Date de début de publication du BOI : 20/10/1999
Identifiant juridique : 3A1154
Références du document :  3A1154

SOUS-SECTION 4 AUTEURS ET INTERPRÈTES DES OEUVRES DE L'ESPRIT ARTISTES DU SPECTACLE

SOUS-SECTION 4

Auteurs et interprètes des oeuvres de l'esprit
Artistes du spectacle

1L'article 261-4-5° du CGI exonérait de la TVA les prestations de services et les livraisons de biens effectuées dans le cadre de leur activité libérale par les auteurs des oeuvres de l'esprit désignées à l'article 3 de la loi n° 57-298 du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique, à l'exclusion des opérations réalisées par les architectes et les auteurs de logiciels. L'article 261-4-6° exonérait les prestations fournies par les interprètes des oeuvres de l'esprit et les artistes du spectacle.

L'article 260-1° prévoyait toutefois la possibilité pour ces personnes d'opter pour la TVA.

Ces dispositions sont abrogées à compter du 1er octobre 1991 par l'article 5 de la loi n° 91-716 du 26 juillet 1991.

Cette mesure s'inscrit dans le cadre de l'harmonisation européenne du régime de TVA applicable aux professions libérales.

À compter du 1er octobre 1991, les auteurs et les interprètes des oeuvres de l'esprit ainsi que les artistes du spectacle sont donc soumis à la TVA.

Désormais, en application des dispositions des articles 256 et 256 A du CGI, et de l'article 5 de la loi n° 91-716 du 26 juillet 1991, les auteurs des oeuvres de l'esprit, les artistes-interprètes et les artistes du spectacle, agissant à titre indépendant, doivent à compter du 1er octobre 1991, soumettre à la TVA les livraisons de biens et les prestations de services qu'ils réalisent à titre onéreux.

Les auteurs des oeuvres de l'esprit et les artistes-interprètes sont dispensés du paiement de la TVA si leur chiffre d'affaires n'excède pas 245 000 F(cf. DB 3 F 13 ) .

Les cessions des droits patrimoniaux reconnus par la loi aux auteurs des oeuvres de l'esprit et aux artistes-interprètes ainsi que de tous droits portant sur des films ou des livres sont soumises au taux réduit de la taxe. En outre, certaines opérations portant sur les oeuvres d'art, objets de collection ou d'antiquité bénéficient également du taux réduit. Les autres prestations de service et livraisons de biens sont soumises au taux normal de la taxe. Les opérations en cause sont celles visées à l'article 278 septies du CGI.

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Par ailleurs, l'article 24 de la loi n° 91-1322 du 30 décembre 1991 portant loi de finances pour 1992 a institué, dans un objectif de simplification, un dispositif permettant de dispenser de toute obligation à l'égard de la TVA les personnes qui perçoivent des droits d'auteurs d'éditeurs, de sociétés de perception et de répartition de droits ou de producteurs.

Selon ce dispositif, les éditeurs, les sociétés de perception et de répartition de droits et les producteurs opèrent sur les droits versés aux auteurs une retenue de la TVA due par l'auteur.

Pour le calcul du montant qui doit être ainsi retenu, la taxe brute due par l'auteur, par exemple au taux de 5,5 % (2,1 % dans les DOM) est diminuée de ses droits à déduction évalués forfaitairement à 0,8 % (0,4 % dans les DOM) des sommes qui lui sont versées, soit un taux net de 4,7 % (1,7 % dans les DOM).

Les éditeurs, sociétés de perception et de répartition de droits et les producteurs déclarent et acquittent la TVA nette pour le compte de l'auteur, dans les mêmes conditions et sous les mêmes sanctions que celle due au titre de leurs propres opérations.

L'auteur peut toutefois renoncer à ce dispositif, qui concerne aussi bien les auteurs bénéficiaires de la franchise que les auteurs redevables de la TVA. Si l'auteur renonce au dispositif de la retenue, le dispositif exposé ci-dessous aux n°s 2 à 51 lui est intégralement applicable.

Les commentaires qui suivent sont consacrés :

- à l'assujettissement à la TVA des auteurs et interprètes des oeuvres de l'esprit et des artistes du spectacle (1ère partie) ;

- aux modalités d'application du dispositif de la retenue applicable aux droits d'auteur (2e partie).

1ère partie :

 L'assujettissement à la TVA des auteurs et interprètes des oeuvres de l'esprit et des artistes du spectacle

  A. SITUATION DES AUTEURS DES OEUVRES DE L'ESPRIT

2La loi n° 57-298 du 11 mars 1957 modifiée et complétée par la loi n° 85-660 du 3 juillet 1985 a organisé la protection de la propriété littéraire et artistique. Elle reconnaît aux auteurs des oeuvres de l'esprit des droits patrimoniaux sur leurs oeuvres : droit de représentation, droit de reproduction, droit de suite, droit à rémunération pour copie privée. Les oeuvres protégées sont les oeuvres littéraires ou artistiques originales, c'est-à-dire celles qui portent l'empreinte de la personnalité de l'artiste. Les titulaires des droits sont les auteurs des oeuvres leur vie durant, la loi précisant à qui appartient cette qualité dans le cas d'oeuvres de collaboration, d'oeuvres composites et d'oeuvres collectives. Toutefois, au décès de l'auteur, les droits persistent au profit des ayants droit des auteurs pendant 50 ans (70 ans pour les compositions musicales).

Les auteurs des oeuvres de l'esprit peuvent exploiter individuellement leurs droits (par exemple, cas de l'écrivain qui conclut un contrat d'édition). La gestion collective des droits, plus répandue, est assurée par des sociétés de perception et de répartition de droits, obligatoirement constituées sous forme de sociétés civiles.

  I. Personnes assujetties

1. Les auteurs des oeuvres de l'esprit agissant à titre indépendant.

3Lorsqu'ils agissent à titre indépendant, les auteurs des oeuvres de l'esprit doivent soumettre les opérations qu'ils réalisent à la TVA. En revanche, lorsqu'ils agissent en qualité de salariés, les rémunérations correspondantes ne sont pas soumises à la TVA.

a. Cas de l'auteur salarié.

4Les sommes perçues en vertu d'un contrat de travail n'entrent pas dans le champ d'application de la TVA.

Toutefois, les oeuvres réalisées dans le cadre d'un tel contrat peuvent donner lieu à la perception (concomitante ou ultérieure) de rémunérations dans le cadre de l'exploitation des droits conservés par l'auteur sur ses oeuvres : ces rémunérations, perçues à titre indépendant, doivent être soumises à la TVA.

5 Remarque : Situation des auteurs et compositeurs dont les droits sont soumis à l'impôt sur le revenu selon les règles prévues en matière de traitements et salaires.

En application des dispositions de l'article 93-1 quater du CGI, les produits des droits d'auteur perçus par les écrivains et compositeurs sont soumis à l'impôt sur le revenu selon les règles prévues en matière de traitements et salaires lorsqu'ils sont intégralement déclarés par des tiers.

La situation des écrivains et compositeurs à l'égard de l'impôt sur le revenu n'a pas pour effet de placer leurs opérations hors du champ d'application de la TVA conformément aux dispositions de l'article 256 A du CGI dès lors qu'ils agissent à titre indépendant (la jurisprudence a d'ailleurs confirmé que les revenus en cause demeuraient des bénéfices non commerciaux même si la base d'imposition est déterminée selon les règles applicables aux traitements et salaires : cour administrative d'appel de Paris, arrêt du 9 octobre 1990 n° 895).

b. Situation des journalistes.

6En vertu de l'article L. 761-2 du code du travail, les journalistes professionnels bénéficient d'une présomption d'existence de contrat de travail et sont donc salariés de l'entreprise de presse qui les emploie. La rémunération qu'ils perçoivent n'est pas soumise à la TVA.

Cette situation de salarié n'exclut toutefois pas que les journalistes perçoivent des rémunérations qui ont le caractère de droits d'auteur passibles de la TVA (par exemple : sommes perçues au titre de la publication de leurs articles en recueil conformément à l'article 36 de la loi du 11 mars 1957).

Par ailleurs, le journaliste qui exercerait sa profession en toute indépendance vis-à-vis de l'entreprise de presse et percevrait sa rémunération en droits d'auteur devrait la soumettre à la TVA.

2. La qualité d'auteur.

7En principe, la qualité d'auteur appartient sauf preuve contraire à celui ou à ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée.

La loi précise toutefois dans certains cas à qui appartient la propriété de l'oeuvre et la titularité des droits.

- cas de l'oeuvre composite  : l'oeuvre composite est l'oeuvre nouvelle à laquelle est incorporée une oeuvre préexistante sans la collaboration de l'auteur de cette dernière. Elle est la propriété de l'auteur qui l'a réalisée, sous réserve des droits de l'auteur de l'oeuvre préexistante.

- cas de l'oeuvre de collaboration : l'oeuvre de collaboration est celle à la création de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques. Elle est la propriété commune des auteurs. De plus, lorsque la participation de chacun des coauteurs relève de genres différents, chacun peut, sauf convention contraire, exploiter séparément sa contribution personnelle, sans toutefois porter préjudice à l'exploitation de l'oeuvre commune.

L'oeuvre audiovisuelle (dont l'oeuvre cinématographique) est une oeuvre de collaboration pour laquelle la loi réputée coauteurs : les auteurs du scénario, de l'adaptation, du texte parlé, des compositions musicales spécialement réalisées pour l'oeuvre ainsi que le réalisateur.

L'oeuvre radiophonique est également une oeuvre de collaboration.

- cas de l'oeuvre collective  : l'oeuvre collective est celle qui est créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui l'édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé. L'oeuvre collective est la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée.

La jurisprudence de la Cour de cassation, en cas de pluralité de créateurs, considère l'oeuvre collective comme l'exception et l'oeuvre de collaboration comme le régime de droit commun.

Les encyclopédies et les dictionnaires sont des exemples d'oeuvres collectives.

Remarque  : L'auteur d'une oeuvre de l'esprit ne peut être une personne morale que dans le cas d'une oeuvre collective.

8 N'ont pas la qualité d'auteur :

- l'éditeur qui est la personne ayant acquis de l'auteur le droit de fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires de l'oeuvre à charge pour elle d'en assurer la publication et la diffusion ;

- le producteur de phonogrammes qui est la personne, physique ou morale, qui a l'initiative et la responsabilité de la première fixation d'une séquence de son ;

- le producteur de vidéogrammes qui est la personne, physique ou morale, qui a l'initiative et la responsabilité de la première fixation d'une séquence d'images sonorisées ou non ;

- les entrepreneurs ou organisateurs de spectacle ;

- les marchands d'oeuvres d'art et les galeries d'art ;

- les intermédiaires (agents littéraires et artistiques, courtiers ...).

Les directeurs de collection ont ou non la qualité d'auteur selon le degré de participation aux ouvrages publiés qui dépend des circonstances de droit (stipulations des contrats) ou de fait. (Par ailleurs la jurisprudence considère que la collection elle-même n'est pas une oeuvre de l'esprit).

3. Les ayants droit des auteurs des oeuvres de l'esprit.

9Les ayants droit des auteurs qui bénéficiaient de l'exonération prévue à l'ancien article 261-4-5° du CGI sont, à compter du 1er octobre 1991, redevables de la TVA. Tel est également le cas des conjoints survivants d'auteurs bénéficiaires de l'usufruit du droit d'exploitation prévu à l'article 24 de la loi du 11 mars 1957.

Remarque : le terme d'auteur est utilisé dans les développements qui suivent pour désigner les auteurs, leurs ayants droit et le conjoint survivant.

4. Qualité d'assujetti-redevable.

10Seules les personnes physiques et, par mesure de tempérament, les groupements de personnes investis des droits d'auteur à titre originaire dans le cas d'oeuvres collectives (sociétés de personnes, associations, groupements de fait) étaient susceptibles de bénéficier de l'exonération prévue à l'ancien article 261-4-5° du CGI, dès lors que cet article ne visait que les auteurs agissant à titre libéral.

11Ont désormais la qualité d'assujetti qui détermine celle de redevable de la TVA :

- l'auteur personne physique ;

- la société de personnes ;

- l'association ;

- la société de fait ou en participation lorsque les membres se comportent entre eux et vis-à-vis des tiers comme de véritables associés qui participent aux apports, à la gestion et aux résultats (bénéfices ou pertes).

12Bien entendu, demeurent assujetties et redevables de la TVA les personnes physiques ou morales qui ne bénéficiaient pas de l'exonération prévue à l'ancien article 261-4-5° du CGI avant le 1er octobre 1991 (sociétés de capitaux, personnes n'ayant pas la qualité d'auteur ...).

Tel est en particulier le cas de la société en participation constituée dans le cadre d'un contrat de « compte à demi ». Par un tel contrat, l'auteur charge l'éditeur de fabriquer des exemplaires de l'oeuvre et d'en assurer la publication et la diffusion moyennant l'engagement réciproque de partager les bénéfices et les pertes. La société en participation est redevable de la TVA au titre de la vente des exemplaires. L'auteur n'est en revanche pas personnellement redevable de la TVA au titre du bénéfice retiré de sa participation.

13 Cas particulier : Les droits de tous les cohéritiers d'un même auteur sont fréquemment versés à l'un d'entre eux chargé de les percevoir collectivement puis de les répartir à chaque ayant droit. Il est admis que les cohéritiers se placent au regard de la TVA dans la situation d'une société de fait redevable de la TVA à raison de l'ensemble des droits perçus, le versement de la taxe étant alors assuré par le cohéritier gérant.

Cette faculté de considérer un cohéritier comme gérant d'une société de fait redevable de la TVA ne concerne pas les intermédiaires (avocats, agents divers ...) qui peuvent éventuellement percevoir des droits pour le compte d'un ou plusieurs auteurs ou héritiers ou d'un groupement de cohéritiers à qui ils les reversent. En effet, dans ce cas, chaque auteur, ayant droit ou gérant d'un groupement de fait de cohéritiers est personnellement redevable de la TVA au titre de ses perceptions. Chacune de ces personnes doit déclarer à la TVA l'ensemble des droits perçus pour son compte et peut déduire la taxe facturée par l'intermédiaire dans les conditions de droit commun.

5. Nature des oeuvres concernées.

14Les oeuvres doivent présenter les caractéristiques d'une création artistique et porter l'empreinte de la personnalité de l'artiste.

Sous cette condition, on peut citer notamment :

• Les oeuvres littéraires, dramatiques ou musicales :

- les livres, brochures, et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques,

- les conférences, allocutions, sermons, plaidoiries et autres oeuvres de même nature,

- les oeuvres dramatiques ou dramatico-musicales,

- les compositions musicales avec ou sans paroles.

• Les oeuvres audiovisuelles consistant dans des séquences animées d'images, sonorisées ou non

- les oeuvres cinématographiques,

- les oeuvres télévisuelles et vidéographiques.

• Les oeuvres radiophoniques

• Les oeuvres chorégraphiques, les numéros et tours de cirque et les pantomimes.

• Les oeuvres graphiques ou plastiques

- pour l'essentiel, les oeuvres dont la description figure à l'article 2 du décret 95-172 du 17 février 1995 (art. 98 A-II de l'annexe III au CGI) qui abroge l'article 71 A de l'annexe III au CGI en vigueur précédemment. La description des oeuvres concernées figure à la DB 3 K 1121 à 1127.

Peuvent également être considérées comme des oeuvres d'art des arts appliqués les productions qui, sans être mentionnées dans cette énumération, remplissent les conditions suivantes :

- elles sont réalisées en exemplaire unique ou en nombre limité. Il est indispensable, à cet égard, que les créations puissent être individualisées par la signature de leur auteur et qu'elles soient numérotées lorsqu'elles sont produites en plusieurs exemplaires ;

- elles dénotent de la part de leur auteur l'intention de réaliser une oeuvre qui a exclusivement une fonction artistique. Les productions d'objets utilitaires par nature (production de l'artisanat d'art telles que assiettes peintes, tissus, vêtements, mobilier, instruments de musique, bijoux...) ne peuvent être considérées comme des oeuvres des arts appliqués que s'il apparaît qu'elles constituent le support d'une création artistique et n'ont aucune vocation à être utilisées en fonction de leurs caractéristiques apparentes ;

- les illustrations, cartes géographiques ainsi que les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie ou aux sciences.

Il est rappelé que les relevés topographiques effectués par les géomètres-experts ne remplissent pas la condition d'originalité nécessaire à la reconnaissance d'une oeuvre de l'esprit (réponse ministérielle à M. Etienne PINTE n° 58838, JO AN du 28 janvier 1985).

• Les traductions, adaptations, transformations ou arrangements des oeuvres de l'esprit ; les anthologies ou recueils d'oeuvres diverses qui, par le choix et la disposition des matières, constituent des créations intellectuelles.