Date de début de publication du BOI : 01/10/1996
Identifiant juridique : 13E3385
Références du document :  13E3385

SOUS-SECTION 5 EFFETS DE L'APPEL. POUVOIRS DES JUGES

4. Appel du ministère public

22La cour peut, sur l'appel du ministère public, soit confirmer le jugement, soit l'infirmer en tout ou en partie dans un sens favorable ou défavorable au prévenu (Code de Proc. pén., art. 515, 1er al.).

Toutefois, l'appel du ministère public demeure étranger aux intérêts civils (Cass crim., 10 juillet 1963, Bull. crim. 250, p. 526, RJCI 18, p. 63).

L'action de l'Administration étant assimilée à l'action civile, la cour suprême a jugé :

- qu'en cas d'appel par le seul ministère public, les juges du second degré ne sont pas régulièrement saisis de la connaissance des contraventions fiscales et ne peuvent dès lors réduire le montant des pénalités fiscales prononcées par les premiers juges, dont la décision a acquis l'autorité de la chose jugée par suite de l'absence d'appe ! de l'Administration et du désistement de la prévenue de son propre appel (Cass. crim., 21 novembre 1977, RJCI 1977, p. 197. Jurisprudence constante et notamment : Cass. crim., 26 janvier 1917, Bull. crim. 29, p. 44 ; Cass. crim., 23 septembre 1941, RJCI 1942, n° 7, p. 11 ; Cass. crim., 18 avril 1956, RJCI 30, p. 327 ; Cass. crim., 3 décembre 1958, RJCI 112, p. 297) ;

- qu'encourt la cassation l'arrêt qui sur les seuls appels du ministère public et du prévenu élève les peines d'amendes fiscales prononcées par les premiers juges à la requête de l'Administration (Cass. crim., 9 décembre 1958, BCI 118).

  C. POUVOIRS DES JUGES D'APPEL. EVOCATION

23En ce qui concerne le pouvoir souverain d'appréciation du juge, il convient de se reporter à la subdivision E 3363.

La limitation générale du pouvoir des juges d'appel, en raison de l'effet dévolutif, est écartée « si le jugement est annulé pour violation ou omission non réparée de formes prescrites par la loi à peine de nullité ». Dans ce cas exceptionnel, « la cour évoque et statue sur le fond », conformément aux dispositions de l'article 520 du Code de Procédure pénale.

L'évocation constitue, d'une part, une exception au principe du double degré de juridiction puisque la décision des premiers juges est annulée et entraîne, d'autre part, un élargissement de la saisine des juges d'appel qui n'est plus limitée par l'effet dévolutif prévu par l'article 509 du Code de Procédure pénale.

  I. Jugement sur le fond régulier en la forme

24En général, les premiers juges ont statué sur le fond par un jugement régulier en la forme.

Dans ce cas, la cour peut réformer cette décision en substituant son appréciation souveraine à celle du tribunal, dans la limite fixée par l'acte d'appel et la qualité de l'appelant (Code de Proc. pén., art. 509).

  II. Jugement sur le fond irrégulier en la forme

1. Incompétence

25En cas d'incompétence des premiers juges, l'affaire doit être renvoyée devant le tribunal compétent.

L'évocation est impossible lorsque le jugement est annulé pour incompétence ratione loci, l'affaire devant être renvoyée devant le premier degré de juridiction auquel elle n'a pas été soumise (Cass. crim., 6 décembre 1951, D. 1952, 90).

2. Autres irrégularités de forme

26Aux termes de l'article 520 du Code de Procédure pénale, la cour évoque et statue sur le fond si le jugement est annulé pour violation ou omission non réparée de formes prescrites par la loi à peine de nullité.

Cette disposition n'est pas limitative et les cours d'appel ont l'obligation stricte d'évoquer et de statuer au fond chaque fois qu'elles annulent un jugement pour toute autre cause que celle d'incompétence.

Jurisprudence constante et notamment : Cass. crim., rejet, 16 février 1972, Bull. crim. 60, p. 140 ; Cass. crim. part., 10 janvier 1974, Bull. crim. 17, p. 40 ; JCPP 1974, II, 17824.

En conséquence, le domaine de l'évocation est très étendu.

27La chambre criminelle a précisé notamment qu'il y avait lieu à évocation dans les cas visés ci-après :

1° Le tribunal a omis de statuer sur un des chefs de la prévention (Cass. crim, part., 20 juin 1925, Bull. crim. 193, p. 372 ; Cass. crim. part., 4 avril 1944, Bull. crim. 100, p. 154) ;

2° Contrairement aux prescriptions de l'article 485 du Code de Procédure pénale, le tribunal n'a pas énoncé ou a laissé incertaines les infractions dont les prévenus ont été déclarés coupables (Cass. crim., rejet, 5 novembre 1970, Bull. crim. 291, p. 701, D. 1971, 90) ;

3° Le tribunal, après avoir admis la culpabilité du prévenu :

- a sursis à statuer sur la peine (Cass. crim. part., 3 juin 1935, Bull. crim. 77. p. 136) ;

- a ordonné une expertise pour évaluer l'importance de la fraude (Cass. crim., rejet, 27 octobre 1937, Bull. crim. 188, p. 340) ;

- n'a pas appliqué la peine sanctionnant l'infraction méconnaissant ainsi les dispositions de l'article 464 du Code de Procédure pénale (Cass. crim., 13 décembre 1973, RJCI p. 143 ; Cass. crim., 29 avril 1976. RJ, p. 113 ; Cour de Douai, 28 juin 1978).

C'est essentiellement pour remédier aux retards qu'apporterait au cours de la justice le renvoi de la cause devant les premiers juges, que la loi impose aux juridictions d'appel de statuer elles-mêmes sur le fond, après avoir annulé la décision qui leur est déférée.

  III. Jugement sur un incident

28Lorsque les premiers juges ont statué sur un incident mais non au fond, si la cour confirme la décision, l'affaire est renvoyée au tribunal.

Dans le cas où la cour d'appel infirme le jugement sur une exception ou un autre incident, elle doit évoquer et statuer sur le fond, selon une jurisprudence constante, compte tenu du caractère non limitatif de l'article 520 du Code de Procédure pénale (Cass. crim., 7 juillet 1949, Bull. crim. 231 ; Cass. crim., 16 mars 1959, Bull. crim. 181 ; Cass. crim., 29 mars 1962, Bull. crim. 159 ; Cass. crim., 29 novembre 1962, Bull. crim. 350 ; Cass. crim., 10 juillet 1963, Bull. crim. 248 ; Cass. crim., 16 mai 1968, Bull. crim. 261 ; Cass. crim., 24 mars 1969, Bull. crim. 129 ; Cass. crim., 9 juillet 1970, Bull. crim. 235).

Lorsque l'Administration a interjeté appel d'un jugement qui avait déclaré non recevable l'opposition par elle formée à un jugement de défaut, la cour saisie de l'appel doit statuer non seulement sur la recevabilité de l'opposition, mais encore sur le fond de l'affaire (Arrêt Paris, 26 janvier 1898 ; Cass. crim., 5 mai 1898, BCI 12, p. 286 et 301).

Lorsque, sur l'appel d'un jugement de police correctionnelle qui annule un procès-verbal pour vice de forme, le tribunal ou la cour saisis de cet appel infirme le jugement, les juges d'appel doivent retenir l'affaire et statuer au fond (TGI, Appel n° 16 ; Cass. crim., 26 mars 1836, Mém. 14, p. 351).

La cour évoque, après avoir annulé un jugement :

- qui a refusé l'admission de la preuve opposée (Cass. crim., 6 juin 1944, Bull. crim. 196) ;

- qui a, à tort, déclaré nulle la citation introductive d'instance (Cass. crim., 3 septembre 1831, Bull. crim. 20).