B.O.I. N° 135 du 10 AOÛT 2006
BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS
13 O-1-06
N° 135 du 10 AOÛT 2006
CONTENTIEUX DE L'IMPOT. RECOURS A L'ENCONTRE DES RECTIFICATIONS REDUISANT UN RESULTAT
DEFICITAIRE. ARTICLE 86 DE LA LOI DE FINANCES POUR 2003. POINT D'ARRIVEE DU DELAI DE RECOURS.
APPLICATION DANS LE TEMPS. CONSEIL D'ETAT. ARRET DU 12 JANVIER 2005 ET AVIS DU 27 JUILLET 2005.
CONTENTIEUX DE L'IMPOT. RECLAMATION. DEMANDES FONDEES SUR LA NON-CONFORMITE D'UNE REGLE DE
DROIT. ARTICLE 117 DE LA LOI DE FINANCES POUR 2006 (N° 2005-1719 DU 30 DECEMBRE 2005).
(L.P.F., art. L. 190)
NOR : BUD L 06 00119 J
Bureaux J 1 et T 3
PRESENTATION
La présente instruction a pour objet de commenter les précisions apportées aux règles applicables, d'une part, aux recours tendant à obtenir la réparation d'erreurs commises par l'administration dans la détermination d'un résultat déficitaire (L.P.F., art. L. 190, 2 ème alinéa) par l'arrêt et l'avis respectivement rendus par le Conseil d'Etat les 12 janvier et 27 juillet 2005, d'autre part, aux réclamations fondées sur la non-conformité d'une règle de droit à une règle de droit supérieure (L.P.F., art. L. 190, 4 ème et 5 ème alinéas) par l'article 117 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005). S'agissant du deuxième alinéa de l'article L. 190 du L.P.F., l'avis et la décision précités de la Haute assemblée apportent des précisions sur le point d'arrivée du délai de réclamation ainsi que sur les modalités d'application dans le temps de ce nouveau droit de recours. Sur le premier point, le Conseil d'Etat considère que les réclamations présentées en application du deuxième alinéa de l'article L. 190 du L.P.F. sont recevables jusqu'à l'expiration des délais de réclamation ouverts, conformément aux dispositions des articles R.* 196-1. et R.* 196-3. du L.P.F., lorsque ces rehaussements entraînent l'établissement d'une imposition. Sur le second point, le Conseil d'Etat juge que les réclamations formées à l'encontre d'une réduction de déficit sont recevables dès lors qu'elle a été confirmée par une réponse aux observations du contribuable ou maintenue après avis de la commission départementale, que la réponse aux observations ou la notification de l'avis soit intervenue avant ou après le 1 er janvier 2003. Par ailleurs, en ce qui concerne les quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 190 du L.P.F., l'article 117 de la loi de finances pour 2006 a, d'une part, modifié la période sur laquelle peuvent porter les réclamations fondées sur des décisions juridictionnelles révélant la non-conformité d'une règle de droit à une règle de droit supérieure et, d'autre part, précisé la nature de ces mêmes décisions. Ainsi, la période dite « répétible », visée au 4 ème alinéa, a été ramenée de quatre à trois années et le cinquième alinéa de l'article L. 190 du L.P.F. prévoit, notamment, que les avis rendus par le Conseil d'Etat (art. L. 113-1 du code de justice administrative) et la Cour de cassation (art. L. 151-1 du code de l'organisation judiciaire) sont considérés comme des décisions juridictionnelles susceptibles de révéler la non-conformité d'une règle de droit à une règle de droit supérieure. • |
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CHAPITRE PREMIER :
Les recours tendant à obtenir la réparation d'erreurs commises par l'administration dans la détermination d'un résultat déficitaire.
(L.P.F., art. L. 190, 2 ème alinéa)
1.Compte tenu des règles en vigueur auparavant en matière contentieuse, un redressement réduisant un déficit sans l'annuler ne pouvait faire l'objet d'un recours contentieux que lorsque le contribuable était en mesure d'imputer ce déficit sur des bénéfices ultérieurs. En effet, à défaut d'imposition supplémentaire, le juge de l'impôt ne pouvait être saisi d'un recours de plein contentieux.
2.L'intervention de l'article 86 de la loi de finances pour 2003, codifié au deuxième alinéa de l'article L. 190 du L.P.F., a ouvert la possibilité d'introduire une réclamation à compter de la réception de la réponse aux observations du contribuable ou, en cas de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, à compter de la réception de l'avis rendu par la commission.
3.L'ordonnance n° 2004-281 du 25 mars 2004 a étendu ce nouveau droit de réclamation aux réductions de crédit de taxe sur la valeur ajoutée et élargi, par ailleurs, le champ des recours susvisés (reports déficitaires et crédits de T.V.A.) aux rectifications opérées dans le cadre d'une procédure de taxation ou d'évaluation d'office, étant précisé qu'en tels cas, les réclamations peuvent être déposées à compter d'un délai de trente jours après la notification prévue à l'article L. 76 du L.P.F..
4.Un avis et un arrêt du Conseil d'Etat apportent des précisions, d'une part, sur le point d'arrivée du délai de réclamation et, d'autre part, sur les modalités d'application dans le temps de ce nouveau droit de recours.
5.Sur le premier point, le Conseil d'Etat considère que les réclamations présentées en application du deuxième alinéa de l'article L. 190 du L.P.F. sont recevables jusqu'à l'expiration des délais de réclamation ouverts, conformément aux dispositions des articles R.* 196-1. et R.* 196-3. du livre précité, lorsque ces rehaussements entraînent l'établissement d'une imposition.
6.Sur le second point, le Conseil d'Etat juge que les réclamations formées à l'encontre d'une réduction de déficit sont recevables dès lors qu'elle a été confirmée par une réponse aux observations du contribuable ou maintenue après avis de la commission départementale, que la réponse aux observations ou la notification de l'avis soit intervenue avant ou après le 1 er janvier 2003.
Section 1 :
Point d'arrivée du délai de recours.
7.Dans son paragraphe B de la section 2 , l'instruction du 20 août 2003, publiée au B.O.I. 13 O-1-03 , indique qu'en application de l'article R.* 196-1. du L.P.F., le délai de réclamation ouvert à l'encontre des réductions de déficit expire le 31 décembre de la deuxième année suivant celle au cours de laquelle est intervenue, selon le cas, soit la réception de la réponse aux observations du contribuable, soit la notification de l'avis de la commission. Elle ajoute que, conformément aux dispositions de l'article R.* 196-3. du L.P.F., le contribuable peut également déposer une réclamation jusqu'au 31 décembre de la troisième année qui suit celle au cours de laquelle est intervenue la notification de redressement, si ce délai est plus long que le précédent.
8.Par un avis du 27 juillet 2005 1 , le Conseil d'Etat retient une analyse différente. En effet, la Haute juridiction considère que le deuxième alinéa de l'article L. 190 du L.P.F. déroge aux règles relatives au point de départ du délai de réclamation mais pas, à défaut de précision, aux règles relatives au point d'arrivée. En conséquence, les réclamations formées en application du deuxième alinéa de l'article L. 190 du L.P.F. sont recevables dans les mêmes délais que ceux applicables aux impositions résultant des rehaussements à l'origine de la réclamation, tels que prévus par les articles R.* 196-1. et R.* 196-3. du L.P.F..
9.Ainsi, le contribuable dont le déficit est réduit n'encourt aucune forclusion tant que les résultats ne sont pas redevenus bénéficiaires et, donc, tant qu'il n'est pas en mesure de procéder à l'imputation dudit déficit. Ses réclamations seront recevables soit, en application de l'article R.* 196-1. du L.P.F., jusqu'à la fin de la deuxième année qui suit la mise en recouvrement, le versement de l'impôt ou la réalisation de l'événement qui motive la réclamation soit, en application de l'article R.* 196-3. du L.P.F., jusqu'à la fin de la troisième année qui suit la proposition de rectification.
10.Cette solution rendue à propos des réductions de déficit est transposable aux réductions d'excédents de crédit de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles l'ordonnance du 25 mars 2004 a étendu le nouveau recours ouvert par le deuxième alinéa de l'article L. 190 du L.P.F..
11.Les indications données dans les deux premiers alinéas du paragraphe B de la section 2 de l'instruction du 20 août 2003 sont donc rapportées.
Section 2 :
Application dans le temps du nouveau droit de recours ouvert par l'article 86 de la loi de finances pour 2003.
12.La section 3 , de l'instruction du 20 août 2003 indique que le nouveau droit de réclamation ouvert par l'article 86 de la loi de finances pour 2003 s'applique aux rehaussements, réduisant un déficit, confirmés par une réponse aux observations du contribuable reçue par ce dernier à compter du 1 er janvier 2003 ou maintenus après avis de la commission départementale notifié à compter de la même date.
13.Par un arrêt rendu le 12 janvier 2005 2 , le Conseil d'Etat juge que si, en principe, les conditions dans lesquelles une décision peut être contestée sont régies par les dispositions en vigueur à la date de la décision en cause, il n'en va pas ainsi des dispositions de l'article 86 de la loi de finances pour 2003 qui ont pour objet de permettre aux contribuables de porter devant la juridiction contentieuse un désaccord existant entre eux et l'administration et d'où risque de résulter, ultérieurement, la mise en recouvrement de droits litigieux, dès que ce désaccord est, à l'issue d'un débat contradictoire, établi par une confirmation formelle de la position de l'administration.
14.Par suite, en subordonnant l'exercice du droit de réclamation à la condition que la réception de la réponse aux observations du contribuable ou la notification de l'avis de la commission départementale ne soit pas intervenue avant le 1 er janvier 2003, l'instruction a apporté au droit de réclamation une restriction que le texte législatif n'impliquait pas.
15.En conséquence, il convient de considérer comme recevables les réclamations formées à l'encontre d'une réduction de déficit dès lors qu'elle a été confirmée par une réponse aux observations du contribuable ou maintenue après avis de la commission départementale, que la réponse aux observations ou la notification de l'avis soit intervenue avant ou après le 1 er janvier 2003.
16.Les mêmes règles sont applicables aux réductions de crédit de taxe sur la valeur ajoutée et aux rectifications opérées dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 76 du L.P.F., qu'elles aient été notifiées, confirmées ou maintenues avant ou après la publication de l'ordonnance du 25 mars 2004.
17.Bien entendu, les réclamations ne sont recevables que pour autant que le délai de réclamation, déterminé selon les modalités indiquées dans la section 1 , ne soit pas expiré. La dernière phrase de la section 3 de l'instruction du 20 août 2003 est ainsi rapportée.
CHAPITRE SECOND :
Les réclamations fondées sur la non-conformité d'une règle de droit, dont il a été fait application, à une règle de droit supérieure.
(L.P.F., art. L. 190, 4 ème et 5 ème alinéas)
18.L'article 117 de la loi de finances pour 2006 a, d'une part, modifié la période sur laquelle peuvent porter les réclamations fondées sur des décisions juridictionnelles révélant la non-conformité d'une règle de droit à une règle de droit supérieure (section 1 ) et, d'autre part, défini la nature des décisions susceptibles de révéler une telle non-conformité (section 2 ).
19.Ainsi, aux termes du paragraphe I. de l'article précité, le quatrième alinéa de l'article L. 190 du L.P.F. est désormais rédigé comme suit :
« Lorsque cette non-conformité a été révélée par une décision juridictionnelle ou un avis rendu au contentieux, l'action en restitution des sommes versées ou en paiement des droits à déduction non exercés ou l'action en réparation du préjudice subi ne peut porter que sur la période postérieure au 1 er janvier de la troisième année précédant celle où la décision ou l'avis révélant la non-conformité est intervenu. ».
20.Par ailleurs, il est ajouté un cinquième alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'application de l'alinéa précédent, sont considérés comme des décisions juridictionnelles ou des avis rendus au contentieux les décisions du Conseil d'Etat ainsi que les avis rendus en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, les arrêts de la Cour de cassation ainsi que les avis rendus en application de l'article L. 151-1 du code de l'organisation judiciaire, les arrêts du Tribunal des conflits et les arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes se prononçant sur un recours en annulation, sur une action en manquement ou sur une question préjudicielle. ».
21.La section 3 du présent chapitre précisera les incidences de ces modifications sur le contentieux de la responsabilité et la section 4 , les modalités de leur entrée en vigueur. Une version consolidée de l'article L. 190 du L.P.F. est jointe en annexe 1 .
Section 1 :
Les conditions d'exercice de l'action.
(L.P.F., art. L. 190, 3 ème et 4 ème alinéas)
22.A titre liminaire, il est rappelé que les actions fondées sur la non-conformité d'une règle de droit à une règle de droit supérieure doivent :
- tendre exclusivement à l'obtention du versement d'une somme par l'administration qu'il s'agisse de la restitution de sommes versées, du paiement de droits à déduction non exercés ou de la réparation du préjudice subi, et
- être fondées sur une décision de justice révélant la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application.
23.Il est toutefois précisé que, s'agissant de droits à déduction en matière de taxe sur la valeur ajoutée, la taxe dont la déduction a été omise peut être déduite des déclarations ultérieures déposées avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit l'omission (2 ème alinéa du 1. de l'article 224 de l'annexe II au C.G.I.). Aussi, la taxe dont la déduction n'a pas été effectuée en raison d'une interdiction déclarée non conforme pourra-t-elle être directement portée en déduction de la taxe à acquitter au titre des périodes postérieures à la décision de justice révélant la non-conformité, dans les limites et conditions prévues à l'article 224 précité, sans qu'il y ait lieu d'introduire une réclamation. Hormis ces cas, une réclamation sera déposée selon les modalités précisées ci-après.
24.A cet égard, il importe de distinguer, d'une part, le délai de réclamation (délai d'action) et, d'autre part, la période sur laquelle porte cette réclamation (période répétible).
25.En application des articles R.* 196-1. c. et R.* 196-2. b. 3 L.P.F., le délai de recours dont disposent les contribuables pour présenter leur réclamation est décompté à partir de l'événement motivant la demande, en l'occurrence, la première décision juridictionnelle révélant la non-conformité telle que définie par le cinquième alinéa de l'article L. 190 du L.P.F. (cf. section 2) . Ce délai pour agir demeure inchangé.
26.En revanche, dans sa rédaction issue de l'article 117 de la loi de finances pour 2006, le quatrième alinéa de l'article précité, précise désormais que les actions en restitution ou en paiement d'une somme : « ne [peuvent] porter que sur la période postérieure au 1 er janvier de la troisième année précédant celle où la décision ou l'avis révélant la non-conformité est intervenu ».
27.La recevabilité de la demande s'apprécie donc tant au regard du délai dans lequel elle a été présentée qu'au regard de la période sur laquelle portent les conclusions (cf. exemple joint en annexe 2-2. ).