Date de début de publication du BOI : 09/03/2001
Identifiant juridique : 4A1214
Références du document :  4A1214

SOUS-SECTION 4 CONTRÔLE DES PRIX DES TRANSACTIONS INTERNATIONALES (LPF, ART. L 13 B ; CGI, ART. 57)

3. Mise en demeure en cas de réponse insuffisante.

25L'appréciation du caractère suffisant ou insuffisant d'une réponse appartient à l'administration, sous le contrôle du juge de l'impôt. Il s'agit d'une question de fait.

Une réponse est insuffisante lorsque notamment :

- il n'est pas apporté de réponse à une ou plusieurs des questions posées ;

- il n'est pas apporté de réponse à une partie de la question posée (ex. alors que des indications permettent de présumer des relations entrant dans les prévisions de l'article 57 du CGI avec des entreprises situées dans trois pays étrangers et que cette situation fait l'objet d'une demande, la réponse apportée ne concerne que deux pays) ;

- il est fait référence à des principes généraux (respect du principe de pleine concurrence, recours aux méthodes reconnues par l'OCDE...) sans que ces affirmations ne soient étayées d'aucune justification concrète relative aux questions posées.

26En cas de réponse insuffisante, l'administration adresse à l'entreprise une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours. Les points de départ et d'arrivée de ce délai sont définis selon les mêmes modalités que celles développées au n° 20 .

Cette mise en demeure est remise ou adressée dans des conditions similaires à la demande initiale (voir supra).

Elle précise les compléments de réponse souhaités par l'administration, en rappelant les questions contenues dans la demande initiale et les raisons pour lesquelles la réponse est considérée comme insuffisante.

27La mise en demeure rappelle les sanctions applicables en cas de défaut de réponse.

Il s'agit d'une amende fiscale égale à 50 000 F pour chaque exercice visé par la demande initiale codifiée à l'article 1740 nonies du CGI (article 39, IV, de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996).

28Une réponse insuffisante après une mise en demeure est considérée comme un défaut de réponse.

  B. LE CHAMP D'APPLICATION DES DEMANDES D'INFORMATIONS ET DE DOCUMENTATION

  I. Domaine des demandes

29Lorsque la présomption décrite aux n°s 13 et suivants permet à l'administration de mettre en oeuvre les dispositions de l'article L13 B du LPF, la demande ne peut porter que sur quatre domaines limitativement énumérés.

Ces domaines sont liés entre eux, mais il n'est pas nécessaire d'interroger l'entreprise sur tous les domaines. Ceci relève de l'appréciation du service vérificateur, de ses besoins pour appréhender la réalité des opérations qu'il contrôle et du degré de coopération qu'aura apporté l'entreprise en matière de documentation.

30Une seule ou plusieurs demandes visant ces domaines peuvent être adressées concernant une ou plusieurs entreprises exploitées ou établies hors de France quelles que soient leurs formes juridiques (par exemple : sociétés de capitaux, de personnes, établissements stables, groupés d'intérêts économiques...).

31Quel que soit le domaine concerné, les demandes doivent être précises, indiquer explicitement, par nature d'activité ou par produit, le pays ou le territoire concerné, l'entreprise, la société ou le groupement visé ainsi que, le cas échéant, les montants en cause.

1. Nature des relations entrant dans les prévisions de l'article 57 du CGI.

32La nature des relations sur laquelle l'entreprise peut être interrogée concerne les liens de dépendance ou de contrôle, existant entre l'entreprise vérifiée et l'entité ou les entités établies à l'étranger.

L'article 57 joue à l'égard soit d'une entreprise française placée sous la dépendance d'une entreprise étrangère, soit d'une entreprise française ayant sous sa dépendance une entreprise étrangère soit enfin lorsqu'une entreprise française est placée en même temps qu'une ou plusieurs entreprises étrangères, sous la commune dépendance, d'une même entreprise, d'un groupe ou d'un consortium.

La dépendance peut être juridique ou de fait (cf. DB 4 A 1211 ).

33L'entreprise vérifiée doit donc être à même d'apporter l'ensemble des informations afférentes à ces sujets. À titre d'exemple, les informations suivantes pourront être notamment demandées : organigramme du groupe, chaînes de participations, pourcentages de participations, composition du capital des entités étrangères, convention d'actionnaires, nature des titres détenus, droits de vote...

34Tous renseignements utiles et informations portant sur les conditions contractuelles ou sur les relations entre les deux entreprises desquelles peuvent découler la dépendance de fait doivent pouvoir être fournis à la demande de l'administration. Il convient à cet égard de se référer à la jurisprudence qui illustre cette notion (cf. DB 4 A 1211 n°s 3 à 6 ).

35L'entreprise qui établit à ce stade l'absence de liens de dépendance ou de contrôle (tels que décrits ci-dessus), est en droit de se dispenser de répondre aux autres questions concernant cette entité (rapport Commission des finances du Sénat, p. 257), sauf si les opérations ont lieu avec une entreprise établie dans un pays à fiscalité privilégiée.

2. Méthode de détermination des prix des opérations de toute nature.

36Les entreprises des groupes multinationaux doivent déterminer le prix de leurs transactions internes selon le principe de pleine concurrence, c'est-à-dire à un niveau auquel auraient traité des entreprises indépendantes pour des marchés identiques.

37Sont notamment visées par l'article L 13 B-2° du LPF, les transactions commerciales, tout versement en rémunération de droits incorporels, les répartitions de frais et charges (frais de siège, accords de répartition de coûts, débours...), les relations financières, d'actionnaires, les relations entre siège et établissements stables...

38À cet égard, la demande de renseignements pourra concerner l'ensemble des éléments ayant concouru à la négociation, à la conclusion et à la réalisation des transactions et opérations en cause et permettant d'apprécier la nature exacte des relations d'affaires entretenues (contrats, engagements, description des opérations, modalités de réalisation, clefs de répartition des charges...).

39Il est nécessaire que les entités, les opérations de nature industrielle, commerciale ou financière, en cause et le cas échéant les montants soient précisément désignés dans la demande (ex. méthode de détermination des prix d'achat des produits semi-finis A, B et C à la société-mère étrangère portés en comptabilité pour 30, 40 et 50 MF sur l'exercice 1996 et 35, 45 et 55 MF sur l'exercice 1997).

40Toute méthode invoquée par l'entreprise peut être considérée comme recevable, pour satisfaire à l'obligation documentaire de l'article L13 B du LPF, sous réserve que sa présentation soit appuyée de justificatifs :

- d'ordre méthodologique et documentaire : par exemple document interne à l'entreprise décrivant la méthode, tout contrat ou document contractuel échangé entre les entités du groupe concernées par la transaction, exposant le cas échéant les engagements réciproques de chaque partie ;

- d'ordre comptable : tout extrait de la comptabilité générale et le cas échéant de la comptabilité analytique ;

- d'ordre économique : toutes considérations ou données se rapportant aux marchés et aux fonctions remplies par les entités du groupe concernées explicitant la méthode invoquée par l'entreprise (ex. la fixation de prix bas pour pénétrer un marché implique que l'entreprise interrogée se dispose à fournir des éléments sur les études conduites sur ce marché, ses propres caractéristiques et celles de l'entité liée concernée, notamment en matière de capital, de fonctions assumées et de risques encourus, les dispositions prises pour évaluer les résultats de la méthode employée et le cas échéant réviser celle-ci) ; toute information et analyse concernant les comparables retenus, justifiant la pertinence du choix effectué.

41La cohérence d'une politique de prix de transfert ne peut être comprise et analysée que globalement, et au travers de la connaissance de l'ensemble des dispositions prises à chaque stade de la vie du produit. Les entreprises doivent donc posséder une documentation capable d'expliquer la démarche globale suivie par le groupe en la matière.

Les explications et la documentation fournies ne sauraient se limiter à des renseignements ponctuels sortis du contexte global de la politique de prix de transfert du groupe.

42Il n'est pas exigé que les justificatifs soient contemporains des opérations conduites pendant la période vérifiée. En revanche, ils doivent se rapporter à cette période.

43Le 2° du premier alinéa de l'article L13 B prévoit également que l'entreprise interrogée sur la méthode de détermination de ses prix soit, le cas échéant, invitée à mentionner les contreparties qu'elle a consenties ou qui lui ont été consenties dans le groupe.

44Il est admis qu'un prix de transfert diffère d'un prix de pleine concurrence si une autre clause (ex. conditions de paiements, termes financiers, services accessoires, garanties, conditions d'exclusivité, garanties d'approvisionnement ou de débouchés...) convenue entre les parties, est susceptible de compenser la différence de prix initialement constatée. De même, une situation avantageuse ou désavantageuse concernant une opération peut être compensée par une autre opération (par exemple : un prix de vente minoré ou un coût d'achat majoré peut être compensé par un taux de redevance majoré ou réduit du droit de commercialisation ou de fabrication sur les produits correspondants).

45Il appartient à l'administration d'examiner l'ensemble des relations entre les entités liées pour déterminer si leurs résultats sont conformes à ce principe.

Il est donc dans l'intérêt de l'entreprise vérifiée d'exposer l'ensemble de ses arguments le plus tôt possible dans le cours du débat oral et contradictoire, afin que l'administration dispose de l'ensemble des éléments d'appréciation.

3. Activités exercées par les entreprises liées.

46Ce domaine concerne les informations et documents permettant d'apprécier les activités d'une ou plusieurs entités liées établies à l'étranger à raison des opérations de nature industrielle, commerciale ou financière, réalisées avec l'entreprise vérifiée.

Exemples : (bilan d'une entreprise liée à laquelle l'entreprise vérifiée, créancière, a consenti un abandon de créance, ou accordé un taux réduit de redevance ou de rémunération d'un prêt) ; moyens d'exploitation et fonctions du département recherche et développement d'une entité liée à laquelle l'entreprise vérifiée verse une contribution ou une redevance, etc.

47Il porte également sur l'analyse des fonctions assumées dans le cadre de cette activité exercée par l'entité ou les entités établies hors de France et leurs modalités de rémunération.

Les demandes auront notamment pour objet de connaître :

- la nature effective de l'activité, ses modalités d'exercice et les risques assumés (exemple : en cas d'activité de négoce de quelle façon est supporté le risque de garantie, le service après-vente..., qui assure la promotion, le marketing...) ;

- les moyens mis en oeuvre (personnels et qualifications, immobilisations corporelles, propriété et exploitation des incorporels...).

48À cet égard, les comptes d'exploitation par produit, les marges dégagées, la composition des actifs, des comptes de charge ..., pourront être demandés.

4. Traitement fiscal.

49À la différence des domaines précédents (article L 13 B, premier alinéas, 1° à 3°), les demandes portant sur le traitement fiscal réservé aux opérations de nature industrielle, commerciale et financière, ne peuvent concerner que des entités étrangères dont l'entreprise vérifiée possède directement ou indirectement plus de 50 % du capital ou des droits de vote, ou qu'elle exploite directement (succursales, établissements).

50On entend par traitement fiscal :

- l'application aux écritures comptables d'une entité de toutes règles fiscales, générales ou particulières, conduisant à la détermination de son résultat imposable et imposé. À cet égard les documents comptables et fiscaux liés aux opérations concernées pourront être demandés afin de s'assurer de la réalité du traitement fiscal ;

- un accord particulier conclu avec les autorités d'un État ou territoire étranger.

Tout régime spécial exorbitant du droit commun du pays considéré devra être explicité.

51Les demandes de cette nature doivent viser des opérations spécifiques. Toutefois, si l'entité étrangère concernée ne conduit qu'un type d'opérations pour lesquelles l'administration a réuni des éléments faisant présumer un transfert de bénéfices ou si l'ensemble des opérations sont présumées constitutives d'un tel transfert, il est possible d'interroger l'entreprise française sur l'ensemble des activités de l'entreprise étrangère en énumérant, le cas échéant, les différentes opérations concernées.

  II. Effets d'un défaut de réponse

1. Procédure, méthode et calcul des redressements.

52Le législateur a expressément prévu que la procédure de redressement contradictoire est suivie, même en cas de défaut de réponse. Toutefois, une société en situation de taxation d'office avant l'emploi de l'article L 13 B du LPF y demeure, quelle que soit l'issue de cette procédure.

La charge de la preuve repose toujours sur l'administration, conformément à la règle générale et aux dispositions particulières en matière de contrôle des transferts de bénéfice à l'étranger (cf. DB 4 A 1212 ) :

- l'administration doit apporter la preuve du lien de dépendance, sauf dans les cas visés au deuxième alinéa de l'article 57 du CGI ;

- l'administration doit apporter la preuve qu'un avantage a été consenti à une entité étrangère et elle doit en déterminer le montant.

Si la présomption de transfert de bénéfices à l'étranger est établie par l'administration :

- l'entreprise vérifiée doit apporter la preuve qui lui incombe, que l'avantage consenti à une entité étrangère ne constitue pas, en fait, un transfert de bénéfices à l'étranger.

Pour sa part, l'entreprise vérifiée conserve la faculté de saisir la Commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires.

53Le défaut de réponse à une demande prévue par l'article L13 B du LPF ne peut à lui seul constituer une motivation suffisante pour notifier un redressement.

Il est néanmoins probable que l'entreprise qui aura négligé de répondre à une demande de précisions fondée sur la présomption qu'elle avait opéré un transfert de bénéfice s'exposera à un redressement.

54En effet, dans cette situation, l'administration est autorisée à évaluer le montant du transfert de bénéfice concerné par la demande, à partir des éléments dont elle dispose et en suivant la procédure contradictoire définie aux articles L 57 à L 61 du LPF (CGI, art. 57, troisième alinéa).

Les dispositions du troisième alinéa de l'article 57 du CGI, atténuent, en cas de défaut de réponse, l'obligation mise à la charge de l'administration de réunir, au moment de la notification de redressements, les éléments permettant d'établir la présomption de transfert de bénéfices à l'étranger.

Mais, l'entreprise pourra toujours contester cette évaluation, en produisant ses propres éléments, notamment en réponse à la notification de redressements. Cette situation sera toutefois défavorable pour elle, dans la mesure où il s'agira d'une production tardive de documents et d'informations, non fournis durant la procédure de l'article L 13 B du LPF et que le service vérificateur n'aura donc pas été en mesure d'examiner lors des interventions sur place dans l'entreprise.

55Il est rappelé enfin, que dans un tel contexte, l'administration peut recourir à la méthode de redressement prévue au dernier alinéa de l'article 57 du CGI qui dispose : « À défaut d'éléments précis pour opérer les redressements prévus aux premier, deuxième et troisième alinéas, les produits imposables sont déterminés par comparaison avec ceux des entreprises similaires exploitées normalement ».

Un tel recours n'est pas automatique ; l'administration devra privilégier, dans la mesure du possible et malgré le défaut de réponse de l'entreprise, le recours aux autres méthodes reconnues par l'OCDE.

56Le défaut de réponse peut également avoir des conséquences sur le calcul du redressement.

À ce titre, l'administration pourra conclure à l'absence de contrepartie ou au rejet de la rémunération d'une entité étrangère, pour une fonction, dans la mesure où elle n'en aura pas eu connaissance ou n'aura pas pu obtenir de justifications.