Date de début de publication du BOI : 30/04/1996
Identifiant juridique : 13O2122
Références du document :  13O2122
Annotations :  Lié au BOI 13O-5-00
Lié au BOI 13O-6-98

SOUS-SECTION 2 DÉLAI GÉNÉRAL DE RÉCLAMATION

SOUS-SECTION 2

Délai général de réclamation

1Aux termes des articles R* 196-1 et R* 196-2 du LPF, les réclamations sont recevables, sous réserve des délais spéciaux étudiés ci-après (s.-s. 3 et 5 et 13 O 22) :

- en toute matière fiscale (excepté les impôts directs locaux, cf. ci-dessous) jusqu'au 31 décembre de la deuxième année suivant celle :

. de la mise en recouvrement du rôle,

. de la notification d'un avis de mise en recouvrement,

. du versement de l'impôt contesté si cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement,

. de la réalisation de l'événement qui motive la réclamation ;

- en matière d'impôts directs locaux et de taxes annexes 1 jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle :

. de la mise en recouvrement du rôle,

. de la réalisation de l'événement qui motive la réclamation ;

- dans les deux cas cités ci-dessus, jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle :

. de la réception par le contribuable d'un nouvel avis d'imposition réparant les erreurs d'expédition que contenait celui adressé précédemment (cf. 13 O 2124, n° 2 ),

. au cours de laquelle le contribuable a eu connaissance certaine de cotisations d'impôts directs établies à tort ou faisant double emploi (cf. 13 O 2124, n°s 3 et suiv. ).

  A. POINT DE DÉPART DU DÉLAI DE RÉCLAMATION

2Ce sont les faits en fonction desquels le délai de réclamation est fixé par les dispositions susvisées du LPF qui déterminent le point de départ de ce délai.

Ces faits, qui varient à la fois selon la nature des impôts contestés, l'état du recouvrement ou le mode de perception desdits impôts et le motif de la réclamation, sont examinés successivement ci-après.

  I. Mise en recouvrement du rôle ou notification d'un avis de mise en recouvrement

3En ce qui concerne les impôts directs établis par voie de rôle, le point de départ du délai de réclamation est, d'une manière générale, la date de mise en recouvrement du rôle.

Ce délai court de la mise en recouvrement du rôle quelle que soit la date à laquelle le contribuable a reçu son avis d'imposition (CE, 5 octobre 1973, n° 83169, RJ, IV, p. 97).

Dans le cas où le contribuable n'a pas reçu l'avis d'imposition, le délai de réclamation ne commence à courir qu'à compter du jour où il a eu connaissance de la mise en recouvrement du rôle sans qu'il y ait lieu d'opérer de distinction entre les impositions périodiquement établies et celles consécutives à un redressement (CE, arrêt du 16 décembre 1992, n° 123 268, Société LIVIANA ANSTALT).

4Pour les impositions ayant donné lieu à l'établissement d'un avis de mise en recouvrement 2 c'est la date à laquelle cet avis a été notifié au contribuable qui constitue le point de départ du délai de réclamation.

La notification des avis de mise en recouvrement, doit être considérée comme faite le jour de la remise effective du pli au contribuable intéressé ou à son fondé de pouvoir.

Dans le cas où le pli recommandé n'a pu être remis à son destinataire, il convient de retenir les solutions indiquées au sujet de la procédure devant les tribunaux administratifs concernant la notification des décisions rendues par l'Administration (cf. 13 O 3).

  II. Versement de l'impôt contesté

5En toute matière fiscale, lorsque les impôts, droits ou taxes contestés ont été versés au Trésor sans qu'ils aient, au préalable, donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement, le point de départ du délai de réclamation est la date à laquelle l'impôt a été acquitté 3 .

Il en est ainsi -sous réserve des indications fournies ci-après au sujet des retenues à la source (cf. 13 O 2124, n°s 10 à 13 ) et des acomptes provisionnels (cf. 13 O 2125, n° 7 )- pour toutes les demandes en restitution d'impôts versés par le redevable de manière spontanée, c'est-à-dire sans que l'Administration ait eu à établir un titre de recouvrement (rôle ou avis de mise en recouvrement) 4 .

6En revanche, les versements effectués en l'acquit d'impôts compris dans un rôle mis en recouvrement ou ayant fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement notifié ne peuvent en aucun cas servir de point de départ au délai de réclamation, ce point de départ demeurant fixé à la date de mise en recouvrement du rôle ou de notification de l'avis de mise en recouvrement (cf. ci-dessus n°s 3 et 4 ).

  III. Événement motivant la réclamation

7  En toute matière fiscale, le délai de réclamation peut avoir pour point de départ la date de l'événement qui motive la réclamation (LPF, art. R* 196-1 et R* 196-2 ).

Par « événement » susceptible d'être retenu comme servant de point de départ au délai de réclamation, il convient d'entendre tout fait ou circonstance ayant pour effet ou conséquence :

- soit de mettre en cause le principe même de l'imposition contestée ;

- soit de modifier rétroactivement l'assiette ou le calcul de cette imposition ;

- soit d'ouvrir droit, par sa nature même, au dégrèvement ou à la restitution de tout ou partie d'une imposition qui, fondée dans son principe, était régulièrement établie et calculée.

8  Seuls les faits ou circonstances se rapportant directement à la situation propre du contribuable, auteur de la réclamation, ou aux éléments de base ou de calcul de l'imposition contestée peuvent constituer un « événement » au sens des articles précités ; sont donc exclus, les faits et circonstances concernant des personnes autres que le contribuable lui-même ou des impositions distinctes de celle visée dans la réclamation.

Il s'ensuit, en particulier, qu'une décision administrative ou judiciaire modifiant la doctrine ou la jurisprudence fiscale antérieure ne peut en aucun cas être considérée comme un « événement » susceptible d'être retenu comme point de départ du délai de réclamation (cf. n° 10 ci-dessous).

9  1. Constituent des événements ouvrant le délai général de réclamation :

- la publication d'un texte législatif ou réglementaire comportant des dispositions qui modifient avec effet rétroactif les règles d'imposition, lorsque du moins ces textes ne fixent pas eux-mêmes un délai spécial de réclamation ; tel a été le cas, par exemple, du décret n° 61-789 du 24 juillet 1961, qui a autorisé les entreprises à constituer en franchise d'impôt des provisions pour hausse des prix sur des exercices dont les résultats avaient été soumis à l'impôt antérieurement à la publication dudit décret ;

- une décision de justice fixant, avec effet rétroactif, la véritable situation du contribuable ou la nature réelle d'un élément d'imposition. Il en serait ainsi, par exemple, d'une décision judiciaire intervenue en 1990 et fixant avec effet de 1987 l'invalidité du contribuable à un taux lui permettant de bénéficier, pour le calcul de l'impôt sur le revenu dû au titre des années 1987 et suivantes, d'un quotient familial supérieur à celui d'après lequel il a été imposé pour lesdites années ;

- tout fait qui ouvre droit par lui-même, en vertu d'une disposition législative ou réglementaire, à un dégrèvement ou à une restitution 5 . Il en est ainsi, par exemple, en matière de taxe foncière sur les propriétés non bâties, en cas de disparition d'un immeuble non bâti par suite d'un événement extraordinaire (CGI, art. 1397) ; pour les taxes sur le chiffre d'affaires de l'exportation des objets ou marchandises ayant supporté lesdites taxes (CGI, art. 271-V) ; pour les droits d'enregistrement et de taxe de publicité foncière, de l'une des causes prévues aux articles 1961 à 1965 E.

En outre, il est admis que les décisions de mutation de cote 6 de taxe foncière ou de transfert 7 de taxe d'habitation soient assimilées, à l'égard du redevable légal de l'impôt, à un « événement » motivant l'introduction d'une réclamation dans le délai général prévu à l'article R* 196-2 du LPF.

La notion d'événement a, par ailleurs, été précisée par la jurisprudence.

En particulier, constitue un événement, au sens des articles R* 196-1 et R* 196-2 du LPF :

- une décision, en date du 14 septembre 1956, par laquelle le service d'Électricité de France-Gaz de France a accordé une pension de caractère rétroactif à raison d'un accident de travail survenu en 1951 (CE, 5 janvier 1962, Ass. plén., n° 46798, RO, p. 9) ;

- le commandement signifié au propriétaire d'un fonds de commerce donné en gérance libre (propriétaire mis en cause par application de l'article 1684-3 du CGI pour le paiement des cotisations dues par le gérant) et mentionnant la nature et le montant des droits mis à sa charge alors même que ledit propriétaire aurait eu antérieurement connaissance de l'existence de cette dette fiscale par la voie d'une saisie-arrêt pratiquée à son encontre sur le montant de l'indemnité de gérance (CE, 6 juillet 1962, n° 55419, RO, p. 143) ;

- la mise en demeure au terme de laquelle le gérant d'une SARL est tenu personnellement, par application de l'article 1745 du CGI et à la suite d'un jugement définitif le déclarant coupable de fraude fiscale, d'acquitter, en tant que débiteur solidaire les cotisations établies au nom de la société, alors même qu'il avait eu antérieurement connaissance desdites impositions, par ses fonctions de gérant de la société (CE, 24 novembre 1971, n° 77372, RJ, IV, p. 150) ;

- la circonstance qu'un contribuable a été condamné à payer les droits d'enregistrement du fait de l'acquisition d'un immeuble, dès lors que les droits en cause qui n'ont été établis et recouvrés qu'après la clôture de l'exercice au cours duquel cet immeuble a été vendu peuvent, dans le cas où la taxation de la plus-value réalisée à l'occasion de cette vente a été opérée, être admis ultérieurement en déduction des bases de calcul de ladite plus-value, car les droits dont il s'agit ont eu pour effet d'augmenter le prix d'acquisition. L'intéressé peut de ce fait, sur réclamation présentée dans le délai prévu à l'(ancien) article 1932-1, dernier alinéa, du CGI, prétendre à une réduction de l'imposition correspondante (CE, 25 février 1966, n° 58298, RO, p. 79) ;

- la signification faite à la veuve du contribuable par voie de commandement d'avoir à payer les impositions établies au nom de son mari décédé (CE, 21 novembre 1973, n° 86456) ;

- la facture rectificative que reçoit une société immobilière après cessation de son activité et après l'expiration du délai normal de réclamation et qui porte mention d'une taxe sur la valeur ajoutée non facturée initialement ; la restitution du trop versé de la taxe apparaissant en conséquence peut ainsi être réclamée par la société (CE, 23 juin 1976, n° 97388, SCI plage de Nauzan, RJ, IV, p. 59) ;

- la liquidation totale du stock ; dans un tel cas, le jour de l'achèvement de cette liquidation (et non pas celui de la dissolution légale de la société) constitue le point de départ du délai dont dispose une société pour demander le remboursement de la TVA qu'elle ne peut plus récupérer par voie d'imputation en raison de sa cessation d'activité (CE, 7 juillet 1976, n° 97156, SA « Soleil et Sports », RJ, IV, p. 62) ;

- la constatation de l'existence d'un paiement indu effectué par des cohéritiers, lors de la détermination définitive du montant des droits de mutation par décès (Cass. com., 2 octobre 1978, affaire sieur Paul Y... ) ;

- l'annulation d'un forfait initial pour des motifs de forme de nature à ouvrir au contribuable le délai de réclamation prévu à l'article R* 196-1 du LPF contre les impositions ultérieurement établies sur des bases résultant de la tacite reconduction de ce forfait (CE, arrêt du 19 décembre 1984, n° 39421).

Par ailleurs, les demandes de remboursement de TVA présentées par les redevables soumis au régime du forfait doivent être introduites avant le 31 décembre de l'année qui suit celle au titre de laquelle le crédit de taxe déductible est déterminé (art. 242-O-D de l'annexe II au CGI). Mais, lorsque la notification du forfait est postérieure à ce délai, celle-ci constitue un événement ouvrant à l'intéressé le délai général de réclamation prévu par l'article R* 196-1 du LPF lui permettant ainsi de présenter une demande de remboursement (CE, arrêt du 8 décembre 1986, n° 57881).

1   Les impôts directs locaux et taxes annexes à ces impôts sont les impôts directs prévus à la deuxième partie du livre 1er du CGI, qui sont perçus au profit des collectivités locales et de divers organismes.

2   Il s'agit des prélèvements et retenues afférents aux revenus de capitaux mobiliers, des retenues à la source d'impôt sur le revenu (CGI, art. 182 A et 182 B), des taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement et de timbre, de la taxe de publicité foncière et de l'impôt de solidarité sur la fortune.

3   En cas de règlement de l'impôt au moyen d'une obligation cautionnée, la souscription de l'obligation vaut paiement et, par suite, c'est la date de souscription de l'obligation qui constitue, en principe, le point de départ du délai de réclamation. Toutefois, il y a lieu d'admettre, par mesure libérale, que le point de départ du délai est la date d'échéance de l'obligation lorsque le redevable s'est normalement acquitté à cette date. Si l'obligation cautionnée est impayée à l'échéance, le délai court à compter de la date de paiement effectif de l'impôt, à moins, bien entendu, qu'un avis de mise en recouvrement n'ait été notifié avant cette date.

4   En ce qui concerne les droits de timbre, il est souvent, en pratique, assez difficile de situer avec certitude la date à laquelle l'impôt a été acquitté par un redevable. Tel est le cas, en particulier, lorsque ce dernier utilise des impressions timbrées (timbres mobiles fiscaux), dont il a acquitté d'avance le coût avant toute utilisation de ces documents. En pareille hypothèse, on peut faire abstraction du versement provisionnel de l'impôt et fixer le point de départ du délai de réclamation à la date à laquelle s'est produit le fait générateur de l'impôt, c'est-à-dire à la date de l'établissement des actes (pour les écrits soumis au timbre de dimension, les effets négociables et non négociables et les contrats de transports) ou à celle de leur délivrance (quittances pures et simples).

5   Les faits de l'espèce sont, d'une manière générale, ceux qui motivent les réclamations visées au chapitre 2 ci-après comportant des règles particulières de procédure. Il convient toutefois d'exclure de ces faits ceux - tels que les pertes de récoltes (cf. 13 O 2211 ) - pour lesquels un délai spécial de réclamation est prévu par la loi.

6   La procédure de mutation de cote est supprimée depuis le 1er août 1994 (loi n° 93-1352 du 30 décembre 1993, art. 85).

7   La procédure de transfert de taxe d'habitation a été supprimée par l'article 44 de la loi de finances rectificative pour 1990.