CHAPITRE 5 PRISE EN COMPTE DU RÉSULTAT DANS LE REVENU GLOBAL
CHAPITRE 5
PRISE EN COMPTE DU RÉSULTAT DANS LE REVENU GLOBAL
A. BÉNÉFICE NON COMMERCIAL
1Lorsque le montant des recettes est supérieur à celui des dépenses professionnelles compte tenu, le cas échéant, des plus-values ou moins-values à court terme retenues dans les conditions exposées DB 5 G 244, n°s 6 et suivants , le bénéfice ainsi réalisé est pris en compte dans le revenu global du bénéficiaire ou du foyer fiscal auquel il est rattaché.
B. DÉFICIT NON COMMERCIAL
2Le régime fiscal des déficits et pertes subis dans le cadre d'une activité non commerciale au sens de l'article 92 du CGI dépend de la nature et des conditions d'exercice de cette activité.
Les déficits qui proviennent de l'exercice d'une profession libérale ou des charges et offices 1 peuvent être imputés sur les bénéfices de même nature réalisés au cours de l'année d'imposition par les autres membres du foyer fiscal. À défaut, ils peuvent être imputés sur le revenu global dans les conditions de droit commun.
Ce déficit non commercial, cumulé, le cas échéant, avec d'autres déficits catégoriels, peut se révéler supérieur au total du revenu global. L'excédent ainsi constaté constitue alors un déficit global reportable sous certaines conditions, sur les années suivantes jusqu'à la cinquième inclusivement (cf. DB 5 B 223 ).
3Les déficits provenant d'activités non professionnelles ne sont déductibles ni d'un bénéfice professionnel, ni du revenu global. Ils peuvent seulement être imputés sur des bénéfices tirés d'activités semblables ou sur des revenus de même nature réalisés au cours de la même année ou des cinq années. suivantes. Il s'agit de ceux qui proviennent des occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus (CGI, art. 156-1-2°),
L'imputation et le report doivent être effectués de façon globale dans le cadre de toutes les activités non professionnelles. Peu importe à cet égard que ces activités soient exercées par le contribuable lui-même ou par les membres du foyer non imposés distinctement.
Il convient donc de distinguer selon qu'une activité libérale est exercée à titre professionnel ou non.
Plusieurs arrêts du Conseil d'État ont précisé cette notion, notamment en ce qui concerne les activités artistiques.
Conformément à la jurisprudence administrative, le caractère professionnel d'une activité libérale s'apprécie au regard de deux critères : l'activité doit être exercée à titre habituel et constant et dans un but lucratif 2 .
Ces deux conditions doivent être remplies simultanément.
I. Exercice de l'activité à titre habituel et constant
4D'une manière générale, le caractère habituel et constant de l'activité résulte de la répétition pendant plusieurs années des opérations qui la caractérisent.
La circonstance que l'activité en cause puisse être exercée parallèlement à une autre profession procurant à l'intéressé son moyen principal de subsistance n'exclut pas, par principe, la reconnaissance de son caractère professionnel.
Dans le domaine des activités artistiques, il en est ainsi, notamment lorsqu'un artiste consacre, sur une longue période, une partie importante de son temps à la création, lorsqu'il participe régulièrement à des expositions et voit sa notoriété consacrée par la communauté artistique.
Le Conseil d'État a ainsi reconnu un caractère professionnel à l'activité d'un artiste-peintre-sculpteur qui s'était consacré de manière constante et pendant plus de cinq ans à la pratique de son art et qui avait participé régulièrement à des expositions publiques et à des salons de peinture et de sculpture pouvant lui permettre d'acquérir la notoriété nécessaire à la vente de ses œuvres. La Haute Assemblée a relevé également qu'il avait exposé dans plusieurs galeries commerciales, qu'il avait concouru pour différents prix et été distingué à de nombreuses reprises, qu'il avait utilisé les moyens de promotion auxquels un artiste désireux de vendre ses œuvres peut recourir (CE, 17 avril 1992, n° 82308).
De même, il a été jugé que, nonobstant l'exercice à titre principal d'une activité salariée, un pilote automobile devait être regardé comme ayant exercé en cette qualité une profession libérale, dès lors que cette dernière lui avait permis d'obtenir pendant plusieurs années une notoriété concrétisée par plusieurs titres de champion de France de sa catégorie et qu'en outre, elle lui avait procuré des recettes d'un montant appréciable (C.A.A. Nantes, 9 octobre 1991, n° 89-1390).
S'agissant des propriétaires de chevaux de course éleveurs sans sol ou titulaires d'un « permis » d'entraîner 3 , le caractère habituel de l'activité peut résulter de l'exercice permanent d'un pouvoir de décision et de toutes diligences utiles traduisant une implication personnelle et complète dans cette activité (choix des poulinières à acquérir, choix des croisements, préparation des ventes, gestion de la carrière des chevaux...).
II. Exercice de l'activité dans un but lucratif
5D'une manière générale, la persistance d'un niveau très bas de recettes ou une disproportion marquée entre recettes et dépenses est un indice du caractère non professionnel de l'activité.
Mais la circonstance que l'intéressé ne tire pas de l'activité l'essentiel de ses ressources ne suffit pas pour qualifier celle-ci de non professionnelle. Il convient d'apprécier, au vu des circonstances de fait, si l'activité est exercée dans un but lucratif.
Le caractère lucratif de l'activité peut résulter de la perception effective de revenus d'un montant appréciable mais également de la mise en œuvre de moyens ou de méthodes analogues à ceux d'un professionnel et caractérisant la recherche effective d'une clientèle. La recherche d'un gain doit être un objectif poursuivi de manière évidente.
Dans le cas des artistes, la recherche d'un gain ou celle d'une clientèle doit être considérée comme établie lorsque l'intéressé utilise tous les moyens de promotion auxquels un artiste désireux de vendre ses œuvres recourt habituellement (expositions, concours, galeries d'art, presse...).
Le Conseil d'État a ainsi jugé que le fait pour un artiste d'avoir participé pendant plusieurs années à des expositions en France et à l'étranger témoignait de l'existence d'une production artistique et de la recherche d'acheteurs. L'intéressé justifiait ainsi avoir exercé une activité d'artiste-sculpteur à titre professionnel, même si cette activité ne lui avait pas procuré l'essentiel de ses ressources (CE, 20 janvier 1992, n° 76785 et 17 avril 1992, n° 82308 ; cf. également CAA Paris, 23 avril 1991, n° 89-1318).
6Lorsque les conditions décrites ci-dessus n°s 4 et 5 ne sont pas remplies, l'activité ne peut être qualifiée de professionnelle. Elle entre alors dans la catégorie des « occupations, exploitations lucratives et sources de profit ne se rattachant pas à une autre catégorie de revenus ».
Le Conseil d'État a ainsi jugé qu'un contribuable qui, parallèlement à ses fonctions de professeur d'université, avait effectué des travaux de recherche ne pouvait être regardé comme ayant poursuivi à ce titre une activité professionnelle, dès lors que lesdits travaux ne lui avaient procuré aucun revenu, n'avaient donné lieu à aucune application industrielle et que l'intéressé ne justifiait pas avoir pris contact avec une clientèle ou recherché des débouchés pour ses travaux (CE, 15 février 1989, n° 78992).
De même, lorsqu'un propriétaire de chevaux de course éleveur sans sol ou titulaire d'un « permis » d'entraîner 3 s'en remet, en fait, principalement au propriétaire du haras ou à l'entraîneur pour décider de la gestion de la carrière et de l'usage de ses chevaux, son activité ne peut être regardée comme présentant un caractère professionnel.
Il appartient bien entendu au contribuable de justifier qu'il exerce l'activité à titre professionnel (CE, 23 mars 1988, n° 68879).
Remarque : les déficits qui proviennent d'activités diverses, telle la gestion par l'intéressé de son patrimoine personnel ne peuvent en aucun cas être imputés sur le revenu global.
On peut citer, à titre d'exemple, sans que cette liste soit exhaustive :
- les personnes qui réalisent des opérations de bourse à titre habituel (CE, 6 mai 1987, n° 47755) ;
- les propriétaires de chevaux de course qui ne sont ni éleveurs ni entraîneurs (C.A.A. Bordeaux, 23 mai 1990, n°s 89757 et 89758) 4 ;
- les personnes qui donnent un immeuble en sous-location nue (CE, 21 octobre 1987, n° 51367) ;
- les héritiers ou légataires qui perçoivent les droits d'un auteur ou d'un inventeur.
1 Il est rappelé que leurs titulaires n'ont pas la qualité de commerçants.
2 Lorsque l'activité présente un caractère professionnel, le contribuable doit être assujetti à la taxe professionnelle, sous réserve bien entendu des exonérations propres à cet impôt et notamment celles qui sont mentionnées à l'article 1460 du CGI.
4 Il est rappelé que, dans certains cas, les propriétaires non-éleveurs et non entraîneurs, ne se livrent pas à une activité lucrative. Il en va ainsi de ceux qui se bornent à confier leurs chevaux à un entraîneur sans exercer de diligences susceptibles d'influencer la préparation ou la carrière de leurs chevaux. Les gains de course qu'ils réalisent n'entrent donc pas dans le champ d'application de l'impôt sur le revenu. Leurs pertes ne peuvent faire l'objet d'aucune imputation (DB 5 G 47, n° 4 in fine).