CHAPITRE 4 CAS PARTICULIERS
CHAPITRE 4
CAS PARTICULIERS
1. Imposition en cas de divorce.
1En cas de divorce, les biens de communauté restent imposés au nom des deux époux (cf. ci-dessus B 32, n os 11 et suiv.) jusqu'à la publication de l'acte liquidatif de la communauté.
2. Héritiers.
2Tant que le partage n'est pas intervenu, les immeubles compris dans une indivision successorale doivent être imposés à la taxe foncière sous la dénomination collective des héritiers, y compris ceux qui n'ont dans la succession qu'un droit d'usufruit (CE, arrêt du 15 juillet 1964, Dupont 1964, p. 766) 1 .
Les biens sont portés à un compte ouvert au nom du « de cujus » suivi de la mention « (succession) ».
3Toutefois, si la succession, ouverte par le décès de l'un des époux, comprend des biens de communauté, ces biens sont portés, sans les séparer des propres du défunt, à un compte ouvert sous la désignation du « de cujus » suivie de la mention « (succession) » et sous la désignation du conjoint survivant les indications relatives au mari étant toujours mentionnées les premières.
4La succession à héritier ou légataire unique est traitée comme une succession indivise entre plusieurs héritiers ou légataires lorsque les biens sont grevés d'un usufruit partiel au profit du conjoint survivant
5Lorsque l'héritier a accepté la succession sous bénéfice d'inventaire, il ne peut exciper de cette réserve pour se soustraire à l'obligation d'acquitter l'impôt à raison des biens qu'il a recueillis et dont il est détenteur (CE, arrêt du 9 janvier 1905, Lebon, p. 26). Il ne saurait être tenu, cependant du paiement de l'impôt sur ses biens personnels mais seulement sur ceux de la succession.
3. Contestation sur le droit de propriété.
6Lorsque la propriété d'un bien fait l'objet d'un litige et qu'il n'existe pas de motif d'attribution de la propriété apparente à l'un plutôt qu'à l'autre des revendiquants, ce bien est inscrit à un compte dont le libellé est analogue à celui d'une indivision. Cette situation est normalement appelée à se dénouer par un accord entre les intéressés ou par une décision de la juridiction civile.
7Par contre, lorsqu'un contribuable demande que la taxe foncière afférente à une portion de parcelle inscrite par erreur, selon lui, au nom d'un tiers soit mutée à son nom, le litige soulève une question préjudicielle, touchant le droit de propriété, qui est de la compétence de l'autorité judiciaire. Dès lors, l'attribution à la matrice cadastrale est maintenue au nom de l'actuel propriétaire apparent à moins que cette inscription ne résulte d'une erreur antérieure, dûment établie, imputable à l'Administration. Les intéressés sont invités à faire trancher leur différend par la juridiction compétente, et l'attribution de propriété est rectifiée, le cas échéant, dans la documentation cadastrale après publication au fichier immobilier de la décision judiciaire intervenue.
4. Abandon de propriétés à la commune.
8Les propriétaires de terres vaines et vagues, landes, bruyères et terrains habituellement inondés ou dévastés par les eaux peuvent s'affranchir de l'imposition à laquelle ces terrains sont soumis s'ils renoncent à ces propriétés au profit de la commune dans laquelle ils sont situés (CGI. art. 1401).
9Cette possibilité de renonciation porte sur la propriété elle-même. Ainsi, en cas d'indivision, ce renoncement ne serait possible que si, par l'effet d'un partage préalable, les droits privatifs du renonçant sur une quote-part de l'immeuble en cause avaient été nettement délimités ou si tous les indivisaires renonçaient à leurs droits au profit de la commune.
10Ne peuvent, par ailleurs, faire l'objet d'un abandon à la commune, en vertu de l'article 1401 précité, que les terrains ne comportant aucun aménagement particulier de nature à les rendre propres à un usage agricole, industriel, commercial ou à des fins d'habitation. Ceci exclut, en particulier, du champ d'application de l'article 1401 des biens comportant principalement un canal et les ruines d'un moulin, alors même que ces installations se trouveraient, par défaut d'entretien, en état de délabrement et que, pour cette raison, les terrains attenants seraient parfois envahis par les eaux (CE, arrêt du 18 juin 1965, commune de Brassempouy, Landes, RO, p. 373). De même, ne peut être abandonnée à la commune, une parcelle comportant des installations industrielles utilisées antérieurement à l'exploitation d'une carrière bien qu'elles soient par défaut d'entretien en mauvais état et en partie détruites et bien que, par suite, la parcelle ait été inondée (CE, arrêt du 27 novembre 1974, sieur X... ).
11La déclaration détaillée de l'abandon est faite par écrit, sur papier timbré, à la mairie de la commune, par le propriétaire ou par un fondé de pouvoir spécial.
Les formalités à accomplir par la commune pour que l'abandon fait à son profit soit opposable aux tiers et que la propriété lui soit transférée, sont les formalités de droit commun résultant du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière et des textes subséquents.
Lorsqu'il s'agit de parcelles situées dans une commune soumise à la conservation cadastrale et inscrites au fichier immobilier, le service établit en double exemplaire un procès-verbal comportant la copie de la déclaration d'abandon certifiée par le maire de la commune ainsi que les désignations cadastrales des parcelles à muter.
Si les parcelles ne sont pas inscrites au fichier immobilier, les parcelles abandonnées sont mutées au vu de la seule déclaration d'abandon.
12Dès que le propriétaire a fait sa déclaration d'abandon, celui-ci devient définitif sans qu'il soit besoin, pour sa réalisation, de l'acceptation des autorités municipales, pourvu toutefois que celles-ci aient été régulièrement mises en cause.
Au cas où la commune refuserait de consentir à l'abandon qui lui est fait, le propriétaire aurait la faculté d'introduire une demande régulière en mutation de cote et il appartiendrait alors aux tribunaux administratifs d'apprécier, après instruction contradictoire, si, en son état actuel, le terrain en cause entre dans la catégorie de ceux visés à l'article 1401 du CGI et si les dispositions de ce texte ont été régulièrement observées.
13Le propriétaire qui abandonne des parcelles en cours d'année n'est affranchi d'impôt pour ces parcelles qu'à partir du 1 er janvier suivant en vertu du principe que les cotisations des terrains ainsi abandonnées comprises dans les rôles établis antérieurement à l'abandon restent à la charge du contribuable imposé.
14Les dispositions de l'article 1401 du CGI ne s'appliquent que dans le cas d'un abandon du terrain aux communes. Elles ne sauraient, par suite, être invoquées en vue d'un abandon à d'autres collectivités et, notamment à des associations syndicales.
15Les communes où il existe des terres incultes dont les propriétaires ont disparu, dont nul ne revendique la possession et dont les impôts sont passés en non-valeur, n'ont aucun droit pour appréhender lesdits immeubles 2 . Seul l'État peut les revendiquer (cf. ci-dessous, n° 16 ).
5. Biens vacants et sans maître 3 .
16Les biens vacants et sans maître sont inscrits dans les documents cadastraux au nom de l'État par l'administration des Domaines 4 . Toutefois, s'il s'agit de terrains cultivés, ils sont attribués, pour l'assiette de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, à l'exploitant qui en recueille les fruits 5 .
17Dans ces conditions, seules les parcelles non cultivées peuvent figurer au compte de l'État par l'administration des Domaines.
6. Biens non délimités.
18On entend par « biens non délimités » des immeubles sur lesquels plusieurs personnes ont des droits non indivis de propriété, mais dont le fractionnement n'a pu être opéré sur le plan cadastral, les propriétaires n'ayant pas été en mesure de fournir ou ayant négligé d'apporter au Service les éléments permettant d'effectuer la division, même d'une façon approximative.
En pareil cas, un seul numéro de plan est attribué à l'ensemble de la masse confondue, mais les surfaces revenant à chacun des différents propriétaires sont déterminées au mieux pour l'assiette de la taxe foncière qui, au cas particulier, est établie au nom de chacun d'eux pour la part leur revenant.
Bien entendu, les propriétaires conservent toujours la faculté de provoquer à toute époque le cantonnement sur le plan cadastral des droits immobiliers correspondant aux indications de leur titre en produisant un document d'arpentage dans les conditions fixées par le décret n° 55-471 du 30 avril 1955.
7. Fermiers (rôles de fermiers).
19La taxe foncière est toujours établie au nom du propriétaire, mais lorsque ce dernier a plusieurs locataires ou fermiers dans la même commune, il peut demander que l'impôt soit acquitté directement à son compte par ces derniers [CGI, art. 1660] 6 .
Pour cela, il doit remettre au comptable du Trésor chargé du recouvrement des impôts directs une déclaration indiquant sommairement la division de son revenu imposable entre lui et ses fermiers. Cette déclaration est signée par le propriétaire et par les fermiers.
Si le nombre des fermiers est de plus de trois, la déclaration est transmise au directeur des Services fiscaux qui opère la division de la taxe et porte, dans un rôle auxiliaire, la somme à payer par chaque fermier (CGI, ann. III, art. 351).
20En fait, même lorsqu'ils sont inscrits sur ce rôle, les fermiers ne sont pas les véritables débiteurs de l'impôt. Seul le propriétaire est poursuivi en cas de non-paiement.
8. Biens communaux.
21Les immeubles non bâtis connus sous le nom de « biens communaux » sont imposables au nom de la commune qui en acquitte les impôts tant qu'ils n'ont pas été partagés. Par contre, la taxe foncière due pour des terrains qui ne sont communs qu'à certaines portions des habitants d'une commune, est acquittée par ces habitants (CGI, art. 1401, 5 e et 6 e al.).
C'est également à la commune qu'incombe le paiement de la taxe foncière relative aux marais et terres vaines et vagues qui n'ont aucun propriétaire particulier (CGI, art. 1401, 5 e al.).
9. Biens concédés. - Chemins de fer.
22La concession est un contrat par lequel une personne morale ou physique (le concessionnaire) s'engage, vis-à-vis d'un tiers (le concédant) qui est le plus souvent une collectivité publique, à effectuer certains travaux ou à assurer certains services moyennant la perception à son profit, pendant une période déterminée, de redevances sur les usagers.
23Lorsque les terrains concédés sont imposables à la taxe foncière sur les propriétés non bâties, la taxe est mise en recouvrement au nom du concédant qui est le véritable propriétaire. Il en est ainsi dans tous les cas et même lorsqu'une clause du cahier des charges de la concession dispose que tous les impôts et taxes afférents aux biens concédés sont à la charge du concessionnaire [cf. ci-avant B 31, n° 3] 7 .
24Un exception doit être faite cependant en ce qui concerne les concessions de chemins de fer et de tramways dont le cahier des charges type mettant l'impôt à la charge du concessionnaire a reçu la sanction législative.
L'autorité concédante n'est imposable, en pareil cas, que jusqu'à la remise de la ligne, si elle s'est engagée à exécuter elle-même les travaux, ou jusqu'à la cession des terrains, si le concessionnaire doit effectuer lui-même les travaux avec ou sans subvention de l'État.
Après la remise de la ligne ou la cession des terrains, le concessionnaire devient débiteur légal de l'impôt 8 .
En conséquence, les chemins de fer d'intérêt général concédés à la SNCF ou à une autre compagnie concessionnaire sont inscrits sur les documents cadastraux à un compte ouvert au nom de la Société nationale des chemins de fer français ou de la compagnie concessionnaire concernée.
Quant aux chemins de fer d'intérêt local et aux tramways, ils sont inscrits sur les documents cadastraux au nom de la collectivité concédante lorsqu'ils sont exploités en régie et au nom de la compagnie concessionnaire lorsqu'ils sont concédés.
10. Vente d'immeuble sous condition résolutoire.
25La vente d'un immeuble non bâti sous condition résolutoire n'est pas de nature à empêcher l'acquéreur d'être considéré comme propriétaire et, par suite, d'être régulièrement imposé à la taxe foncière jusqu'à ce que la résolution de l'acte de cession de l'immeuble soit devenue effective.
1 Il appartient aux héritiers de faire diligence pour obtenir la mutation cadastrale (cf. ci-après 8 511, n° 18).
2 Lorsqu'un contribuable est imposé à raison de parcelles incultes qui n'ont jamais été siennes et dont il ignore, malgré ses recherches, le nom du propriétaire réel, il peut obtenir le dégrèvement de la taxe foncière afférente à ces parcelles, en adressant au directeur des Services fiscaux une demande en mutation de cote. Il n'est pas tenu de désigner dans cette demande le véritable propriétaire desdites parcelles.
3 La procédure d'appréhension et d'aliénation de certains immeubles présumés vacants et sans mattre a été instituée par l'article premier de la loi n° 62-933 du 8 août 1962 et commentée par la circulaire interministérielle du 18 mai 1966 (JO du 2 juillet p. 5603 et suiv.).
4 Toutefois le paiement de la taxe foncière afférente aux marais et terres vaines et vagues qui n'ont aucun propriétaire particulier incombe à la commune (CGI, art. 1401, 5° al.I)
5 L'imposition à la taxe foncière étant une opération purement fiscale, elle ne peut. par elle-même, créer ou consacrer des droits quelconques sur un immeuble. Ainsi, dans le cas d'un terrain vacant et sans maître attribué pour l'assiette de la taxe foncière à l'exploitant actuel, le paiement de l'impôt ne peut être invoqué par l'assujetti que comme présomption de l'existence d'un droit de propriété. De sorte que si le véritable propriétaire se manifeste ou si l'immeuble est appréhendé par l'État au titre des biens vacants et sans maître, le possesseur du terrain n'a la possibilité de résister à l'action en revendication du propriétaire ou de l'État qu'en justifiant être devenu lui-même propriétaire par prescription acquisitive dans les conditions de droit commun.
6 L'article L 415-3 du Code rural prévoit que « les dépenses afférentes aux voies communales et aux chemins ruraux sont supportées par le preneur. À cet effet il doit payer au bailleur une fraction du montant global de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la taxe foncière sur les propriétés non bâties portant sur les biens pris à bail. y compris la taxe régionale. À défaut d'accord amiable entre les parties, cette fraction est fixée à un cinquième ». Mais ces dispositions, dépourvues de caractère fiscal, ne permettent pas à l'État de recouvrer directement sur le fermier la part des taxes foncières normalement à se charge. Il n'en va différemment qu'en cas d'application de l'article 1660 du CGI.
7 Il s'agit là. en effet d'une clause contractuelle qui régit des rapports de droit privé entre autorité concédante et concessionnaire et qui ne peut avoir pour effet de faire échec au principe de l'imposition au nom du propriétaire (CGI, art. 1400-I). Pour éviter, à cet égard. toute difficultés l'imposition est établie au nom de l'autorité concédante (État par le ministère de tutelle intéressé par exemple) sans aucune référence au concessionnaire.
8 Compte tenu du principe de l'annualité, l'autorité concédante demeure imposable jusqu'au 31 décembre de l'année au cours de laquelle la ligne a été remise ou les terrains ont été cédés.