Date de début de publication du BOI : 25/06/1998
Identifiant juridique : 4G3341
Références du document :  4G334
4G3341

SECTION 4 CONTRÔLE ET RECTIFICATION DES DÉCLARATIONS


SECTION 4

Contrôle et rectification des déclarations


1Aux termes de l'article 54 du CGI, le déclarant est tenu de représenter à toute réquisition de l'Administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes ou de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans sa déclaration.

2En vertu de l'article 55 du même code le service des impôts vérifie les déclarations soit d'après les documents et renseignements en sa possession, soit dans le cadre d'opérations conduites sur place (cf. série 13 J 4).

Il peut rectifier les déclarations en se conformant à la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L 55 du LPF (cf. G 3342 et 13 L 151).

3La rectification du bénéfice imposable est une opération consistant :

- soit, si le service constate une insuffisance, une inexactitude une omission ou dissimulation dans les éléments servant de base au calcul de l'impôt, en une réintégration dans les résultats des déductions non justifiées ou à la réparation des erreurs, omissions ou dissimulations relevées ;

- soit en une reconstitution globale du résultat imposable -ou de certains éléments de ce résultat- lorsque la comptabilité, quoique régulière en la forme, a été écartée par le vérificateur qui avait des raisons sérieuses d'en contester la sincérité.

Remarque. - Le pouvoir de redressement de l'Administration ne s'applique qu'aux conséquences des erreurs, volontaires ou non, commises par les entreprises et des décisions de gestion qu'elles ont prises irrégulièrement. En revanche, les décisions de gestion régulières sont opposables tant au service qu'aux entreprises elles-mêmes. Sur la distinction entre erreurs et décisions de gestion. cf. 4 A 214.

4Les règles relatives au contrôle et à la rectification des résultats des entreprises sont examinées dans les quatre sous-sections suivantes

Sous-section 1 : rectification des déclarations suivant la procedure contradictoire ;

Sous-section 2 : modifications résultant de l'article 81-I de la loi de finances pour 1987 ;

Sous-section 3 : contestation des rectifications apportées à la déclaration.


SOUS-SECTION 1

Rectification des déclarations suivant
la procédure de redressement contradictoire


1Sous réserve des cas, en principe exceptionnels, où il est en droit d'utiliser la procédure de l'évaluation d'office (cf. ci-avant G 3326 et 13 L 155), le service ne peut rectifier la déclaration de résultats régulièrement souscrite par une entreprise qu'en suivant une procédure contradictoire (dite « procédure de redressement contradictoire ») prévue aux articles 55 du CGI et L 55 du LPF.

2La présente sous-section a uniquement pour objet de définir la portée et les cas d'application de cette procédure en tant qu'elle peut concerner les entreprises industrielles et commerciales placées sous un régime de bénéfice réel. Pour ce qui touche le déroulement et les modalités d'application de la procédure contradictoire de rectification des déclarations de résultats, il convient de se reporter à la série 13 L 151.

3On se bornera à indiquer ici :

- que le service peut demander au contribuable (par lettre n° 754) tous renseignements ou explications sur les mentions de la déclaration ou des documents qui y sont joints, ainsi que sur les divers éléments concourant à la determination du bénéfice net imposable. Le défaut de réponse à une telle demande n'entraîne pas l'abandon de la procédure contradictoire ni l'application d'une sanction, mais peut constituer un des éléments d'appréciation permettant de conclure à l'opportunité d'une intervention sur place (cf. 13 J) ;

- que tout rehaussement du résultat déclaré doit donner lieu à une notification par lettre recommandée avec avis de réception indiquant la nature, les motifs et le montant du ou des redressements envisagés. La formule à utiliser à cet effet est l'imprimé n° 2120 ou n° 3924 selon qu'il s'agit de redressements opérés du cabinet ou de rehaussements faisant suite à une vérification (cf. 13 L 1513) ;

- qu'en cas de refus du redressement, le litige peut être soumis à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, soit à la demande du contribuable soit à l'initiative du service (cf. 13 M 2).

4La rectification des déclarations peut consister :

- soit en des rectifications ponctuelles opérées à partir de la comptabilité elle-même, dont la sincérité ou la valeur probante n'est pas contestée par le service (par exemple réintégration de recettes, de créances ou d'avantages déterminés, omis en comptabilité ou pris en compte pour un montant minoré ; réintégration de charges ou de pertes non déductibles en tout ou en partie) ;

- soit en des rectifications ponctuelles portant sur les corrections en plus ou en moins, opérées par l'entreprise sur son bénéfice comptable pour obtenir le bénéfice net fiscal (par exemple reintégration, dans le bénéfice net fiscal, de gains d'exploitation considérés à tort comme des plus-values à long terme) ;

- soit en des rectifications portant globalement sur l'ensemble des résultats déclarés ou sur un ensemble d'opérations de l'entreprise.

5Les deux premiers de ces procédés -qui sont le mode normal et le plus courant de rectification des insuffisances de déclaration résultant d'une mauvaise application des règles relatives à l'assiette de l'impôt- n'appellent pas de commentaires particuliers.

6En revanche, le troisième de ces procédés impliquant un rejet de la comptabilité considérée comme dénuée de sincérité ou non probante en tout ou en partie, il apparaît nécessaire de préciser d'une part, les conditions de son utilisation et d'autre part, les modalités suivant lesquelles les contribuables auxquels il a été appliqué peuvent contester les bases d'imposition retenues par l'Administration (sur ce dernier point, cf. G 3344).

7Il est souligné dès maintenant que le rejet d'une comptabilité comme dénuée de sincérité ou comme non probante ne doit être opéré qu'à bon escient et avec la plus glande circonspection, lorsqu'il existe des motifs précis et sérieux permettant de la considérer comme non probante.

8Comme il a été indiqué plus haut ( G 3334 ), l'absence de valeur probante d'une comptabilité, condition nécessaire de son rejet, peut résulter soit de l'irrégularité formelle de cette comptabilité, elle-même, d'une insuffisance des justifications fournies à l'appui de ses énonciations ou de l'une et l'autre de ces deux causes, soit, même si la comptabilité apparaît régulière en la forme, d'éléments permettant d'en contester la sincérité ou la valeur probante.


  A COMPTABILITÉ IRRÉGULIÈRE


9On rappelle qu'une comptabilité est irrégulière lorsqu'elle est incomplète ou n'est pas correctement tenue, c'est-à-dire est entachée de négligences, erreurs ou lacunes de nature à la rendre impropre à justifier les résultats déclarées (cf. G 3334 ).

10Mais, bien entendu, une comptabilité ne doit pas être écartée si elle n'est entachée que d'irrégularités insuffisantes pour lui enlever toute valeur probante.

Le défaut de valeur probante ne peut résulter que d'irrégularités ayant un caractère de gravité indiscutable : balances inexactes, erreurs répétées de reports, enregistrement non chronologique des opérations, absence de pièces justificatives de recettes ou de dépenses, fausses factures, soldes de compte caisse fréquemment créditeurs, enregistrements d'une partie des opérations réalisées.

11Le Conseil d'État a considéré que devait être rejetée comme étant depourvue de valeur probante une comptabilité :

- présentant de nombreuses irrégularités et, en particulier, lorsqu'il a été constaté des minorations importantes de recettes provenant des travaux effectués pour le compte de divers clients sans que les factures correspondantes aient été établies et qu'en outre divers documents annexes -tels que bordereaux de livraison et carnets de clients- sont absents (CE, arrêt du 18 avril 1966, req. n° 63762) ;

- qui ne présente pas les garanties d'exactitude requises, dès lors qu'elle est entachée de diverses irrégularités, parmi lesquelles, notamment, l'absence de relevé détaillé des opérations de caisse de nature à justifier la consistance des chiffres de recettes arrêtés en fin de journée (CE, arrêt du 28 octobre 1966, req. n° 68658) ;

- qui n'a pas enregistré la totalité des achats et des ventes (CE, arrêt du 21 juillet 1972, req. n° 81156).

- réduite, par l'effet d'un incendie, au journal centralisateur et au livre d'inventaire (CE, arrêts du 6 février 1985, n°s 43328 et 43330).

12En revanche, dès lors que la démonstration par le contribuable du caractère probant de ses écritures comptables n'est soumise à aucun formalisme, ne peut être rejetée globalement une comptabilité :

- qui comporte des livres-journaux auxiliaires suffisamment détaillés, même si leurs mentions ne sont reprises au livre-journal que pour le montant des soldes mensuels contrairement aux dispositions de l'article 5, al. 2 du décret n 83-1020 du 29 novembre 1983 ;

- qui comporte des inventaires regulièrement établis, même en l'absence du livre d'inventaire prévu à l'article 2 du même décret ;

- dont les défauts sont d'une gravité limitée et dont les erreurs ont pu être rectifiées ;

- dont les résultats sont corroborés par les indications tirées de la reconstitution d'une comptabilité-matières et les explications fournies au sujet de la casse, de la perte ou du vol de certains articles (CE arrêt du 7 novembre 1975, req n° 90786.

Nota. - En ce qui concerne le caractère probant ou non probant de la comptabilité, il convient de se reporter également aux indications données ci-après n°s 13 à 18 .


  B. COMPTABILITÉ RÉGULIÈRE EN LA FORME, MAIS CONSIDÉRÉE COMME NON PROBANTE


13Même si elle est régulière en la forme, et appuyée de justifications apparemment suffisantes, une comptabilité peut être rejetée pour défaut de valeur probante lorsque des présomptions précises et concordantes permettent d'en contester la sincérité et de soutenir que le bénéfice déclaré est inférieur au bénéfice effectivement realisé.

Ces présomptions peuvent résulter notamment :

1. D'une insuffisance du taux de bénéfice brut calculé à partir des données de la comptabilité.

14 La seule insuffisance du taux de bénéfice brut par rapport soit au taux moyen dans la branche considérée, soit aux taux constatés dans des entreprises similaires, si elle constitue une indication importante et propre à justifier un examen approprié ne peut être considérée comme un motif suffisant de rejet de la comptabilité lorsque celle-ci a par ailleurs une valeur probante. En effet, il est parfaitement possible que les conditions de fonctionnement de l'entreprise vérifiée comportent des particularités de nature à expliquer les écarts constatés.

15En revanche, un rejet peut être valablement fondé sur le fait que le pourcentage de bénéfice brut, tel qu'il résulte de la comptabilité, est différent de celui obtenu en comparant systématiquement dans l'entreprise elle-même, les prix d'achat et les prix de vente de marchandises déterminées (en ce sens : CE, arrêt du 14 mai 1975, req. n° 91518).

Un dépouillement exhaustif des achats d'un exercice parait pouvoir être utilement opposé au contribuable si, après l'application d'une méthode complète et precise, il conduit à constater l'existence de discordances importantes de chiffres d'affaires.

16Mais le service ne doit exciper d'une telle diffèrence de pourcentage de bénéfice brut que si celle-ci est suffisamment importante pour être significative. En effet le Conseil d'État, dans une espèce concernant une entreprise gérant un restaurant, a estimé, contrairement à la thèse du service, que la comptabilité présentée, régulière en la forme, ne pouvait qu'être tenue pour sincère, en raison tant des incertitudes et de l'imprécision qui affectent la reconstitution d'un taux de bénéfice brut que de la faiblesse de l'écart constaté en l'espèce entre le taux ressortant de la comptabilité et le taux théorique retenu par l'Administration. Au cas particulier, ce dernier taux avait été reconstitué par comparaison entre le prix de certains menus et le montant des achats de produits utilisés pour leur confection (CE, arrêt du 10 mars 1976, req. n° 79933).

2. Du train de vie et de l'enrichissement de l'exploitant.

17Le train de vie et, le cas échéant, l'enrichissement de l'exploitant ou des associés, lorsqu'il est hors de proportion avec l'importance des bénéfices déclarés, se trouve au nombre des éléments d'où peuvent être tirées des présomptions précises et concordantes que le bénéfice déclaré est inférieur au bénéfice effectivement réalisé (en ce sens : arrêts des 27 octobre 1952, req. n° 12642, R0. p. 107 ; 19 novembre 1955, req. n° 32903 ; 29 mai 1957, req. n° 22803 ; 29 janvier 1969, req. n° 73027).

Toutefois, eu égard à la séparation des patrimoines d'une société passible de l'impôt sur les sociétés et de ses associés, la circonstance que l'enrichissement de ces derniers resterait inexpliqué ne permet pas de présumer qu'il provient de bénéfices dissimulés qui auraient été appréhendés par les intéressés (CE, arrêt du 23 avril 1975, req. n° 92874).

18Il est à noter que dans certaines des espèces où la juridiction administrative a admis une rectification des résultats fondée sur un enrichissement injustifié de l'exploitant, il existait, outre cet enrichissement constaté, d'autres circonstances permettant de mettre en doute ou de contester la valeur probante de la comptabilité :

- la différence constatée entre l'augmentation du patrimoine de l'exploitant et le montant des bénéfices déclarés était très importante, les bénéfices déclarés representant moins du dixième de l'enrichissement (arrêt du 27 octobre 1952) ;

- les écritures comptables comportaient des irrégularités (arrêts des 19 novembre 1955, 29 mai 1957 et 14 février 1962).