Date de début de publication du BOI : 01/10/1996
Identifiant juridique : 13E224
Références du document :  13E224

SECTION 4 AGGRAVATION DES PEINES RÉCIDIVE


SECTION 4

Aggravation des peines
Récidive


1La récidive, qui constitue une circonstance aggravante pour l'application des peines, est l'état dans lequel se trouve une personne qui commet une infraction alors qu'elle avait déjà été condamnée pour une infraction antérieure.

Il convient de distinguer :

- la récidive spéciale issue de l'article 7 de la loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977 (CGI, art. 1804 A) ;

- de la récidive ordinaire ou de droit commun prévue à l'article 132-10 du N.C.P.

Par ailleurs, la récidive considérée par rapport au sursis (cf. E 2232 ) peut, pour certaines infractions, soit faire obstacle à l'octroi de ce dernier, soit entraîner sa révocation.


  A. RECIDIVE SPECIALE VISEE A L'ARTICLE 1804 A DU CGI


2Le second alinéa de l'article 7 de la loi du 29 décembre 1977, codifié à l'article 1804A du CGI, apporte un second correctif à la diminution de la pénalité proportionnelle en réprimant, sur un plan général, la récidive en matière de contributions indirectes. Ce deuxième alinéa prévoit, en effet, que si le contrevenant commet, dans les cinq ans qui suivent une transaction ou une condamnation devenue définitive après l'entrée en vigueur de la loi, une nouvelle infraction punie de l'amende proportionnelle, le taux maximal de celle-ci est doublé.


  I. Conditions de la récidive


Trois conditions sont nécessaires pour qu'il y ait récidive punissable dans les termes prévus par l'article 7 de la loi susvisée (CGI, art. 1804 A) :

3a. Il faut que le contrevenant (personne physique ou morale) ait commis une première infraction suivie d'une transaction ou d'une condamnation définitive après l'entrée en vigueur de la loi du 29 décembre 1977.

La notion de condamnation définitive, c'est-à-dire passée en force de chose jugée, les voies de recours ayant été épuisées ou leurs délais étant expirés, n'appelle pas de commentaire particulier. On notera seulement qu'il importe peu que la condamnation n'ait pas été exécutée ou qu'elle ne l'ait été que partiellement.

Touchant le cas où la première infraction a donné lieu à transaction, il y a lieu de considérer que celle-ci doit également être devenue définitive après l'entrée en vigueur de la loi, ce qui suppose que, régulièrement approuvée, le cas échéant, par l'autorité supérieure, elle a été exécutée postérieurement à cette date. Si l'amende transactionnelle a été acquittée par acomptes, c'est la date du dernier versement, achevant l'exécution, qui doit être prise en considération ;

4 b. Il faut que le contrevenant commette une seconde infraction tombant sous le coup de la pénalité proportionnelle, c'est-à-dire une des infractions visées aux articles 1791, 1793 A, 1794, 1795, 1797 et 1804 du CGI. En conséquence, il n'y a pas récidive punissable au sens de l'article 7, deuxième alinéa, de la loi du 29 décembre 1977 chaque fois que cette pénalité n'est pas applicable à la seconde infraction. C'est en général le cas de la contravention de refus d'exercice.

Il est à remarquer qu'il n'est pas nécessaire que la première infraction tombe sous le coup de la pénalité proportionnelle. Il suit de là que le contrevenant qui, après s'être rendu coupable de détention illicite d'anéthol (suivie d'une transaction ou d'une condamnation devenue définitive) commet dans le délai de la loi (cf. n° 5 ci-après) une nouvelle infraction pour laquelle il encourt la pénalité de une à trois fois les droits fraudés ou la valeur, se trouve en état de récidive, alors qu'il ne le serait pas si les deux contraventions avaient été commises dans l'ordre inverse.

Par ailleurs, la loi ne subordonne pas la récidive à l'identité des deux infractions. Il faut, mais il suffit que la seconde soit passible de la pénalité proportionnelle. Du fait même qu'il s'agit de deux contraventions aux lois régissant les contributions indirectes ou aux réglementations assimilées, elles sont du reste de même nature ;

5c. La seconde contravention doit être commise dans les cinq ans qui suivent la transaction ou la condamnation devenue définitive après l'entrée en vigueur de la loi du 29 décembre 1977, à laquelle a donné lieu la première.

Soit, par exemple, un débitant contre lequel un procès-verbal a été rapporté en janvier 1977 pour introduction irrégulière de boissons dans son établissement. Il a accepté l'arrangement amiable qui lui a été proposé au mois de juillet suivant et a achevé de régler l'amende transactionnelle le 9 janvier 1978 ; S'il encourt, indépendamment de l'amende et de la confiscation, la pénalité de une à trois fois les droits fraudés ou la valeur pour une nouvelle infraction quelconque en matière de contributions indirectes, commise avant le 9 janvier 1983, cette nouvelle infraction est réprimée dans les conditions prévues à l'article 1804 A du CGI.

Il convient, enfin, de signaler que pour l'application des dispositions dont il s'agit, aucune distinction n'est à faire entre les auteurs, coauteurs ou complices.


  II. Preuve de la récidive


6L'existence du premier terme de la récidive doit être spécialement mentionnée dans les conclusions déposées devant les juges du fond, auxquels il convient de demander - lorsque les autres conditions de la récidive seront réunies - de faire application au prévenu de l'aggravation de la pénalité proportionnelle édictée par l'article 1804 A du CGI.

Si la première infraction a été sanctionnée par une amende transactionnelle, il convient de produire à l'appui des conclusions, une copie certifiée conforme de la transaction, à laquelle il faut joindre une copie de la deuxième partie de l'avis n° 4832 ou n° 4382 bis, annotée de l'ensemble des recouvrements effectués. Si le tribunal le demande, les originaux eux-mêmes sont produits. Ils doivent, en conséquence, être classés et conservés soigneusement dans le dossier de l'affaire.

Dans le cas où la première infraction a été poursuivie en justice et où le contrevenant a fait l'objet d'une condamnation définitive, il convient de produire une expédition du jugement ou de l'arrêt accompagnée, s'il y a lieu, d'une copie de l'acte de signification, ou un extrait du casier judiciaire.


  III. Effets de la récidive


7Lorsqu'il y a récidive, le taux maximal de la pénalité proportionnelle est doublé. Les juges peuvent donc prononcer contre le récidiviste une amende allant de une à six fois le montant des droit fraudés ou de la valeur.

L'amende en principal n'est pas aggravée ; elle reste de 100 F à 5 000 F (art. 1791) ou de 100 à 200 F (art. 1791 bis). Rien n'est changé, non plus, à la confiscation.

Par ailleurs, la récidive de l'article 1804 A du CGI fait obstacle à l'octroi du sursis (cf. E 2232, n° 12 ).


  B. AUTRES CAS DE RECIDIVE - RECIDIVE ORDINAIRE


8Indépendamment de la récidive de l'article 1804 A du CGI, d'autres cas de récidive sont expressément prévus par la loi fiscale.


  I. Cas d'application


8La récidive n'est retenue que si une disposition spéciale du CGI prescrit son application.

Il en est ainsi dans les cas suivants :

9 Art. 1746-1 - En cas de récidive d'opposition individuelle aux fonctions des agents des impôts le juge répressif peut prononcer, outre l'amende fiscale, une peine de prison de six mois.

10 Art. 1810 - Cet article, qui vise des infractions présentant une certaine gravité, prévoit qu'en cas de récidive la peine de prison de six mois applicable auxdites infractions sera prononcée obligatoirement.

11 Art. 1812-2 - Ce texte sanctionne les infractions commises en matière d'importation, de fabrication, de mise en circulation, de détention ou de vente des essences pouvant servir à la fabrication des boissons alcooliques.

12 Art. 1813 - Les infractions en matière d'utilisation irrégulière d'un appareil de distillation sont punies d'une amende de 40 000 F. En cas de récidive, la peine d'amende peut être élevée jusqu'à 120 000 F et un emprisonnement d'un an peut, en outre, être prononcé.

13 Art. 1816 - Pour les infractions visées à l'article 505 du CGI (interdictions relatives à la détention des alcools ayant le caractère de spiritueux rectifiés) et en cas de récidive, le tribunal prononce la suppression de la licence attachée à l'établissement.

14 Art. 1817 - Ce texte prévoit que les dispositions de l'article 1750 du CGI sont applicables aux infractions énumérées aux articles 1810 et 1812 du même code.

Dès lors, en cas de récidive, la durée de l'interdiction d'exercer toute profession industrielle, commerciale ou libérale et celle de la suspension du permis de conduire peuvent être doublées sans pouvoir excéder six ans.


  II. Conditions de la récidive ordinaire


15Les conditions de la récidive ordinaire sont fixées par l'article 132-10 du nouveau Code pénal 1 . La récidive du délit est applicable en matière de contributions indirectes. En effet, l'article 132-10 précité est de portée générale et s'applique, en principe, à tous les délits prévus par des lois particulières.

a. Identité des infractions

16Le contrevenant doit avoir été condamné précédemment pour une contravention de même nature que celle constituée par la nouvelle infraction ; en d'autres termes, les deux contraventions doivent porter sur une infraction identique.

b. Caractère définitif de la condamnation précédente

17La condamnation doit être devenue définitive au moment où le délinquant commet la dernière infraction. Tant qu'elle n'est pas définitive, une condamnation peut être réformée ou même disparaître par l'effet de la voie de recours. Il serait donc injuste d'en tenir compte pour aggraver la condamnation encourue pour la seconde infraction.

Ainsi, un jugement en dernier ressort attaqué en cassation par un pourvoi ne peut servir de premier terme à la récidive.

De même, une condamnation par défaut ne peut constituer le premier terme de la récidive que si le jugement a été signifié à personne et n'est plus susceptible d'opposition.

En matière de contributions indirectes, il a été jugé qu'en condamnant une prévenue du chef de délit de fabrication et de ventes de liqueurs similaires d'absinthe, commis le 19 février 1969, à l'interdiction définitive d'exercer un commerce ou une industrie ayant pour objet la fabrication, le transport ou la vente de tous alcools, boissons, vins et liqueurs, les juges du fond ont relevé que la prévenue se trouvait en état de récidive spéciale, ayant été condamnée pour la même infraction le 21 avril 1967. La cour de cassation est en mesure de vérifier que la condamnation, retenue comme premier terme de la récidive, était définitive à la date à laquelle a été commise la nouvelle infraction, dès lors qu'il résulte du bulletin n° 1 du casier judiciaire, joint à la procédure, que ladite condamnation, portant une peine de 1 000 francs d'amende, a été prononcée contradictoirement par le tribunal de grande instance » (Cass rejet, 9 mai 1973, RJCI, p. 43).

Dans une autre affaire la jurisprudence a précisé : « dès lors que les faits d'enlèvement ou de transport d'alcool sans titre de mouvement, objet de la poursuite, ont été commis et qu'il appert au bulletin du casier judiciaire et d'une expédition d'un jugement correctionnel, régulièrement joints et inventoriés à la procédure, que cette décision, par laquelle le prévenu avait été condamné. à raison de faits de même nature, à deux mois d'emprisonnement. était contradictoire, les juges du fait ont à bon droit déclaré ce prévenu en état de récidive aux termes des articles 1810 et 1817 du CGI » (Crim. rejet, 7 février 1973, RJCI, p. 7 ; dans le même sens : Cass. crim. 11 juillet 1963, Bull. crim., 257, p. 542 : 13 juillet 1951, Bull., crim., 215, p, 366).

18Mais, il n'est pas nécessaire, pour qu'elle puisse servir de premier terme de la récidive, que la condamnation définitive ait été exécutée. Si le condamné s'est soustrait à l'exécution de sa peine et l'a prescrite, ou encore s'il en a obtenu remise gracieuse. La condamnation vaudra toujours comme premier terme de la récidive.

Enfin, la récidive n'est encourue que si la condamnation antérieure a été prononcée par un tribunal répressif. Ainsi, un précédent procès-verbal terminé par une transaction, ne peut servir de base à la récidive (Cass. crim., 8 septembre 1820 Mém., X/-88).

Sur ce dernier point comparer ci-dessus n° 3 .

c. Condamnation non amnistiée

19La condamnation ne doit pas avoir été effacée par l'amnistie. L'amnistie ayant pour effet d'effacer le délit lui-même, une infraction couverte par l'amnistie et les condamnations qui en ont été la suite ne peuvent servir à constituer l'état de récidive.

d. Commission de la seconde infraction dans le délai de cinq ans

20La seconde contravention doit avoir été commise avant l'expiration du délai prévu par les textes, c'est-à-dire, d'une façon générale, d'un délai de cinq ans qui court à partir de l'exécution de la peine ou de sa prescription 2 . Lorsque la loi n'a prévu aucun délai spécial pour la récidive, c'est le délai de cinq ans fixé en matière de droit commun par l'article 132-10 du nouveau Code pénal qui doit être envisagé.

En définitive, toute infraction nouvelle, de même nature que la première, entraîne l'état de récidive pendant tout le délai qui s'écoule après que la condamnation est devenue définitive jusqu'à ce que cinq ans se soient écoulés depuis la fin de la peine ou de sa prescription.

La preuve de la première condamnation est apportée par le casier judiciaire.

Il est rappelé que la récidive ordinaire entraîne la révocation du sursis (cf. E 2232, n°s 10 et suiv. ).

 

1   Nouveau Code pénal : Art. 132-10. Lorsqu'une personne physique, déjà condamnée définitivement pour un délit, commet, dans le délai de cinq ans à compter de l'expiration ou de la prescription de la précédente peine, soit le même délit, soit un délit qui lui est assimilé au regard des règles de la récidive, le maximum des peines d'emprisonnement et d'amende encourues est doublé.

2   En matière correctionnelle, la peine se prescrit par cinq années révolues à compter du jugement ou de l'arrêt définitif.