SECTION 8 NOTIFICATION DES JUGEMENTS
SECTION 8
Notification des jugements
1Les jugements du tribunal administratif sont notifiés le même jour, par les soins du greffier en chef, à toutes les parties en cause, à leur domicile réel, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, sans préjudice du droit des parties de les faire signifier par acte d'huissier de justice (cf. C. TACAA, art. R 211, R 215 et R 216 et LPF, art. R* 200-4 , 1er al.) 1 .
Le fait qu'un contribuable n'a pas été informé, lors de la notification d'un jugement du tribunal administratif rendu à son profit, qu'il avait la faculté de faire courir le délai de recours contentieux à l'encontre du ministre, en lui faisant signifier le jugement par exploit d'huissier, n'est pas de nature à permettre à l'intéressé d'opposer la déchéance au recours formé en temps utile par le ministre contre le jugement en cause (CE, arrêt du 8 janvier 1955, n° 32874, RO, p. 222).
Quant au défaut de notification d'une décision du tribunal administratif, il n'est pas de nature à entacher cette décision d'irrégularité mais a pour seule conséquence de ne pas faire courir le délai d'appel à l'encontre du requérant (CE, arrêt du 22 mai 1950, n°s 1409 et 1410, X... , RO, p. 52, Leb. chron., p. 306, 1re esp.).
Les expéditions des jugements sont signées et délivrées par le greffier en chef ou par l'un des greffiers, selon le cas (C. TA-CAA, art. R 210). Elles ne doivent pas, comme les minutes, être signées par le président (CE, arrêt du 19 avril 1982, n° 26471).
A. PERSONNES À QUI DOIT ÊTRE ADRESSÉE LA NOTIFICATION
I. Notification à l'Administration
2En ce qui concerne l'Administration, la notification des jugements est faite à la direction des impôts qui a suivi l'affaire (LPF, art. R* 200-4 , 1er al.), c'est-à-dire, en règle générale, au directeur des Services fiscaux, au directeur régional ou au directeur du service spécialisé qui a eu à en connaître 2 .
II. Notification au contribuable
1. Généralités.
3La notification des jugements est valablement faite à la partie au lieu de son domicile réel (lieu du siège pour un établissement ou une société).
Ainsi, le Conseil d'État a précisé que la notification d'un jugement du tribunal administratif, sur une réclamation formée par un patentable, est faite régulièrement au siège de l'établissement exploité par ce patentable et non à son domicile (CE, arrêt du 19 avril 1866, n° 38512, X... , RO, 1693, Leb. chron., p. 390).
2. Cas particuliers :
a. Le contribuable a désigné un mandataire.
4La notification des jugements est toujours valablement faite à la partie, au lieu de son domicile réel (C. TA-CAA, art. R 211) alors même qu'elle a constitué un mandataire et élu domicile chez ce mandataire.
Cette règle est confirmée par la jurisprudence.
Est régulière la notification d'un jugement du tribunal administratif qui a été faite au domicile réel du contribuable, alors même que celui-ci aurait constitué un mandataire, domicilié dans le département, avec pouvoir de poursuivre éventuellement l'instance, et qu'il aurait élu domicile chez ce mandataire (CE, arrêt du 11 décembre 1911, n° 42713, Syndicat de l'épicerie française, RO, 4433, Leb. chron., p. 1178, 1re esp.).
Toutefois, le jugement peut être notifié au mandataire s'il a reçu pouvoir, non seulement d'introduire ou de soutenir l'instance devant le tribunal administratif, mais encore de se pourvoir, le cas échéant.
De fait, lorsqu'un tiers a reçu mandat de représenter un contribuable devant tous tribunaux de première instance ou d'appel, tant en demandant qu'en défendant et que ce tiers a introduit l'instance devant le tribunal administratif, le jugement lui est valablement notifié et le délai d'appel court du jour de la notification au mandataire (CE, arrêt du 13 mai 1903, n° 9894, X... , RO, 6240, Leb. chron., p. 350, 3e esp.).
Également, la notification du jugement du tribunal administratif est régulièrement faite à l'avoué qui a valablement introduit l'instance au nom du contribuable intéressé (CE, arrêt du 19 juin 1931, n° 17389, RO, 5645).
Mais lorsque le mandataire n'a été habilité qu'à agir en première instance, la notification qui lui est faite est inopérante au regard du délai d'appel.
Ainsi, jugé qu'est inopérante au regard du délai d'appel, la notification d'un jugement faite à un mandataire qui n'avait pouvoir que pour réclamer devant le tribunal administratif en pareil cas, la notification doit être adressée au contribuable lui-même (CE, arrêt du 19 décembre 1900, n° 87766, dame X... , RO, 3798, Leb. chron., p. 790, 2e esp.).
b. Le contribuable est une société.
5La notification du jugement est valablement faite au représentant légal, ou à l'un des représentants légaux de la société.
Jugé que la notification d'un jugement du tribunal administratif, rendu sur une requête formée par une société, est régulièrement faite à l'un des gérants de cette société, lorsque d'ailleurs il a signé la requête (CE, arrêt du 25 juillet 1860, X... , RO, 1040).
De même, le tribunal administratif pouvant valablement statuer par une seule décision sur les demandes en décharge ou en réduction présentées par les membres d'une société en nom collectif en ce qui concerne les impositions auxquelles ils ont été assujettis au titre de la contribution des patentes (act. taxe professionnelle), la circonstance que le jugement n'a été notifié qu'à l'un d'entre eux n'est pas de nature à entraîner l'annulation de la décision (CE, arrêt du 4 juillet 1938, X... , RO, p. 358).
6Société en liquidation judiciaire (règlement judiciaire) 3 .
Lorsque la société en cause est en liquidation judiciaire (règlement judiciaire), la notification du jugement doit être faite à la société et à son liquidateur.
Jugé que la notification d'un jugement du tribunal administratif rendu à l'égard d'une société en liquidation judiciaire (règlement judiciaire) doit être faite à la fois à la société et à son liquidateur (administrateur au règlement judiciaire) ; si cette notification n'est faite qu'à la société, elle est irrégulière et ne peut faire courir le délai d'appel (CE, arrêt du 26 décembre 1938, n° 63095, Compagnie agricole de minoterie, RO, p. 600, Leb. chron., p. 979).
Le Conseil d'État a par ailleurs précisé qu'est irrégulière la notification d'une décision du directeur ou du tribunal administratif, faite à un syndic-liquidateur par une lettre qui ne porte pas l'indication du contribuable intéressé et ne contient que des renseignements insuffisants -nature de l'imposition contestée, quartier où elle a été établie, article du rôle- pour permettre à son destinataire de déterminer le litige sur lequel porte la décision (CE, arrêt du 3 novembre 1944, Syndic de la société de gérance des cinémas Pathé, RO, p. 193).
7Société en liquidation amiable.
Lorsque l'avis portant notification d'un jugement du tribunal administratif, adressé à bon droit au siège d'une société anonyme, a été renvoyé à l'expéditeur avec la mention « société dissoute, partie sans laisser d'adresse », il appartient au service expéditeur d'effectuer une seconde notification à l'adresse du liquidateur de la société, laquelle est en principe portée à la connaissance des tiers par la voie des annonces légales. Dans ce cas, le délai d'appel ne court que du jour de la réception de cette nouvelle notification par le liquidateur (CE, arrêt du 9 novembre 1960, n° 48750, Leb. chron., p. 618).
c. Notification remise à une personne sans qualité.
8Lorsque la lettre portant notification de la décision du directeur ou du tribunal administratif a été remise à une personne sans qualité, la notification est irrégulière et ne peut, dès lors, faire courir le délai pour porter le litige devant le tribunal administratif ou pour former appel (CE. arrêt du 24 octobre 1938, n° 60979, RO, p. 438).
B. MODALITES DE LA NOTIFICATION
9La notification comporte l'envoi d'une expédition du jugement revêtue de la formule exécutoire (C. TA-CAA, art. R 209).
L'envoi est effectué par le greffier en chef sous une enveloppe spéciale portant la mention « notification d'un jugement » (circulaire du ministère de l'Intérieur du 26 avril 1959, n° 212 Per/CP).
Si le pli recommandé contenant l'expédition du jugement est renvoyé au greffe avec la mention « refusé », l'envoi vaut notification du jugement pour le destinataire du pli refusé (ibid).
Dans le cas ou le destinataire n'a pu être atteint par La Poste, le greffier se renseigne sur le domicile réel de l'intéressé et lui adresse une nouvelle notification par la voie postale (ibid).
À cet égard, il a été précisé que, lorsque l'administration des Postes, n'ayant pu remettre à son destinataire la lettre portant notification d'un jugement du tribunal administratif, a laissé, à la seule adresse que l'intéressé ait indiquée soit à cette administration, soit à celle des Impôts, une note lui faisant connaître que cette lettre était à sa disposition au bureau de poste, le dépôt de cette note doit être regardé comme faisant courir le délai d'appel prévu par l'article 49 de l'ordonnance du 31 juillet 1945 (CE, arrêt du 18 décembre 1954, n° 32382, RO, p. 168, Leb. chron., p. 765).
En cas d'échec de la notification par voie postale, le greffier procède à la notification par la voie administrative. À cet effet, il demande au préfet du département du domicile présumé de l'intéressé de faire procéder à cette notification par un agent public et de transmettre, en retour, au greffe un procès-verbal daté et signé comportant l'une des mentions : « Remis le ; refusé le ou introuvable » (circulaire du ministère de l'Intérieur précitée).
Si ce dernier mode de notification s'avère inopérant, le greffier informe les autres parties au litige de l'échec des tentatives et leur fait savoir qu'il leur appartient, si elles veulent faire courir le délai d'appel contre leur adversaire introuvable, de faire procéder à leurs frais à la signification du jugement par huissier (ibid).
Dans le cas d'un destinataire domicilié à l'étranger, le greffier peut notifier le jugement à l'intéressé directement par lettre recommandée avec avis de réception ou demander au ministre des Affaires étrangères de faire procéder à la notification, dans la forme administrative, par la voie consulaire (ibid).
C. OMISSION OU ERREUR DANS LA NOTIFICATION
10D'une manière générale, la circonstance que la notification d'un jugement comporterait des erreurs ou des inexactitudes n'est pas de nature à entacher de nullité le jugement lui-même.
Ainsi il a été jugé que ne saurait entraîner l'annulation d'un jugement :
- l'erreur commise dans l'exploit de signification d'un jugement (CE, arrêt du 13 mars 1931, n° 10654, X... , Bull., n° 13, 1931, p. 171, TJCA, n° 17007, Leb. chron., p. 289) ;
- la circonstance que la date du jugement portée sur l'expédition adressée au contribuable serait erronée. Une seconde notification effectuée en vue de réparer l'erreur matérielle antérieurement commise ne peut ouvrir un nouveau délai de recours (CE, arrêt du 23 mai 1938, X... , RO, p. 284) ;
- la circonstance que la notification du jugement serait irrégulière (CE, arrêt du 24 novembre 1949, n°s 99609 à 99618, dame X... et autres, Rec., 1949, p. 143, TJCA. n° 17035, Leb. chron., p. 504).
11Par ailleurs, le Conseil d'État a précisé que la notification d'un jugement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception est régulière et fait, en conséquence, courir le délai d'appel alors même que le pli recommandé contenant le jugement n'aurait pas contenu en outre la lettre de notification informant le requérant dudit délai (CE, arrêt du 9 juillet 1975, n° 93319, X... , RJ, n° IV, p. 44).
1 Le président peut décider en outre de faire notifier aux parties la décision par la voie administrative mentionnée à l'article R 140 du C. TA-CAA (art. R 212 du même code).
2 Service qui a pris la décision sur la réclamation préalable.
3 Régimes remplacés depuis le 1er janvier 1986 par celui du redressement et de la liquidation judiciaires des entreprises (loi n° 85-98 du 25 janvier 1985).