SECTION 3 EMPLOYEURS AGRICOLES
SECTION 3
Employeurs agricoles
1À l'exception de ceux qu'il exonère expressément (cf. 5 L 122 ), l'article 231-1 du CGI soumet à la taxe sur les salaires toutes les personnes ou organismes qui paient des traitements, salaires, indemnités ou émoluments lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la TVA ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires.
2Les employeurs agricoles dont les recettes n'entrent pas, à titre obligatoire ou sur option, dans le champ d'application de la TVA, sont donc passibles de la taxe sur les salaires mais, selon l'article 231-3 du CGI, le calcul de la taxe dont ils sont redevables doit s'effectuer selon des modalités spéciales fixées par décret.
Or, ce décret n'est intervenu qu'à l'égard :
- des organismes coopératifs mutualistes et professionnels agricoles [CGI, ann. III, art. 53 bis ] 1 ;
- des agriculteurs qui commercialisent ou transforment leurs produits en faisant appel à des moyens analogues à ceux des commerçants ou des industriels [CGI, ann. III, art. 53 ter ] 1 .
4Donc, en l'état actuel de la réglementation :
- les employeurs agricoles énumérés par les articles 53 bis et 53 ter de l'annexe III au CGI, sont redevables de la taxe sur les salaires lorsque 90 % au moins de leur chiffre d'affaires ne sont pas soumis à la TVA ;
- les autres employeurs bénéficient d'une exonération de fait.
5La présente section est consacrée à l'examen de la situation :
- des organismes coopératifs, mutualistes et professionnels agricoles ;
- des agriculteurs qui utilisent des moyens similaires à ceux des commerçants ou industriels pour vendre ou transformer leurs produits ;
- des autres employeurs agricoles.
A. ORGANISMES COOPÉRATIFS, MUTUALISTES ET PROFESSIONNELS AGRICOLES
6L'article 53 bis de l'annexe III au CGI rend imposables à la taxe sur les salaires, les groupements coopératifs, mutualistes et professionnels agricoles régulièrement constitués à raison de l'ensemble des rémunérations versées à leur personnel.
I. Organismes imposables à raison de l'ensemble des rémunérations
7Les organismes coopératifs, mutualistes et professionnels agricoles régulièrement constitués doivent acquitter la taxe sur les salaires du chef des salaires payés à l'ensemble de leur personnel.
L'article 53 bis cité plus haut énumère :
- les caisses de mutualité sociale agricole ;
- les caisses d'assurances mutuelles agricoles constituées conformément à l'article 1235 du Code rural ;
- les caisses de crédit agricole mutuel ;
- les sociétés coopératives agricoles ;
- les sociétés d'intérêt collectif agricoles ;
- les syndicats agricoles,
- les chambres d'agriculture ;
- les unions et fédérations des organismes précités.
8 Cette liste n'est pas limitative. La taxe sur les salaires est due également par :
- les associations syndicales de propriétaires constituées en application de la loi du 21 juin 1865 modifiée par la loi du 22 décembre 1926 ;
- les groupements de productivité agricole des villages et zones témoins ;
- les centres d'études techniques agricoles ;
- les syndicats d'entretien des cours d'eau ;
- les comités départementaux des prestations sociales agricoles ;
- les centres de formation professionnelle en agriculture ;
- les associations de vachers de remplacement.
9De même, la jurisprudence a considéré comme des organismes professionnels agricoles redevables de la taxe sur les salaires :
- les fédérations départementales de chasseurs, eu égard à leur organisation et à leur activité (CE, arrêt du 11 mai 1960, req. n° 47332, RO, p. 85 et du 22 juin 1962, req. n° 51412) ;
- les sociétés de courses hippiques (CE, arrêt du 9 avril 1962, req. n° 53521, RO, p. 65) ;
- une association sans but lucratif dont le personnel relève du régime agricole au regard de la législation sur la sécurité sociale et qui, conformément à ses statuts, se propose de faciliter à ses membres la pratique de l'équitation et de la connaissance des meilleures méthodes d'élevage, d'hygiène et d'entretien du cheval (CE, arrêt du 22 juin 1962, req. n° 51766, RO, p. 129) ;
- un syndicat de propriétaires, constitué en vue d'exploiter un canal d'irrigation, bien qu'il ait le caractère d'un établissement public (CE, arrêt du 22 juin 1962, req. n° 51548, RO, p. 131) ;
- une union d'associations syndicales de défense contre les eaux de rivières non navigables ni flottables, constituée pour l'acquisition et l'emploi en commun d'un matériel de curage et d'endiguement ainsi que pour l'établissement des programmes de travaux incombant à chaque association, bien qu'elle ait la qualité d'établissement public (CE, arrêt du 18 février 1963, req. n° 53901, RO, p. 282) ;
- un « groupement de productivité agricole » constitué sous la forme d'une association régie par la loi du 1er juillet 1901 et formé par des agriculteurs en vue de l'expérimentation par ces derniers, sur leurs propres exploitations, de méthodes et de moyens de culture (CE, arrêt du 29 janvier 1969, req. n° 72609, RJCD, 1re partie, p. 19) ;
- une association régie par la loi du 1er juillet 1901 qui a pour but l'amélioration de l'élevage dans ses rapports avec la protection sanitaire et qui se propose à cet effet notamment de diffuser des méthodes modernes de prophylaxie et de veiller à leur application parmi ses membres adhérents, lesquels sont des éleveurs et propriétaires d'animaux s'engageant à respecter et faire respecter certaines règles en la matière
Une telle association constitue un groupement professionnel agricole même si elle compte parmi ses membres fondateurs, d'honneur ou délégués, des personnes qui ne sont pas des agriculteurs ou éleveurs (CE, arrêt du 20 février 1981, req. n° 17832)
10En revanche, ne sont pas passibles de la taxe sur les salaires en qualité d'organismes agricoles
- les maisons familiales d'apprentissage rural (décision ministérielle du 25 janvier 1956) 3 ;
- les groupements forestiers qui en vertu d'une déclaration faite par le ministre, le 8 décembre 1964, au cours de la discussion de la loi de finances rectificative pour 1964 [cf. JO du 9 décembre 1964, déb, AN, p. 5902] doivent être considérés comme des employeurs agricoles ordinaires 4 ;
- les groupements agricoles d'exploitation en commun institués par la loi n° 62-917 du 8 août 1962. En effet, selon l'article 7 de cette loi, la participation à un groupement agricole d'exploitation en commun ne doit pas avoir pour effet de mettre ceux des associés qui sont considérés comme chefs d'exploitation, pour tout ce qui touche leurs statuts économique, social et fiscal, dans une situation inférieure à celle des autres chefs d'exploitation agricole.
II. Sociétés coopératives imposables à la taxe à raison d'une partie des rémunérations
11Conformément à une disposition expresse de l'article 53 bis de l'annexe III au CGI, les sociétés coopératives de culture en commun et les sociétés coopératives d'utilisation en commun de matériel agricole ne sont redevables de la taxe que pour les salaires alloués aux membres de leur personnel occupés dans leurs services administratifs et leurs ateliers de réparation.
Les coopératives d'insémination artificielle bénéficient également de cette règle.
III. Organismes professionnels établis dans les départements d'outre-mer
12La taxe sur les salaires n'est pas applicable aux organismes professionnels agricoles établis dans les départements d'outre-mer (CGI, ann. III, art. 53 quater ).
B. EMPLOYEURS AGRICOLES EFFECTUANT DES OPÉRATIONS DE CARACTÈRE INDUSTRIEL OU COMMERCIAL
13L'article 53 ter de l'annexe III au CGI prévoit l'imposition à la taxe sur les salaires des rémunérations versées par des employeurs agricoles 5 aux membres de leur personnel qui exécutent certaines opérations de caractère industriel ou commercial.
Sous le bénéfice de cette remarque préliminaire la taxe porte sur les salaires du personnel affecté :
- à certaines opérations de vente ;
- à certaines opérations de préparation ou de manipulation.
I. Établissements dans lesquels sont effectuées des ventes de produits agricoles
14Les salaires versés au personnel affecté dans des établissements où les employeurs agricoles effectuent des ventes n'entrent dans les prévisions de l'article 53 ter de l'annexe III au CGI que si :
- et que les locaux sont distincts et séparés de l'exploitation agricole.
1. Conditions tenant à la nature des ventes effectuées.
15Le paragraphe 1° de l'article 53 ter de l'annexe III au CGI vise les ventes de produits provenant des terrains exploités par l'employeur agricole ou du bétail qu'il y élève, y entretient ou y engraisse :
- lorsque ces ventes sont effectuées suivant des méthodes commerciales en ce qui concerne, notamment, l'agencement matériel et la recherche des débouchés (art. 53 ter -1°-a) ;
- lorsque ces ventes ne portent pas exclusivement sur les produits ci-dessus visés (art. 53 ter -1°-b) ;
- lorsque la totalité ou une partie desdits produits a subi une préparation ou une manipulation qui en modifie le caractère et qui, en outre, ne s'impose pas pour les rendre propres à la consommation ou à l'utilisation en l'état (art. 53 ter -1°-c).
a. Ventes suivant des méthodes commerciales.
16Pour apprécier si les ventes sont effectuées suivant des méthodes commerciales, il convient notamment de se référer à l'agencement matériel et aux méthodes utilisées pour la recherche des débouchés.
Les indications ainsi données par le texte réglementaire ne sont pas limitatives.
Il importe donc de tenir compte de l'ensemble des circonstances de fait.
Les ventes doivent cependant être réputées réalisées suivant des méthodes commerciales, lorsqu'elles sont effectuées dans un magasin ouvert au public et analogue, du point de vue de son agencement, à celui d'un commerçant.
Il en est de même lorsque l'exploitant de l'établissement a recours à une publicité commerciale ou fait éditer un catalogue pour écouler les produits mis en vente ou développer le volume de ses affaires ou bien encore lorsqu'il utilise les services de représentants (cf. notamment CE, arrêt du 17 février 1982, n° 15053).
b. Ventes de produits achetés.
17La taxe est due lorsque l'employeur agricole ne vend pas exclusivement des produits provenant des terrains qu'il exploite ou du bétail qu'il y élève, y entretient ou y engraisse (cf. arrêt précité du 17 février 1982).
Il en est ainsi, en principe, quelle que soit l'importance des produits achetés par rapport à ceux qui proviennent de l'exploitation.
18Toutefois, ce principe doit être interprété avec un esprit libéral.
La taxe sur les salaires n'est donc pas réclamée dans les cas suivants :
1° Incorporation dans les produits provenant de l'exploitation d'ingrédients achetés lorsque cette opération n'a pas pour objet d'augmenter la quantité des denrées vendues, mais -conformément à l'usage normalement pratiqué dans la région ou suivant la nature des produits- d'en améliorer la qualité ;
2° Vente de produits de l'exploitation agricole emballés ou mis en fûts ;
3° Vente d'animaux élevés avec de la nourriture achetée à l'extérieur.
19 c. Produits subissant une préparation ou une manipulation qui en modifie le caractère et qui ne s'impose pas pour les rendre propres à la consommation ou à l'utilisation en l'état (cf. ci-après, n°s 21 à 30 ).
2. Conditions relatives aux locaux.
20L'établissement où sont effectuées les ventes doit être à la fois distinct de l'exploitation agricole et séparé de celle-ci.
Lorsque les ventes répondant aux conditions exposées plus haut sont effectuées dans un établissement distinct de l'exploitation agricole et séparé de celle-ci, l'employeur est tenu d'acquitter la taxe sur les salaires à raison des rémunérations payées à l'ensemble du personnel affecté à cet établissement. Il en est ainsi même lorsque certains employés sont affectés exclusivement à la vente des produits provenant de l'exploitation agricole.
En revanche, la taxe n'est pas due si le magasin ne peut pas être considéré, par son organisation, comme distinct de l'exploitation agricole et, par sa situation géographique, comme se trouvant en dehors de l'ensemble des terrains et constructions dépendant de cette même exploitation.
1 Ces dispositions ne sont pas applicables dans les départements d'outre-mer
2 En revanche, lorsque les autres conditions légales sont satisfaites, les salaires versés par des employeurs agricoles sont retenus dans les bases de la participation à la formation professionnelle continue car le texte qui a institué cette participation se réfère aux salaires définis par l'article 231-1, si bien que les dispositions du 3 du même article sont sans incidence en ce domaine.
3 Les maisons familiales d'apprentissage rural sont devenues les maisons familiales rurales d'éducation et d'orientation.
4 Cette déclaration a été faite, suite à un arrêt du Conseil d'État du 29 juin 1964, req. n° 60231, RO, p. 134, dans lequel la Haute Assemblée avait jugé que les groupements forestiers devaient être regardés comme des organismes professionnels agricoles pour l'application de la taxe sur les salaires.
5 En ce qui concerne les organismes coopératifs, mutualistes et professionnels agricoles, voir ci-dessus n°s 6 à 12 .