Date de début de publication du BOI : 14/06/1996
Identifiant juridique : 13N4221
Références du document :  13N422
13N4221
Annotations :  Lié au BOI 5B-2-07

SECTION 2 INFRACTIONS ASSIMILÉES AU DÉLIT DE FRAUDE FISCALE


SECTION 2  

Infractions assimilées au délit de fraude fiscale


L'article 1743 du CGI prévoit l'application des peines réservées au délit général de fraude fiscale :

- pour les délits tenant à la comptabilité ;

- pour les délits d'entremise pour le dépôt de valeurs ou l'encaissement de coupons à l'étranger.


SOUS-SECTION 1

Omission d'écritures
Passation d'écritures inexactes ou fictives


L'article 1743-1° CGI rend passible des peines prévues à l'article 1741, quiconque a sciemment omis de passer ou de faire passer des écritures ou bien a passé ou fait passer des écritures inexactes ou fictives au livre-journal et au livre d'inventaire prévus par les articles 8 et 9 du Code de commerce ou dans les documents qui en tiennent lieu 1 .

Toutefois, ce texte ne prévoit pas de sanctions pour la simple tentative, laquelle est d'ailleurs difficilement concevable en cette matière.

En revanche, une personne peut être déclarée complice du délit d'omission de passation d'écritures comptables ou de passation d'écritures inexactes ou fictives en application des articles 121-6 et 121-7 du NCP qui ont une portée générale.


  A. ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS


1Aux termes de l'article 1743-1°, les omissions d'écritures et la passation d'écritures inexactes ou fictives sont punissables lorsqu'elles sont relevées non seulement sur le journal ou le livre d'inventaire dont la tenue est prescrite par le Code de commerce, mais également dans les documents tenant lieu des livres comptables ainsi prescrits.

Ainsi peuvent être sanctionnées les irrégularités comptables imputables aux industriels et commerçants mais aussi celles commises par tous les contribuables à qui une disposition légale impose la tenue de certains documents comptables (contribuables imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ou soumis au régime d'imposition réel en matière de bénéfices agricoles par exemple).

2Parmi les illustrations offertes pour la jurisprudence de la Cour de cassation, on peut citer celles qui ont permis de condamner sur le fondement des dispositions de l'article 1743-1° du CGI :

- un vétérinaire qui n'a tenu ni le registre journalier de ses recettes, ni le livre-journal (Cass. crim., 12 janvier 1981, X... Michel ; Bull. crim. n°14, p. 54) ;

- un ingénieur-conseil qui n'a pu fournir au vérificateur aucun des documents comptables exigés par la loi (Cass. crim., 17 octobre 1983, X... Jean) ;

- un dirigeant d'une société dont la comptabilité présentait de nombreuses irrégularités, notamment des apports de fonds sans origine déterminable, des prélèvements opérés sans mention des bénéficiaires et des recettes de bar et de restaurant non comptabilisées mais ayant servi à alimenter une caisse noire, étant précisé que ces irrégularités avaient été signalées par les experts-comptables et les commissaires aux comptes (Cass. crim., 1er octobre 1984, X... Robert) ;

- un avocat qui reconnaît l'absence de valeur probante des écritures qu'il a passées sur les livres comptables qu'il devait servir au jour le jour (Cass. crim., 9 février 1987, X... Raymond) ;

- un avocat qui n'a produit, plusieurs mois après la première intervention du. vérificateur, qu'un livre-journal reconstitué sur lequel les recettes n'étaient pas enregistrées à leurs dates mais à celles de la remise des chèques à la banque (Cass. crim., 30 novembre 1987, X... Fernand) ;

- un expert fiscal et financier qui n'a tenu aucune comptabilité et a mis le vérificateur dans l'impossibilité de procéder aux opérations de contrôle auxquelles il entendait se livrer (Cass. crim., 7 mars 1988 , X... Georges) ;

- un administrateur de société qui a participé à l'élaboration des bilans comportant des bénéfices minorés (Cass. crim., 24 avril 1989, X... Armand) ;

- un gérant de pressing qui tenait une comptabilité irrégulière caractérisée par la multiplicité et la gravité des anomalies ou lacunes des comptes de stocks ou de caisse (Cass. crim., 8 août 1990, X... Richard ; Bull. crim. n° 303, p. 764) ;

3Cela étant, le délit prévu à l'article 1743-1° requiert pour être constitué que son caractère intentionnel soit établi.

La Cour de cassation a jugé que le délit d'omission de passation d'écritures ou de passation d'écritures inexactes ou fictives prévu par l'article 1743-1° du CGI constitue, lorsqu'il est poursuivi principalement et non comme un des éléments ou l'une des circonstances aggravantes du délit de soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement de l'impôt prévu par l'article 1741 du même code, une infraction distincte de ce dernier délit et qui est caractérisée en elle-même, dès lors que se trouvent réunis ses éléments constitutifs propres et sans qu'il soit nécessaire que son auteur ait poursuivi la réalisation d'une fraude fiscale (Cass. crim., 3 décembre 1979 ; Bull. crim. n° 343, p. 935).

4Enfin, malgré sa spécificité, le délit réprimé par l'article 1743-1° du CGI entre dans les prévisions des articles L. 228 à L. 233 du LPF et doit dès lors faire l'objet d'une saisine préalable de la Commission des infractions fiscales (Cass. crim., 15 décembre 1987 ; Bull. crim. n° 465, p. 1227 et Cass. crim ;, 16 octobre 1989 ; Bull. crim. n° 360, p. 871).

5Comme en matière de fraude fiscale, certains faits sont sans influence sur la poursuite. Ainsi l'ignorance du comptable, l'incapacité professionnelle ou la faute de la personne chargée de tenir la comptabilité ne peuvent être considérées comme des excuses absolutoires.


  B. DATE DU DÉLIT. PRESCRIPTION DE L'ACTION. PROCÉDURE


6L'article L. 230 du LPF dispose que les plaintes visant les délits prévus à l'article 1743 CGI peuvent être déposées jusqu'à l'expiration de la troisième année qui suit celle au cours de laquelle l'infraction a été commise.

Le délai offert à l'administration pour engager l'action judiciaire en cette matière est donc identique à celui prévu pour les cas de fraude fiscale et le cours de la prescription bénéficie de la suspension prévue par l'article L. 230, alinéa 3, du LPF pour neutraliser la période de saisine pour avis de la Commission des infractions fiscales.

Le point de départ du délai de prescription est la date de l'infraction, c'est-à-dire celle à laquelle l'écriture mensongère a été inscrite sur les documents comptables ou celle à laquelle aurait dû être passée l'écriture omise (Cass. crim., 17 mars 1980 et Cass. crim., 24 novembre 1986 ; Bull. crim. n° 352, p. 921).

Cela étant, il convient de considérer qu'en cas de pluralité ou d'enchaînement d'écritures, le délai de prescription court seulement à compter de la passation de la dernière écriture irrégulière.

7Ainsi, s'agissant d'une comptabilité commerciale, une écriture irrégulière passée en cours d'exercice se trouve renouvelée -sauf en cas de rectification spontanée- lors de la transcription des comptes annuels sur le livre d'inventaire, transcription par définition postérieure à la date de clôture de l'exercice (Cass. crim., 28 novembre 1994, X... Jean-Michel ; Bull. crim. n° 378, p. 926).

Il en résulte que peuvent être visées jusqu'au 31 décembre 1996, les irrégularités comptables commises au cours d'un exercice clos le 31 décembre 1992 alors même que l'année 1992 serait prescrite au regard du délit général de fraude fiscale (art. 1741 du CGI).

De même, si l'exercice ne coïncide pas avec l'année civile, demeurent non prescrites jusqu'au 31 décembre 1996, les infractions commises au cours d'un exercice clos à compter du 1er janvier 1993, en dépit du fait que les écritures irrégulières initiales aient été passées au cours de l'année 1992.

Ces règles ne s'appliquent pas aux comptabilités non commerciales pour lesquelles les écritures étant passées au jour le jour au livre-journal, le point de départ de la prescription se situe au dernier jour de l'exercice. Dans ce cas, seuls les exercices 1993 et suivants sont susceptibles d'être visés pénalement jusqu'au 31 décembre 1996.


  C. PEINES


8Les peines prévues par l'article 1743-1° pour le délit d'omission d'écritures ou de passation d'écritures inexactes ou fictives sont celles de l'article 1741 (cf. 13 N 4218- 1 ) à savoir, en ce qui concerne les peines principales :

- une amende de 250 000 F et un emprisonnement de cinq ans ;

- en cas de récidive, une amende pénale de 700 000 F et un emprisonnement de dix ans.

9Les peines accessoires et complémentaires sont également celles prévues pour le délit de fraude fiscale (cf. 13 N 4218, n°s 3 à 9 ).

Enfin, l'application de l'article 1743-1° ne met pas obstacle à l'application des peines de droit commun.

 

1   Les obligations prévues à ces articles ont été allégées par la loi n° 94-126 du 11 février 1994 (art. 20) pour les commerçants relevant du régime simplifié d'imposition et du forfait (cf. articles 17-1 à 17-4 du Code de commerce).