SOUS-SECTION 4 DÉLAIS DE REPRISE EN MATIÈRE D'ENREGISTREMENT, DE PUBLICITÉ FONCIÈRE, D'IMPÔT DE SOLIDARITÉ SUR LA FORTUNE, DE TIMBRE ET DE TAXES ASSIMILÉES
SOUS-SECTION 4
Délais de reprise en matière d'enregistrement 1 , de publicité
foncière,
d'impôt de solidarité sur la fortune, de timbre et de taxes assimilées
A. DROITS D'ENREGISTREMENT, TAXE DE PUBLICITÉ FONCIÈRE, IMPÔT DE SOLIDARITÉ SUR LA FORTUNE, DROITS DE TIMBRE ET TAXES, IMPOSITIONS ET REDEVANCES ASSIMILÉES AUTRES QUE LA TAXE SUR LES CONVENTIONS D'ASSURANCES ET LE DROIT DE TIMBRE SUR LES OPÉRATIONS DE BOURSE
1Sous réserve des dispositions spéciales prévues par l'article L. 182 du LPF pour la taxe sur les conventions d'assurances et le droit de timbre sur les opérations de bourse (cf. ci-après n os53 et 54 ), le droit de reprise de l'administration au regard des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière, de l'impôt de solidarité sur la fortune, des droits de timbre ainsi que des taxes, redevances et impositions assimilées, est soumis :
- soit à la prescription de courte durée, dite « prescription abrégée », prévue par les articles L. 180 et L. 181 du LPF (sous réserve de la prorogation du délai de reprise prévue aux articles L. 187 et L. 188 A du LPF ; cf. respectivement DB 13 L 1216 et 1217 ) ;
- soit à la prescription décennale, de droit commun en matière fiscale, prévue à l'article L. 186 du LPF, lorsque les conditions d'application de la prescription abrégée ne sont pas réunies (cf. DB 13 L 121 ).
Ces dispositions s'appliquent non seulement aux droits d'enregistrement et de timbre proprement dits, mais encore aux taxes, redevances et impositions diverses assimilées à ces droits, à savoir notamment :
2 • les taxes et droits assimilés aux droits d'enregistrement :
- taxes additionnelles aux droits d'enregistrement perçues au profit des communes (CGI, art. 1584), des départements (CGI, art. 1595) et du fonds de péréquation départemental (CGI, art. 1595 bis) ;
- taxe additionnelle au droit de bail perçue au profit de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (CGI, art. 741 bis 2 ) ;
- taxe d'accroissement (CGI, art. 1005 et 1006) ;
- droits de sceau (CGI, art. 1019) ;
- droit fixe de procédure (CGI, art. 1018 A) ;
- impôt de solidarité sur la fortune (CGI, art. 885 A).
3 • les taxes et droits assimilés aux droits de timbre :
- droits de délivrance de documents et taxes diverses visés aux articles 945 à 968 C 3 du CGI ;
- droit forfaitaire de délivrance d'ampliation (CGI, art. 1018 B 4 ) ;
- taxe différentielle sur les véhicules à moteur (CGI, art. 1599 C) ;
- taxe sur les véhicules des sociétés (CGI, art. l010).
4 • les autres taxes et prélèvements :
Les règles de prescription prévues pour les droits d'enregistrement sont également applicables à divers prélèvements et taxes qui, bien que libératoires des impôts sur les revenus ou imputables sur ces impôts, sont néanmoins, en vertu de leurs textes institutifs, recouvrés comme en matière d'enregistrement.
Il s'agit :
- de la taxe sur les transformations de sociétés en groupements forestiers et sur les apports à ces groupements de bois ou de terrains à reboiser (CGI, art. 238 quater) ;
- du prélèvement sur les profits retirés des opérations visées à l'article 35 du CGI (marchands de biens et assimilés) par des personnes physiques ou des sociétés n'ayant pas d'établissement en France (CGI, art. 244 bis et LPF, art. L. 172 C ).
I. Prescription conditionnelle de courte durée dite « prescription abrégée »
1. Délai de la prescription abrégée.
5Aux termes de l'article L. 180 du LPF, le droit de reprise de l'administration peut s'exercer jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au cours de laquelle l'exigibilité des droits a été suffisamment révélée par l'enregistrement d'un acte ou d'une déclaration ou par l'exécution de la formalité fusionnée sans qu'il soit nécessaire de recourir à des recherches ultérieures.
2. Point de départ de la prescription abrégée.
6Le point de départ de la prescription abrégée se situe à la date de l'enregistrement de l'acte ou de la déclaration (ex. : date de production d'une déclaration de succession ; date d'enregistrement d'un acte sous seing privé).
Aussi, lorsque plusieurs actes successifs se rapportant à la même affaire ont été enregistrés à des dates différentes, les délais de prescription s'apprécient isolément pour chaque acte.
La Cour de cassation en a fait l'application suivante en précisant que l'action en répétition de l'administration peut être exercée selon l'article 1971 du CGI, actuellement codifié à l'article L. 180 du LPF, jusqu'à l'expiration de la quatrième année (actuellement troisième année) suivant celle au cours de laquelle l'exigibilité des droits et taxes a été suffisamment révélée par l'enregistrement d'un acte ou d'une déclaration. Dès lors qu'il ressort des constatations du jugement qu'en l'espèce l'exigibilité des droits réclamés a été révélée à l'administration non pas par l'acte de vente du 23 décembre 1966, mais par l'acte dit de « rétrocessior » du 4 juin 1970, quelle que soit la qualification qu'il convienne de donner à cet acte, le tribunal a décidé à bon droit que c'était à tort que la requérante avait invoqué l'exception de prescription pour faire échec à un redressement afférent au second acte (Cour de cassation, chambre commerciale, arrêt du 28 juin 1977, RJ, n° IV, p. 37).
7En cas de défaut de déclaration de succession ou d'omission de biens dans cette déclaration, ce délai, lorsqu'il s'applique, court à compter du jour de la publication d'un acte ou de l'enregistrement d'un écrit ou d'une déclaration mentionnant la date et le lieu du décès ainsi que le nom et l'adresse de l'un au moins des héritiers et autres ayants droit. Mais en ce cas, il ne concerne que les biens, sommes ou valeurs expressément mentionnés dans l'écrit ou la déclaration comme dépendant de la succession.
8La formalité donnée à un acte ou à une déclaration ne peut avoir pour effet de rendre applicable la prescription abrégée lorsqu'elle intervient avant que se soit produit le fait générateur de l'impôt (Cass. civ., arrêts des 20 octobre 1947 et 10 mai 1950).
Par contre, la prescription abrégée peut jouer si l'enregistrement a lieu après le fait générateur, mais avant la date légale d'exigibilité des droits.
Toutefois, en vertu du principe général contenu dans l'article 2257 du code civil, le point de départ de la prescription est alors reporté au jour de l'échéance du délai accordé pour le paiement de l'impôt (Cass. civ., arrêts des 18 novembre 1941, 8 novembre 1943 et 11 mars 1946). Il en résulte que le terme de la prescription se trouve alors fixé au 31 décembre de la troisième année suivant celle au cours de laquelle a expiré le délai de paiement des droits exigibles. Cette règle trouve tout particulièrement à s'appliquer en matière de droits de mutation par décès (cf. annexe I).
9Le 1er janvier de l'année d'imposition constitue à la fois le fait générateur et le point de départ du délai de prescription abrégé en matière d'impôt de solidarité sur la fortune.
3. Conditions générales d'application de la prescription abrégée.
10L'application de la prescription abrégée est subordonnée à la double condition :
- que l'administration ait eu connaissance des droits omis par l'enregistrement d'un acte ou d'une déclaration ou par l'exécution de la formalité fusionnée ;
- que l'exigibilité de ces droits soit établie d'une manière certaine par l'acte ou la déclaration sans qu'il soit nécessaire de recourir à des recherches ultérieures.
a. Première condition : enregistrement ou publication d'un acte ou enregistrement d'une déclaration.
1 ° Principes.
11La prescription de courte durée ne peut commencer à courir qu'après l'enregistrement ou la publication d'un 'acte ou l'enregistrement d'une déclaration permettant à l'administration de constater l'existence des droits omis.
Elle ne court pas à compter :
- de l'envoi d'un avertissement au redevable (Cass., req. du 4 mars 1946) ;
- ou de la présentation d'un répertoire au visa ;
- de la découverte, faite au cours de la mise en oeuvre du droit de communication ou de la vérification de la comptabilité d'une entreprise, de documents non enregistrés révélant l'exigibilité de l'impôt (Tribunal de la Seine, 13 février 1965).
L'enregistrement en débet d'un acte, par contre, fait courir ladite prescription.
Il en est de même dans le cas où le receveur qui a enregistré (ou le conservateur qui a publié) l'acte révélateur :
- n'est pas celui qui a qualité pour réclamer les droits omis, l'administration étant une en la personne de ses divers agents (Cass. civ., 27 décembre 1892) ;
- n'est pas compétent pour donner la formalité à l'acte.
2° Cas particuliers.
• Actes obligatoirement soumis ou admis facultativement à la formalité fusionnée - Rejet de la formalité de publicité foncière - Refus du dépôt.
12Il convient de noter que, depuis la fusion des formalités de l'enregistrement et de la publicité foncière, l'enregistrement d'un acte - soumis obligatoirement ou admis facultativement à la formalité dite fusionnée ou unique - résulte de sa publicité (CGI, art. 647-II).
Toutefois, en cas de rejet de la formalité de publicité foncière, l'acte est néanmoins réputé enregistré à la date du dépôt (CGI, art. 647-IV) ;
À ce sujet, il importe de distinguer le simple rejet de la seule formalité de la publicité foncière - l'acte présenté ne pouvant être publié en l'état - du refus de la formalité fusionnée ou refus de dépôt qui, de même que le refus de la formalité de l'enregistrement, ne saurait faire courir le délai de prescription.
En d'autres termes, la prescription abrégée court à compter de l'exécution :
- soit de la formalité fusionnée ou unique par le conservateur des hypothèques ;
- soit de- la formalité de l'enregistrement par le receveur des impôts ou le conservateur des hypothèques.
13Il a ainsi été jugé que, dès lors que le délai de prescription abrégée du droit de reprise de l'administration a pour point de départ l'enregistrement de l'acte ou de la déclaration soumis aux droits d'enregistrement, ne fait pas courir ce délai le document que l'agent compétent a refusé d'enregistrer (Cass. com., 26 novembre 1996, Bull. IV, n° 286, p. 245 ; cf. annexe IX).
Il découle, en effet, des dispositions de l'article L. 180 du LPF que le refus de la formalité de l'enregistrement fait, par principe, obstacle au départ, et donc à l'application, du délai de prescription abrégée lorsqu'elle est susceptible de s'appliquer.
Il s'ensuit que, chaque fois qu'il y a lieu de refuser l'enregistrement de l'acte ou de la déclaration 5 notamment en raison de l'irrégularité qui entache l'écrit ou du défaut de paiement intégral et préalable des droits simples (rappr. DB 7 A 4123 ), la prescription abrégée ne saurait courir du seul fait du dépôt du document en cause au bureau chargé de l'exécution de la formalité, et ce, sans qu'il soit besoin, par ailleurs, d'apprécier si les énonciations de ce document révèlent suffisamment, sans nécessité de recherches ultérieures, l'exigibilité des droits ou taxes auxquels il ouvre droit.
• Actes et décisions juridictionnelles dispensés de la présentation effective à la formalité (paiement des droits fixes sur états).
14Certains actes (actes notariés, actes extrajudiciaires, actes de greffe) et certaines décisions juridictionnelles (décisions des tribunaux judiciaires) ne donnant ouverture qu'à des droits fixes sont dispensés de la formalité de l'enregistrement ou de la présentation matérielle à la formalité, les droits exigibles étant payés sur états.
La remise à la recette des impôts d'un état collectif permettant la perception des droits fixes exigibles mais ne comportant ni reproduction, ni analyse des actes ou décisions en cause, ne peut révéler l'existence d'aucune convention ou fait juridique imposable et n'est donc pas susceptible de faire courir la prescription abrégée (tribunal de grande instance, Paris, jugement du 16 février 1974).
Cependant, lorsque l'admission au régime de la perception des droits fixes sur états est subordonnée à la condition du dépôt, à l'appui de l'état collectif de versement, de la copie certifiée conforme des actes concernés ou de certains d'entre eux (cf. CGI, ann. IV, art. 60, dernier alinéa), ce dépôt, s'il est révélateur de l'exigibilité de droits omis, fera normalement courir le délai de la prescription abrégée.
1 Voir également DB 13 L 1216 et 13 L 1217 .
2 Cette taxe est abrogée pour les loyers courus à compter du 1er octobre 1998 (loi de finances rectificative pour 1998, art. 12).
3 Les articles 25 de la loi de finances pour 1999 et 31 de la loi de finances pour 2000 ont abrogé plusieurs de ces dispositions (cf. respectivement BOI 7 M-3-99 et 7 M-1-00 ).
4 Abrogé par l'article 31 de la loi de finances pour 2000 (cf. BOI 7 M-1-00 ).
5 L'équivalence entre « l'enregistrement » et la « présentation à la formalité » prévue au 1er alinéa de l'article L. 180 du LPF pour la fixation du point de départ de la prescription abrégée découle de l'article 5 de la loi n° 69-1168 du 26 décembre 1969 qui a étendu à la taxe de publicité foncière, perçue au lieu et place des droits d'enregistrement en cas de formalité fusionnée à la conservation des hypothèques, les règles gouvernant le contrôle desdits droits d'enregistrement.
Or, l'article I-IV de ladite loi, actuellement codifié à l'article 647-IV du CGI, dispose qu'« en cas de rejet de la formalité de publicité foncière, l'acte est néanmoins réputé enregistré à la date du dépôt ». Autrement dit, il est nécessaire mais suffisant pour faire courir la courte prescription des droits dont l'exigibilité est suffisamment établie par la teneur d'un acte soumis à la formalité fusionnée de publicité foncière que le dépôt de cet acte soit accepté à la conservation des hypothèques, quand bien même la formalité de publicité lui serait refusée.
Mais aucune disposition légale ou réglementaire n'a prévu pareille assimilation en ce qui conceme le dépôt d'un acte ou d'une déclaration à la recette en vue de son enregistrement. Dans ce cas, seul l'enregistrement peut faire courir le délai de prescription abrégée.