SOUS-SECTION 1 COMPÉTENCE MATÉRIELLE OU RATIONE MATERIAE
B. EXCEPTION. COMPÉTENCE PERSONNELLE OU RATIONE PERSONAE
13Bien que tous les citoyens soient, en application des dispositions de l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme, en principe égaux devant la justice, le législateur, dans l'intérêt même d'une meilleure justice pénale, a institué des juridictions spéciales. Ainsi, il est dérogé, dans certains cas, à la compétence ratione materiae, en raison de la qualité personnelle du contrevenant par l'institution d'une compétence ratione personae.
I. Enfants mineurs 1
14La loi relative aux tribunaux d'enfants est générale : elle s'applique à tous les crimes et délits commis par des mineurs âgés de moins de 18 ans, y compris les infractions en matière de contributions indirectes, même celles punies de simples amendes, puisque les amendes fiscales n'ont pas seulement le caractère de réparations civiles, mais aussi un caractère pénal (Cass. crim., 18 mai 1916, BCI 18, Bull. crim. 114).
Lorsque le mineur est impliqué dans la même affaire qu'un ou plusieurs inculpés âgés de plus de 18 ans, la poursuite qui le concerne est disjointe.
Il existe en ce qui concerne les mineurs quelques dispositions dérogatoires au droit commun touchant la procédure, notamment le droit de citation.
II. Agents diplomatiques
15Les immunités reconnues aux agents diplomatiques et consulaires sont des prérogatives accordées aux intéressés en vue de favoriser le libre exercice de leurs fonctions. Les diplomates étrangers selon une tradition constante du droit international sont notamment soustraits à la juridiction des tribunaux répressifs en France.
Cette immunité absolument générale s'applique à toutes les infractions, notamment à celles réalisées en matière de contributions indirectes.
Pour ce qui concerne l'immunité de juridiction des agents diplomatiques, se reporter au décret n° 71-284 du 29 mars 1971 portant publication de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, notamment l'article 31 de la Convention (CPP sous l'article 231).
Pour ce qui concerne l'immunité de juridiction des fonctionnaires consulaires, se reporter au décret n° 71-288 du 29 mars 1971 portant publication de la Convention de Vienne sur les relations consulaires, notamment l'article 43 de la Convention (cf. art. 231 précité).
L'immunité de juridiction est limitée aux actes de la fonction pour les consuls :
- Cour de Rennes, 25 juillet 1849, DP 50-243 ;
- Cass. crim., 23 décembre 1854, DP 59-1-85, S 54-1-811.
III. Membres du Gouvernement
16La Constitution du 4 octobre 1958 a institué une Haute Cour de justice, élue par l'Assemblée nationale et le Sénat après chaque renouvellement général ou partiel de ces assemblées, pour juger le président de la République en cas de haute trahison et les membres du Gouvernement pour les crimes et délits commis dans l'exercice de leurs fonctions (art. 67 et 68) (CPP, sous l'art. 231).
Il est admis qu'à l'égard de ces derniers, sa compétence n'est que facultative et qu'ils peuvent être renvoyés devant les juridictions de droit commun.
Car la répartition des affaires pénales entre les juridictions de droit commun et les juridictions d'exception ne dépend pas toujours exclusivement de la personne du délinquant, mais souvent aussi de la nature même de l'infraction commise.
Ainsi les délits commis par des membres du Gouvernement, en dehors de l'exercice de leurs fonctions, relèvent des tribunaux de droit commun : cf. Trib. correct. Paris (17e Chambre), 14 mars 1982, GP n°90/91 des 31 mars et 1er avril 1982, p. 11, concernant des propos tenus par un ministre dans le cadre d'une campagne électorale, par conséquent, hors de l'exercice de ses fonctions.
IV Inviolabilité parlementaire
17Pendant la durée des sessions, un membre du Parlement ne peut être poursuivi pour crime ou pour délit, hormis le cas d'infraction flagrante 2 , sans l'autorisation de l'assemblée à laquelle il appartient (Constitution, 4 octobre 1958, art. 26).
Cette prérogative qui met les parlementaires à l'abri des poursuites judiciaires leur permet d'assurer le libre exercice de leur mandat.
Remarque est faite qu'elle n'est pas absolue (ci-dessus : flagrant délit, vote de l'assemblée).
1 Se reporter, au besoin, aux articles 122-8 du nouveau Code pénal et 20-2 à 20-6 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.
2 Art. 26, alinéa 2 in fine de la constitution ; cf. Cass. crim., 11 février 1960, Bull. crim. 84, p. 168.