Date de début de publication du BOI : 15/06/2000
Identifiant juridique : 7D212
Références du document :  7D212
Annotations :  Lié au BOI 7D-1-01

SECTION 2 CONVENTIONS ASSIMILÉES À DES CESSIONS DE FONDS DE COMMERCE

SECTION 2  

Conventions assimilées à des cessions de fonds de commerce

CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS

(législation applicable au 31 mars 1999)

Art. 720.- Les dispositions du présent code applicables aux mutations de propriété à titre onéreux de fonds de commerce ou de clientèles sont étendues à toute convention à titre onéreux, ayant pour effet de permettre à une personne d'exercer une profession, une fonction ou un emploi occupé par un précédent titulaire, même lorsque ladite convention conclue avec ce titulaire ou ses ayants cause ne s'accompagne pas d'une cession de clientèle.

Les droits sont exigibles sur toutes les sommes dont le paiement est imposé, du chef de la convention, sous quelque dénomination que ce soit, au successeur, ainsi que sur toutes les charges lui incombant au même titre.

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  A. PRINCIPE

1L'article 720 du CGI étend les dispositions applicables aux cessions de fonds de commerce à toute convention à titre onéreux ayant pour effet de permettre à une personne d'exercer une profession, une fonction ou un emploi occupé par un précédent titulaire, même lorsque ladite convention ne s'accompagne pas d'une cession de clientèle.

Entre ainsi dans le champ d'application de l'article 720 du CGI, la résiliation de l'accord par lequel une société abandonnait une des activités qu'elle exerçait à une autre société, dès lors que cette résiliation lui permet de reprendre, contre indemnisation, l'activité précédemment remise (Com. 4 juin 1996, n° 1034 D, cf. annexe VII).

2Sous réserve que les conditions examinées ci-dessous se trouvent réunies, il y a lieu de considérer que l'article 720 du CGI s'applique, d'une façon très générale, à toutes les conventions à titre onéreux, écrites ou verbales, quel qu'en soit l'objet et quelles que soient la forme et la qualification qui leur ont été données par les parties, qui ont pour effet de permettre à une personne, physique ou morale, l'exercice d'une activité quelconque, civile ou commerciale.

Il n'y a pas à distinguer, à cet égard, selon la nature de la profession, de la fonction ou de l'emploi considéré, ni à rechercher si la convention implique ou non cession de clientèle.

3Les droits sont exigibles sur toutes les sommes dont le paiement est imposé, du chef de la convention, sous quelque dénomination que ce soit, au successeur, ainsi que sur toutes les charges lui incombant au même titre.

  B. CONDITIONS DE L'IMPOSITION

  I. Les opérations doivent procéder d'accords contractuels

4En règle générale, l'appréciation de cette condition ne soulève pas de difficultés. Toutefois, les opérations peuvent se présenter de manière complexe, des actes séparés ou plusieurs conventions successives étant conclus : dans ce cas, il convient de leur restituer leur véritable caractère (Cass. com. 10 juin 1974, X...  : voir ci-dessous n° 43 ).

Sur l'application de cette règle, cf. notamment Cass. Com. 20 juin 1990, SA. DESERTOT (voir ci-après, n° 49 ) et Cass. Com. 9 novembre 1987, Société T.U.R (voir ci-après, n° 64 ).

5Seules les conventions ayant pour effet de permettre à l'une des parties de succéder dans l'activité de l'autre partie, précédemment titulaire de l'activité, sont taxables. Le successeur ne peut être un tiers à la convention (Com. 21 janvier 1997, bull. IV ; voir ci-après, n° 66 ).

6Toutefois, la présence d'un syndic qui se borne à assister, sans représenter, la société cédante en redressement judiciaire, ne prive pas l'opération de son caractère de convention conclue entre l'ancien et le nouveau titulaire de l'activité cédée. Il n'y a pas, en l'occurrence, intervention d'un tiers. Au cas particulier, après avoir retenu que les modalités de cession ont été fixées entre les deux sociétés concernées, que la société cédante, en règlement judiciaire, était assistée et non représentée par son syndic et que l'avis favorable du juge commissaire n'avait fait qu'entériner la solution proposée par la société débitrice, un tribunal a pu justement déduire que la présence du syndic n'ôtait pas à l'opération son caractère de convention conclue entre le nouveau et l'ancien titulaire de l'activité cédée (Com. 16 juin 1998, n° 1396 P, cf. annexe XIII).

7Par ailleurs, la convention peut prendre la forme de la résiliation d'un accord par lequel une société confiait jusque là une de ses activités à une autre société, puisque cette résiliation, contre indemnisation, lui permet de reprendre l'activité précédemment exercée (Com. 4 juin 1996, n° 1034 D ; voir ci-avant, n° 1 ).

  II. La convention doit avoir été conclue à titre onéreux

8L'administration n'est pas liée par la dénomination donnée par les parties aux sommes dont le paiement est imposé au cessionnaire. Ainsi, il a été jugé que la succession d'une SARL à une société en participation dans la même activité d'expertise pour le compte de compagnies d'assurances ayant eu lieu en exécution d'une convention intervenue entre les dirigeants des deux sociétés alors que des sommes étaient perçues par la société en participation, tant au titre de la rétribution de l'activité déployée en vue de la formation par cette dernière d'experts adhérant à la SARL que la cession à celle-ci d'un mobilier, c'est à bon droit qu'un tribunal en a déduit le caractère onéreux de la convention dont il s'agit, quelles que soient par ailleurs ses modalités d'exécution et la dénomination donnée aux sommes dont le paiement était imposé (Cass. com., arrêt du 13 octobre 1981, SARL Organisation Sert : RJ III, p. 134).

9Les dispositions de l'article 720 du CGI, sont susceptibles d'être appliquées aux conventions conclues entre des sociétés appartenant au même groupe, dès lors que, par ailleurs, se trouvent remplies les conditions requises par ce texte.

À cet égard, la circonstance que l'opération en cause soit réalisée dans le cadre d'une restructuration ou d'une réorganisation du groupe n'est pas de nature à lui ôter son caractère onéreux.

10Le caractère onéreux de la convention résulte du seul paiement exigé de la société cessionnaire pour la cession des biens devant lui permettre de succéder à l'activité de l'autre société partie à la convention, peu important que les deux sociétés appartiennent au même groupe.

11Ainsi, il a été jugé qu'au regard de l'article 720 du CGI, les motifs selon lesquels, le transfert d'une branche complète d'activité de distribution ne pouvant se réaliser que si cette activité est autonome, ce qui suppose une cession de savoir-faire et de droits de propriété industrielle, sont impropres à caractériser l'absence de cession d'une activité de distribution de produits. En effet, cette activité était, au cas particulier, distincte de la production de ces mêmes produits qui seule requiert la disposition de droits de propriété industrielle et d'un savoir-faire, lesquels n'étaient concédés à la société cessionnaire que pour une durée limitée.

Dans l'arrêt commenté, la Haute Juridiction reconnaît le caractère onéreux d'une convention passée entre deux sociétés filiales d'un même groupe. Ce caractère onéreux résulte du seul paiement exigé pour la cession des biens. En l'espèce, le prix convenu ne s'attachait qu'aux stocks et immobilisations

Par ailleurs, la Cour sanctionne le tribunal qui avait considéré que l'activité de distribution des produits aux clients finaux, transférée à une autre société, n'était pas autonome de l'activité de production des mêmes produits à défaut de cession concomitante du savoir-faire et des droits de propriété industrielle qui n'étaient concédés, quant à eux, que pour une durée limitée. Elle précise ainsi que l'activité de commercialisation faisant l'objet de la cession est distincte de celle de production, seule activité à laquelle sont attachés le savoir-faire et les droits de propriété industrielle. (Cass. Com. arrêt du 12 novembre 1996, n° 1682 D, cf. annexe III).

12Cela étant, une convention de successeur suppose l'existence d'une contrepartie ; peu importe cependant la dénomination donnée aux sommes dont le paiement est imposé (par ex. : cession de matériel...) [Com. 16 décembre 1997, Bull. IV ; voir ci-après, n° 18 ].

  III. La profession, l'emploi ou la fonction exercées par le successeur doivent être identiques à ceux qui étaient exercés par le précédent titulaire

13Pour l'application de l'article 720 du CGI, il a été jugé que les deux activités successives doivent être non seulement similaires mais identiques (Cass. com., arrêt du 8 février 1984, Compagnie. fermière des boues de Saint-Amand-Thermal et Cass. com., arrêt du 4 novembre 1987, Compagnie fermière des boues de Saint-Amand, Bull. IV., n° 221, p. 165).

14À ce sujet, la Cour de Cassation a également précisé que l'article 720 " n'est applicable qu'à des conventions ayant pour effet de permettre l'exercice d'une activité identique à celle du précédent titulaire, fût-elle partielle, à proportion de la cessation d'activité volontaire de celui-ci " . Au sens de cet article, la succession dans une profession, un emploi ou une fonction s'entend de la succession dans une activité professionnelle exercée à l'égard de tiers ; une telle activité n'est pas identique à une activité de gestion propre (Cass. com., arrêt du 17 décembre 1991, G.I.E. IBESIS, Bull. IV, n° 390, p. 270).

15Il convient de se placer à la date de conclusion de la convention pour apprécier s'il y a bien succession dans l'activité du précédent titulaire. Ainsi, peu importe qu'il ne soit pas démontré que la cession de matériel ait entraîné un accroissement d'activité (Com. 2 novembre 1994, n° 1965 D, cf. annexe IV).

De même, c'est à cette date qu'il faut se placer pour s'assurer que l'acquéreur n'est pas dans l'impossibilité de succéder dans l'activité précédemment exercée par le cédant (Com. 13 mai 1997, Bull. IV, n° 136, p. 122, cf. annexe X).

Cependant, il est indifférent au regard de l'article 720 du CGI, que l'obtention d'une autorisation administrative soit nécessaire pour exercer l'activité cédée (Com. 7 mars 1995, n° 464 D, cf. annexe V).

16En réalité, l'opération taxable se limite bien souvent à une cession de matériel. (cf. notamment Com. 2 novembre 1994, n° 1965 D ; 21 janvier 1997, n° 139 D ; 21 octobre 1997, bull. IV, n° 274, p. 237), même sans qu'il y ait cession de clientèle (Com. 4 juin 1996, n° 1034 D), cette dernière cession étant imposable à l'article 719 du CGI.

17Elle peut également consister en une simple reprise d'activité précédemment abandonnée (Com. 4 juin 1996, n° 1034 D ; cf. annexe VII). En l'espèce, les deux sociétés n'étaient pas liées par un contrat de sous-traitance. Toutefois, la solution est transposable à la résiliation de tels contrats, y compris lorsque le donneur d'ordre n'a jamais cessé d'exercer l'activité partiellement confiée au sous-traitant (cf. Com. 24 juin 1986, Bull. IV, n° ; 140, p. 117 ; cf. ci-après, n° 25 ).

18Cette identité peut n'être que partielle (Cass. com., arrêt du 25 octobre 1977, SA des liqueurs Combier ; Cass. com., arrêt du 28 avril 1981, Société industrielle nouvelle de fabrication pour l'automobile et le cycle SINFAC, RJ III, p. 63 ; Cass. com., arrêt du 18 octobre 1982, SA Codibois ; Cass. com., arrêt du 14 mars 1983, SARL Location transports Fontoy LTF, RJ, p. 72, n° 25 ; Cass. com., arrêts du 2 novembre 1994, n° 1965 D ; cf. annexe IV, du 14 novembre 1995, n° 1906 D, cf. annexe VI, du 21 janvier 1997, n° 139 D ; cf. annexe VIII, du 16 décembre 1997, Bull. IV, n° 346, p. 300 ; cf. annexe XII).

19La partie d'activité cédée doit être exercée de façon identique. À cet égard, peu importe que le cédant conserve une partie de son activité après la cession de matériel (cf. notamment Com. 21 janvier 1997, n° 139 D, cf. annexe VIII) ou que la convention ne comprenne pas d'engagement de la part de la société cédante de cesser définitivement la fabrication concernée, de ne pas la reprendre ou de ne pas concurrencer l'acquéreur (Com. 14 novembre 1995, n° 1906 D ;cf. annexe VI).

20Enfin, l'ancien titulaire de l'activité et son successeur pouvaient parfaitement, antérieurement au transfert taxable, exercer, au moins partiellement, la même activité sans que cela influe sur la mise en oeuvre de l'article 720 du CGI.

Ainsi, la cession de fûts et de matériel de bureau par un groupement d'intérêt économique de viticulteurs à une société d'intérêt collectif agricole entre dans le champ d'application de l'article 720 du CGI, même si avant la cession litigieuse, les activités des deux parties étaient au moins partiellement identiques, dès lors que cette cession a pour effet de transférer du GIE vers la SICA une activité de négoce de produits viticoles. L'évolution comptable de l'activité respective des parties avant et après la cession est sans incidence au regard de la preuve du transfert d'activité (Cass. com., arrêt du 2 novembre 1994, n° 1965 D, cf. annexe IV).

21Cette identité peut résulter du fait que les conventions d'exploitation passées respectivement par les sociétés cédante et cessionnaire étaient rédigées en termes pratiquement identiques. Le tribunal a pu ainsi décider que l'opération litigieuse était soumise aux droits d'enregistrement prévus par l'article 720 du CGI, dès lors que résultent des énonciations du jugement le caractère distinct des deux personnes morales, ainsi que le caractère onéreux de la cession (Com. 16 décembre 1997, BULL. IV, n° 346, p. 300, cf. annexe XII).

22Néanmoins, la notion d'identité d'activité est à interpréter strictement. Ainsi, l'article 720 peut s'appliquer en cas de cessation d'activités identiques partielles, mais non en présence de cessions d'activités partiellement identiques. C'est à l'administration d'apporter la preuve de l'identité, au moins partielle, des activités du cédant et du cessionnaire (Com. 30 juin 1998, n° 1406 P ; cf. annexe XIV).

23D'autre part, l'extension de l'étendue territoriale de l'activité par l'acquéreur est indifférente, dès l'instant où le cédant avait lui-même vocation à y procéder Il s'ensuit que l'activité de l'ancien et du nouveau titulaire doit être considérée comme identique (Cass. com., arrêt du 13 octobre 1981, SARL Organisation Sert, RJ III, p. 134).

24En outre, le fait que l'exploitation ait été interrompue ne fait pas échec aux dispositions de l'article 720 du CGI, ce texte n'exigeant pas que la profession, l'emploi ou l'activité qui était exercée par le précédent titulaire l'ait été sans interruption (TGI Nevers, jugement du 11 octobre 1978, X...  : arrêt d'activité d'un an).

25Enfin, la circonstance qu'antérieurement à la convention de successeur, l'acquéreur exerçait une activité identique à celle du cédant ne fait pas obstacle à l'application de l'article 720 précité. Ainsi, a été reconnue taxable la convention par laquelle une société d'exploitation portuaire a repris la totalité des opérations de transbordement précédemment assurées par la société titulaire, alors même que la société cessionnaire pratiquait déjà une telle activité dans le même port (Cass. com., arrêt du 24 juin 1986, Affaire compagnie française de navigation Rhénane, CFNR, RJ, p. 47).