'il y a lieu, un administrateur provisoire, fixe les mises à prix, détermine les conditions principales de la vente, commet pour y procéder l'officier public qui dresse le cahier des charges, éventuellement règle la publicité extraordinaire et autorise, s'il y a pas d'autres créanciers inscrits ou opposants, le créancier poursuivant à toucher le prix.

a. Nomination d'un administrateur provisoire.

32.Le tribunal a la faculté de désigner un administrateur provisoire dont le rôle est de prendre toutes mesures conservatoires, notamment pour prévenir des détournements et assurer la gestion du fonds. Cette nomination est facultative.

33.Il ne peut aliéner le fonds ou le donner en nantissement. En effet, l'administrateur provisoire ne peut se livrer à aucun acte de disposition. Toutefois, il lui est reconnu le droit de vendre des marchandises dans la mesure strictement nécessaire à l'exploitation normale de l'établissement.

34.L'administrateur provisoire a droit à une indemnité. L'article 22 du décret du 28 août 1909 a prévu que les frais et indemnités qui lui sont dus sont taxés par le président du tribunal de commerce.

b. Fixation de mises à prix.

35.Selon l'article 15, 5 ème alinéa, le tribunal fixe également les mises à prix des éléments corporels et incorporels. Compte tenu des termes du texte, des mises à prix distinctes devraient être fixées pour les éléments incorporels, le matériel et les marchandises.

36.Dans la pratique, la mise à prix ne vise que les éléments incorporels, le matériel et le mobilier devant être repris par l'acquéreur à dire d'experts, c'est-à-dire après une expertise amiable ou judiciaire. En outre, le jugement prévoit, généralement, que la mise à prix pourra immédiatement et indéfiniment être baissée à défaut d'enchérisseur.