Date de début de publication du BOI : 30/04/1996
Identifiant juridique : 13O1213
Références du document :  13O1213

SOUS-SECTION 3 RÈGLES APPLICABLES À CERTAINS MODES PARTICULIERS D'IMPOSITION

SOUS-SECTION 3

Règles applicables à certains modes particuliers d'imposition

La présente sous-section regroupe, sur le plan de la charge de la preuve, les divers régimes d'imposition qui présentent par rapport aux règles énoncées ci-dessus un certain nombre de particularités.

Ces règles concernent :

- les impositions établies d'après les éléments du train de vie ;

- les impositions établies selon un mode forfaitaire ;

- les impositions directes perçues au profit des collectivités locales ;

- les impositions établies à la suite d'une présomption légale ;

- les contributions indirectes 1  ;

- la répression des abus de droit.

  A. ÉVALUATION D'APRES CERTAINS ÉLÉMENTS DU TRAIN DE VIE

1Lorsqu'il existe une disproportion marquée entre le train de vie d'un contribuable et ses revenus, la base d'imposition à l'impôt sur le revenu peut être déterminée forfaitairement d'après les éléments du train de vie de l'intéressé, dans les conditions prévues à l'article 168 du CGI.

2En cas de réclamation contentieuse, l'Administration doit justifier de la régularité de la mise en oeuvre de la taxation résultant des dispositions de l'article précité en même temps que du montant de l'évaluation forfaitaire.

Elle doit donc :

- démontrer la disproportion marquée existant entre le train de vie du contribuable et ses revenus selon les prescriptions du paragraphe 2 bis de l'article 168 (cf. 5 B 5222) ;

- établir l'existence des éléments du train de vie ;

- justifier de l'exacte application du barème.

3Suivant les dispositions du paragraphe 3 du même article, le contribuable peut apporter la preuve que ses revenus ou l'utilisation de son capital ou les emprunts qu'il a contractés lui ont permis d'assurer son train de vie (cf. 5 B 525).

Il peut également démontrer que certains éléments du train de vie ont été retenus à tort ou que leur évaluation est excessive.

  B. IMPOSITIONS ÉTABLIES SELON UN MODE FORFAITAIRE

  I. Forfait (bénéfices industriels et commerciaux, chiffre d'affaires)

4• Le contribuable qui estime que son forfait, en matière de bénéfice industriel et commercial ou de taxes sur le chiffre d'affaires, a été fixé sur des bases excessives peut produire une réclamation contre ce forfait, visant l'une ou l'autre, ou les deux années de la période biennale. Il en est ainsi non seulement dans le cas où le forfait a été fixé par le service après acceptation expresse ou tacite du contribuable, mais encore lorsqu'il a été fixé par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires.

Dans un cas comme dans l'autre, le contribuable ne peut obtenir une réduction qu'en fournissant tous éléments, comptables ou autres, de nature à permettre d'apprécier, en se plaçant à la date de fixation ou de reconduction du forfait, l'importance du bénéfice ou des opérations que son entreprise peut produire ou réaliser normalement compte tenu de sa situation propre (LPF, art. R* 191-1-b et c  ; cf. 4 G 3253 et 3 F 261 ; CE, arrêt du 10 mars 1972, n° 83780, sté de fait Établissement Pignol-Langlois, RJ, n° II, p. 40 ; arrêt du 24 mai 1982, n° 26346).

• De même, lorsqu'un changement d'activité intervient après fixation des bases forfaitaires (cf. 3 F 2511, n°s 1 et suiv.), le contribuable peut adresser une réclamation en vue d'obtenir une révision de son forfait. Il doit alors apporter tous éléments comptables ou autres de nature à permettre d'apprécier l'importance du bénéfice ou du chiffre d'affaires que son entreprise peut produire ou réaliser normalement à la suite du changement d'activité (CGI, art. 302 ter-7 ; cf. 4 G 3251 et 3 F 2621).

• Enfin, l'intervention d'une législation nouvelle 2 c'est-à-dire : une modification du champ d'application ou des règles d'assiette de l'impôt autorise également le contribuable à demander la réduction de son forfait par la voie d'une réclamation.

Il est précisé que l'application d'une législation nouvelle en matière de taxes sur le chiffre d'affaires n'a pas obligatoirement une incidence sur les résultats d'exploitation d'une entreprise. En conséquence, une modification des règles d'assujettissement ou d'assiette de la TVA n'implique pas nécessairement la révision d'un forfait de bénéfice fixé avant l'entrée en vigueur de la nouvelle législation.

Toutefois, s'il est en mesure d'établir que les modifications intervenues ont eu pour effet d'augmenter ses charges d'exploitation, le redevable a la possibilité de demander une réduction de son imposition (cf. 3 F 2622).

  II. Évaluation administrative (bénéfices non commerciaux)

5Sous le régime de l'évaluation administrative en matière de bénéfices des professions non commerciales, le contribuable peut demander, par la voie contentieuse, une réduction du bénéfice qui lui a été assigné soit par le service, soit par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, à charge pour lui d'apporter tous éléments, comptables ou autres, de nature à permettre d'apprécier le montant du bénéfice réalisé (LPF, art. R* 191-1-a ; CE, arrêt du 6 février 1981, n° 18775).

  III. Caducité du forfait ou de l'évaluation administrative

6Lorsque le forfait de bénéfice ou de taxes sur le chiffre d'affaires, ou l'évaluation administrative, est devenu caduc (LPF, art. L 8) et que le service doit procéder, selon le cas, soit à la fixation d'un nouveau forfait ou d'une nouvelle évaluation administrative suivant les procédures propres à ces régimes d'imposition, soit à l'évaluation d'office d'un bénéfice réel (commercial ou non commercial) ou à la taxation d'office d'un chiffre d'affaires réel, la charge préalable de la preuve de l'inexactitude des renseignements ou documents fournis incombe en toute hypothèse à l'Administration.

  C. IMPOSITIONS DIRECTES PERÇUES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS LOCALES

7Il s'agit de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, de la taxe d'habitation et de la taxe professionnelle qui sont établies sur l'initiative de l'Administration bien que les contribuables soient tenus de souscrire certaines déclarations 3 . La charge de la preuve incombe en principe à l'Administration.

8On observera toutefois que c'est au contribuable qu'il appartient éventuellement d'apporter la preuve de la réalité des faits nouveaux qu'il invoque à l'appui de sa réclamation (disparition, vacance ou inexploitation d'immeuble, changement d'habitation ...).

9Il appartient également au contribuable d'apporter toutes justifications utiles dans le cas où il y a contradiction entre les renseignements fournis dans sa réclamation et ceux produits dans les déclarations qu'il avait l'obligation de souscrire pour l'établissement de ses impôts locaux.

10Pour ce qui est en particulier des demandes en mutation de cote de taxe foncière 4 (cf. 13 O 2211, n°s 50 et suiv. ).

  D. PRÉSOMPTIONS LÉGALES

11Le CGI prévoit un certain nombre de présomptions en matière de droits d'enregistrement, d'impôt de solidarité sur la fortune 5 et d'impôts directs dont, notamment, celles énoncées ci-après.

  I. Présomptions légales en matière de droits d'enregistrement ou d'impôt de solidarité sur la fortune

Ces présomptions touchent la propriété, la jouissance ou la valeur de certains meubles ou immeubles, ainsi que la réalité de certaines dettes.

12Sont présumés faire partie de la succession du défunt pour la liquidation des droits de mutation par décès, ou du patrimoine du redevable au 1er janvier de l'année d'imposition, pour l'établissement de l'impôt de solidarité sur la fortune :

1°) Les valeurs mobilières, les biens meubles ou immeubles appartenant pour l'usufruit au défunt ou au redevable et pour la nue-propriété à l'un de ses héritiers présomptifs ou aux descendants de ces derniers, ou à ses donataires ou légataires, ou à des personnes interposées, sauf le cas de donation régulière (CGI, art. 751 ; cf. 7 G 2154, n°s 2 et suiv. et 7 S 322, n° 13).

Toutefois, cette présomption n'a dû trouver à s'appliquer que rarement au titre de l'impôt sur les grandes fortunes 2 puisque l'article 885 G du CGI (édition 1986) pose pour principe que les biens grevés d'usufruit, d'un droit d'habitation ou d'un droit d'usage sont compris pour l'assiette de l'impôt dans le patrimoine de l'usufruitier pour leur valeur en toute propriété sauf dans les cas énumérés au a, b et c du même article (cf. 7 R 3212, n°s 15 et suiv.). Les mêmes règles issues de l'article 885 G du CGI (édition 1989) s'appliquent au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune.

2°) Les valeurs mobilières, parts sociales et créances dont le défunt ou le redevable a eu la propriété ou a perçu les revenus ou à raison desquelles il a effectué une opération quelconque moins d'un an avant son décès ou au cours de l'année précédant celle au titre de laquelle l'imposition est établie (CGI, art. 752 ; cf. 7 G 2154, n°s 24 et suiv. et 7 S 322, n°s 14 et 15).

3°) À raison d'une part virile, les titres, sommes ou valeurs en dépôt et faisant l'objet de comptes indivis ou collectifs avec solidarité et les biens déposés dans un coffre-fort loué conjointement à plusieurs personnes (CGI, art. 753 et 754 ; cf. 7 G 2154, n°s 51 et s. et 7 S 322, n°s 16 et suiv.).

4°) Les immeubles, fonds de commerce et clientèle visés aux articles 1881 et 1882 du CGI (cf. ci-dessous n° 13 ).

Par ailleurs, certaines valeurs mobilières françaises qui n'auraient pas été mises au nominatif au plus tard le 1er octobre 1982 ou qui n'auraient pas été inscrites en compte tenu par la personne émettrice ou par un intermédiaire habilité sont, sauf preuve contraire, présumées être la propriété, au titre des droits de succession et de l'impôt sur les grandes fortunes 5 ou de l'impôt de solidarité sur la fortune, des gérants, du président du conseil d'administration ou du directoire de la société émettrice qui ne justifieraient pas avoir effectué toute diligence pour l'application de la loi (CGI, art. 754 B et 885 C) [cf. 7 G 2154, n°s 41 et suiv. et 7 R 322, n°s 21 et suiv.].

Enfin, en ce qui concerne l'assiette des droits de mutation par décès de l'impôt de solidarité sur la fortune, il est précisé que :

- la valeur des meubles ainsi que, dans certains cas, des immeubles ayant fait l'objet d'un échange ou d'une mutation à titre gratuit est fixée d'après les bases déterminées par la loi (CGI, art. 684, 4e al., 761, 2e al. et 764 ; cf. 7 G 2312 et 7 S 352) ;

-certaines dettes sont présumées remboursées, fictives ou prescrites et leur déduction est prohibée (CGI, art. 773 ; cf. 7 G 2321, n°s 31 et suiv. et 7 S 362).

13Pour la perception des droits de mutation entre vifs et par décès ou des droits et taxe additionnelle afférents aux baux, sont présumées établies par l'existence de certains actes ou la constatation de certains faits limitativement énumérés aux articles 1881, 1882 et 1883 du CGI (notamment, inscription au rôle des impôts locaux et paiement de ces impôts) :

- les mutations d'immeubles en propriété ou usufruit ;

- les mutations de fonds de commerce ou de clientèle ;

- les jouissances d'immeubles à titre de ferme, de location ou d'engagement.

Pour l'impôt de solidarité sur la fortune, cf. 7 S 322, n° 29.

Situation en cas de réclamation.

14En cas de réclamation dirigée contre des droits déterminés sur la base de l'une des présomptions légales visées aux paragraphes précédents, le service a seulement l'obligation d'établir que les conditions fixées par la loi pour la mise en jeu de la présomption se trouvent réunies.

Toutefois, la charge de la preuve incomberait intégralement au service dans le cas où, usant de la faculté réservée par l'article 753 du CGI, il aurait liquidé les droits afférents aux biens faisant l'objet d'un compte indivis ou collectif avec solidarité sur une somme supérieure à la part virile du défunt.

Quant au contribuable, il lui appartient, pour faire échec à la présomption, d'apporter la preuve contraire, c'est-à-dire d'établir, suivant le cas : que les biens en cause n'ont fait l'objet d'aucune mutation, que leur valeur est inférieure à la base retenue, etc. En ce qui concerne, toutefois, les dettes dont la déduction de l'actif est interdite par le jeu des présomptions légales, le contribuable n'est admis que pour certaines d'entre elles -et parfois sous certaines conditions- à faire la preuve de leur existence (et de leur exigibilité) au jour du décès ou au 1er janvier de l'année d'imposition (cf. à cet égard, CGI, art. 773 et 774).

1   Cf. 13 O, renvoi n° 2.

2   Il est précisé qu'un simple changement de taux de TVA n'est pas de nature à remettre en cause les bases du forfait ; il entraîne le rajustement du montant de l'impôt à acquitter.

3   En ce qui concerne la taxe foncière sur les propriétés bâties, les propriétaires intéressés ont été appelés à souscrire, dans le cadre de la révision des évaluations, des déclarations, dont la date de référence est le 1er janvier 1970. Ils sont en outre tenus de déclarer dans les quatre-vingt-dix jours de leur réalisation définitive les constructions nouvelles et les changements affectant leurs immeubles.

Par ailleurs, certains redevables de la taxe professionnelle (dont les recettes dépassent certaines limites ou dont l'activité s'exerce dans plusieurs communes) sont tenus de souscrire une déclaration contenant des renseignements nécessaires à la détermination de leur base d'imposition.

4   Procédure supprimée depuis le 1er août 1994, par l'article 85 de la loi de finances pour 1994.

5   L'impôt sur les grandes fortunes a été supprimé à compter du 1er janvier 1987 ; l'impôt de solidarité sur la fortune a été institué à compter du 1er janvier 1989.