SOUS-SECTION 2 LA SAISIE-VENTE
V. Oppositions constatant une extension de la saisie initiale
1. Le créancier premier saisissant veut ajouter une nouvelle créance.
232.Cette procédure a pour objet d'étendre la saisie initiale à d'autres biens.
233.Les règles relatives à la signification d'un commandement de payer seront les suivants, dans les cas où le créancier saisissant forme lui-même opposition (art. D. 119. al. 2) :
234.Il devra faire signifier un commandement conforme aux dispositions de l'article D 81 et mentionnant le décompte des nouvelles sommes dues en capital, frais et intérêts échus, ainsi que le taux d'intérêt, et indiquant que le créancier souhaite se faire payer sur le prix procuré par la vente des biens déjà sous saisie.
S'agissant d'un comptable des impôts, la mise en demeure afférente à la nouvelle créance vaut commandement de payer.
2. Le créancier veut étendre l'assiette de la saisie à des biens non compris dans l'acte de saisie initial.
a. Procédure.
1° L'inventaire complémentaire (art. D120, al. 3).
235.Cette extension de la saisie initiale est établie par acte d'huissier dans les mêmes conditions que l'acte de saisie initial, et signifié au créancier premier saisissant et au débiteur (art. D 120, al. 2).
2° Moment où la saisie complémentaire doit être pratiquée.
236.Lorsqu'à l'occasion d'une saisie, le débiteur présente l'acte établi lors d'une précédente saisie, le créancier peut procéder sur le champ, à une saisie complémentaire qui obéit aux mêmes règles que la saisie initiale.
3° Forme et effets de la saisie complémentaire.
237.Elle est identique à celle décrite pour l'extention de la saisie initiale.
238.L'inventaire dressé lors de la saisie complémentaire est signifié au créancier premier saisissant et au débiteur (art. D 120, al. 2). S'il est dressé à l'occasion d'une seconde saisie, le créancier étant averti de l'existence de la première saisie, l'inventaire complémentaire est signifié au créancier premier saisissant en même temps que l'acte d'opposition (art. D 121, al. 2). Le tout est également signifié au débiteur (art. D 121, al. 2).
239. OBSERVATION :
La procédure d'extension de la saisie initiale à d'autres biens peut être mise en oeuvre par le créancier premier saisissant (art. D. 119 al. 2) et les créanciers opposants (art. D. 120) alors que ces derniers ont seuls qualité pour pratiquer une saisie complémentaire (art. D. 118, al. 1) ;
b. Effets de la saisie complémentaire.
240.La saisie complémentaire produit les effets de la saisie initiale en ce qui concerne le statut des biens saisis (art. D 120, al. 1 er , renvoie à l'art. D 97). L'huissier de justice qui procède à une saisie complémentaire peut également photographier les biens, conformément aux dispositions de l'article D 90 du décret (art. D 120, al. 1 er ).
241.Même si l'assiette de la saisie a été modifiée par une saisie complémentaire, c'est le créancier premier saisissant qui poursuit seul la vente (art. D 119, al. 3).
242.Dans la poursuite de la saisie-vente, le créancier doit respecter les intérêts du débiteur saisi. Notamment, en cas d'extention de la saisie initiale, la vente forcée ne pourra avoir lieu qu'à l'expiration de tous les délais impartis pour la vente amiable de tous les biens, ce qui rallonge la saisie initiale (art. D 122). En effet, il faudra attendre l'expiration du délai prévu pour la vente amiable à compter de la dernière des saisies complémentaires s'il y a pluralité d'opposants.
243. EXCEPTION :
Compte tenu des inconvénients de ces allongements pour le créancier premier saisissant, la vente forcée des biens pour lesquels le délai de vente amiable est expiré peut intervenir immédiatement dans deux cas :
- soit le créancier peut d'abord obtenir l'accord du débiteur ou l'autorisation du juge de l'exécution (ce qui, compte tenu des délais inhérents à la procédure devant ce magistrat, peut s'avérer inutile pour accélérer la procédure de saisie), pour vendre immédiatement ceux des biens pour lesquels le délai imparti en vue de leur vente amiable est expiré (art. D 122, al. 2) ;
- soit le créancier premier saisissant peut également procéder à la vente des biens initialement saisis si les formalités de publicité avaient déjà été effectuées au moment de l'opposition (art. D 122, al. 2).
En effet, il n'est pas opportun d'arrêter une vente alors que les acquéreurs éventuels ont déjà été informés du lieu et de la date de la vente publique.
VI. Conséquences de l'opposition
1. Le créancier opposant est admis à faire valoir ses droits sur le prix de vente des objets saisis (art. L 54).
244.Dès lors qu'il s'est manifesté avant la vérification des biens saisis, le créancier opposant bénéficie des opérations de répartition du prix de vente selon les rangs et privilèges attachés à sa créance.
2. Le créancier opposant peut être subrogé dans les droits du créancier premier saisissant (art. D 123).
245.Il s'ensuit que, s'il veut faire valoir ses droits sur le prix de vente des biens, objets de la saisie complémentaire, le créancier premier saisissant doit, à son tour, recourir à la procédure d'opposition (art. D. 199, al. 2).
a. Conditions et délais.
246.Si la poursuite de la saisie-vente est exercée par le créancier premier saisissant (D. 119, al. 3), la nécessité de sauvegarder les intérêts de l'opposant a justifié la possibilité d'une subrogation dans les poursuites.
En effet, si le créancier premier saisissant néglige de faire procéder aux formalités de la mise en vente forcée à l'expiration des délais prévus pour la vente amiable, tout créancier opposant peut le sommer d'y procéder dans le délai de huit jours (art. D 123, al. 1er).
247.Si le créancier premier saisissant n'a pas fait procéder à la vérification des biens saisis, n'a pas fixé la date de la vente et n'a pas fait effectuer les publicités obligatoires dans les huit jours de la sommation, le créancier opposant qui en est l'auteur « lui est subrogé de plein droit » (art. D 123, al. 1er).
Dans ces conditions, le créancier opposant peut faire procéder à la vente forcée à l'expiration de ce délai de huit jours à compter de la sommation infructueuse au créancier premier saisissant.
b. Les effets.
248.Le créancier opposant est subrogé de plein droit au créancie, saisissant, lequel est déchargé de ses obligations mais conserve ses droits sur le prix de vente des biens saisis.
Il est tenu de mettre à la disposition du créancier subrogé toutes les pièces utiles pour parvenir à la vente forcée (art. D 123) pour que ce dernier puisse poursuivre les opérations de la saisie-vente.
249.Cette subrogation de plein droit protège efficacement les intérêts de l'opposant face à l'inertie du premier saisissant, peu incité à poursuivre la procédure s'il doit partager le prix de vente.
VII. Mainlevée ou nullité de la saisie initiale
1. La mainlevée de la saisie initiale.
250.La mainlevée de la saisie-vente peut intervenir avec l'accord du créancier saisissant et du (ou des) créancier(s) opposant(s) (art. D 124). Il est logique que la renonciation aux effets d'une mesure d'exécution engagée ne puisse qu'émaner de tous les participants, opposants compris, puisque chacun a une créance à sauvegarder. La mainlevée peut également résulter d'une décision du juge de l'exécution (art. D 124), qui constate par exemple que les conditions pour réaliser une telle mesure ne sont pas remplies.
2. Nullité de la saisie initiale.
251.La nullité de la première saisie n'entraîne pas la caducité des oppositions, si ce n'est lorsqu'elle résulte d'une « irrégularité dans le déroulement des opérations de saisie » (art. D 125, al. 1 er ).
Par conséquent, si la saisie initiale est annulée pour une cause tenant à l'absence de droits du créancier premier saisissant (paiement total ou annulation d'un titre exécutoire à titre provisoire par un juge), les oppositions peuvent lui survivre, la plus ancienne d'entre elles se substituant à la saisie initiale.
252.En revanche, lorsque l'irrégularité trouve sa source dans le déroulement des opérations de saisie (nullité du procès-verbal pour vice de forme tel que l'absence d'une mention obligatoire, défaut d'accomplissement d'une formalité prescrite, insaisissabilité ou preuve de la propriété des biens saisis par un tiers), l'annulation de la première saisie entraîne la caducité.
253.Le commandement de payer n'étant pas inclus dans le chapitre II du titre V du décret du 31 juillet 1992, dans les opérations de saisie, les irrégularités susceptibles de l'affecter ne peuvent avoir de retentissement sur la validité des oppositions.
Quoi qu'il en soit, que la nullité trouve son origine dans la créance du premier saisissant ou dans le déroulement des opérations, elle est dépourvue de conséquences sur la saisie complémentaire à laquelle l'article D 125 al. 2 reconnaît un caractère autonome.
VIII. Engagement et déroulement de la saisie-vente
1. Déroulement de la procédure
254.L'attention des comptables est plus particulièrement appelée sur les points suivants :
a. Lieu de la vente.
255.Chaque fois qu'un incident ou des difficultés particulières peuvent être redoutés dans la commune du saisi, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 617 ancien du Code de procédure civile et de demander au président du tribunal de grande instance d'autoriser la vente dans une autre commune.
Dans ce cas, les frais supplémentaires nécessités par le transport des meubles sont engagés, payés et apurés selon les mêmes modalités que celles prévues pour les frais de poursuites et de contentieux (cf. 12 B 32).
b. Choix de l'officier public compétent pour procéder à la vente.
256.Lorsqu'il n'existe aucun monopole au profit des commissaires-priseurs, les comptables peuvent avoir recours, pour faire procéder à la vente dans la commune du saisi, à n'importe quel huissier établi dans le ressort du tribunal d'instance ou à l'un des commissaires-priseurs du département.
c. Recherche d'un acquéreur en cas de vente forcée.
257.Afin d'assurer le succès des ventes, les comptables doivent rechercher, avant le jour fixé pour celle-ci, des personnes intéressées par les objets à mettre en vente et décidées à porter des enchères.
C'est ainsi qu'ils sont habilités à prendre tout contact utile avec les professionnels concernés par les biens objet de la vente (par exemple, avec des garagistes pour les ventes d'automobiles et de véhicules utilitaires).
d. Déroulement de la procédure - Fixation de la mise à prix lors de la vente aux enchères publiques.
1° Déroulement des enchères.
258.Les comptables ne sont pas obligés d'assister à la vente mais ils doivent faire en sorte que le commissaire-priseur ou l'huissier puisse se concerter avec eux sur les mesures à prendre en cas d'incident.
L'officier ministériel chargé de la vente doit indiquer, avant l'ouverture des enchères, l'importance minimum qu'elles devront comporter ; il ne doit pas consentir à une réduction de la mise à prix qui, suivies d'autres réductions, pourrait aboutir à une vente à un prix dérisoire.
2° Cas où aucune enchère n'est portée.
259.Si aucune enchère n'est portée ou si les enchères portées ne sont pas sérieuses, mais présentent un caractère dérisoire, l'officier ministériel peut se concerter avec le comptable pour arrêter la vente. Il vaut mieux, en effet, renoncer momentanément à la vente que de la laisser se poursuivre jusqu'à l'adjudication des objets à un vil prix.
Il est fait observer, que l'article D. 114 alinéa 2 du décret de 1992 (article 624 ancien du Code de procédure civile) selon lequel les biens sont adjugés au plus offrant, ne doit s'appliquer que lorsque les enchères sont sérieuses.
Les huissiers et commissaires-priseurs, qui sont investis d'un mandat légal en vertu duquel ils doivent assurer, sous leur responsabilité, la correction des ventes auxquelles ils procèdent, doivent donc se refuser à adjuger sur enchères non sérieuses.
260. OBSERVATION :
En raison des frais qu'elle entraîne, la vente par adjudication aux enchères publiques présente, en pratique, un intérêt limité dès lors qu'elle aboutit rarement au désintéressement du comptable saisissant.
C'est pourquoi, il convient d'examiner avec attention les propositions de vente amiable faites par le débiteur et de ne les refuser que dans les cas où le prix proposé apparaît très insuffisant.
e. Opposition exercée par le comptable.
261.L'attention des comptables est appelée sur le fait que seule la mise en oeuvre de la procédure d'opposition peut leur permettre de faire valoir leurs droits sur le prix de vente des biens de leurs débiteurs déjà placés sous main de justice, dès lors que celui-ci est réputé insaisissable (art. L 53, al. 2). Toutefois cette procédure doit intervenir avant la vérification des biens.
262.Ils doivent également y recourir pour étendre l'assiette de la saisie antérieure ou pour faire valoir une nouvelle créance dans le cadre de la procédure (art. D 119).