Date de début de publication du BOI : 01/01/1978
Identifiant juridique : 12C521
Références du document :  12C52
12C521

CHAPITRE 2 HYPOTHÈQUES ET PRIVILÈGE IMMOBILIER

CHAPITRE 2

HYPOTHÈQUES ET PRIVILÈGE IMMOBILIER

Les articles 1926, 1927 et 1929-1 du CGI confèrent au Trésor, pour le recouvrement des droits et taxes confié aux comptables des impôts, un privilège sur tous les meubles et effet mobiliers des redevables.

Pour garantir ses droits sur les immeubles de ces derniers le Trésor ne disposait, en matière d'hypothèque, jusqu'à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 58-1372 du 29 décembre 1958 et notamment de son article 8 (repris sous l'article 1929 ter du CGI) que des procédures de droit commun d'inscription d'hypothèque judiciaire ou d'hypothèque conservatoire et de transcription de commandement à fin de saisie immobilière.

Le jugement nécessaire pour prendre une hypothèque judiciaire est souvent long à obtenir. Par ailleurs l'inscription d'une hypothèque conservatoire entraîne l'obligation de faire juger ensuite l'affaire sur le fond.

De ce fait, l'action de l'Administration à l'égard des redevables ayant un patrimoine essentiellement immobilier était pratiquement très limitée, ce qui n'était pas, parfois, sans inconvénient pour les redevables eux-mêmes qui se voyaient refuser le sursis aux poursuites qu'ils sollicitaient.

L'article 8 de l'ordonnance du 29 décembre 1958 précitée (CGI, art. 1929 ter ) a modifié les droits de l'Administration tout en laissant, bien entendu, subsister les anciennes procédures de droit commun et notamment celle de l'hypothèque judiciaire toujours possible après jugement.

Pour garantir ses droits, le Trésor dispose donc actuellement :

- de l'hypothèque légale prévue à l'article 1929 ter du CGI ;

- et de l'hypothèque judiciaire (Code civ., art. 2116, 2117 et 2123).

Par ailleurs il peut bénéficier de la constitution d'une hypothèque conventionnelle (Code civ., art. 2124 à 2133).

A ces trois catégories de sûreté il y a lieu d'ajouter le privilège de la séparation des patrimoines qui peut être demandé, en vertu des articles 878 et 2103-6 e du Code civil, par les créanciers du défunt et notamment par l'Administration.

Avant d'examiner les modalités pratiques que les comptables des impôts doivent adopter, pour la constitution de chaque catégorie d'hypothèque et notamment de l'hypothèque légale du Trésor, il convient de poser les règles générales les gouvernant

Par ailleurs, une section est consacrée au privilège de la séparation des patrimoines.

SECTION 1

Règles générales relatives aux hypothèques

1Aux termes de l'article 2114 du Code civil « l'hypothèque est un droit réel sur les immeubles affectés à l'acquittement d'une obligation.

Elle est, de sa nature, indivisible, et subsiste en entier sur tous les immeubles affectés, sur chacun et sur chaque portion de ces immeubles.

Elle les suit dans quelques mains qu'ils passent. ».

Les caractéristiques de l'hypothèque découlent de cet article même :

1. L'hypothèque est un droit réel accessoire.

2L'hypothèque, qui consiste en l'affectation d'un immeuble à la garantie d'une dette, sans dessaisissement du débiteur, constitue un droit réel accessoire lié à la créance.

En effet elle procure au créancier non payé à l'échéance la possibilité de saisir l'immeuble en quelques mains qu'il se trouve et de se faire payer par préférence sur le prix.

Elle suppose donc une créance dont elle est destinée à garantir le paiement et à laquelle elle reste étroitement attachée.

Mais il n'est pas indispensable que la créance existe lors de la constitution de l'hypothèque : celle-ci peut garantir une créance tuture ou éventuelle.

Enfin, du caractère accessoire du droit réel conféré par l'hypothèque il résulte que celle-ci prend fin automatiquement lorsque la créance se trouve annulée par la renonciation du créancier à l'hypothèque ou éteinte par paiement et qu'elle suit la créance dans le cas de cession de celle-ci.

On notera, cependant, que l'hypothèque peut se détacher de la créance lorsqu'elle est cédée isolément par le créancier (subrogation à l'hypothèque).

2. L'hypothèque est un droit immobilier.

3L'hypothèque ne peut être constituée que sur des immeubles.

En effet le Code civil énonce :

- dans son article 2118, « sont seuls susceptibles d'hypothèques :

• les biens immobiliers qui sont dans le commerce, et leurs accessoires réputés immeubles ;

• l'usufruit des mêmes biens et accessoires pendant le temps de sa durée ».

- dans son article 2119, « les meubles n'ont pas de suite par hypothèque ».

Bien que la créance qu'elle garantit soit le plus souvent mobilière, l'hypothèque garde le caractère d'un droit immobilier du seul fait de sa constitution obligatoire sur des biens immeubles.

Ce caractère immobilier est conforté par la nécessité d'avoir la capacité requise pour aliéner un immeuble lorsqu'il s'agit de renoncer à une hypothèque ou céder une créance hypothécaire.

Il est toutefois à noter que, par exception aux dispositions de l'article 2119 du Code civil, l'interdiction d'hypothéquer les meubles n'a pas de valeur à l'égard des navires, bateaux et aéronefs qui, en raison de leur individualisation aisée, sont susceptibles d'hypothèque (cf. infra 5218).

3. L'hypothèque est un droit indivisible.

4De l'article 2114 du Code civil rappelé ci-dessus (n° 1 ) il découle que chaque partie d'un immeuble hypothéqué garantit l'intégralité de la dette et que chaque fraction de la dette est garantie par l'immeuble tout entier.

Ces principes trouvent à s'appliquer notamment :

- en cas de division de l'immeuble (vente en plusieurs lots, démembrement en nue-propriété et usufruit) ; l'hypothèque subsiste en entier sur chaque fraction de l'immeuble, autrement dit le créancier peut demander le paiement de la totalité de sa créance sur la fraction suffisante de son choix.

- en cas de division de la créance (décès du créancier laissant plusieurs héritiers) ; chaque bénéficiaire peut se prévaloir de l'hypothèque sur la totalité de l'immeuble grevé ;

- en cas de division de la dette (décès du débiteur laissant plusieurs héritiers) ; le ou les attributaires de l'immeuble hypothéqué doivent répondre de la totalité de la dette. Cette solution résulte de l'article 873 du Code civil qui précise que « les héritiers sont tenus des dettes et charges de la succession pour leur part et portion virile, et hypothécairement pour le tout ;... ».

Ainsi la loi évite au créancier hypothécaire de poursuivre chaque débiteur à concurrence de sa part et écarte, à son profit, le risque d'insolvabilité de l'un d'eux.

5L'hypothèque ainsi définie, il convient d'examiner successivement :

- les biens susceptibles d'être hypothéqués ;

- l'assiette de l'hypothèque ;

- les diverses espèces d'hypothèques ;

- l'inscription des hypothèques ;

- la durée, la péremption et le renouvellement des hypothèques ;

- les effets de l'hypothèque ;

- la réduction, la transmission et l'extinction des hypothèques.

Enfin, une dernière sous-section est réservée aux cas particuliers des hypothèques sur les navires, bateaux et aéronefs.