Date de début de publication du BOI : 07/06/1999
Identifiant juridique : 4B3521
Références du document :  4B352
4B3521

SECTION 2 EXONÉRATION TEMPORAIRE DES PLUS-VALUES CONSTATÉES EN CAS DE TRANSMISSION D'ENTREPRISE INDIVIDUELLE

SECTION 2

Exonération temporaire des plus-values constatées
en cas de transmission d'entreprise individuelle

1Aux termes de l'article 12-III de la loi de finances pour 1981, n° 80-1094 du 30 décembre 1980 - codifié à l'article 41-II du CGI- l'exonération temporaire des plus-values prévue en cas de continuation de l'exploitation dans le cadre familial cesse de s'appliquer, à compter du 1er avril 1981 :

- en cas d'apport en société, corrélativement à l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 151 octies du CGI (cf. ci-avant B 351 ) ;

- en cas de transmission d'entreprise individuelle à titre onéreux.

En revanche, et à compter de la même date, les dispositions de l'article 41-I sont étendues à toutes les transmissions à titre gratuit d'entreprise individuelle.

2Par ailleurs, l'article 151 nonies-II du CGI institue, à partir du 1er avril 1981, et sous certaines conditions, une exonération provisoire des plus-values constatées en cas de transmission à titre gratuit à une personne physique de droits ou parts d'une société dont les bénéfices sont, en application des articles 8 et 8 ter, soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels ou commerciaux (ou bénéfices agricoles réels et bénéfices non commerciaux).

3Seront donc successivement étudiés :

- d'une part, le régime applicable jusqu'au 31 mars 1981 en cas de continuation de l'exploitation dans le cadre familial (s.-s. 1) ;

- d'autre part, le régime actuellement en vigueur en cas de transmission à titre gratuit d'entreprise individuelle (s.-s. 2).

SOUS-SECTION 1

Continuation de l'exploitation dans le cadre familial

(Régime applicable jusqu'au 31 mars 1981)

  A. CONDITIONS D'APPLICATION DE L'ARTICLE 41-I

1Le bénéfice de l'article 41-I est subordonné, aux termes mêmes de cette disposition, à deux conditions :

- en premier lieu, l'exploitation doit être continuée, soit par un ou plusieurs héritiers ou successibles en ligne directe ou par le conjoint survivant, soit par une société en nom collectif, en commandite simple ou à responsabilité limitée constituée exclusivement, soit entre lesdits héritiers ou successibles en ligne directe, soit entre eux et le conjoint survivant ou le précédent exploitant ;

- en second lieu, les nouveaux exploitants ne doivent apporter aucune augmentation aux évaluations des éléments d'actif figurant au dernier bilan dressé par l'ancien exploitant, sous réserve, toutefois, de modalités particulières en cas de constitution d'une société à responsabilité limitée.

2On notera que le 2° du deuxième alinéa de l'article 41-I subordonne en outre le bénéfice de sursis d'imposition des plus-values à l'inscription, au passif du bilan des nouveaux exploitants, en contrepartie des éléments d'actif pris en charge, des provisions pour renouvellement de l'outillage et du matériel égales à celles figurant dans les écritures du précédent exploitant.

Cette condition ne comporte plus de portée actuelle dès lors que le régime spécial d'application de ces provisions a été supprimé par l'article 76 de l'ordonnance du 15 août 1945.

3Les développements consacrés aux dispositions de l'article 41-I seront donc limités à un commentaire des deux premières conditions relatives :

- à la continuation de l'exploitation dans le cadre familial ;

- à la non-augmentation des évaluations des éléments d'actif.

  I. Continuation de l'exploitation dans le cadre de la famille de l'ancien exploitant

4Le changement d'exploitant effectué dans le cadre familial conformément aux dispositions de l'article 41-I du CGI intervient, soit à la suite du décès du précédent exploitant, soit du vivant de ce dernier.

5L'entreprise peut, d'autre part, être continuée, soit sous la forme individuelle, soit sous la forme d'une société de famille.

6Dans ce dernier cas, ladite société doit répondre à certaines conditions, en ce qui concerne notamment sa forme, sa composition et son fonctionnement.

7Mais, en tout état de cause, les nouveaux exploitants doivent obligatoirement poursuivre l'exploitation dans les mêmes conditions que le précédent exploitant (cf. sur ce point, ci-dessous, n°s 109 à 115 ).

8On examinera :

- d'une part, la notion de changement d'exploitant dans le cadre familial en distinguant selon que la cession ou cessation d'entreprise résulte ou non du décès du précédent exploitant ;

- d'autre part, les dispositions relatives à la constitution de sociétés de famille avec ou sans la participation de l'ancien exploitant.

1. Changement d'exploitant à la suite du décès du précédent exploitant.

9Lorsque le changement d'exploitant -ou la constitution d'une société de famille- résulte du décès du précédent exploitant, la première condition fixée pour bénéficier de l'exonération temporaire des plus-values constatées à cette occasion se trouve remplie si l'exploitation est continuée :

- soit par le conjoint seul ;

- soit par un seul héritier en ligne directe, lorsque le fonds lui a été attribué par testament ;

- soit par plusieurs héritiers en ligne directe restés dans l'indivision ;

- soit par le conjoint survivant et un ou plusieurs héritiers en ligne directe restés dans l'indivision ;

- soit, enfin, par une société en nom collectif, en commandite simple ou à responsabilité limitée constituée exclusivement entre lesdits héritiers ou entre eux et le conjoint survivant.

La condition ainsi posée n'est pas remplie dans le cas où l'exploitation est continuée par une concubine légataire de l'entreprise dans laquelle elle était salariée (RM Frédéric-Dupont, débats JO, AN du 27 décembre 1982, p. 5331, n° 20180).

10La condition susvisée continue à être remplie dans le cas de cession de parts d'indivision entre les intéressés (conjoint et héritiers directs) et, notamment, lorsque l'un des héritiers directs a racheté les parts des autres cohéritiers. Par contre, elle cesserait de l'être en cas de cession de ces droits à un tiers ; en ce cas, la totalité de la plus-value et des provisions devenant imposables serait à rattacher aux bénéfices de l'exercice de la cession.

11En cas de partage de la succession, l'exonération temporaire est maintenue, mais à la condition que le ou les héritiers en ligne directe ou le conjoint survivant attributaires du fonds continuent l'exploitation et, bien entendu, respectent les conditions prévues à l'article 41-I du CGI (cf. ci-dessous n°s 55 et suiv. ).

12La même règle s'applique dans le cas où les héritiers en ligne directe et le conjoint survivant constituent exclusivement entre eux une société en nom collectif, en commandite simple ou à responsabilité limitée, à condition, également, que les évaluations des éléments d'actif existant au décès du précédent exploitant ne soient pas augmentées à cette occasion. En pareille hypothèse, d'ailleurs, la règle doit trouver son application, que le partage ait été ou non effectué préalablement à la constitution de la société.

Par application de ce principe l'exonération temporaire demeure notamment acquise :

- lorsqu'en l'absence de partage, certains des cohéritiers directs ayant racheté les parts d'indivision des autres constituent entre eux une société en nom collectif, en commandite simple ou à responsabilité limitée ;

- lorsque, après le partage, les attributaires du fonds constituent entre eux une telle société.

13 Remarque. - En cas de maintien de l'indivision ou de création d'une société de famille, la participation active à l'exploitation de tous les héritiers en ligne directe ou du conjoint survivant n'est pas indispensable.

Il suffit que l'exploitation ou la gestion du fonds soit continuée par l'un ou plusieurs d'entre eux pour le compte de l'indivision ou de la société.

2. Changement d'exploitant réalisé du vivant même du précédent exploitant.

14Lorsque le changement d'exploitant -ou la constitution d'une société de famille- est réalisé du vivant même de l'ancien exploitant, la première condition requise pour bénéficier de l'exonération temporaire des plus-values constatées à cette occasion est remplie, si l'exploitation est continuée :

- soit par un seul successible en ligne directe ;

- soit par plusieurs successibles en ligne directe restés dans l'indivision ou qui constituent exclusivement entre eux une société en nom collectif, en commandite simple ou à responsabilité limitée ;

- soit, enfin, par le précédent exploitant et un ou plusieurs successibles en ligne directe qui constituent exclusivement entre eux une société en nom collectif, en commandite simple ou à responsabilité limitée.

a. Constitution d'une société de famille.

15Il résulte de ce qui précède que l'ancien exploitant peut, à son gré, continuer ou non à participer à l'exploitation de l'entreprise dans le cadre d'une société de famille. Rien ne s'oppose d'ailleurs à ce qu'il soit le gérant de la société de famille ainsi constituée.

16À cet égard, lorsque l'exploitation est poursuivie ou reprise sous la forme d'une société de famille, il convient de considérer comme constituant des « successibles en ligne directe », aussi bien les ascendants que les descendants, quel que soit le degré de parenté des intéressés dans cette ligne et sans qu'il y ait lieu de rechercher si les successibles ainsi associés au précédent exploitant sont ou non les héritiers directs de ce dernier.

17En d'autres termes, un exploitant peut toujours, par exemple, apporter son entreprise, sous le bénéfice des dispositions de l'article 41-I à une société de famille constituée entre lui-même et ses père et mère, dès lors que ces derniers sont, soit des héritiers présomptifs s'il n'existe pas de descendants légitimes ou adoptifs, soit des successibles en ligne directe dans le cas contraire.

b. Transmission de l'exploitation.

18À défaut d'apport de son fonds à une société de famille, un exploitant peut également, sous le bénéfice de l'article 41-I, transmettre ce fonds à ses successibles en ligne directe, soit à titre onéreux (vente, etc.), soit à titre gratuit (donation, partage d'ascendant, etc.).

19Dans ce cas, l'exploitant cédant ne doit garder aucun intérêt dans l'exploitation du fonds. En particulier la transmission d'un fonds de commerce -quelle soit effectuée à titre gratuit ou à titre onéréux-ne peut en aucun cas être assortie d'une réserve d'usufruit.

C'est ainsi qu'en cas de donation faite par un exploitant à son fils de la nue-propriété de son fonds de commerce et dès lors que le père poursuit l'exploitation, ladite donation ne saurait être regardée comme s'analysant en une cession d'entreprise suivie d'une location gratuite consentie au donateur par le donataire. Par suite, le donateur ne peut se prévaloir du bénéfice des dispositions de l'article 41-I dont l'application est strictement subordonnée à la cession ou à la cessation de son entreprise. La plus-value éventuellement dégagée à cette occasion est donc immédiatement imposable entre les mains du donateur.

De même le bénéfice des dispositions de l'article 41-I qui ont pour objet de permettre à l'exploitant d'organiser sa succession étant subordonné à la transmission de son entreprise, la cession par un contribuable de tout ou partie des parts qu'il détient dans une société en nom collectif ne peut être assimilée à une cession de son exploitation pour l'application de l'article 41-I. Par suite, la plus-value en résultant ne peut bénéficier de l'exonération temporaire prévue par cet article même si la cession est réalisée au profit d'héritiers ou successibles en ligne directe (RM Brochard, déb. AN du 9 mars 1981, p. 972, n° 33910) 1 .

20Par ailleurs, rien ne s'oppose, lorsque l'exploitant possède plusieurs établissements, à ce que la cession soit limitée à certains d'entre eux ou à ce que chaque établissement fasse l'objet d'une cession distincte.

En tout état de cause l'exploitant a le droit de conserver certains biens pour les faire entrer dans son patrimoine privé, mais les plus-values et provisions afférentes auxdits bien doivent être maintenues dans les bénéfices immédiatement imposables. De même, en cas de donation-partage d'un fonds de commerce, l'exonération temporaire des plus-values constatées à cette occasion doit être limitée à celles afférentes aux éléments d'actif dont la propriété a été effectivement attribuée au nouvel exploitant dudit fonds.

21Bien entendu, la cession ou donation doit être consentie au profit des successibles en ligne directe de l'exploitant, c'est-à-dire des enfants de ce dernier ou, à défaut, de ses ascendants.

22Il est en outre admis qu'un exploitant peut, sous le bénéfice des dispositions de l'article 41-I, céder ou donner son entreprise à son gendre ou à sa belle-fille lorsque la cession ou la donation est consentie du vivant de sa fille ou de son fils et que le fonds constitue un bien de communauté. Mais, bien entendu, les plus-values bénéficiant du sursis de taxation deviennent imposables lorsque les conditions prévues par l'article 41-I ne sont plus remplies. Tel est le cas, lorsqu'à la suite de son divorce, le gendre ne peut plus être considéré comme un héritier ou successible en ligne directe au sens de cet article (RM Benoît, déb. AN du 12 mai 1980, p. 1913 et 1914, n° 26700).

3. Dispositions particulières relatives à la constitution d'une société de famille.

a. Conditions de forme.

23Les sociétés de famille visées à l'article 41-I du CGI doivent être exclusivement constituées sous la forme de sociétés en nom collectif, en commandite simple ou à responsabilité limitée.

24Elles ne peuvent donc, en aucun cas, revêtir la forme de sociétés anonymes ou en commandite par actions.

25En revanche, aucun délai n'est imposé à l'ancien exploitant ou à ses ayants cause pour la constitution d'une société de famille entrant dans les prévisions de l'article 41-I.

Par suite, une telle société peut être valablement créée quelques années après le décès de l'ancien exploitant, si la société en cause est constituée, exclusivement, entre les héritiers et le conjoint survivant restés en indivision ou, après le partage, entre ceux qui poursuivent l'exploitation.

1   Sur la question de la transmission à titre gratuit à une personne physique de droits sociaux considérés comme des éléments de l'actif affectés à l'exercice de la profession cf. ci-après B 3522 n° 6 .