Date de début de publication du BOI : 04/10/2010
Identifiant juridique :

B.O.I. N° 86 DU 4 OCTOBRE 2010


Section 3  :

Garantie apportée par l'article L 80 C



Sous-section 1 :

Conditions de la garantie


  1. DEMANDE DE L'ORGANISME

304.Afin de garantir une plus grande sécurité juridique aux organismes recevant des dons, l'article L 80 C du livre des procédures fiscales, issu de l'article 1 er de la loi n° 2003-709 du 1er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations, ouvre la possibilité à ces organismes de s'assurer auprès de l'administration fiscale qu'ils répondent bien aux critères définis aux articles 200 et 238 bis du code général des impôts. Ces dispositions sont également ouvertes aux fonds de dotation, dont la création s'inscrit dans le régime du mécénat.

305.L'organisme qui entend bénéficier de la garantie prévue à l'article L 80 C doit en faire la demande auprès de l'administration fiscale. Cette demande doit être présentée selon un modèle fixé par voie réglementaire (cf. annexe 8).

306.L'auteur de la demande doit être clairement identifié et mandaté par l'organisme.

307.Cette demande doit comporter une présentation précise, complète et sincère de l'activité exercée par l'organisme ainsi que toutes les informations nécessaires à l'administration pour apprécier si celui-ci relève de l'une des catégories mentionnées aux articles 200 et 238 bis du code général des impôts.

308.Elle doit être adressée, par pli recommandé avec demande d'avis de réception, à la direction départementale de l'administration fiscale du siège de l'organisme. Elle peut également faire l'objet d'un dépôt contre décharge.

  2. REPONSE DE L'ADMINISTRATION

2-1. Computation du délai de réponse

309.La date de réception de la demande de l'organisme par le service constitue le point de départ du délai de réponse, fixé à six mois par l'article L 80 C.

310.Lorsque la demande parvient à un service incompétent, ce service la transmet sans délai au service compétent et en informe l'auteur de la demande. Dans ce cas, le délai prévu à l'article L. 80 C court à compter de la date de réception par le service compétemment saisi.

311.En principe, un contribuable (ou son représentant) de bonne foi n'a pas à saisir, pour une même demande ou l'application d'une même disposition, plusieurs services différents, d'autant que, dans l'hypothèse d'une erreur du contribuable sur le lieu de dépôt, il appartient à l'administration de transmettre sa demande au service compétent et de l'en informer.

Par conséquent, la saisine par un contribuable (ou son représentant) de plusieurs services, simultanément ou successivement, sans que chacun en soit expressément informé, pourra, en règle générale, être considérée comme abusive, en particulier, s'il est relevé, par exemple, l'absence manifeste de tout fondement à agir ainsi ou le caractère malintentionné d'une telle démarche visant notamment à rechercher la multiplication des prises de position de l'administration sur une même demande. Dans une telle situation, la bonne foi du contribuable ne pourrait être retenue : sa demande ne pourrait alors recevoir une suite favorable et les réponses obtenues ne seraient pas opposables.

312.Le délai de six mois se calcule de quantième à quantième. Il commence à courir le jour de la réception de la demande et expire le jour du dernier mois qui porte le même quantième que le jour de la réception de la demande. Tout délai expire le dernier jour à minuit.

313.Ainsi, lorsqu'une demande a été reçue le 10 mai, le délai de six mois expire le 10 novembre à minuit.

314.A défaut de quantième identique, le délai expire le dernier jour du mois.

315.Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.

316.La réponse de l'administration doit être adressée par pli recommandé avec demande d'avis de réception et être présentée à l'organisme dans le délai de six mois. A défaut, l'organisme peut se prévaloir d'une réponse tacite positive.

2-2. Demande d'éléments complémentaires

317.Lorsque la demande ne contient pas tous les éléments nécessaires à l'administration pour statuer, l'auteur de la demande est invité, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à produire les éléments manquants.

318.Le délai de six mois ne court qu'à compter de la réception de la totalité des éléments du dossier.


Sous-section 2 :

Etendue de la garantie


  1. L'ADMINISTRATION A REPONDU POSITIVEMENT OU N'A PAS REPONDU DANS LE DELAI DE 6 MOIS

319.La réponse positive de l'administration ne vaut que pour la situation décrite. Elle ne pourrait valablement lui être opposée si les éléments d'information communiqués par l'organisme s'avéraient erronés ou ne pas correspondre à sa situation réelle.

320.De même, la prise de position de l'administration cesse de lui être opposable si la situation a évolué depuis le jour où elle s'est prononcée. Dans cette circonstance, la garantie prévue à l'article L 80 C ne joue plus à compter du jour où la situation de fait sur laquelle l'administration a fondé sa prise de position a changé. La preuve de ce changement incombe au service.

321.L'administration est par ailleurs en droit de revenir sur son appréciation antérieure. Dans cette situation, la garantie cesse de produire ses effets à compter du jour où l'organisme a été avisé que la prise de position antérieure est rapportée.

322.L'absence de réponse de l'administration dans le délai de six mois qui lui est imparti vaut accord tacite.

  2. L'ADMINISTRATION A REPONDU NEGATIVEMENT DANS LE DELAI DE SIX MOIS

323.La réponse négative de l'administration doit comporter l'exposé des motifs qui la justifient.

324.Si l'organisme ne partage pas l'avis de l'administration, il a la faculté de solliciter un second examen dans les conditions prévues à l'article L 80 CB (cf. n° 364 à 389 ).

325.L'organisme qui délivre des reçus fiscaux malgré une réponse négative de l'administration encourt, en toute connaissance de cause, l'amende prévue à l'article 1740 A du code général des impôts.


Section 4  :

Garantie apportée par l'article L 64 B


326.Aux termes de l'article L 64 B, la procédure définie à l'article L 64 n'est pas applicable lorsqu'un contribuable, préalablement à la conclusion d'un ou plusieurs actes, a consulté par écrit l'administration centrale de la DGFiP en lui fournissant tous les éléments utiles pour apprécier la portée véritable de cette opération et que l'administration n'a pas répondu dans un délai de six mois à compter de la demande.

  1. CONDITIONS D'APPLICATION DE L'ARTICLE L 64 B

327.La garantie instituée par l'article L 64 B trouve à s'appliquer lorsque la consultation de l'administration répond aux quatre conditions suivantes :

- la consultation de l'administration doit concerner la portée d'un ou plusieurs actes susceptibles d'être mis en cause dans le cadre de la procédure de l'abus de droit fiscal ;

- cette consultation doit être préalable à la conclusion de cet acte ou ces actes ;

- la demande doit être adressée par écrit à l'administration centrale de la DGFiP ;

- la demande doit comporter tous les éléments utiles pour apprécier la portée véritable de l'opération.

Si ces conditions sont satisfaites et que l'administration n'a pas répondu dans un délai de six mois à compter de la demande, la procédure de l'abus de droit fiscal ne pourra pas être appliquée à cette opération.

328.En revanche, si l'une des conditions posées n'est pas remplie, la consultation n'entre pas dans le champ d'application de l'article L 64 B et les contribuables concernés ne pourront pas se prévaloir de la garantie instituée par cet article en l'absence de réponse de l'administration.

1-1. La consultation de l'administration doit concerner la portée d'un ou plusieurs actes susceptibles d'être mis en cause dans le cadre de la procédure de l'abus de droit fiscal

329.Il est rappelé à cet égard, qu'en application de l'article L 64, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposable, les actes constitutifs d'un abus de droit :

- soit que ces actes ont un caractère fictif ;

- soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles.

Cette définition couvre les situations de fictivité juridique et de fraude à la loi.

En pratique, la fictivité juridique est constituée par la différence objective existant entre l'apparence juridique créée par l'acte en cause et la réalité, en particulier économique, sous-jacente à cet acte.

Selon la jurisprudence, la fraude à la loi en matière fiscale, souvent résumée par la recherche d'un but exclusivement fiscal, est constituée toutes les fois que sont réunies cette recherche d'un but exclusivement fiscal et, d'autre part, l'obtention d'un avantage fiscal par une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs (CE, 29 décembre 2006, n°283314, Bank of Scotland), par exemple par le recours à un montage juridique et économique artificiel (CE, 18 mai 2005, n° 267087, B... , CE, 18 février 2004, n° 247729, C... et CE, 27 juillet 2009, n° 295358, Caisse Interfédérale du Crédit Mutuel)

330.En conséquence, la demande présentée par le contribuable doit porter sur les conséquences fiscales d'un ou plusieurs actes et viser expressément l'article L 64 B. Le contribuable doit exposer sa propre analyse fiscale des opérations projetées, indiquer leurs conséquences fiscales et préciser les conséquences fiscales que pourraient engendrer l'application de la procédure d'abus de droit fiscal qu'il entend écarter.

1-2. La demande doit être préalable à la conclusion ou la réalisation du ou des actes soumis à l'appréciation de l'administration

331.Le ou les actes que le contribuable entend soumettre à l'appréciation de l'administration s'entendent d'actes écrits ou non qu'ils soient bilatéraux, multilatéraux voire unilatéraux, c'est-à-dire tout document ou événement qui, sans être constaté nécessairement par écrit, produit des effets de droit et manifeste l'intention de son auteur.

S'agissant des actes non écrits mais emportant néanmoins des effets de droit, comme la mise à disposition d'un bien non formalisée par un écrit par exemple, le contribuable, faute de pouvoir produire un acte écrit à l'administration procède par description de la situation de fait concernée.

332.L'administration doit être saisie avant la conclusion ou la réalisation des actes, soit en pratique s'agissant des contrats ou conventions avant leur signature par les parties.

333.En revanche, une consultation qui interviendrait après la conclusion ou la réalisation du ou des actes aurait le caractère d'une demande individuelle entrant dans le cadre des dispositions du 1 er alinéa de l'article L 80 A (garantie contre les changements d'interprétation d'un texte fiscal) ou de l'article L 80 B 1° (appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal) et pourrait donc bénéficier, le cas échéant, de la garantie attachée à une prise de position formelle de l'administration. En particulier, seule une réponse expresse de l'administration fiscale l'engage.

1-3. La demande doit être adressée par écrit à l'administration centrale

334.La demande signée par au moins une des parties à l'acte ou aux actes ou par un représentant habilité doit être adressée (par pli recommandé avec avis de réception) à l'administration centrale de la DGFiP, soit au Service juridique de la fiscalité, Bureau des agréments et rescrits, soit à la Direction de la législation fiscale.

1-4. La demande doit comporter tous les éléments utiles pour apprécier la portée véritable de l'opération envisagée

335.Cette exigence implique de la part du demandeur, notamment :

- un exposé clair, complet et sincère de l'opération envisagée ;

- la désignation exacte (nom ou raison sociale, adresse) de toutes les parties au projet d'acte ;

- la description des liens existant déjà entre ces parties ;

- les productions d'une copie de tous les projets de documents (actes, contrats, conventions, protocoles d'accord, statuts), utiles pour apprécier la portée véritable de l'opération.

336.La garantie instituée par l'article L 64 B ne peut bénéficier qu'aux contribuables de bonne foi qui ont exposé tous les éléments qui caractérisent l'opération envisagée. Un contribuable ne pourra donc, en aucun cas, se prévaloir de la garantie lorsqu'il aura fourni des éléments incomplets ou inexacts.

337.Dans l'hypothèse où la demande présentée serait incomplète, le contribuable a la faculté de présenter pour la même opération une demande complétée. Mais l'administration n'est réputée saisie au sens de l'article L 64 B qu'à partir du moment où elle dispose de tous les éléments lui permettant d'apprécier la portée véritable de l'opération envisagée.