B.O.I. N° 89 du 8 OCTOBRE 2008
INTRODUCTION
1.L'article 44 septies du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 14 A de la loi de finances pour 1989 (n° 88-1149 du 23 décembre 1988), prévoit un régime d'exonération d'impôt sur les sociétés au profit des sociétés créées pour reprendre une entreprise industrielle en difficulté. Cette exonération est accordée en cas de cession ordonnée par le tribunal en application des articles L. 621-83 et suivants du code de commerce ou, à défaut de mise en oeuvre de la procédure de redressement judiciaire, sur agrément du ministre chargé du budget.
Par une décision du 16 décembre 2003, publiée au JOCE du 16 avril 2004, la Commission européenne a conclu à l'incompatibilité du régime d'exonération avec le traité instituant la Communauté européenne. Les conséquences immédiates de cette décision ont été portées à l'attention des opérateurs par l'instruction administrative 4 H-2-04 du 4 mars 2004.
Les dispositions condamnées de l'article 44 septies ont ainsi fait l'objet d'une refonte dans le cadre de l'article 41 de la loi de finances rectificative pour 2004. La Commission européenne a validé ce nouveau dispositif (décision du 1 er juin 2005, commentée dans l'instruction 4 H-3-05 du 27 juillet 2005).
Par ailleurs, le dispositif a été à nouveau réaménagé par l'article 87 de la loi de finances rectificative pour 2006 afin d'assurer sa conformité avec le règlement (CE) n° 1628/2006 de la Commission du 24 octobre 2006 relatif aux aides nationales à l'investissement à finalité régionale. Ce même article prévoit que les plafonds d'aide à finalité régionale, d'aide en faveur des PME et d'aide de minimis ne peuvent plus désormais être appliqués simultanément, l'entreprise ne pouvant être placée que sous un seul de ces encadrements.
La présente instruction a pour objet de commenter les modalités d'application des nouvelles dispositions de l'article 44 septies issues des deux lois de finances rectificatives précitées.
Sauf mention contraire, les articles mentionnés sont ceux du code général des impôts ou de ses annexes.
CHAPITRE 1 :
CHAMP D'APPLICATION
2.Le régime d'exonération s'applique, à l'instar du passé, aux seules sociétés nouvelles créées dans le seul but de reprendre une entreprise industrielle en difficulté.
En présence de clause de substitution ou de porte-fort 1 , le bénéfice de l'exonération n'est susceptible d'être accordé qu'à la société nouvelle effectivement exploitante, quand bien même cette dernière ne serait pas désignée comme repreneuse dans le jugement de cession du tribunal mentionné au n° 5 .
Section 1 :
Conditions relatives à l'entreprise reprise
Sous-section 1 :
Forme juridique
3.Il n'est pas posé de condition quant à la forme juridique de l'entreprise reprise, qui peut être une entreprise individuelle ou revêtir la forme d'une société. Le régime d'exonération est applicable aussi bien à la reprise d'une entreprise dans sa globalité qu'à la reprise d'un ou plusieurs établissements.
4.L'établissement est défini par référence à un critère géographique ou fonctionnel. Un établissement s'entend de toute installation fixe munie de l'ensemble des équipements nécessaires à son fonctionnement et utilisée par une entreprise en un lieu déterminé, ou d'une unité de production intégrée dans un ensemble industriel lorsqu'elle peut faire l'objet d'une exploitation autonome.
Il en résulte qu'une reprise de locaux nus ne peut pas être qualifiée de reprise d'établissement au sens de l'article 44 septies.
Sous-section 2 :
Notion de difficulté
5.L'état de difficulté est apprécié par l'analyse de la situation de l'entreprise reprise ou, le cas échéant, du ou des établissements repris.
Cet état de difficulté résulte notamment de l'engagement d'une procédure de redressement judiciaire. Dans ce cas, la reprise est effectuée par voie de rachat de l'entreprise ou du ou des établissements cédés en application des articles L. 621-83 et suivants du code de commerce (ancienne numérotation) ou de l'article L. 631-22 du code de commerce dans sa rédaction issue de l'article 92 de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises.
L'état de difficulté résulte également de l'engagement d'une procédure de liquidation judiciaire. Dans ce cas, la reprise est effectuée par voie de rachat de branches complètes et autonomes d'activité industrielle, dans le cadre de cessions ordonnées par le juge-commissaire en application de l'article L. 622-17 du code de commerce (ancienne numérotation), ou des articles L. 642-1 et suivants du code de commerce dans leur rédaction issue de l'article 111 de la loi de sauvegarde des entreprises précitée.
La notion de branche complète et autonome d'activité recouvre l'ensemble des éléments investis dans une division de l'entreprise qui constitue du point de vue technique une exploitation autonome, c'est-à-dire un ensemble capable de fonctionner par ses propres moyens dans des conditions normales. La qualification d'une branche complète d'activité relève de l'appréciation des faits.
Les reprises effectuées dans le cadre d'une procédure de sauvegarde par voie de rachat d'un établissement ou d'une branche complète et autonome d'activité industrielle en application de l'article L. 626-1 du code de commerce dans sa rédaction issue de l'article 59 de la loi de sauvegarde des entreprises précitée peuvent, elles aussi, être éligibles au régime d'exonération, dans la mesure où la procédure de sauvegarde définie aux articles L. 620-1 et suivants (nouveaux) du code de commerce vise les débiteurs justifiant de difficultés qu'ils ne sont pas en mesure de surmonter et qui sont de nature à les conduire à la cessation de paiements.
En l'absence d'ouverture d'une procédure collective, l'état de difficulté s'entend d'une situation financière de l'entreprise qui rend imminente la cessation de paiements. L'arrêt de l'exploitation en découlant ne doit donc pas être rendu seulement probable par les événements en cours, mais doit présenter un caractère inévitable.
L'appréciation de la situation financière de l'entreprise est effectuée à partir d'un faisceau d'indices, appréciés le cas échéant par recours à la comptabilité analytique, dont notamment :
- évolution de l'effectif du personnel (recours au chômage partiel, réduction des effectifs...) ;
- évolution du chiffre d'affaires ;
- analyse de la situation financière de la société (situation nette, notamment lorsque les capitaux propres sont inférieurs à la moitié du capital social) ;
- informations transmises aux représentants des salariés et aux services du ministère du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ;
- appréciation portée sur la situation de l'entreprise ou de l'établissement en difficulté par le Comité départemental d'examen des problèmes de financement des entreprises (CODEFI) ou par le Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI).
Une analyse de l'environnement économique et d'éventuelles difficultés sectorielles peut également être prise en compte.
Sous-section 3 :
Activités éligibles
A. CARACTÈRE INDUSTRIEL DE L'ACTIVITÉ
6.La reprise doit concerner une entreprise ou un établissement qui exerce exclusivement une activité industrielle. De même, dans le cas des cessions ordonnées par le juge-commissaire dans le cadre d'une procédure de liquidation judiciaire, la reprise doit porter sur une branche complète et autonome d'activité exclusivement industrielle. Enfin, en cas de reprise d'établissements en difficulté, au sein desquels est exercée exclusivement une ou plusieurs activités industrielles, d'une entreprise qui n'est pas elle-même en difficulté, l'activité de cette entreprise doit elle-même être industrielle.
Les activités industrielles s'entendent des activités qui remplissent les deux conditions cumulatives suivantes :
- elles consistent en la transformation de matières premières ou de produits semi-finis en produits fabriqués ;
- le rôle du matériel ou de l'outillage utiles à la réalisation de ces activités est prépondérant.
Par conséquent, ne peuvent pas être considérées comme industrielles notamment les activités suivantes :
- les activités commerciales qui consistent principalement en l'achat-revente de marchandises en l'état ;
- les activités financières (banques, assurances...) ;
- les activités se rattachant au secteur des services tels que le transport, la réparation, la maintenance ;
- les activités du bâtiment et des travaux publics ;
- les activités extractives et la production d'énergie ;
- les activités culturelles ou artistiques qui concourent à la réalisation d'une oeuvre originale, quels que soient les moyens mis en oeuvre.
En pratique, l'entreprise ou l'établissement industriel doit constituer nécessairement un établissement industriel par nature, évalué conformément aux dispositions des articles 1499 ou 1500, selon le cas.
B. CARACTÈRE EXCLUSIF DE L'ACTIVITÉ INDUSTRIELLE
7.L'ensemble des actifs repris doit être affecté à l'activité industrielle de l'entreprise reprise.
Par conséquent, lorsque l'entreprise ou l'établissement repris, selon le cas, exerce simultanément une activité industrielle et une ou plusieurs autres activités ne présentant pas ce caractère, les dispositions de l'article 44 septies ne sont pas applicables à l'entreprise nouvelle, sauf si les activités non industrielles constituent le complément indissociable d'une activité industrielle exercée à titre principal.
C. ACTIVITÉS EXPRESSÉMENT EXCLUES DU DISPOSITIF
8.Aux termes du troisième alinéa du I de l'article 44 septies, les activités exercées dans l'un des secteurs suivants n'ouvrent pas droit au bénéfice de l'exonération :
- transports ;
- construction de véhicules automobiles ;
- construction de navires civils ;
- fabrication de fibres artificielles ou synthétiques ;
- sidérurgie ;
- industrie charbonnière ;
- production ou transformation de produits agricoles ;
- pêche, aquaculture et pisciculture.
En cas d'exercice simultané, au sein de l'entreprise reprise ou de l'établissement repris, d'activités industrielles éligibles au dispositif prévu par l'article 44 septies et d'activités expressément exclues par ce dispositif, l'exonération ne pourra pas être accordée à l'entreprise nouvelle.
Les activités exclues du dispositif d'exonération sont appréciées en fonction des codes de nomenclature des activités françaises (NAF) 2003. En cas de mise en oeuvre ultérieure d'une nouvelle nomenclature NAF, celle-ci sera considérée comme étant sans incidence sur le champ des secteurs exclus, qui demeurent définis par la nomenclature NAF 2003.
1. Transports
9.S'agissant des transports, il est précisé que ne sont concernées par l'exclusion du dispositif d'exonération que les activités de prestation de transport, et non la fabrication de véhicules servant au transport, sous réserve des exclusions relatives à la construction de véhicules automobiles et de navires civils (cf. n os 10 et 11 ).
2. Construction de véhicules automobiles
10.Les activités exclues du dispositif d'exonération relèvent en principe des classes d'activité suivantes (codes de nomenclature des activités françaises - NAF) : 341Z (construction de véhicules automobiles), 342A (fabrication de carrosseries automobiles), 342B (fabrication de caravanes et véhicules de loisirs), 343Z (fabrication d'équipements automobiles).
Certaines des activités relevant de ces secteurs peuvent toutefois être éligibles au régime d'exonération, selon le type de véhicule objet de l'activité industrielle et selon les modalités pratiques d'exploitation : l'annexe I à la présente instruction précise les activités concernées par l'exclusion, ainsi que la situation des équipementiers dont l'activité peut être assimilée à celle de constructeur de véhicules automobiles.
3. Construction de navires civils
11.Les activités exclues du dispositif d'exonération relèvent, en principe, des classes d'activité suivantes (codifications NAF) : 351B (construction de navires civils), 351C (réparation navale), 351E (construction de bateaux de plaisance).
Toutefois, seuls les navires utilisés pour le transport de passagers et/ou de marchandises ou pour la pêche d'au moins 100 tonnes brutes sont visés par l'exclusion : des précisions sont données sur ce point en annexe II à la présente instruction. Par ailleurs, les activités industrielles liées aux navires militaires sont, en tout état de cause, éligibles au régime d'aide.
4. Fabrication de fibres artificielles ou synthétiques
12.L'activité exclue du régime d'exonération correspond au secteur d'activité de la fabrication de fibres artificielles ou synthétiques répertorié sour le code NAF 247Z.
5. Sidérurgie
13.Les activités exclues du régime d'exonération correspondent au secteur sidérurgique CECA (ancienne communauté européenne du charbon et de l'acier), qui recouvre les secteurs d'activité suivants (codifications NAF) : 271Y (sidérurgie), 272A (fabrication de tubes en fonte), 272C (fabrication de tubes en acier), 273A (étirage à froid), 273C (laminage à froid de feuillards), 273E (profilage à froid par formage ou pliage), 273G (tréfilage à froid).
6. Industrie charbonnière
14.Les activités exclues du régime d'exonération correspondent au secteur couvert par le traité CECA, qui s'entend des secteurs d'activité suivants (codifications NAF) : 101Z (extraction et agglomération de la houille), 102Z (extraction et agglomération du lignite), 231Z (cokéfaction).
7. Production ou transformation de produits agricoles
15.Pour l'application du régime d'exonération, les produits agricoles s'entendent de ceux visés à l'annexe I du Traité CE, qui figure en annexe III à la présente instruction.
Les activités de production agricole sont, en tout état de cause, exclues du régime, s'agissant d'activités non industrielles.
Les activités de transformation (industrie agro-alimentaire) qui aboutissent à la fabrication d'un produit figurant à l'annexe I du Traité CE sont également exclues du régime, quel que soit le degré de transformation : par exemple, extraction du jus à partir de fruits ou abattage d'animaux pour l'obtention de la viande.
En revanche, la transformation d'un produit visé à l'annexe I du Traité CE en produit non répertorié à cette annexe est considérée comme éligible au régime.
L'attention est appelée sur le caractère agricole, au sens du présent régime, des activités portant sur le tabac brut, le liège, le lin brut et le chanvre brut.