Date de début de publication du BOI : 01/10/1996
Identifiant juridique : 13E3362
Références du document :  13E3362

SOUS-SECTION 2 FORME ET CONTENU

SOUS-SECTION 2

Forme et contenu

GENERALITES

Pour s'assurer que les prescriptions des articles 485 et 486 du Code de Procédure pénale ont été strictement respectées, la rédaction du jugement comprend :

1° Une partie formelle

Intitulé, date, nom des parties, des juges, du greffier, présence et réquisitions du ministère public, plaidoirie des avocats et nom de ceux-ci, termes de la citation ou de l'ordonnance qui a saisi le tribunal, caractère de la sentence (contradictoire ou par défaut), textes de loi appliqués, réponses aux demandes des parties, signatures du président et du greffier.

2° Une partie narrative

Exposé des circonstances de la prévention permettant de vérifier si les faits sont constitutifs de l'infraction retenue.

3° Une partie discursive

Examen critique des moyens sur lesquels les parties en cause étayent leur argumentation, exposé des raisons qui motivent la décision des juges.

4° Une partie dispositive

Constituée par le libellé de la sentence rendue tant sur l'action publique que, le cas échéant, sur l'action civile.

5° Et in fine, la formule exécutoire

Apposée par le greffier sur la grosse du jugement.

  A. PROCEDURE A L'AUDIENCE ET FORME DU JUGEMENT

(Voir également E 3324 , Tenue des audiences)

1La procédure à l'audience a été organisée sur le modèle accusatoire : les débats sont publics, oraux et contradictoires.

Au jour fixé, l'affaire est évoquée à l'audience dans la forme ordinaire.

Les conclusions signées par le directeur des Services fiscaux sont lues par le représentant de l'Administration, puis elles sont remises au tribunal.

C'est l'assignation qui saisit le tribunal et non les conclusions. Il s'ensuit que le juge doit statuer sur l'ensemble des faits relatés dans le procès-verbal transcrit en tête de l'assignation, même si les conclusions ont omis de faire état de certains d'entre eux.

Les audiences sont ter ;ues dans les conditions exposées ci-dessus (voir E 3324 , Tenue des audiences).

Les débats sont dirigés d'un bout à l'autre par le président de la juridiction de jugement.

Les parties ayant déposé leurs conclusions et les avocats ayant, le cas échéant, plaidé, le tribunal rend son jugement.

L'instruction définitive à l'audience comprend l'interrogatoire du prévenu, l'audition des témoins et des experts.

  I. Intitulé du jugement

(Voir également E 3324 , Tenue des audiences)

Il est rédigé, sous le contrôle du président, par le greffier au vu des éléments du dossier et des notes d'audience.

Sont mentionnés :

2 1° la date à laquelle le jugement a été rendu ainsi que celle des débats (Code de Proc. Pén., art. 486).

Il a été jugé que l'omission, dans le corps mêm de la décision, de la date d'un arrêt rendu contradictoirement ne met en question ni son existence, ni sa régularité lorsqu'une mention, portée en marge de son utilité, désigne la juridiction qui l'a rendu, précise sa date et son numéro d'ordre, et que cette date ne fait l'objet d'aucune contestation de la part des demandeurs, qui s'y sont d'ailleurs référés, sans faire aucune réserve, dans leurs déclarations de pourvoi. (Cass. Crim., 9 mai 1973, RJ I, p. 43).

3 2° Les noms, prénom et qualités des parties et les conditions de leur comparution (assistance éventuelle d'un défenseur et désignation, le cas échéant, d'un représentant).

Il ne doit exister aucun doute sur les personnes mise en cause et sur la qualité en laquelle elles comparaissent.

4 3° Le nom des magistrats qui ont rendu la décision (Code de Pro. pén., art. 486) et la mention de leur présence, à tout le déroulement des débats si ceux-ci ont été développés au cours d'audiences successives (Cass. Crim., 17 novembre 1959, Bull. Crim. 490).

La jurisprudence de la Cour de cassation a précisé les conditions d'application de cette règle. A cet égard, il doit être distingué entre les jugements des tribunaux correctionnels et les arrêts des cours d'appel.

• Tribunaux correctionnels.

5Le tribunal correctionnel est composé d'un président et deux juges. Toutefois, il n'est composé que d'un seul magistrat pour le jugement des délits prévus à l'art. 398-1 du CPP.

Lorsqu'un procès paraît de nature à entraîner de longs débats, le président du tribunal de grande instance peut décider qu'un ou plusieurs magistrats du siège supplémentaires assisteront aux débats. Dans le cas où un ou plusieurs magistrats du siège composant le tribunal correctionnel seraient empêchés de suivre les débats jusq'au prononcé du jugement, ils sont remplacés par le ou les magistrats du siège supplémentaires dans l'ordre de leur nomination au tribunal de grande instance, en commençant par le plus ancien du rang le plus élevé (Code de Proc. pén., art. 398).

Voir également, l'article 592 du Code de Procédure pénale (nullité des décisions prononcées) et E 3324, n°s 3 et suivants.

Dans l'hypothèse où l'audience n'a pas été présidée par le magistrat désigné soit par l'assemblée générale du tribunal, soit par le président de ce tribunal pour siéger habituellement à la chambre où l'affaire a été appelée, le jugemert doit spécifier après le nom du président d'audience, l'empêchement du titulaire et la qualification du magistrat qui le remplace (Cass. crim., 11 juillet 1967, Bull. crim, 213). Cf. Code de l'Organisation judiciaire, art, R* 311-21, (JO du 18 mars 1978, p, 1164).

Si le tribunal est complété par un avocat, appartenant au barreau du siège du tribunal, la minute doit mentionner que l'ordre du tableau a été observé (Cass. crim., 26 décembre 1961, Bull crim. 554).

Est irrégulier le remplacement du président désigné pour présider habituellement la chambre par celui d'une autre chambre qui viendrait compléter le tribunal pour suppléer le titulaire empêché (Cass. crim., 8 février1961, Bull. crim. 81).

• Cours d appel

6 La chambre des appels correctionnels est composée d'un président de chambre et de deux conseillers (Code de Proc. pén., art. 510).

Il a été notamment jugé :

- qu'en matière d'appel, « les magistrats ayant eux-mêmes la capacités de siéger, il y a présomption légale que celui qui est appelé à compléter une chambre l'est conformément aux dispositions de l'article 3 de la loi du 28 avril 1919 1 et que cette présomption ne peut être détruite que par la preuve contraire » (TGI, Jugements et arrêts, I, n° 49 ; Cass. Crim., 15 avril 1932, BCI 10).

- qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 28 avril 1919, lorsqu'une chambre ou une section est dans l'impossibilité de se constituer, les magistrats peuvent siéger dans une chambre ou section, soit civile soit correctionnelle, autre que celle à laquelle ils ont été affectés en vertu du tableau annuel de roulement, Le même texte précise, d'autre part, qu'en cas d'empêchement, les premier président, prssident de chambre ou président de section des cours d'appel, sont remplacés, pour le service des audiences, par le magistrat le plus ancien dans l'ordre des nominations 2 .

Encourt, dès lors, la cassation, l'arrêt dont les énonciations ne permettent pas de vérifier si ces dispositions ont été observées (Cass. crim., 17 décembre 1958, RJCI 1958, n° 126, p. 333) :

- qu'un avocat n'a qualité pour remplacer un conseiller que sous la double condition qu'il n'y ait aucun conseiller disponible et que l'avocat ait été appelé dans l'ordre du tableau.

Encourt la cassation l'arrêt qui, énonçant qu'un avocat appelé à compléter la cour en remplacement du magistrat titulaire empêché et comme étant le plus ancien des avocats inscrits au tableau présents à la barre, ne constate pas que les autres membres de la cour étaient dans l'impossibilité de compléter la chambre correctionnelle (TGJ, Jugements et arrêts, I, n° 70 : Cass. crim., 7 février 1947, RJCI 1949, n° 1, p. 3 : voir ci-dessus E 3323 , Composition du tribunal).

7Aux termes de l'article 513 du Code de Procédure pénale, l'appel est jugé à l'audience, sur le rapport oral d'un conseiller faisant partie de la juridiction appelée à statuer.

La participation du conseiller rapporteur au jugement constitue une formalité substantielle.

Lorsqu'un arrêt énonce : « Puis le Monsieur le Président a donné la parole à Monsieur le Conseiller... qui a fait le rapport publiquement », le mot « puis » et le membre de phrase « a donné la parole à Monsieur le Conseiller... qui » ayant été rayés, sans que cette rature soit approuvée, la Cour de cassation se trouve dans l'impossibilité de contrôler la participation au jugement du conseiller rapporteur (Cass. crim., 5 juin 1973, RJ n° 1, p. 75).

Au cas particulier, la décision de la Cour est intéressante en ce qu'elle fait des dispositions de l'article 107 du Code de Procédure pénale - qui ne vise, strictement, que les procès-verbaux d'audition de témoins par le juge d'instruction - une application générale (irrégularités, mots rayés ne permettant pas à la Cour d'exercer son droit de contrôle).

Lorsqu'un arrêt constate que la cause a été appelée et plaidée à une audience et renvoyée, pour le prononcé de l'arrêt, à une date ultérieure et que, d'autre part, ledit arrêt, rendu à cette derniére date, porte la mention finale - « Ainsi jugé et prononcé en audience publique les jours, mois et an susdits » - qui se réfère à la formule initiale indiquant-qu'étaient présents MM ..., cette dernière énonciation se réfère elle-même à toutes les audiences auxquelles l'affaire a été débattue et jugée et les magistrats qui ont concouru au jugement sont réputés, à défaut de constatation ou preuve contraire, avoir assisté à ces diverses audiences (Cass. crim., 20 janvier 1959, RJCI 1959, n° 11, p. 28).

Enfin, la cour suprême a jugé que la régularité de la composition de la Cour est établie par un arrêt constatant qu'elle était présidée par le conseiller le plus ancien dans l'ordre des nominations à défaut du magistrat du siège désigné,suivant les modalités des articles 40 et 41 du décret du 6 juillet 1810, modifié par celui du 13 décembre 1965 3 . L " empêchement du président titulaire s'en déduit nécessairement, en effet, à raison de la référence expresse aux textes précités (Cass. Crim., 4 janvier 1977, RJCI 1977, p. 25).

84° Le nom du représentant du ministère public qui a conclu à l'audience ou a assisté au prononcé de la sentence (Code de Proc. pén., art. 460, 486, 512 et 592).

L'indivisibilité du ministère public permet que plusieurs membres du Parquet se succèdent au cours des débats.

En application du même principe d'indivisibilité, la Cour de cassation a décidé que l'omission à la minute du patronyme du magistrat du ministère public présent aux débats n'entraîne pas la nullité du jugement (Cass. crim., 26 février 1970, Bull. crim. 81, p. 182).

Il y a présomption que le ministère public porté à la minute comme présent aux débats a assisté à toutes les audiences (Cass. crim., 25 octobre 1967, Bull. crim. 269).

L'audition du ministère public est une formalité substantielle. La preuve de son accomplissement doit, à peine de nullité, être apportée par les mentions de la décision elle-même.

Doit, dès lors, être annulé un jugement qui constate la présence du ministère public, mais ne précise pas que le substitut qui le représentait a eu la parole, et a été entendu en ses réquisitions (Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 19 février 1973, RJ 1, p. 9 ; Cass. crim., 13 mai 1942, RJCI 57, p. 160 ; Cass. crim., 6 décembre 1945, RJCI 30, p. 49 ; Cass. crim., 14 novembre 1946, RJCI 42, p. 96 : Cass. crim., 6 octobre 1954, RJCI 36, p. 92 ; Cass. crim., 9 mars 1965, Bull. crim. 68, p. 149 et les arrêts cités).

Toutefois, faisant application des dispositions de l'article 802 du Code de Procédure pénale, la cour suprême a jugé que la nullité qui, aux termes de l'article 592, alinéa 2, du même code, résulte du défaut d'audition du ministère public, ne saurait être prononcée dès lors qu'il n'est pas démontré, ni même allégué, que cette irrégularité ait eu pour effet de porter atteinte aux intérêts du demandeur. Elle a donc rejeté le moyen tendant à l'annulation d'un arrêt, qui tout en constatant la présence du ministère public à l'audience, ne mentionnait pas qu'il avait été entendu dans ses réquisitions (Cass. crim., 21 novembre 1977, RJCI 1977, p. 199).

Nota. : - Il résulte des articles 460 et 512 du Code de Procédure pénale que. devant la Cour d'appel comme devant le tribunal. le ministère public doit prendre ses réquisitions. Cette formalité substantielle est prescrite à peine de nullité (Code de Proc. pénale, art. 592, al. 2) et la preuve de son accomplissement doit résulter du jugement ou de l'arrêt lui-même (Cass. crim. part., 8 janvier 1972, Bull. crim. 8, p. 16). Il ne suffit donc pas que celui-ci mentionne la présence du ministère public à l'audience.

Si, en l'espèce, la chambre criminelle a néanmoins rejeté le pourvoi du prévenu, fondé sur l'absence, dans l'arrêt attaqué, de toute mention relative à l'audition du ministère public, c'est parce que, désormais, les juridictions pénales (y compris la Cour de cassation) ne peuvent prononcer, sur requête ou d'office, la nullité d'un acte que lorsque l'irrégularité dont il est entaché a porté atteinte aux intérêts de la partie qu'il concerne. C'est, bien entendu, à cette partie qu'il incombe de démontrer le préjudice qu'elle a subi.

Cette règle - pas de nullité sans grief - résulte de l'article 802 du Code de Procédure pénale, et s'applique « en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles  ». L'examen des travaux préparatoires prouve que l'intention du législateur a été d'exclure également les nullités d'ordre public du champ d'application de l'article 802 : pour être prononcées, ces nullités ne nécessitent pas la preuve d'un grief.

Il résulte de la décision rapportée ci-dessus que l'annulation d'un arrêt rendu sans que le ministère public ait été entendu -ou, ce qui revient au même, sans qu'il soit fait mention de l'accomplissement de cette formalité- ne peut être prononcée que s'il en est résulté une atteinte aux intérêts du demandeur. Dès lors, il est permis de se demander si la cour suprême, en statuant de la sorte, a entendu dénier à la formalité dont il s'agit le caractère d'ordre public que l'on pouvait légitimement lui attribuer ou bien si elle a voulu donner de l'article 802 une interprétation extensive en incluant dans les causes d'annulation qu'il vise celle résultant de l'inobservation d'une formalité d'ordre public.

Il est toutefois précisé que l'arrêt faisant l'objet du pourvoi a été rendu dans une poursuite purement fiscale pour infractions à la réglementation de la billetterie dans les établissements de spectacles comportant un prix d'entrée.

Cette circonstance -la lecture des motifs de sa décision le confirme- a été déterminante pour la chambre criminelle. Dans ce cas, en effet, le ministère public n'a pas véritablement à prendre de réquisitions : l'application des peines fiscales est réclamée par l'Administration partie poursuivante (cf. ci-avant E 3352 , Exceptions et autres incidents ; et ci après E 3392 , décisions susceptibles de pourvoi).

10 5° Signature de la minute par le président et le greffier (Code de Proc. pén., art. 486).

La mention sur l'expédition d'un arrêt qui a été signé par le président et le greffier, vaut jusqu'à inscription de faux) Cass. crim., 7 janvier 1976, RJ 1, p. 7).

Il convient donc, lorsqu'il en est ainsi, de considérer que la minute de l'arrêt satisfait à la prescription de l'article 486, alinéa 2, du Code de Procédure pénale.

L'inobservation de cette disposition n'est d'ailleurs pas de nature à entraîner la nullité de la décision dans la mesure où elle ne met pas en question l'existence de la décision elle-même (cf. par exemple sous l'empire de l'article 196 de l'ancien Code d'Instruction criminelle, texte que l'article 486 du Code de Procédure pénale reproduit pour l'essentiel).

Parmi la jurisprudence constante, on citera : Cass. crim., rejet, 23 mai 1874, Bull. crim. 144, p. 267 ; Cass. crim., rejet, 24 février 1905, Bull. crim. 88, p. 137 ; Cass. crim., rejet, 28 décembre 1912, Bull. crim. 686, p. 1242 ; Cass. crim., rejet, 5 février 1948, Bull. crim. 45, p. 66 ; Cass. crim., rejet, 9 décembre 1958, Bull. crim. 729, p. 1305. Rappr. crim., rejet, 20 juillet 1960, Bull. crim. 379, p. 759 ; Crim., rejet, 12 mai 1971, Bull. crim. 153, p. 387.

1   Voir Code de l'Organisation judiciaire, article R* 213-10 (JO du 18 mars 1978, p. 1158).

2   Voir Code de l'Organisation judiciaire, article R* 213-7 (JO du 18 mars 1978, p. 1158).

3   Voir Code de l'Organisation judiciaire, article R* 213-7 (JO du 18 mars 1978, p. 1158).