SOUS-SECTION 4 DÉLAIS PARTICULIERS AUX IMPÔTS DIRECTS ÉTABLIS PAR VOIE DE RÔLE ET AUX RETENUES À LA SOURCE ET PRÉLÈVEMENTS
SOUS-SECTION 4
Délais particuliers aux impôts directs établis par voie de rôle et
aux retenues à la source et prélèvements
1Les articles R* 196-1 et R* 196-2 du LPF visent trois situations particulières :
- l'envoi de nouveaux avis d'imposition rectifiés se substituant à ceux déjà émis qui comportent des erreurs ;
- l'envoi d'avis d'imposition afférents à des impositions établies à tort ou faisant double emploi ;
- les contestations relatives à l'application de retenues effectuées à la source ou de prélèvements.
A. DÉLAI PARTICULIER EN CAS D'ENVOI DE NOUVEAUX AVIS D'IMPOSITION
2Les avis d'imposition rectifiés à la suite d'erreurs d'expédition commises dans la confection des rôles (ou avis d'imposition) sont adressés au contribuable sous pli recommandé avec demande d'avis de réception postal.
C'est la date portée sur l'avis de réception postal qui constitue le point de départ du délai particulier de réclamation.
Ce délai expire le 31 décembre de l'année suivant celle au cours de laquelle le contribuable a reçu le nouvel avis d'imposition (LPF, art. R* 196-1 et R* 196-2 ).
B. DÉLAI PARTICULIER EN CAS DE COTISATIONS D'IMPÔTS DIRECTS ÉTABLIES À TORT OU FAISANT DOUBLE EMPLOI
3Dans le cas où des cotisations d'impôts directs sont établies à tort ou font double emploi, le délai pour la présentation des réclamations prend fin le 31 décembre de l'année suivant celle au cours de laquelle le contribuable a eu connaissance certaine de l'existence de la cotisation indûment imposée (LPF, art. R* 196-1 et R* 196-2 ).
I. Champ d'application
a. Cotisation établie à tort (faux emploi).
4Est, par exemple, considérée comme dirigée contre une « cotisation établie à tort » et comme pouvant bénéficier, par suite, du délai spécial, une demande de l'héritier d'un contribuable décédé contestant une imposition établie au nom du défunt et mise en recouvrement postérieurement au décès (CE, 20 avril 1959, n° 42317).
En revanche, il a été jugé que ne pouvaient pas bénéficier du délai spécial :
- une réclamation dirigée contre une imposition à la contribution mobilière établie collectivement au nom de deux soeurs à raison d'une habitation qui n'est plus occupée que par l'une d'elles (CE, 23 mars 1908, n° 28232, demoiselle X... , RO, n° 6256) ;
- une réclamation tendant à la décharge d'une imposition établie d'après la déclaration même du contribuable (CE, 30 juillet1952, n° 15245, RO, p. 101 ; CE, 17 juin 1970, n° 71542).
b. Double emploi.
5Il y a double emploi par exemple, lorsque deux cotisations ayant le même objet ont été établies au nom d'un contribuable alors qu'une seule est due.
Toutefois, il a été jugé que la circonstance que des pertes au change provenant d'un emprunt hypothécaire contracté en Suisse pour les besoins de l'entreprise et subies au cours des exercices 1948 à 1952 ont été omises pour le calcul du bénéfice desdites années ne permet pas de dire qu'il y a double emploi en ce qui concerne l'imposition de 1956, afférente à la plus-value de cession et qui ne tient pas compte du montant de la dette contractée (CE, 18 mai 1960, n° 47002).
II. Conditions d'application
6Le bénéfice du délai particulier ne s'applique qu'aux réclamations fondées sur un « faux » ou un doublé emploi affectant l'intégralité de la cotisation. En outre, le point de départ du délai est constitué par la connaissance certaine de l'imposition indue (CE, 17 avril 1974, n° 89760, Bull., n° 74, p. 74, p. 266, n° 17083).
7 a. Intégralité de la cotisation.
Aux termes d'une jurisprudence constante, le « faux » ou le double emploi doit affecter l'intégralité de la cotisation.
À cet égard, il a été jugé :
- qu'en matière d'impôt sur les revenus, toute imposition supplémentaire constitue en elle-même une cote distincte. Le bénéfice du délai spécial s'applique, dès lors, à une réclamation qui tend à la décharge pour faux emploi d'une imposition de cette nature (CE, 27 mars 1939, n° 48167, RO, p. 180) ;
- que lorsqu'un contribuable assujetti à la contribution des patentes ne saurait prétendre qu'à une réduction de son imposition, il ne peut bénéficier du délai spécial en cas de faux ou de double emploi (CE, 5 mars 1955, n° 26692).
8 b. Connaissance certaine.
La connaissance certaine de l'existence d'une cotisation indûment établie résulte, d'après la jurisprudence du Conseil d'État, de toute circonstance impliquant l'impossibilité pour le contribuable d'ignorer l'existence de l'imposition établie à son nom.
9Ainsi, la date servant de point de départ au délai (connaissance certaine) peut résulter :
1° Du paiement de l'imposition contestée.
Tel est le cas d'un premier paiement effectué sur l'imposition litigieuse, en cas de cotisation établie à tort, ou effectué sur celle des deux cotisations qui a été acquittée en dernier lieu, en cas de double emploi.
Est donc irrecevable une réclamation fondée sur un faux emploi, qui a été présentée plus de trois mois (ancien délai) après le jour où le contribuable a effectué un premier versement sur la cotisation litigieuse (CE, 10 mai 1943, n° 67055, X... , RO, p. 329).
Toutefois, un contribuable qui a adressé au percepteur un chèque postal sans indication d'affectation ne peut être considéré comme ayant eu, à la date de cet envoi, connaissance officielle d'une imposition sur laquelle le percepteur a imputé d'office le montant du chèque, dès l'instant qu'il n'a pas été informé de l'imputation ainsi effectuée (CE, 12 mai 1933, Société Forges et Aciéries de Flize, RO, 6000).
De même, lorsque le percepteur, avant la mise en recouvrement du rôle, a imputé d'office le montant d'un dégrèvement sur la cotisation d'un contribuable, celui-ci ne peut être regardé comme ayant eu connaissance officielle de l'imposition à la date de l'imputation. C'est seulement à la date à laquelle il a acquitté le solde qu'il a eu connaissance officielle de ladite imposition (CE, 19 mai 1983, X... , RO, 6301).
2° De poursuites.
Les héritiers d'un contribuable décédé jouissent, pour demander la décharge d'une imposition établie à tort au nom du défunt, du délai spécial qui court de la date des poursuites dirigées contre eux (CE, 28 décembre 1928, n° 1370).
3° D'une réclamation.
La connaissance officielle de l'imposition litigieuse est acquise au plus tard le jour où l'intéressé a présenté :
- une réclamation contre le même impôt (CE, 6 mai 1908, n° 27919, X... ) ;
- une réclamation contre une autre cotisation portée sur le même avertissement (avis d'imposition) [CE, 14 mai 1926, n° 90465, RO, 5090] ;
- une demande de sursis de paiement (CE, 4 décembre 1908, n° 29551, X... ) ;
- une demande en remise gracieuse au sujet de l'imposition contestée (CE, 6 juillet 1962, n° 51067).
4° De l'aveu du contribuable.
Ainsi a été considérée comme irrecevable une réclamation, fondée sur un double emploi, qui a été présentée plus de trois mois (ancien délai) après le jour, où, de son propre aveu, le contribuable a eu connaissance de l'imposition contestée (CE, 30 mars 1936, n° 45854, RO, 6416) ; dans le même sens pour une réclamation fondée sur un faux emploi (CE, 15 février 1937, n° 52513, RO, p. 102 ; CE, 17 novembre 1941, n° 64560, RO, p. 321).
5° D'une notification.
Est irrecevable, au regard du délai de faux emploi, une réclamation qui a été présentée plus de trois mois (ancien délai) après le jour où le contribuable a reçu notification - par une lettre recommandée d'ailleurs accompagnée de l'avertissement relatif à l'imposition contestée - de l'avis du contrôleur l'informant qu'aucun dégrèvement ne pouvait être accordé d'office sur le montant de cette imposition (CE, 16 mai 1938, Société des Établissements Agache Fils, RO, p. 276).
Il en est de même en ce qui concerne la réclamation d'un contribuable qui a reçu notification d'un redressement avant la mise en recouvrement de l'imposition et qui a nécessairement eu connaissance de ladite imposition par des commandements de payer à lui adressés avant l'expiration du délai normal de réclamation (CE, 19 mai 1965, n° 61094).
C. DÉLAIS DE RÉCLAMATION EN CAS DE RETENUES À LA SOURCE ET DE PRÉLÈVEMENTS
10En ce qui concerne les impôts ainsi perçus 1 , des réclamations peuvent être présentées :
- soit par les personnes ou sociétés qui ont versé au Trésor les retenues ou prélèvements opérés par leurs soins ;
- soit par les contribuables ayant supporté les retenues.
a. Partie versante.
11Lorsque la personne ou société qui a opéré la retenue de l'impôt et en a effectué le versement au Trésor demande une restitution de ce versement, le point de départ du délai de réclamation se situe à la date dudit versement et la date d'expiration de ce délai est le 31 décembre de la deuxième année suivant la date du versement (art. R* 196-1, 1er alinéa, § b).
b. Contribuables.
1° Cas général.
12Pour ce qui est des réclamations présentées par les contribuables, le point de départ du délai est la date à laquelle les retenues ont été opérées (date du paiement, à leur bénéficiaire, des revenus amputés de l'impôt retenu à la source), et la date d'expiration du délai est le 31 décembre de l'année suivant celle de ce point de départ (art. R* 196-1, 2e alinéa, § b).
2° Crédit d'impôt ou avoir fiscal.
13Quand la retenue à la source à laquelle sont soumis certains revenus de capitaux mobiliers ouvre droit au profit du contribuable à un crédit d'impôt venant en déduction de l'impôt sur le revenu établi par voie de rôle, le point de départ du délai particulier est la mise en recouvrement du rôle et le point d'arrivée est le 31 décembre de la deuxième année qui suit la date de mise en recouvrement (LPF, art. R* 196-1 , 1er alinéa, § a).
Il en est de même pour l'avoir fiscal attaché aux dividendes distribués par les sociétés françaises.
L'étude détaillée de ces restitutions (prévues aux articles 158 bis et 199 ter du CGI) figure dans la série 5FP, division I.
1 Sont perçus par voie de retenue ou prélèvement à la source :
- l'impôt frappant les salaires, pensions et rentes viagères de source française, les rémunérations de source française payées à raison de prestations artistiques ou sportives à compter du 1er janvier 1990, et certains revenus non salariaux servis à des personnes non domiciliées en France et n'y ayant pas d'installation professionnelle permanente (CGI, art. 182 A et 182 B) ;
- l'impôt frappant certains revenus de capitaux mobiliers.