SOUS-SECTION 1 FORMALITÉS
6. Tribunal saisi
15Aux termes de l'article 551, 3e alinéa, du Code de Procédure pénale : « La citation... doit indiquer le tribunal saisi ».
Par ailleurs, pour être valable, l'assignation doit être faite devant le tribunal compétent (cf. E 3321 et 3322 ).
16L'assignation devant un tribunal incompétent est nulle et sans effet en tant qu'elle constitue un mode de saisine du tribunal, mais produit son effet interruptif de la prescription, dès l'instant qu'elle relate l'objet de la poursuite (Cass. crim., 13 mars 1967, RJCI, p. 18, et les arrêts cités en note ; Bull. crim. 99, p 234).
Pour que l'assignation faite devant un tribunal incompétent soit interruptive de prescription, il faut toutefois que le prévenu ait connaissance de cette citation et qu'il ne puisse douter de la réalité même de cette citation 1 .
Nota : L'Administration insiste sur la nécessité d'apporter une attention toute particulière à l'établissement des assignations dont la validité conditionne l'action fiscale.
Il convient de s'assurer soigneusement de la régularité de ces actes, comme d'ailleurs de tout exploit en général, même lorsqu'ils sont établis ou signifiés par des officiers publics 2 et de les renouveler si les délais le permettent encore, toutes les fois qu'un doute apparaît sur leur validité.
7. Lieu, heure et date de l'audience
18Selon les dispositions de l'article 551, 3e alinéa, du Code de Procédure pénale, « la citation indique.le lieu, l'heure et la date de l'audience ».
D'autre part, l'article 552 du Code de Procédure pénale précise un délai à respecter entre le jour où la citation est délivrée et le jour fixé pour la comparution devant le tribunal correctionnel (cf. ci-dessous E 3332, n°s 11 et suiv. ).
Pour assurer le déroulement de l'instance dans les meilleures conditions possibles, il y a lieu de préciser pour les grandes villes, le numéro de la chambre où l'affaire sera appelée, bien que l'omission de cette indication ne soit pas une cause de nullité.
L'attention est spécialement attirée sur ces dispositions, différentes de celles du Code d'instruction criminelle sous l'empire duquel aucune loi n'exigeait 3 , en matière correctionnelle, que les assignations contiennent l'indication précise du jour de la comparution.
Toutefois, les formalités relatives au lieu, à l'heure et à la date de l'audience ne sont pas prescrites à peine de nullité, sauf dans les cas où il aurait été porté atteinte aux droits de la défense (Code de proc. pén., art. 565).
19Selon la jurisprudence exposée ci-dessous, les assignations correctionnelles sont interruptives de prescription alors même qu'elles comportent certaines irrégularités de forme, notamment en ce qui concerne la date de comparution. Par un arrêt du 30 octobre 1963 (RJCI 21, p. 75), la Chambre criminelle de la Cour de cassation a décidé qu'une citation donnée pour comparaître après l'expiration des délais de la loi et en tant que de besoin à toutes les audiences suivantes jusqu'à jugement définitif, contient toutes les énonciations prescrites par le Code de Procédure pénale pour interpeller le prévenu et pour saisir le tribunal des faits de la poursuite et qu'elle met en conséquence, la Direction générale des Impôts à l'abri de la déchéance édictée par l'article L. 236 du Livre des procédures fiscales et y substitue la prescription triennale.
Dans cette affaire l'assignation avait été délivrée après l'entrée en vigueur du Code de procédure pénale il s'ensuit que la Chambre criminelle ne considère pas l'indication du jour de l'audience comme une mention prescrite à peine de nullité, par l'article 551 du même code. Il est préférable, toutefois, de se conformer aux dispositions de ce texte.
De même, la Cour suprême a décidé qu'il n'importe que l'assignation délivrée pour soustraire la régie à ladéchéance édictée par l'article 1869 du CGI 4 n'ait pas indiqué le jour de l'audience, dès lors que cette précision a été apportée par l'assignation ultérieure et que le prévenu a été ainsi à même d'assurer sa défense (Cass. crim., 8 mai 1967, RJCI 1967, p. 25 ; Bull. crim., 151, p. 356).
Par ailleurs, la jurisprudence intervenue sous l'empire du Code d'instruction criminelle 5 peut être valablement invoquée devant les juridictions répressives dans la mesure où les dispositions du Code de procédure pénale (dont les art. 551 et 565) n'apportent pas de divergence (cf. Cass. crim., 6 août 1879, Bull. crim. 58, p. 93 ; 26 novembre 1896, BIC 1897, p. 10, Bull. crim. 338, p. 521 ; 20 décembre 1930, BIC 1931, p. 49 ; 30 octobre 1963, RJCI 21, p. 75).
Lorsqu'une erreur de date s'est glissée dans la copie de l'assignation remise au prévenu, le jugement rendu par défaut doit être annulé pour violation des droits de la défense, mais l'assignation subsiste avec tous ses effets interruptifs de la prescription (Cour d'appel de Nancy, 8 juillet 1885 ; TGI Assignation n° 21, Mém. Cl 21, p. 482).
Dans le même sens :
-Cass. crim., 26 novembre 1896, BIC 1897, 1, p. 10 ; Bull. crim. 338, p. 521 ; Cass. crim., 31 mai 1913, BIC 13, p. 66.
8. Désignation de la personne à qui l'exploit est remis (art. 550 CPP, 5e al.)
20Cette mention est portée sur l'assignation, original et copie, au moment de la signification de l'exploit.
Le non-respect de cette formalité n'entraîne pas obligatoirement la nullité de la citation :
- l'omission, sur les copies, de l'indication de la personne à laquelle la remise a été effectuée n'est pas une cause de nullité lorsque le prévenu comparaît (Cass. crim., 18 novembre 1813, Mém. Cl 11, p 47 ; Bull. crim. 249) ;
- est régulière et interruptive de la prescription l'assignation dont le parlant à ... a été laissé en blanc lorsque l'agent chargé de la signification de l'exploit, après avoir constaté que le prévenu ne se trouve pas au domicile déclaré et n'a en réalité ni domicile ni résidence connus en France, s'est transporté au parquet et a procédé à l'accomplissement des formalités prescrites par le Code de procédure civile (Cass. crim., 20 décembre 1930, BIC 1931, 4, p. 49).
9. Signature
21Conformément aux dispositions relatives à la forme des actes d'huissier de justice, l'assignation doit être signée par l'agent ou l'huissier qui la délivre (nouveau Code de procédure civile, formes des actes d'huissier de justice, art. 648).
10. Ratures, timbre et enregistrement
a. Ratures
22Dans tous les cas, les ratures, les surcharges et les renvois non approuvés ou paraphés sont considérés comme non avenus à moins que cette approbation ne résulte indirectement d'une mention de renvoi paraphée remplaçant, à n'en pas douter, les mots raturés (cf. Cour d'appel de Bordeaux, 21 mars 1906, BCI 12, p, 58 ; ainsi que Cass. crim., 21 janvier 1903, D 1903-1-120).
b. Timbre et enregistrement
23Les assignations délivrées par les agents des Impôts (contributions indirectes) sont établies sur des imprimés n° 4670 ou 4671 (assignation à comparaître). Elles sont dispensées de l'enregistrement et du timbre.
En revanche, les assignations correctionnelles délivrées par les huissiers de justice doivent être enregistrées (CGI, art. 635-1-2°). Elles sont exonérées du droit de timbre de dimension (CGI, art 902 2-1°).
II. Délivrance de l'assignation (signification)
1. Objet
24La signification de l'assignation donne officiellement connaissance de la citation dont ils font l'objet, au prévenu, à la personne civilement responsable, aux témoins (art. 550 et s., Code de proc. pén.).
Les formalités prescrites tendent à assurer, dans la mesure du possible, l'arrivée de l'exploit entre les mains du destinataire.
La signification de l'exploit comporte la remise d'une copie à l'intéressé ou, en cas d'absence, à une personne chargée de la lui faire parvenir.
2. Pluralité de contrevenants
25Autant de copies qu'il y a de contrevenants doivent être délivrées, mais il n'est établi qu'un seul original sur lequel il est fait mention de la copie remise à chacune des parties (Cass. crim., 14 août 1813).
« En matière correctionnelle, les assignations doivent être délivrées en autant de copies qu'il y a de prévenus, toutefois en cas de copie collective, établie par erreur, si cette copie a été remise à l'un des prévenus, en personne, l'assignation est valable en ce qui le concerne ». (Cass. crim., rejet, 22 janvier 1909, BCI 5, p. 28 ; Bull. crim. 41, p. 84).
3. Personne qui délivre l'assignation
26L'article 28 du décret du 1er Germinal an XIII avait prévu que l'assignation à fin de condamnation pourrait être donnée « par les commis ». Le premier alinéa de l'article L. 236 du Livre des procédures fiscales reprend cette disposition : « la personne qui fait l'objet de poursuites devant le Tribunal correctionnel en est informé par la citation prévue par l'article 550 du Code de Procédure pénale ; celle-ci peut être faite soit par les huissiers de justice, soit par les agents de l'administration des impôts ».
En règle générale, ce sont les agents des impôts qui sont chargés de signifier les assignations, conformément aux dispositions de l'article L. 236 précité, par exception au droit commun (Code de proc. pén., art. 550, 1er al. art. C 690 modifié) 6 .
27Toutefois, le directeur des services fiscaux, s'il l'estime opportun, peut confier cette tâche à un huissier de justice, selon les règles du droit commun (Code de proc. pén., art. 550).
Il peut en être ainsi lorsque l'intervention du service présente des inconvénients ou risque de soulever des incidents, notamment de la part des redevables ayant déjà eu des difficultés avec les agents.
Il n'y a pas vice de forme si l'assignation est donnée par un seul agent des Impôts car l'article L. 236 du LPF ne spécifie pas que les employés doivent être deux (Bordeaux, 23 décembre 1886, Dall. 88.2.216 ; Limoges, 1er mai 1886 et 17 mai 1888 ; cf. également mais de manière implicite ; Cass. crim 12 octobre 1966, RJCI 19, p. 60).
Jugé d'autre part que :
« Les actes des huissiers dressés et signifiés conformément à la loi sont des actes authentiques, qui font foi jusqu'à inscription de faux de tout ce que l'huissier a constaté ou affirmé avoir fait dans l'exercice de ses attributions » 7 .
« Le même principe est applicable au cas où les agents des impôts (agents assermentés) délivrent eux-mêmes des assignations en vertu de l'habilitation qu'ils tiennent de l'article L. 236 du LPF.
« Il en résulte que doit être également regardée comme faisant foi jusqu'à inscription de faux l'énonciation d'une assignation signifiée par un agent des impôts, énonciation suivant laquelle une copie du procès-verbal était jointe à ladite assignation. Aucune inscription de faux n'ayant été formalisée contre cette énonciation, le Tribunal devait tenir ce fait pour établi » (Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 19 février 1973, RJ 1, p. 10).
4. Jours et heures de remise
28Les formalités des exploits en matière civile ne sont pas, en principe, applicables à peine de nullité, aux citations données en matière correctionnelle ; il suffit, pour la validité de celle-ci, qu'elles soient portées à la connaissance du prévenu car elles n'ont d'autre objet que d'obtenir sa comparution à l'audience et de le mettre en mesure d'assurer sa défense (Cass. crim., 18 novembre 1813 ; Mém. CI 11, p. 47 ; Bull. crim. 249 ; Cass. crim 25 janvier 1828, Mém. CI 12, p. 422 ; Bull. crim. 25 ; Cass. crim., 14 janvier 1830, Mém. CI 12, p. 446 ; Bull. crim. 14 ; Cass. crim., 8 janvier 1887, Journal des CI 1887, p. 335 ; Cass. crim., 29 janvier1887, Bull. crim. 35, p. 49 ; Cass. crim., 31 mars 1911, BCI 12, p. 83 ; Cass. crim., 21 janvier1921, BCI 10, p. 61 ; Bull. crim. 33, p. 51).
Les assignations correctionnelles peuvent être délivrées les dimanches et les jours fériés ou chômés (Cass. crim., 27 août 1807, Mém. Cl 3-4, p. 154). Lorsque le dernier jour du délai de prescription tombe un dimanche ou un jour férié (ou chômé), il convient donc en particulier de ne pas attendre le lendemain pour signifier l'exploit (cf. E 3332, n° 6 ).
29Selon les dispositions de l'article 664 du nouveau Code de Procédure civile, « La signification d'un actes d'huissier de justice ne peut être faite, en matière civile, qu'entre six heures et vingt et une heures ».
30Ces dispositions restrictives qui existaient déjà sous l'empire de l'article 1037 du Code de procédure civile, ne s'appliquent pas avec la même rigueur en matière répressive. En effet, aucun article du Code de procédure pénale ne s'oppose à ce qu'un exploit puisse être signifié, ailleurs qu'au domicile, en dehors des heures légales. Par un arrêt du 14 mars 1912 (Dall. 1913-1-126 ; Bull. crim. 148, p. 257), la Chambre criminelle de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi d'un prévenu, alors détenu, qui demandait l'annulation d'une signification effectuée tardivement dans la journée ; elle a estimé que les dispositions de l'article 1037 du Code de procédure civile, qui interdit les significations et les exécutions pendant les heures de nuit, n'étaient pas applicables aux actes qui se rattachent à l'exercice de la justice répressive.
Il ne peut, toutefois, être signifié de nuit au domicile d'un particulier qui n'autorise pas l'huissier à pénétrer chez lui (cf. Cass. crim., 17 février 1950, Bull. crim. 63, p. 99, à propos d'un officier ministériel qui agissait en exécution d'une ordonnance prise par le président du tribunal pour un constat d'adultère).
1 Aux termes de l'article L.236 du Livre des procédures fiscales , « la citation doit être délivrée dans un délai de trois ans à compter de la date du procès-verbal constatant l'infraction. Toutefois lorsque la personne est en état d'arrestation, la citation doit être faite dans un délai d'un mois à partir de l'arrestation ».
2 Rapprocher du n° 6 ci-dessus.
3 Mais pratiquement la notification avait lieu en suivant les règles édictées par les articles 68 et 69 de l'ancien Code de procédure civile.
4 Actuellement article L.236 du Livre des procédured fiscales.
5 Remplacé par le Code de procédure pénale.
6 Instruction générale-prise pour l'application du Code de procédure pénale, JO 4 mars et rectificatif du 2 juillet 1959.
7 Sur ce principe, qui est admis par la jurisprudence, les arrêts qui sont les plus caractéristiques sont les suivants :
- En matière pénale :
Cass.crim., 27 mai 1959, RJCI 1959, p. 185 ; Cass. crim., 6 février 1969, Dall. 1969, p. 314, Bull. criml. 66, p. 163 ;
Cass. crim., 15 janvier 1970. Bull,, crim. 29, p. 64 ;
- En matière civile :
Le principe admis par tous les auteurs est à ce point constant que la jurisprudence l'énonce rarement et se borne à en tirer les conséquences à l'occasion.
Cass. civ., 5 juillet 1882, DP 83-1-350 ; Cass. civ., 3 août 1935, DH 1937, somm. 2 ; Cass. civ., (2°), 5 avril 1965, Bull. civ. 347, p. 238 ; Cass. civ., (2°), 18 février 1966, Bull. civ 226 p. 162 ; Cass. civ., (3°), 8 janvier 1970, Bull. civ., 25, p. 18 ; Cass. civ., (2°), 6 octobre 1971, Bull. civ. 265, p. 192.
La Cour d'appel d'Aix-en-Provence (arrêt cité ci-après) n'a pas, au cas particulier, hésité, quant à elle, à reconnaître aux assignations établies et délivrées par les agents des impôts la même force probante qu'aux exploits d'huissier. Il est utile d'insister sur l'intérêt de cette décision.