Date de début de publication du BOI : 22/09/2009
Identifiant juridique : 3D-3-09
Références du document :  3D-3-09

B.O.I. N° 83 DU 22 SEPTEMBRE 2009


BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS

3 D-3-09

N° 83 DU 22 SEPTEMBRE 2009

INSTRUCTION DU 14 SEPTEMBRE 2009

INFORMATION JURISPRUDENCE
DECISION RENDUE PAR LA COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE PARIS
ARRÊT N° 07PA01498 DU 19 FEVRIER 2009

NOR : BCF Z 09 00066 J

Bureau JF-2C



PRESENTATION


T.V.A. – droit à déduction – condition tirée de l'inscription distincte sur la déclaration de la T.V.A. dont la déduction a été omise .

Par un arrêt du 19 février 2009, la Cour administrative d'appel de Paris a jugé que la condition d'inscription distincte sur la déclaration modèle n° 3310-CA3 de la T.V.A., dont la déduction avait été omise, prévue par l'article 224.-1. 2 ème alinéa de l'annexe II au C.G.I. 1 , méconnaît le principe d'effectivité et le principe de proportionnalité qu'implique l'application de l'article 22 § 8 de la 6 ème directive n° 77/388/C.E.E. du 17 mai 1977, modifiée, tels qu'ils sont respectivement interprétés par la Cour de justice des Communautés européennes 2 .

Cette analyse de la Cour n'est pas partagée par l'administration et l'acquiescement à l'arrêt commenté n'est motivé qu'uniquement par des circonstances d'espèce.


D.B. liée :  3 D 1228 à jour au 2 novembre 1996.

Le Chef de Service

Jean-Pierre LIEB


Décision de la Cour administrative d'appel de Paris, n° 07PA01498,
S.N.C. Kimberly Clark c. / Ministre
.


D.B. liée : 3 D 1228 à jour au 2 novembre 1996 .

DECISION DE LA COUR :

« […] En ce qui concerne le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur les factures émises au titre de la période du 1 er janvier 1993 au 30 septembre 1995 :

Considérant que l'article 224 de l'annexe II au code général des impôts subordonne la régularisation dans le délai prévu de la taxe omise à son inscription sur une ligne distincte dans la déclaration souscrite par le contribuable ; que si en vertu de l'article 22 paragraphe 8 de la sixième directive les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour s'assurer que l'assujetti remplit ses obligations de déclaration et de paiement ou prévoient d'autres obligations qu'ils jugeraient nécessaires pour assurer l'exacte perception de la taxe et éviter la fraude, de telles dispositions ne doivent pas avoir pour conséquence de remettre en cause le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en fixant une telle condition formelle relative non à l'existence même du droit à déduction mais aux modalités d'exercice de ce droit dont le non-respect est sanctionné par un refus de déduction alors que les exigences de fond sont satisfaites et que l'absence d'inscription distincte ne rend pas impossible ou excessivement difficile l'exercice par l'administration de son droit de contrôle pour s'assurer de l'exacte perception de la taxe et pour éviter la fraude, l'article 224 de I'annexe II en tant qu'il conditionne au respect d'une exigence formelle le droit à déduction prévu à l'article 17 de la sixième directive, méconnaît ce principe fondamental du système commun de la taxe sur la valeur ajoutée et le principe de proportionnalité qu'implique l'application de l'article 22 paragraphe 8 de la même directive tels que les interprète la Cour de justice des Communautés européennes ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société requérante a porté sur ses déclarations CA 3 déposées au titre du mois de novembre 1995 le montant de taxe sur la valeur ajoutée déductible figurant sur des factures relatives à des dépenses de réception, de restauration et d'hébergement au titre de la période du 1 er janvier 1993 au 30 septembre 1995 et qu'elle avait omis de déclarer ; qu'elle a porté ce montant sur la ligne 17 - « T.V.A. déductible sur biens et services » desdites déclarations et non, comme le prévoit l'article 224 de l'annexe II susvisé, sur la ligne distincte réservée à cet effet, la « ligne 18 » ; que l'administration qui ne conteste ni le droit à déduction de la taxe afférente aux dépenses concernées, ni le montant de taxe déductible et n'allègue aucune fraude ne pouvait légalement se fonder sur les dispositions de I'article 224 de l'annexe II au code général des impôts en tant qu'elles imposent une mention des régularisations sur une ligne distincte pour refuser à la société requérante la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur les factures de ses fournisseurs au titre de la période du 1 er janvier 1993 au 30 septembre 1995 pour un montant total de 393 434,62 F (59 978,72 €) ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la société, celle-ci est fondée à demander la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée résultant de la remise en cause par l'administration de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur des factures susmentionnées portée sur sa déclaration CA 3 de novembre 1995 ; …

D E C I D E :

Article 1 er   : Il est accordé à la société en nom collectif Kimberly Clark la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés et résultant de la réintégration d'un montant de taxe sur la valeur ajoutée déductible d'un montant de 393 434,62 F (59 978,72 €) au titre des factures émises du 1 er janvier 1993 au 30 septembre 1995 ainsi que des intérêts de retard y afférents. […] ».

*

NOTA :

Acquiescement pour circonstances d'espèce.

Sur le principe, l'analyse de la Cour, en ce qu'elle a considéré que l'article 224 de I'annexe II au C.G.I. méconnaissait les principes d'effectivité et de proportionnalité, tels qu'ils sont interprétés par la jurisprudence communautaire, n'est pas partagée.

La condition d'une inscription distincte des régularisations de taxe sur la « ligne 18 » prévue à cet effet sur les déclarations de T.V.A. doit être regardée comme maintenue.

A cet égard, le Conseil d'Etat se livre à une lecture stricte et littérale des conditions formelles posées par l'article 224 précité et considère que la T.V.A. dont la déduction a été omise ne peut être ultérieurement déduite qu'à la condition de faire l'objet d'une inscription distincte sur les déclarations déposées avant le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de l'omission 3 .

Par ailleurs, il est rappelé que l'article 224 de l'annexe II au C.G.I. en ce qu'il prévoit un délai de péremption du droit à déduction a été jugé conforme aux dispositions de la 6 ème directive n° 77/388/C.E.E. du 17 mai 1977, modifiée, dont l'article 18 § 3 n'interdit pas que soient prévues en droit national des forclusions du droit à déduction. Ce délai court à compter de l'exigibilité de la taxe chez le fournisseur 4 .

De plus, à titre d'illustration, l'article 18 § 4 5 de la 6 ème directive susvisée permet aux Etats membres de fixer eux-mêmes les modalités de remboursement des crédits de T.V.A., et ne s'oppose pas, notamment, à ce que des mesures nationales prévoient la retenue à titre conservatoire d'un crédit de T.V.A. restituable lorsqu'il existe des présomptions sérieuses de fraude fiscale 6 .

N.B . : L'intervention de la décision de la Cour administrative d'appel de Paris ne constitue pas un événement 7 , au sens et pour l'application combinées des articles R. *196-1-c). et L. 190 du L.P.F..

 

1   Repris à l'article 208 de l'annexe II au C.G.I. issu du décret 2007-566 du 16 avril 2007.

2   C.J.C.E. 8 mai 2008, aff. 95/07 et 96/07, 3 e ch., Ecotrade SpA. ; C.J.C.E. 27 septembre 2007, aff. 146/05, Y... .

3   C.E. 16 juin 1999 n° 168383, 8 e et 9 e s.-s., Sté Les ducs de Savoie.

4   B.O.I. 3 D-1-09 du 3 février 2009.

5   Repris à l'article 183 de la directive 2006/112/C.E. du 28 novembre 2006.

6   C.J.C.E. 18 décembre 1997, aff. 286/94, 340/95, 401/95 et 47/96, 5 e ch., Garage Molenheide BVBA.

7   B.O.I. 13 O-1-06 du 10 août 2006.