B.O.I. N° 119 du 17 JUILLET 2006
b) Compensation entre une prestation compensatoire et une soulte d'un même montant
12.Aux termes de la jurisprudence de la Cour de cassation, la soulte s'analyse comme le paiement d'une somme d'argent (Cass. Civ. 1ère, 2 février 1971).
13.Par suite, les époux peuvent prévoir que celui d'entre eux tenu de verser à l'autre une soulte dans le cadre des opérations de liquidation du régime matrimonial reçoive de ce dernier une prestation compensatoire, de telle sorte que les deux dettes se compensent dans les conditions prévues aux articles 1289 et suivants du code civil. Le règlement d'une prestation compensatoire en compensation d'une soulte peut ouvrir droit à la réduction d'impôt prévue à l'article 199 octodecies du CGI, s'il intervient dans les douze mois qui suivent le jugement de divorce ayant acquis force de chose jugée.
Exemple : Des époux mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts sont propriétaires d'un immeuble évalué à 100 000 €. Le jugement de divorce condamne l'un des époux au versement immédiat d'une prestation compensatoire en capital pour un montant de 50 000 €. Le divorce entraîne la liquidation du régime matrimonial, chacun des époux bénéficie donc de la moitié de la masse commune, soit 50 000 € chacun.
Par convention, l'époux bénéficiaire de la prestation compensatoire est attributaire de l'immeuble en contrepartie du versement, au profit de son ex époux, d'une soulte de 50 000 €. Chacun des époux étant débiteur et créancier l'un envers l'autre, il s'opère une compensation qui a pour conséquence d'éteindre les deux dettes. Le débiteur de la prestation compensatoire n'a donc pas à verser la somme de 50 000 € et bénéficie de la réduction d'impôt sur le revenu prévue à l'article 199 octodecies du CGI. L'assiette de la réduction d'impôt est de 50 000 €, plafonnée à 30 500 €.
c) Versements provisionnels à valoir sur la prestation compensatoire
14.Il arrive que, par convention entre les parties, l'un des époux reçoive de la part de l'autre des versements provisionnels à valoir sur la prestation compensatoire. De même, le juge peut prévoir, dans le cadre du jugement de divorce, et après avoir constaté l'existence d'une disparité dans les conditions de vie respectives des époux, le versement d'une prestation compensatoire provisionnelle dans l'attente d'une décision définitive sur le montant de celle-ci, après une mesure d'expertise.
15.Ces versements étant effectués avant l'intervention du jugement passé en force de chose jugée, ils sont susceptibles de bénéficier de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 octodecies du CGI puisque intervenus avant l'expiration du délai de douze mois décompté à partir de celui-ci.
16.Toutefois, lorsque les sommes qualifiées rétroactivement de « prestation compensatoire » n'ont pas été versées la même année que celle au cours de laquelle est intervenue l'homologation de la convention de divorce ou le jugement de divorce, la réduction d'impôt sur le revenu ne peut être obtenue que par voie de réclamation contentieuse ou de dégrèvement d'office si le délai de réclamation est expiré.
17.Par ailleurs, le plafond de versement éligible à la réduction d'impôt (30 500 €) est global. Par suite, si la convention homologuée ou le jugement de divorce prévoit le versement d'une prestation compensatoire d'un montant supérieur aux sommes versées par anticipation, il convient d'attribuer la réduction d'impôt chaque année au prorata des versements effectués.
Exemple :
Une somme de 20 000 € a été versée le 20 janvier 2005 dans le cadre d'un accord entre les parties. La convention définitive de divorce homologuée par un jugement passé en force de chose jugée le 5 mai 2006 prévoit pour sa part le versement d'une prestation compensatoire de 50 000 € correspondant à hauteur de 20 000 € au versement réalisé le 20 janvier 2005 et pour le solde (30 000 €) à un versement effectué à la date de prononcé du jugement.
Le jugement confère rétroactivement le caractère de prestation compensatoire au versement de 20 000 € réalisé en janvier 2005. Par suite, les sommes de 20 000 € et de 30 000 € sont réputées avoir été versées sur une période au plus égale à douze mois à la date du jugement.
L'attribution de la réduction d'impôt sur le revenu s'effectue comme suit :
- au titre des revenus de 2005, sur réclamation contentieuse du contribuable :
30 500 x 20 000 / 50 000 = 12 200 €
12 200 x 25 % = 3 050 €
- au titre des revenus de 2006, dans le cadre de la liquidation normale de l'impôt sur le revenu :
30 500 x 30 000 / 50 000 = 18 300 €
18 300 x 25 % = 4 575 €
B. LA PRESTATION COMPENSATOIRE EST VERSEE SOUS FORME DE RENTE VIAGÈRE
18.Lorsque, exceptionnellement, la prestation compensatoire est versée sous forme de rente viagère, les versements sont déductibles du revenu imposable du débiteur aux termes du 2° du II de l'article 156 du CGI et imposables à l'impôt sur le revenu au nom du crédirentier selon le régime des pensions, conformément aux dispositions de l'article 80 quater du CGI.
19.Les précisions apportées au n° 11 en cas de non-respect du jugement de divorce ou de la convention de divorce homologuée à des fins d'optimisation fiscale s'appliquent mutatis mutandis.
C. CAS PARTICULIER DES PRESTATIONS COMPENSATOIRES « MIXTES » VERSEES POUR PARTIE SOUS FORME DE CAPITAL EN NUMERAIRE LIBÉRÉ DANS LES DOUZE MOIS DU JUGEMENT DE DIVORCE ET POUR PARTIE SOUS FORME DE RENTE
20.Aux termes du II de l'article 199 octodecies du CGI, le débiteur de la prestation compensatoire ne peut pas bénéficier de la réduction d'impôt sur le revenu visée à cet article lorsque la prestation compensatoire est pour partie servie sous forme de rente dont le montant est déductible de son revenu imposable. En effet, le bénéfice de la réduction d'impôt n'est accordé qu'aux contribuables qui se libèrent du paiement intégral de la prestation compensatoire sous forme de capital dans les douze mois du jugement de divorce passé en force de chose jugée ou de la convention de divorce homologuée, dès lors que l'attribution de cet avantage fiscal a pour objet d'inciter au règlement rapide et définitif des effets pécuniaires du divorce (cf. bulletin officiel des impôts 5 B-9-02 n° 11 ).
21.Les sommes versées à titre de rente temporaire ou viagère, ainsi que les versements en capital sur une durée supérieure à douze mois sont pour leur part déductibles du revenu imposable du débiteur et imposables à l'impôt sur le revenu au nom du bénéficiaire (cf. n° 9 et 10 et n° 18 et 19).
D. CAS PARTICULIER OÙ LES MODALITES DE VERSEMENT DE LA PRESTATION COMPENSATOIRE NE SONT PAS PRECISEES
22.Dans le cas où le jugement ou la convention homologuée ne prévoit pas les modalités de versement de la prestation compensatoire, le régime fiscal est déduit par l'administration fiscale des conditions dans lesquelles le débiteur s'acquitte de son obligation. Dès lors, si l'intégralité de la prestation compensatoire est versée dans les douze mois du jugement passé en force de chose jugée, la réduction d'impôt sur le revenu prévue à l'article 199 octodecies s'applique (cf. n° 7 et suivants ). Si les versements s'échelonnent sur une durée supérieure à douze mois à compter du jugement, le régime des rentes leur est applicable (cf. n° 9 et 10 ), sous les réserves mentionnées aux numéros 20 et 21 en cas de prestations versées pour partie sous forme de capital et pour partie sous forme de rente.
E. CONSEQUENCE DE LA SUBSTITUTION D'UN CAPITAL À UNE RENTE
23.Les prestations compensatoires initialement versées sous forme de rente puis converties en capital s'analysent fiscalement comme des prestations « mixtes » (cf. supra n° 20 et 21 ), puisque les sommes versées avant le jugement de conversion sont venues en déduction du revenu imposable du débirentier.
24.Par suite, la somme versée dans les douze mois du jugement de conversion à titre de capital, en substitution d'une rente, n'ouvre pas droit à la réduction d'impôt sur le revenu.
25.En revanche, les versements en capital effectués sur une période supérieure à douze mois et soumis au même régime fiscal que les rentes, sont déductibles du revenu imposable du débiteur et imposables à l'impôt sur le revenu au nom du bénéficiaire (cf. n° 9 et 10 ).