B.O.I. N° 34 du 23 FÉVRIER 2006
2. Contribuables concernés
33.La procédure amiable prévue par la convention européenne d'arbitrage s'applique aux « entreprises associées ». Celles-ci sont définies par l'article 4, paragraphe 1 de la convention comme soit deux entreprises de deux Etats contractants différents dont l'une participe, directement ou indirectement, à la direction, au contrôle ou au capital de la seconde 3 , soit comme deux entreprises de deux Etats contractants différents dont les mêmes personnes participent, directement ou indirectement, à la direction, au contrôle ou au capital.
34.Cette définition, qui est identique à celle qui est retenue dans les conventions fiscales bilatérales rédigées conformément au modèle de convention de l'OCDE dans son article 9, paragraphe 1 sur les entreprises associées, vise notamment les sociétés mères et leurs filiales d'Etats membres de l'Union européenne, ainsi que les sociétés membres de l'Union européenne placées sous un contrôle commun, ce dernier pouvant se situer hors de l'Union européenne.
35.La convention européenne d'arbitrage couvre en outre, selon son article 4, paragraphe 2, les relations entre le siège d'une entreprise située dans un Etat membre et son établissement stable situé dans un autre Etat membre. A cet égard, l'article 1 er de la convention stipule dans son paragraphe 2 qu'un établissement stable d'une entreprise d'un Etat contractant situé dans un autre Etat contractant est considéré comme une entreprise de l'Etat dans lequel il est situé.
36.Par ailleurs, selon une déclaration commune des Etats signataires de la convention européenne d'arbitrage du 23 juillet 1990 publiée au journal officiel des Communautés européennes (aujourd'hui journal officiel de l'Union européenne) le 20 août 1990 en même temps que la convention (cf. annexe 3), sont visées par le texte non seulement les transactions réalisées directement entre deux entreprises associées juridiquement distinctes mais aussi les transactions réalisées entre l'une des entreprises et l'établissement stable de l'autre entreprise situé dans un troisième Etat contractant.
37.Sont donc visées par la convention européenne d'arbitrage :
- les transactions entre le siège d'une entreprise d'un Etat membre de l'Union européenne et un établissement stable de cette entreprise situé dans un autre Etat membre, ou entre deux établissements stables situés dans deux Etats membres différents d'une même entreprise d'un Etat membre de l'Union européenne dont le siège est situé dans un troisième Etat membre ;
- les transactions entre une entreprise d'un Etat de l'Union européenne et l'établissement stable d'une autre entreprise associée d'un Etat membre de l'Union européenne située dans un troisième Etat membre.
38.En revanche, la convention ne couvre pas notamment :
- les transactions entre deux établissements stables situés respectivement dans deux Etats membres différents d'une même entreprise d'un Etat non membre de l'Union européenne ;
- les transactions entre une entreprise située dans un Etat membre de l'Union européenne et l'établissement stable situé dans un autre Etat membre de l'Union européenne d'une entreprise associée située dans un Etat non membre de l'Union européenne ;
- les transactions réalisées avec l'établissement stable situé dans un Etat non membre de l'Union européenne d'une entreprise située dans un Etat membre de l'Union européenne.
39.Par ailleurs, une personne morale considérée comme telle aux fins d'imposition peut demander l'ouverture de la procédure amiable même si l'imposition effective est établie au niveau de ses membres ou associés. Lorsque cet Etat est la France, une société de personnes, un groupement de personnes ou un groupement d'intérêts économiques sont habilités à demander l'ouverture d'une procédure amiable s'ils font l'objet d'une double imposition effective.
40.Toutefois, les membres ou associés de telles personnes ou groupements ont également la possibilité de demander l'ouverture d'une procédure amiable dans la mesure où leur participation dans celles-ci est concernée.
41.De même, une entreprise française qui est membre d'un groupe de sociétés, au sens des articles 223 A à U du code général des impôts, peut demander l'ouverture d'une procédure amiable alors même que l'impôt sur les sociétés est acquitté pour son compte par la société mère. Parallèlement, la société mère peut également demander pour le compte de sa filiale membre du groupe l'ouverture de la procédure amiable.
42.S'agissant de la définition de l'établissement stable, il y a lieu d'appliquer la définition donnée à ce terme dans le cadre de la convention fiscale bilatérale destinée à éviter les doubles impositions, conclue entre la France et l'Etat concerné.
43.En outre, la convention européenne d'arbitrage trouve également à s'appliquer lorsque l'une quelconque des entreprises concernées a subi des pertes au lieu de réaliser des profits (cf. article 1, paragraphe 3).
3. Nature des impositions concernées
44.La procédure amiable prévue par la convention européenne d'arbitrage s'applique à l'impôt sur le revenu et à l'impôt sur les sociétés s'agissant de la France, et aux impôts équivalents dans les autres Etats européens concernés (article 2, paragraphe 2).
45.Elle s'applique également aux impôts de nature identique ou analogue qui seraient établis après la date de signature de la convention et qui s'ajouteraient aux impôts précités ou les remplaceraient (article 2, paragraphe 3).
46.Ainsi, la convention européenne d'arbitrage s'applique à la contribution sociale généralisée (CSG) prévue par l'article 1600-O C du code général des impôts ainsi qu'à la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) prévue par l'article 1600-O-H du code général des impôts.
47.Par ailleurs, la convention européenne d'arbitrage s'applique à la contribution sur l'impôt sur les sociétés prévue à l'article 235 ter ZA du code général des impôts pour les exercices clos ou les périodes d'imposition arrêtées à compter du 1 er janvier 1995 et à la contribution temporaire sur l'impôt sur les sociétés prévue à l'article 235 ter ZB du code précité pour les exercices clos ou les périodes d'imposition arrêtées entre le 1 er janvier 1997 et le 31 décembre 1999.
48.Enfin, la convention européenne d'arbitrage s'applique à la contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés instituée par l'article 235 ter ZC du code général des impôts pour les exercices clos à compter du 1 er janvier 2000.
4. Mesures permettant l'engagement de la procédure amiable
49.Les articles 4 et 5 de la convention européenne d'arbitrage traitent des ajustements de bénéfices qui peuvent être effectués lorsque les transactions ont été conclues entre des entreprises associées dans des conditions autres que celles de pleine concurrence. Ils prévoient que les autorités fiscales d'un Etat contractant peuvent, pour calculer l'impôt dû par des entreprises associées, rectifier la comptabilité des entreprises si, par suite des relations spéciales existant entre ces dernières, cette comptabilité ne fait pas apparaître les bénéfices réels imposables qu'aurait réalisé dans cet Etat une entreprise indépendante dans des conditions similaires.
50.L'article 6 de la convention européenne d'arbitrage institue une procédure amiable pour le règlement des difficultés soulevées par l'application de la convention. Elle est donc mise en oeuvre dans les cas où les redressements effectués où envisagés par l'administration fiscale d'un Etat contractant sur les résultats d'une entreprise associée, fondés sur l'existence dans les relations commerciales ou financières des entreprises associées de conditions convenues ou imposées différentes de celles qui seraient convenues entre des entreprises indépendantes, entraînent ou peuvent entraîner une double imposition juridique ou économique que la convention a pour objet d'éviter.
51.Il s'ensuit que l'ouverture de la procédure amiable est conditionnée par la notification d'une mesure administrative (cf. supra 22) permettant aux autorités compétentes d'apprécier si les principes de pleine concurrence énoncés par la convention sont susceptibles de ne pas avoir été respectés.
52.Par ailleurs, que la mesure entraînant l'ouverture de la procédure amiable ait été prise en France ou à l'étranger, il est précisé que l'acceptation expresse ou tacite d'un redressement, même suite à une transaction, par un contribuable ou le contribuable associé ne prive pas celui-ci du droit de demander l'ouverture de la procédure amiable.
5. Situations excluant le recours à la procédure amiable
53.En vertu de l'article 5 de la convention, si un Etat contractant envisage de corriger les bénéfices d'une entreprise en application du principe de pleine concurrence, il doit en informer celle-ci en temps voulu. En pratique, cette information est matérialisée en France par l'envoi d'une proposition de rectification. Cette entreprise peut informer l'autre entreprise associée concernée par la transaction et ainsi lui donner l'occasion d'évoquer ce cas devant son autorité compétente. Pour autant, cette information n'empêche nullement le premier Etat de faire les redressements qu'il estime justifiés. Si les deux entreprises associées concernées et l'autre Etat contractant informé de la correction des bénéfices envisagée dans le premier Etat acceptent cette correction, la procédure amiable n'a, bien entendu, pas lieu d'être engagée.
54.En application de l'article 8, paragraphe 1 de la convention européenne d'arbitrage, l'autorité compétente d'un Etat n'est pas obligée d'entamer la procédure amiable (ou de constituer le cas échéant la commission consultative) lorsqu'il est décidé définitivement, par une procédure judiciaire ou administrative, qu'une des entreprises concernées est passible d'une pénalité grave à l'occasion d'une correction de bénéfices.
55.Une entreprise est définitivement passible d'une pénalité grave soit lorsqu'elle n'a pas contesté l'application d'une telle pénalité et que le délai de réclamation est expiré, soit dans le cas où elle l'a contestée, lorsqu'une décision confirmant l'application de la pénalité a été rendue et n'est plus susceptible de faire l'objet d'une voie de recours.
56.Le paragraphe 2 de l'article 8 de la convention européenne d'arbitrage précise que lorsque la procédure judiciaire ou administrative visant à statuer qu'une des entreprises concernées est passible d'une pénalité grave est en cours en même temps que la procédure amiable ou que la procédure d'arbitrage, les autorités compétentes peuvent suspendre le déroulement de ces dernières procédures jusqu'à l'aboutissement de la ladite procédure judiciaire ou administrative
57.En cas de redressements opérés en France, les pénalités graves s'entendent des sanctions pénales, ainsi que des sanctions fiscales telles que les sanctions pour défaut de déclaration après mise en demeure, pour absence de bonne foi ou manquement délibéré, pour manoeuvres frauduleuses, pour opposition à contrôle fiscal (la pénalité prévue par l'article 1740 nonies, désormais 1735 II, du code général des impôts n'est pas concernée), pour rémunérations ou distributions occultes, ou pour abus de droit, selon une déclaration unilatérale de la France publiée au journal officiel de l'Union européenne en même temps que la convention (cf. annexe 3).
58.En conséquence, lorsque des pénalités graves ont été appliquées et font l'objet d'un recours contentieux, la procédure amiable peut être ouverte mais elle est aussitôt suspendue jusqu'à l'aboutissement de la procédure contentieuse. Si les pénalités sont définitivement maintenues, la procédure amiable est clôturée.
59.En cas de redressements effectués dans un autre Etat membre de l'Union européenne, l'autorité compétente française s'adresse à l'autorité compétente étrangère pour s'assurer du respect des conditions d'ouverture de la procédure amiable.
60.A titre d'information, les 14 autres Etats membres de l'Union européenne dans lesquels la convention est actuellement en vigueur ont indiqué également par voie de déclaration unilatérale les pénalités constituant dans leur procédure des pénalités graves au sens de l'article 8 de la convention européenne d'arbitrage (cf. annexe 3).
61.La procédure amiable ne peut être ouverte que pour les litiges portant sur l'application du principe de pleine concurrence conformément à l'article 4 de la convention européenne d'arbitrage. Ainsi, par exemple, ne rentrent pas dans le champ d'application de la convention des redressements portant sur l'application de la limitation de la déduction des intérêts versés aux associés (article 39-1-3° du code général des impôts).
62.Enfin, le principe posé au n°26 de la présente instruction trouve à s'appliquer à la procédure amiable prévue par la convention européenne d'arbitrage.