SOUS-SECTION 2 ÉCONOMIE DU RÉGIME SPÉCIAL
SOUS-SECTION 2
Économie du régime spécial
1Le régime spécial défini à l'article 239 bis B comporte :
- d'une part, la taxation atténuée des plus-values nettes réalisées sur les éléments de l'actif immobilisé lors des opérations de liquidation ;
- d'autre part, l'application d'une taxe forfaitaire de 15 % aux plus-values soumises à l'impôt sur les sociétés 1 ainsi qu'à tout ou partie des réserves figurant au bilan de la société à la date de la dissolution. La taxe forfaitaire tient lieu de la retenue à la source visée à l'article 119 bis du CGI (dans le cas exceptionnel où celle-ci est exigible) ainsi que de l'impôt sur le revenu normalement dû, sous le régime de droit commun, à raison de la distribution de ces plus-values.
Le régime spécial, en revanche, demeure sans effet sur les droits d'enregistrement et taxes diverses dus par les sociétés dissoutes.
A. PLUS-VALUES TAXABLES AUX TAUX RÉDUITS DES PLUS-VALUES À LONG TERME
2 L'article 239 bis B dispose que les plus-values nettes réalisées lors de la liquidation des sociétés dont la dissolution a été agréée peuvent être imposées en totalité suivant les règles applicables aux plus-values à long terme, quelle que soit la date de l'acquisition des biens.
Toutes les plus-values nettes dégagées par la cession des éléments de l'actif immobilisé ou leur attribution aux actionnaires ou associés sont donc, selon le cas, taxables à l'impôt sur les sociétés :
- d'après le taux de 25 % s'il s'agit de plus-values constatées sur des terrains à bâtir ou immeubles assimilés au sens de l'article 691 du CGI 2 ;
- d'après le taux de 15 % dans les autres cas.
3 Le montant des plus-values taxables s'entend des plus-values nettes, c'est-à-dire de celles obtenues après compensation, dans les diverses catégories d'imposition, des plus ou moins-values partielles constatées sur chacun des éléments de l'actif immobilisé. Enfin, chaque plus-value ou moins-value est déterminée par comparaison entre, d'une part, le prix de vente obtenu (ou la valeur mentionnée dans l'acte s'il y a appréhension par un associé dans le cadre du partage de l'actif social) et d'autre part, la valeur que l'immobilisation aliénée avait du point de vue fiscal, dans les écritures de l'entreprise cédante 3 . Il s'ensuit notamment que les plus-values réinvesties au titre de l'ancien article 40 du CGI ou les plus-values provisoirement exonérées au titre de l'ancien article 210 du même code sont quelle que soit leur nature, passibles du régime du long terme.
B. TAXE FORFAITAIRE DE 15 %
4La taxe forfaitaire de 15 % a pour but et pour résultat de libérer les éléments de l'actif social qui lui servent d'assiette de certains impôts légalement dus à raison de leur distribution, qu'il y ait liquidation et que cette distribution soit effective ou qu'il y ait transformation et quelle soit alors seulement réputée faite du point de vue fiscal.
I. Assiette de la taxe forfaitaire
5L'application du régime spécial implique pour les sociétés qui y sont admises, l'obligation d'acquitter, à l'occasion de la distribution de leur boni de liquidation, ou, en cas de transformation visée à l'article 3 de l'arrêté ministériel du 17 mai 1976 (cf. D 2240 ), à l'occasion de l'appropriation par les associés des sommes réputées distribuées du fait de cette opération (plus-values et réserves) 4 , une taxe forfaitaire au taux uniforme de 15 %. Celle-ci est établie et recouvrée selon les mêmes modalités que la retenue à la source applicable aux distributions antérieures au 1 er janvier 1966.
La base de cette taxe est égale :
- au montant net, après déduction de l'impôt sur les sociétés, des plus-values liquidatives soumises à cet impôt aux taux réduits de 15 % ou 25 % ;
- majoré le cas échéant du montant des réserves figurant au bilan de la société à la date de sa dissolution.
1. Plus-values liquidatives.
6Compte tenu des taux réduits de 15 % ou 25 % applicables aux plus-values de cession, la taxe forfaitaire ne peut, en règle générale, porter sur les sommes ou valeurs supérieures à 85 % ou 75 % de leur montant
D'autre part, il a paru possible d'admettre que les plus-values qui seraient normalement susceptibles d'échapper à l'impôt sur les sociétés en vertu d'une disposition spéciale 5 , soient retenues pour la détermination de la base de la taxe forfaitaire lorsqu'elles sont afférentes à des éléments de l'actif immobilisé à la condition que la société ait volontairement acquitté, du chef de ces plus-values, l'impôt sur les sociétés au taux approprié.
Bien que la loi vise les plus-values « qui auront été soumises » à l'impôt sur les sociétés au taux réduit, il convient d'admettre que l'application de la taxe forfaitaire de 15 % pourra, dans certains cas, être préalable à celle de l'impôt sur les sociétés, en raison des délais de déclaration et de paiement prévus pour ce dernier impôt
Il appartiendra alors aux sociétés intéressées de faire apparaître le montant des distributions qu'elles estimeront susceptibles d'être admises au bénéfice du régime spécial, compte tenu à la fois de la teneur de l'agrément qui leur aura été accordé et du montant des plus-values qu'elles se proposent de déclarer pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés.
Bien entendu, les sociétés admises au bénéfice du régime spécial peuvent, si elles estiment y avoir intérêt, limiter l'application de la taxe forfaitaire à des sommes ou valeurs d'un montant inférieur au maximum défini ci-dessus.
2. Réserves existant au jour de la dissolution.
7L'article 239 bis B prévoit que l'agrément peut comporter l'autorisation de distribuer, sous le bénéfice du régime spécial, tout ou partie des réserves figurant au bilan de la société à la date de sa dissolution.
Les réserves dont il s'agit s'entendent, en principe, des bénéfices et profits de toute nature- ayant ou non supporté l'impôt sur les sociétés - que la personne morale a réalisés depuis sa formation et qu'elle a décidé de conserver dans son patrimoine, sous quelque dénomination et sous quelque poste qu'ils figurent au bilan, y compris ceux qui ont été incorporés au capital depuis le 1 er janvier 1949 6
Ne peuvent, au contraire, être répartis sous le couvert de la taxe fofaitaire :
- les bénéfices afférents au dernier exercice social clos à la date de la dissolution ;
- éventuellement, ceux provenant de l'exercice précédent, mais dont l'affectation résulterait de décisions postérieures à la dissolution.
En toute hypothèse, la nature et le montant des réserves susceptibles d'être distribuées avec le bénéfice du régime de faveur sont mentionnés dans la décision d'agrément.
3. Imputation de la taxe additionnelle au droit d'apport.
8Lorsque la taxe forfaitaire de 15 % porte sur des réserves ayant supporté la taxe additionnelle au droit d'apport à l'occasion d'une fusion ou d'une augmentation de capital intervenue entre le 1 er janvier 1949 et l'entrée en vigueur du décret n° 52-804 du 30 juin 1952, il convient d'admettre l'imputation de cette taxe additionnelle sur la taxe forfaitaire de 15 %.
II. Conséquences du paiement de la taxe forfaitaire
9Les conséquences du paiement intéressent non seulement la société qui a versé la taxe, mais également les associés qui bénéficient de la répartition des sommes lui ayant servi de base. À leur égard, toutefois, les effets diffèrent selon qu'ils sont soumis à l'impôt sur le revenu ou qu'ils sont, au contraire, redevables de l'impôt sur les sociétés.
1. Au regard de la société dissoute.
10La société est dispensée d'opérer la retenue à la source visée à l'article 119 bis -2 du CGI, à concurrence des sommes ou valeurs ayant donné lieu au paiement de la taxe forfaitaire de 15 % et qui sont attribuées à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France.
Elle est également dispensée d'acquitter à raison de la distribution ayant donné lieu au paiement de la taxe forfaitaire, le précompte visé à l'article 223 sexies du CGI dès lors qu'aucun crédit d'impôt n'est accordé du fait de la distribution.
Il résulte enfin d'une disposition expresse du I de l'article 239 bis B que la taxe forfaitaire de 15 % ne constitue pas une charge déductible pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés.
2. Au regard des associés soumis à l'impôt sur le revenu.
11Dans ce cas, qui est celui où les associés sont des personnes physiques, la taxe de 15 % affranchit les sommes sur lesquelles elle a été perçue du paiement de l'impôt sur le revenu dû en raison de leur répartition.
Il en est de même lorsque les associés sont des personnes morales relevant de l'article 8 du CGI dans la mesure du moins où les bénéfices de ces personnes sont imposables à l'impôt sur le revenu.
Corrélativement, ainsi que le précise le IV de l'article 239 bis B, les distributions auxquelles donnent lieu les opérations agréées n'ouvrent pas droit à l'avoir fiscal.
On notera enfin que, sauf application de l'article 161 du CGI 7 , la partie du boni de liquidation n'ayant pas supporté la taxe forfaitaire demeure passible, lors de la distribution, de l'impôt sur le revenu dans les conditions du droit commun.
3. Au regard des associés passibles de l'impôt sur les sociétés.
12La taxe forfaitaire de 15 % tient lieu de la retenue à la source et de l'impôt sur le revenu. C'est ce que décide le deuxième alinéa du I de l'article 239 bis B. Cette disposition à caractère dérogatoire ne peut, comme il est de règle, qu'être limitativement appliquée. Par suite, lorsque les sommes réparties constituent pour leurs ayants droit des profits imposables à l'impôt sur les sociétés, la perception de la taxe forfaitaire demeure sans influence sur le principe comme sur l'assiette de cet impôt. Elle ne donne pas lieu non plus à l'attribution de l'avoir fiscal. Elle est seulement considérée comme un acompte à valoir sur le montant de l'impôt sur les sociétés, sans que la déduction à opérer de ce chef puisse excéder la fraction de cet impôt correspondant aux sommes ainsi distribuées.
Ce droit d'imputation, accordé par l'article 220-I a du CGI, a des effets différents selon qu'il y a application ou non du régime des sociétés mères.
13Cas général. - La société bénéficiaire de la distribution ayant donné lieu au paiement de la taxe forfaitaire peut imputer le montant de cette taxe sur l'impôt sur les sociétés dont elle est redevable au titre de l'exercice dont les résultats englobent les sommes ou valeurs distribuées.
14Cas particulier des sociétés mères. - En droit strict, l'imputation de la taxe forfaitaire sur l'impôt sur les sociétés ne peut être opérée, compte tenu des dispositions combinées des articles 145 et 216 du CGI.
Les sociétés mères sont toutefois autorisées à retrancher de la retenue à la source la taxe forfaitaire ayant grevé les produits qu'elles redistribuent à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France.
En outre, pour éviter que les sociétés mères qui n'ont que des associés domiciliés ne soient désavantagées par rapport aux autres, il a paru possible d'admettre que la taxe forfaitaire de 15 % soit imputée sur le précompte dont elles sont redevables en vertu de l'article 223 sexies, au même titre que les crédits d'impôt attachés aux produits de participations encaissés au cours des exercices clos depuis cinq ans au plus, conformément aux dispositions de l'article 146-2 du code précité (cf. 4 K 1132).
C. DROITS D'ENREGISTREMENT ET TAXES DIVERSES
15L'agrément n'emporte aucune modification en matière de droits d'enregistrement, qu'il s'agisse de ceux exigibles sur l'acte même constatant la dissolution de la société (CGI, art 811-2°) ou de ceux applicables au partage de l'actif (CGI, art 746).
De même, les sociétés qui procèdent à une liquidation agréée en application de l'article 239 bis B demeurent assujetties au paiement de l'imposition forfaitaire annuelle de 1 000 F 8 due par les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés (cf. 4 FE, division L).
1 L'impôt sur les sociétés perçu sur ces gains doit être déduit pour l'assiette de la taxe forfaitaire de 15 %. Celle-ci, en effet, est calculée sur le montant net des plus-values liquidatives.
2 L'article 691 du CGI se substitue à l'article 150 ter, ce dernier ayant été abrogé par la loi n° 78-660 du 19 juillet 1976 relative à l'imposition des plus-values.
3 Le service, dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle, peut être amené à substituer la valeur vénale à la valeur d'apport ou de partage.
4 On rappelle que lorsqu'une personne morale soumise à l'impôt sur les sociétés cesse d'y être assujettie, ses bénéfices et réserves, capitalisés ou non, sont réputés distribués aux associés, en proportion de leurs droits (CGI, art. 111 bis ).
5 C'est actuellement le cas des plus-values retirées de la cession de certaines sociétés immobilières conventionnées (CGI, art. 40 sexies , 1 er al.) ou de sociétés agréées pour la recherche scientifique ou technique (CGI, art. 40 sexies , 2° al.).
6 Les réserves incorporées au capital avant le 1 er janvier 1949 n'ont jamais à être comprises dans la base de la taxe forfaitaire dès lors que leur attribution aux actionnaires ou associés après liquidation est assimilée à un remboursement d'apports en vertu de l'article 112-3°- a du CGI.
7 Cet article prévoit que le boni attribué lors de la liquidation d'une société aux titulaires de droits sociaux en sus de leur apport n'est compris, le cas échéant, dans les bases de l'impôt sur le revenu que jusqu'à concurrence de l'excédent du remboursement des droits sociaux annulés sur le prix d'acquisition de ces droits dans le cas où ce dernier est supérieur au montant de l'apport.
8 Cette somme a été portée à 3 000 F par l'article 3-III de la loi n° 77-1467 du 30 décembre 1977.