Date de début de publication du BOI : 10/08/1998
Identifiant juridique : 13O3321
Références du document :  13O3321

SOUS-SECTION 1 EXPERTISE

  II. Personnes pouvant assister à l'expertise

52Toutes les personnes prévenues par l'expert de la date et de l'heure de l'expertise (cf. ci-dessus, n°s 48 et suiv. ) peuvent, bien entendu, y assister.

L'Administration se fait représenter dans tous les cas à l'expertise par un agent (un inspecteur, un inspecteur divisionnaire ou un inspecteur principal), qui doit obligatoirement accompagner les experts lorsqu'il est nécessaire, au cours des opérations, d'effectuer un déplacement sur les lieux (LPF, art. R* 200-12 ).

Quant au requérant, il a la faculté de se faire assister d'un conseil pendant les opérations d'expertise (CE, arrêt du 2 août 1901, n° 98191, X... , RO, 3796, Leb. chron., p. 739, 1re esp.). Il peut également se faire représenter par un mandataire (LPF, art. R* 200-12 ).

La disposition par laquelle, dans un jugement ordonnant une expertise, le tribunal administratif n'autorise les experts à demander que par écrit des éclaircissements au vérificateur et au comptable n'ayant eu pour objet, en l'espèce, que d'éviter toute confrontation entre ces derniers, ne saurait être regardée comme comportant par elle-même l'interdiction, pour le requérant, de se faire représenter aux opérations par son comptable, ni par suite, comme entachée d'irrégularité (CE, arrêt du 29 juin 1966, n° 67034, RO, p. 199).

53De leur côté, les experts peuvent s'adjoindre des auxiliaires non assermentés chargés de les assister dans leur travail (CE, arrêt du 29 janvier 1947, req. n° 73599, X... , RO, p. 155, Leb. chron., p. 582) mais ils doivent dans tous les cas procéder personnellement aux opérations et ne peuvent déléguer leurs pouvoirs.

54Enfin, le maire convoqué ainsi que les deux membres de la commission communale qu'il a désignés (cf. ci-dessus n°s 48 et suiv. ) ont le droit de suivre les opérations ; mais leur présence n'étant pas obligatoire, l'expertise doit être entreprise même s'ils ne se présentent pas et poursuivie s'ils se retirent soit dès le début, soit au cours des opérations.

Jugé ainsi qu'une expertise est valable :

- bien que le maire et les répartiteurs 1 convoqués ne se soient pas présentés (CE, arrêt des 17 décembre 1862, X... , RO, 1335 et 21 novembre 1930, n° 9375, X... , RO, 5504, Leb. Chron., p. 962, 2e esp.) ;

- bien que le maire et les répartiteurs 1 se soient retirés dès le début (CE, arrêt du 21 décembre 1877, X... , RO, 2993) ;

- bien que le délégué du maire se soit retiré avant la fin de l'opération et n'ait pas signé le procès-verbal (CE, arrêt du 18 juillet 1873, n° 46132, X... , RO, 2490,.Leb. chron., p. 645) ;

- bien qu'après la réunion à la mairie, l'un des répartiteurs 1 ait refusé de prendre part à la visite des lieux (CE, arrêt du 23 novembre 1877, n° 50642, X... , RO, 2992, Leb. chron., p. 898).

Enfin, le maire et les répartiteurs 1 qui assistent à l'expertise ne sont pas tenus de donner leur avis (CE, arrêt du 25 mars 1870, n° 43772, X... , RO, 2239, Leb. chron., p. 351).

  III. Incidents susceptibles de survenir au début de l'expertise

1. Demande en récusation d'expert.

55Si, dès le début de la réunion, le requérant manifeste personnellement l'intention de demander la récusation d'un expert, en justifiant d'ailleurs qu'il n'a pas reçu notification de la désignation de cet expert (cf. ci-dessus, n°s 36 et suiv. ), les opérations de l'expertise ne sont pas entreprises. Dans ce cas, l'expert consigne le fait dans son rapport.

Il y a lieu de remarquer à cet égard que les pourvois au Conseil d'État n'ayant pas d'effet suspensif, il peut être procédé à l'expertise même si le jugement par lequel le tribunal administratif a rejeté une demande de récusation d'expert a été attaqué devant le Conseil d'État [CE, arrêt du 5 novembre 1934, X... , RO, 6304] 2 .

2. Absence du requérant ou d'un expert.

56Lorsque le requérant ou un expert ne s'est pas rendu à la réunion, en excipant, pour motiver son abstention, soit d'une convocation réellement tardive. soit d'un cas de force majeure, soit enfin, pour l'expert, d'une démission, les opérations de l'expertise ne sont pas entreprises. Il appartient alors à l'expert du tribunal administratif de consigner le fait dans son rapport.

Par suite, est irrégulière l'expertise effectuée :

- sans la participation du requérant et de son expert, lorsque ceux-ci n'ont pas été convoqués au moins dix jours (ancien délai) à l'avance (CE, arrêt du 9 janvier 1874, n° 46614, X... , RO, 2445, Leb. chron., p. 6) ;

- en l'absence de l'expert du requérant lorsque cet expert a prévenu en temps utile et justifié par un certificat du médecin qu'il ne pourrait assister aux opérations, au jour primitivement fixé (CE, arrêt du 23 novembre 1908, n° 27838, dame X... , RO, 4155, Leb. chron., p. 950, 1re esp.) ou lorsque cet expert a fait connaître, en temps utile, qu'il donnait sa démission (CE, arrêt du 22 juillet 1910, n° 31707, dame X... , RO, 4335, Leb. chron., p. 612, 1re esp.) ;

- non par l'expert unique désigné par le tribunal administratif, mais par un employé dudit expert (CE, arrêt du 1er mai 1939, X... , RO, p. 240).

57Mais l'expertise est exécutée, nonobstant leur absence mentionnée dans le rapport d'expertise, si le requérant ou l'expert défaillant ont été régulièrement convoqués et s'ils se sont abstenus sans empêchement sérieux indépendant de leur volonté ou s'ils se sont volontairement retirés.

Ainsi, a été jugée régulière :

- l'expertise effectuée en l'absence du requérant et de son expert, dès lors que l'intéressé avait formellement accepté qu'il y soit procédé dans de telles conditions (CE, arrêt du 22 juillet 1948, n° 90387, X... , RO p. 80, Leb. chron., p. 345) ;

- l'expertise effectuée en l'absence du requérant dont le défaut a été constaté par les experts dans le procès-verbal qui lui a été régulièrement notifié (CE, arrêt du 17 mai 1961, n° 41742, Leb. chron., p. 325).

De même, un requérant ne peut valablement attaquer :

- l'expertise par le motif qu'il se serait retiré avec son expert avant la fin de l'opération (CE, arrêt du 17 décembre 1862, n° 33960, X... , RO, 1335, Leb. chron., p. 788) ;

- l'expertise faite en l'absence de son fondé de pouvoir, si ce dernier a assisté au commencement de l'opération et s'est ensuite retiré volontairement (CE, arrêt du 17 août 1864, n° 35249, Compagnie des chemins de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée, RO, 1518, Leb. chron., p. 789, 3e esp.) ;

- l'expertise au cours de laquelle le requérant qui a été régulièrement convoqué à la première séance n'a pas été avisé des séances ultérieures, dès lors que son mandataire, après avoir assisté à l'ouverture des opérations, s'est retiré volontairement avant la fin de la première séance (CE, arrêt du 3 novembre 1933, n° 20260, RO, 6044) ;

- l'expertise faite en l'absence de son conseil dès lors qu'il a lui-même participé à la réunion des experts (CE, arrêt du 16 juillet 1976, n° 99680).

3. Désistement.

58Lorsque le requérant ou son mandataire dûment qualifié déclare renoncer à l'expertise, cette déclaration est consignée dans le rapport d'expertise.

Dans ce cas, et si l'Administration accepte le désistement du requérant, l'exécution de l'expertise devient inutile. Si, au contraire, l'Administration n'accepte pas le désistement, l'expertise ne pourra être exécutée que lorsque le tribunal administratif aura sanctionné cette non-acceptation.

À noter que l'expert d'un contribuable n'a pas qualité, à défaut d'un mandat de ce dernier, pour accepter les propositions de l'Administration. Jugé en conséquence que l'inexécution d'une expertise à la suite d'une acceptation faite dans ces conditions et sans que le requérant ait déclaré renoncer à cette mesure d'instruction, constitue une irrégularité de procédure susceptible d'entraîner l'annulation du jugement du tribunal (CE, arrêt du 21 novembre 1896, n° 82673, X... , RO, 3612, Leb. chron., p. 757, 3e esp.).

4. Autres incidents.

59Un contribuable n'est pas fondé à se plaindre qu'il n'ait pas été procédé à l'expertise lorsque c'est par son fait que cette opération n'a pu avoir lieu (CE, arrêt du 30 mai 1873, X... , RO, 2379) ou s'il s'est opposé à l'exécution de l'expertise ordonnée par le tribunal (CE, arrêt du 5 décembre 1873, n° 46783, X... , RO, 2448, Leb. chron., p. 894).

  IV. Constatations des experts

60S'il y a plusieurs experts, ils procèdent ensemble aux opérations d'expertise (C. TA-CAA, art. R 165). Ils doivent s'attacher essentiellement à la vérification des faits. Mais il importe qu'ils restent dans les limites de la mission qui leur est confiée par le jugement ordonnant l'expertise (cf. ci-dessus, n°s 24 à 34 ).

Ainsi les experts qui ont reçu mission de vérifier la valeur probante des justifications comptables ou extra-comptables présentées par un contribuable, à l'effet de démontrer l'exagération de l'évaluation faite par l'Administration, peuvent, le cas échéant, mettre en évidence des erreurs de principe ou de fait viciant cette évaluation, mais il ne leur appartient pas de remettre en cause le caractère non probant de la comptabilité, ni de substituer purement et simplement leur évaluation à celle de l'Administration sans démontrer l'inexactitude de celle-ci (CE, arrêt du 23 janvier 1967, n° 65320, RJ, 2e partie, p. 20).

61Les experts ne sont pas tenus d'étudier dans le détail toutes les pièces mises à leur disposition par le contribuable, dès lors qu'ils ont fait une étude suffisante de la comptabilité et notamment des livres de caisse et de banque, d'achats et de ventes et du livre centralisateur, dont la consultation était indispensable à l'accomplissement de leur mission (CE, arrêt du 4 octobre 1978, n° 1727).

1. Exécution des opérations d'expertise.

62Les experts sont tenus, en principe, de se rendre sur les lieux, d'examiner les locaux, objets ou documents sur lesquels porte le litige et d'opérer toutes constatations utiles au vu des pièces comptables ou autres qui peuvent être produites ou représentées tant par le requérant que par l'Administration.

63 a. Déplacement des experts. - Jugé que la circonstance que l'expert unique désigné par le tribunal administratif et le représentant de l'Administration auraient été transportés dans un même véhicule n'est pas de nature à entacher d'irrégularité les opérations de l'expertise (CE, arrêt du 8 janvier 1958, X... , RO, p. 6).

64 b. Lieu de l'expertise. - Dans une espèce où le litige concernait une société dont le siège était à Monaco, le Conseil d'État a estimé qu'aucune disposition de la convention franco-monégasque du 23 décembre 1951 ne prévoyant la possibilité d'accomplir une mesure d'instruction judiciaire dans la Principauté 3 , une société monégasque n'est pas recevable à prétendre qu'une expertise ordonnée par le tribunal administratif aurait dû se dérouler à Monaco (CE, arrêt du 13 novembre 1964, n°s 50944 et 60449, RO, p. 186).

65 c . Examen des lieux. - En ce qui concerne la visite sur place des experts, l'article R* 200-12 du LPF précise que ce déplacement doit être effectué « lorsqu'il est nécessaire, au cours de l'expertise, de se rendre sur les lieux ».

Ainsi, est entachée de nullité l'expertise opérée sans que l'immeuble, objet de la réclamation, ait été visité (CE, arrêt du 29 juin 1877, n° 51475, X... , RO, 2896, Leb. chron., p. 633).

En revanche, rien n'oblige les experts à procéder aux opérations d'expertise dans les locaux mêmes du requérant, dès lors qu'ils ont à leur disposition tous les documents nécessaires à l'accomplissement de leur mission et que la visite de ces locaux ne présente aucune utilité dans les circonstances de l'affaire (CE, arrêt du 5 décembre 1960, n° 47093, RO, p. 209).

66 d . Communication aux experts d'éléments d'information. - L'Administration ne doit pas se refuser à donner aux experts commis dans une instance fiscale communication de tous les éléments d'information de nature à permettre d'apprécier le bien-fondé de l'imposition litigieuse et notamment à désigner les entreprises ou personnes susceptibles d'être retenues comme termes de comparaison, s'il s'agit de la détermination de bénéfices. Mais, pour respecter le secret professionnel auquel elle est tenue en vertu des articles L 60, alinéa 2, et L 103 du LPF, elle ne peut fournir que des moyennes de chiffres d'affaires, de revenus, de frais, dépenses, charges ou autres éléments se rapportant aux entreprises ou personnes qu'elle désigne nommément. Quant à la communication intégrale des documents ou pièces concernant lesdites entreprises ou personnes, elle ne doit, en vertu de l'article L 201 du LPF, être donnée qu'au tribunal administratif, en chambre du conseil, lorsque celui-ci a demandé à l'audience à les recevoir pendant le délibéré pour son intime conviction.

67 e. Délais de production des documents impartis par les experts. Conséquences. - Lorsque les experts ont imparti un délai au requérant pour répondre à leurs demandes, ils ne peuvent, sans vicier les opérations d'expertise, négliger d'examiner les documents présentés par le contribuable après l'expiration dudit délai mais avant le depôt au tribunal administratif de leur rapport (CE, arrêt du 11 fevrier 1966, n° 57479, RO, p. 61).

68 f. Entraves aux constatations des experts. - Dans une affaire où le contribuable soutenait que son expert avait été l'objet de mesures qui l'avaient gêné dans l'accomplissement de sa mission, le Conseil d'État a décidé que le moyen invoqué devait être rejeté dès lors que ce fait n'était pas établi et que le jugement avait été rendu sur le vu des trois rapports déposés par les experts (CE, arrêt du 3 avril 1940, n° 36378, X... , Bull. n° 9, 1940, p. 166, TJCA, n° 119031, Leb. chron., p. 121, 1re esp.).

En revanche, l'expertise portant sur le classement de parcelles non bâties a été déclarée irrégulière, dès lors que les experts n'ont pu procéder efficacement aux constatations qui leur incombaient en raison des circonstances atmosphériques existant au moment des opérations (CE, arrêt du 13 juin 1938, X... , RO, p. 324).

1   Membres de la commission communale des impôts directs.

2   Arrêt rendu antérieurement à la réforme du contentieux administratif.

3   La convention du 19 mai 1963 actuellement en vigueur ne prévoit pas non plus cette possibilité.