SOUS-SECTION 2 CONTENU DE L'ACTE DE POURVOI
SOUS-SECTION 2
Contenu de l'acte de pourvoi
A. DÉSIGNATION DES PARTIES
1La déclaration de pourvoi, faite par écrit, indique (NCPC, art. 975) :
1° a) Si le demandeur en cassation est une personne physique : ses nom, prénoms, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;
b) Si le demandeur est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente ;
2° Les nom, prénoms et domicile du défendeur ou, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination et son siège social.
B. INDICATION DE LA DÉCISION ATTAQUÉE ET DE L'ÉTAT DE LA PROCÉDURE D'EXÉCUTION
2Outre les mentions indispensables à l'identification des parties, la déclaration de pourvoi comporte l'indication de la décision attaquée (NCPC, art. 975-4°), ainsi que l'état de la procédure d'exécution, sauf dans les cas où l'exécution de la décision attaquée est interdite par la loi (ibid 5°).
Elle précise, le cas échéant, les chefs de la décision auxquels le pourvoi est limité.
C. EXPOSÉ DES MOYENS
3En principe, les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée doivent être énoncés dans le mémoire du demandeur (NCPC, art. 978). Ces moyens doivent entrer dans l'un des cas d'ouverture à cassation et être précis.
Ainsi, à peine d'être déclaré d'office irrecevable, un moyen ou un élément de moyen ne doit mettre en oeuvre qu'un seul cas d'ouverture. Chaque moyen ou chaque élément de moyen doit préciser, sous la même sanction :
- le cas d'ouverture invoqué ;
- la partie critiquée de la décision ;
- ce en quoi celle-ci encourt le reproche allégué (NCPC, art. 978, 2ème al.).
Toutefois, la déclaration de pourvoi contient d'ordinaire l'exposé des moyens.
4 Remarque : avant toute autre considération, il importe de rechercher si les circonstances alléguées à l'appui du moyen existent réellement. Si le moyen manque effectivement, son rejet s'impose à ce seul titre.
Ainsi, il a été jugé que manque en fait le moyen selon lequel le jugement attaqué, statuant en matière d'enregistrement, a été rendu sur les observations orales des parties et non sur mémoires respectivement signifiés, dès lors qu'il résulte des pièces de la procédure, régulièrement produites, que les parties en cause ont établi des mémoires écrits qui ont été, en fait, respectivement signifiés (Cass. com., 22 janvier 1968, dame X... , RJ, 2è partie, p. 18).
I. Moyens de fait et moyens de droit
5La déclaration de pourvoi ou le mémoire du demandeur ne peuvent contenir que des moyens de droit. Les moyens de fait sont donc irrecevables.
6Cependant, en matière fiscale, la Cour de cassation s'était parfois reconnue le droit de réviser les appréciations des faits contenus dans le jugement contesté (cf. notamment, Cass. civ., 5 juillet 1949, consorts X... , BOED, 5694 ; Cass. civ. 8 janvier 1957, X... , BOED 7425), mais cette spécificité des instances fiscales devant la Cour suprême tend à disparaître.
7Il convient également de rappeler que le litige est délimité par le contenu de la réclamation contentieuse adressée au directeur des services fiscaux compétent (Cass. Com., arrêt du 27 avril 1982, n° 391).
II. Moyens nouveaux
8En principe, les moyens non soulevés devant les juges du fond sont irrecevables (NCPC, art. 619 ; cf. notamment Cass. com., 14 janvier 1969, dame X... , RJ, 2ème partie, p. 13).
9Par exception, sont recevables :
- les moyens nouveaux nés de la décision attaquée : par exemple vices de forme, vices internes tels que le défaut de motifs, l'insuffisance de motifs, l'existence de motifs dubitatifs ou contradictoires ;
- les moyens de pur droit ;
- les moyens nouveaux d'ordre public (Cass. civ., 8 novembre 1950, Caisse française de crédit, BOED 5626).
À cet égard, les moyens de fond sont considérés, en matière fiscale, comme d'ordre public. Ils peuvent dès lors être opposés en cassation pour la première fois à condition que les premiers juges aient été saisis du principe même du débat (Cass. civ., 20 janvier 1914, Dalloz 1921-1-227).
10Quoi qu'il en soit, en aucun cas un moyen nouveau, même d'ordre public, reposant sur des faits ou mélangé de fait et de droit, ne peut être opposé pour la première fois devant la Cour de cassation.
11Par exemple, a été déclaré irrecevable comme formulé pour la première fois en cassation :
- le moyen tiré d'une prescription (Cass. civ., 8 décembre 1954, X... , BOED 6814) ;
- le moyen fondé sur une prétendue erreur de liquidation des droits ou des pénalités réclamés par l'Administration (Cass. civ., 3 février 1960, consorts X... , BOED 8206 ; Cass. civ. 20 mai 1963, X... , BOED 9000) ou sur les modalités de liquidation des droits (Cass. com., 13 mai 1974, Société Hardel et Lecoq, RJ, 1974, n° IV, p. 53) ;
- le moyen tiré de l'amnistie (Cass. com., 3 juillet 1967, X... , RJ, 2è partie, p. 165) ;
- le moyen, mélangé de droit et de fait, tiré de la violation des articles L. 57 et R* 57 du LPF, faisant état de l'absence de mention, dans la notification de redressements, d'un texte sur lequel l'administration fondait les rappels de droit litigieux (Cass. com. 13 janvier 1998, n° 133 P, reproduit ci-après en annexe). Par cet arrêt, la Cour de Cassation consacre, comme elle l'avait déjà fait dans une affaire similaire (Cass. com. 26 novembre 1996, Consorts X... , arrêt n° 1559 D), l'application stricte de l'une des règles de procédure civile, spécifique au débat en cassation, selon laquelle un moyen qui n'a pas été préalablement soumis aux juges du fond n'est recevable devant la Cour de cassation que s'il est de pur droit, c'est-à-dire s'il ne nécessite, de la part du juge de cassation, aucune constatation, ni appréciation de fait, qui n'ait été effectuée par la décision attaquée.
12En revanche, ne saurait être considéré comme nouveau le moyen tiré par l'Administration de la qualification inexacte donnée par le tribunal 1 aux conventions intervenues entre les parties, dès lors que, dans son mémoire devant ce tribunal 1 , l'Administration avait effectivement posé le problème de la définition de ces conventions et que l'argumentation développée par elle sur cette question a été reproduite dans les motifs du jugement (Cass, civ., 5 novembre 1956, DGI contre dame X... , BOED 7443).
III. Arguments nouveaux
13On ne saurait assimiler au moyen nouveau le simple argument nouveau ou le fait de développer les justifications d'un moyen déjà invoqué devant le tribunal de grande instance 1 (Cass. civ., 5 novembre 1941, X... , BCI 1942, n° 17).
Il importe cependant comme pour les moyens d'ordre public que ces arguments soient de droit et non mélangés de fait et de droit.
D. PRODUCTIONS
I. Production de la décision attaquée et de la décision rendue en premier ressort
14À peine d'irrecevabilité du pourvoi prononcée d'office, une copie de la décision attaquée signifiée soit à partie, soit à avoué, soit à avocat ou une expédition de cette décision, ainsi qu'une copie de la décision confirmée ou infirmée par la décision attaquée, doivent être remises au greffe dans le délai de dépôt du mémoire (soit dans les cinq mois à compter du pourvoi) [NCPC, art. 979].
II. Production de pièces et documents divers
15Le demandeur doit joindre les pièces invoquées à l'appui du pourvoi (NCPC, art. 979, 2ème al.). En règle générale, les pièces sont produites avec le mémoire du demandeur (cf. 13 O 641, n° 10 ).
Toutefois, elles peuvent l'être avec le pourvoi lorsque les moyens sont mentionnés à ce stade de la procédure (cf. ci-dessus n°s 3 et 4 ).
16En tout état de cause, les pièces et documents divers peuvent être produits tant que le conseiller ou le conseiller référendaire rapporteur n'est pas saisi.
Bien entendu, les parties ne sont pas admises à exciper en cassation de documents qui n'auraient pas été soumis au tribunal de grande instance 2 , ni à proposer des moyens, même d'ordre public (cf. ci-dessus n°s 8 à 13 ) fondés sur ces documents (rappr. Cass. com., 15 octobre 1968, X... , RJ, 2e partie, p. 209).
ANNEXE
Com. 13 janvier 1998, n° 133 P :
« Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Bonneville, 17 janvier 1996), que les sociétés anonymes Grand hôtel du parc et Les Enfants terribles ont acquis avant leur fusion la totalité des actions de la société anonyme Résidence du Mont Blanc, société d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé, et ont placé leur acquisition sous le régime fiscal de l'article 710 du Code général des impôts prévoyant un taux réduit pour les achats d'immeubles devant être affectés pendant 3 ans au moins à l'habitation ; que l'administration des Impôts a contesté l'application de ce régime au motif que l'activité des acquéreurs était commerciale et a procédé à un redressement ; que la société Grand hôtel du parc a contesté ce redressement en faisant valoir, notamment, son irrégularité formelle ;
Attendu que la société Grand hôtel du parc reproche au jugement d'avoir écarté ce moyen, alors, selon le pourvoi, qu'une notification de redressement n'est suffisamment motivée que lorsque l'Administration y précise le fondement en droit comme en fait des redressements et y mentionne les textes sur lesquels elle s'appuie, de sorte que toute notification d'un redressement en matière de droits d'enregistrement fondé sur la déchéance du régime de faveur prévu à l'article 710 du Code général des impôts doit mentionner l'article 1840 G quater du même Code, seul article à prévoir la déchéance dont il s'agit et à en fixer les conséquences ; qu'en l'espèce il résulte du jugement attaqué que les notifications de redressement datées des 7 et 11 juin 1991, qui ont été adressées à elle-même et à la société Les Enfants terribles, ne mentionnent que l'article 710 du Code général des impôts pour justifier des redressements en matière de droits d'enregistrement consécutifs à la déchéance du régime de taxation réduite que prévoit ce texte ; que dès lors, en statuant comme il l'a fait, l'article 1840 G quater devant être mentionné dans lesdites notifications pour qu'elles soient motivées, le Tribunal a violé les articles L 57 et R 57 du Livre des procédures fiscales ;
Mais attendu que, dans ses mémoires présentés au Tribunal, la société Grand hôtel du parc s'était bornée à faire valoir qu'auraient dû être mentionnés, dans la notification du redressement, les articles 728 et 729 du Code général des impôts ; que, faute d'avoir alors fait état de l'omission de l'article 1840 G quater du Code général des impôts, le grief est nouveau et, mélangé de fait et de droit, irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE LE POURVOI ; ... »
1 Et la Cour d'appel, pour les jugements rendus par les tribunaux de grande instance depuis le 1er mars 1998.
2 Et à la Cour d'appel, pour les jugements rendus par les tribunaux de grande instance depuis le 1er mars 1998.