SECTION 3 DROITS DE MUTATION À TITRE GRATUIT
SECTION 3
Droits de mutation à titre gratuit
1En cas de transmission d'exploitations exerçant une activité non commerciale, la doctrine administrative prévoyait, pour l'imposition des revenus des années 1996 et antérieures, la possibilité de déduire les droits de succession, de donation ou de donation-partage et les honoraires versés à un notaire en cette circonstance, à condition que les héritiers donataires poursuivent personnellement l'exercice de la profession.
2L'article 18 de la loi de finances rectificative pour 1996, codifié au 7° du 1 de l'article 93 du CGI, permet au repreneur d'une exploitation non commerciale de déduire, pour la détermination du résultat de cette exploitation, les droits de mutation à titre gratuit et les intérêts supportés lors de sa transmission. Cette mesure commentée ci-après s'applique à compter de l'imposition des revenus de l'année 1997. Par voie de conséquence, la doctrine administrative figurant au n° 1 ci-avant est rapportée à compter de la même date.
A. CHAMP D'APPLICATION DE LA MESURE
I. Exploitations concernées
1. Nature de l'activité.
3L'exploitation transmise doit exercer une activité relevant de la catégorie des bénéfices non commerciaux.
2. Forme juridique des exploitations transmises.
4La mutation doit normalement porter sur une exploitation individuelle exercée par le défunt ou le donateur.
Bien que n'étant pas engagés pour l'acquisition d'une exploitation individuelle, les droits de mutation à titre gratuit et les intérêts afférents à la transmission des parts d'une société soumise au régime des sociétés de personnes sont néanmoins déductibles en application de l'article 151 nonies du CGI lorsque l'héritier, le légataire ou le donataire exerce, dans cette société, son activité professionnelle au sens de cet article.
II. Mutations concernées
1. Nature des mutations.
5Les droits de mutation à titre gratuit déductibles en application du 7° du 1 de l'article 93 du CGI s'entendent des droits dus à raison des transmissions d'exploitation par décès ou par donation, quelle que soit la forme de la libéralité (donation-partage, donation simple, donation par contrat de mariage).
6Cette disposition concerne les droits dus par les héritiers, légataires ou donataires, quel que soit leur lien de parenté avec le défunt ou le donateur et même en l'absence d'un tel lien.
2. Objet des mutations.
7La mutation doit porter sur l'ensemble des biens meubles et immeubles -corporels ou incorporels - affectés par le défunt ou le donateur à l'exercice de son activité. Les droits afférents à la mutation de certains éléments seulement de l'exploitation sont donc exclus du champ du dispositif. En outre, la transmission ne doit pas se traduire par la scission de l'exploitation en plusieurs exploitations distinctes.
8Pour les contribuables relevant du régime de la déclaration contrôlée et, pour l'imposition des revenus perçus à compter de 1999, du régime déclaratif spécial, les biens affectés à l'exploitation sont les biens nécessaires à l'exercice de la profession et qui sont inscrits sur le registre des immobilisations et des amortissements. Il s'agit par conséquent aussi bien des éléments affectés par nature à l'exercice de la profession et dont l'inscription sur ledit registre est obligatoire (cf. DB 5 G 2112, n° 11 ) que des éléments non affectés par nature à l'exercice de la profession mais utilisés dans le cadre de celle-ci et que le contribuable a volontairement inscrit sur ce registre (cf. DB 5 G 2112, n° 12 ).
9Sont toutefois exclues du bénéfice du régime de la déduction, en tant qu'éléments non nécessaires à l'exploitation, les valeurs mobilières acquises par les membres des professions libérales au moyen de fonds reçus en dépôt de leurs clients et inscrites sur le registre des immobilisations et des amortissements.
10Les biens qui ne sont pas inscrits sur le registre des immobilisations et des amortissements sont exclus du bénéfice du régime de déduction même s'ils sont utilisés dans le cadre de l'exercice de l'activité.
11Pour les contribuables relevant du régime de l'évaluation administrative 1 ou du régime déclaratif spécial prévu à l'article 102 ter du CGI jusqu'à l'imposition des revenus de 1998, l'affectation des biens à l'exploitation était déterminée en fonction d'une analyse objective du bien et de son utilisation dans le cadre de la profession. Le régime de la déduction bénéficiait donc aux biens qui servaient de support à l'activité professionnelle et qui étaient effectivement utilisés dans le cadre de la profession.
III. Dépenses concernées
1. Droits de mutation et intérêts.
a. Principes.
1° Droits de mutation.
12Les droits dont la déduction est autorisée s'entendent des droits acquittés à raison d'une mutation à titre gratuit (cf. n°s 7 , 8 , 11 et 13 ), que ces droits soient payés immédiatement ou qu'ils fassent l'objet d'un paiement différé ou fractionné au sens de l'article 1717 du CGI et des articles 396-1°, 397-1° et 397 A de l'annexe III au même code.
La taxe de publicité foncière n'est pas visée, elle n'est donc pas déductible. Il en est de même des honoraires versés au notaire.
13En pratique, à l'exception de la taxe de publicité foncière, la totalité des droits de mutation à titre gratuit afférents à l'exploitation transmise est déductible selon les modalités mentionnées aux n°s 16 et 17 . En effet, lorsque l'exploitation transmise est en indivision entre les différents héritiers, légataires ou donataires, les droits de mutation à titre gratuit sont alors déductibles des résultats de l'exploitation imposés au nom de chaque coindivisaire, dès lors que l'un d'entre eux poursuit l'activité dans les conditions mentionnées aux n°s 20 à 25 . Lorsque l'entreprise est transmise à un seul héritier, légataire ou donataire, les droits de mutation à titre gratuit sont déductibles des résultats de l'exploitation imposés à son nom, dès lors que cette personne poursuit l'activité dans les conditions prévues aux n°s 20 à 25 .
14Lorsque, dans le cadre d'une donation simple ou d'une donation-partage, les droits de mutation à titre gratuit sont pris en charge par le donateur, ils ne peuvent être admis en déduction pour la détermination des bénéfices imposables du donataire.
2° Intérêts.
15La déduction des intérêts dus en application des dispositions de l'article 1717 du CGI est expressément prévue au 7° du 1 de l'article 93 du même code.
Les intérêts payés par les bénéficiaires d'une mutation à titre gratuit sont uniquement les intérêts dus à raison du paiement différé ou fractionné des droits, à l'exclusion des intérêts d'emprunts souscrits auprès d'établissements bancaires en vue du paiement immédiat des droits de mutation à titre gratuit.
b. Détermination du montant des droits et intérêts déductibles.
16Pour l'application du régime prévu au 7° du 1 de l'article 93 du CGI, les bénéficiaires de la mutation à titre gratuit doivent, dans la déclaration de succession ou l'acte de donation, évaluer distinctement les biens affectés à l'activité et les autres biens transmis.
17Si les héritiers, légataires ou donataires recueillent à la fois des biens ouvrant droit au régime prévu au 7° du 1 de l'article 93 du CGI et d'autres biens, la part des droits déductibles est déterminée en effectuant une double liquidation.
Le premier calcul est effectué sur la valeur totale de la part transmise.
La seconde liquidation ne tient compte que de la valeur des biens transmis autres que ceux constituant l'exploitation.
Le montant des droits déductibles est égal à la différence entre les deux résultats ainsi obtenus. En pratique, cette solution conduit à considérer que l'actif représenté par l'exploitation transmise à titre gratuit a été soumis aux taux supérieurs du barème progressif des droits de mutation à titre gratuit.
En cas de paiement différé ou fractionné, les intérêts déductibles sont ceux afférents aux seuls droits portant sur les biens constituant l'exploitation.
S'agissant des modalités de calcul, il convient de se reporter à l'exemple figurant en annexe à la présente section.
2. Pénalités.
a. Pénalités non déductibles.
18Les pénalités mises à la charge de l'exploitation pour infraction aux règles d'assiette des différents impôts et taxes ne constituent pas des charges déductibles, au sens de l'article 93 du CGI, pour la détermination des bénéfices imposables de cette exploitation. Il en est ainsi par exemple :
- de l'intérêt de retard en cas d'inexactitudes, insuffisances ou omissions commises de bonne foi dans les déclarations ;
- des intérêts de retard et des majorations exigés dans le cas où la mauvaise foi du contribuable est établie ou s'il y a manoeuvre frauduleuse ;
- des intérêts de retard et des majorations mises à la charge des redevables lorsque le retard dans le règlement des droits est consécutif au dépôt hors délai de la déclaration ou de l'acte qui doit normalement accompagner le paiement ;
- des amendes fixes pour défaut de production ou production tardive de documents ou pour omissions ou inexactitudes relevées dans les documents produits.
b. Pénalités déductibles.
19Sont déductibles l'intérêt de retard visé à l'article 1727 du CGI et la majoration de 5 % prévue à l'article 1731 du code précité lorsqu'intervient la déchéance du crédit prévue à l'article 403 de l'annexe III au même code 2 .
B. CONDITIONS D'APPLICATION DU RÉGIME
I. Engagement de poursuite de l'exploitation
20La déductibilité des droits de mutation à titre gratuit est subordonnée à la condition que l'un au moins des héritiers, donataires ou légataires qui reçoit en pleine propriété, en nue propriété ou en usufruit une fraction de l'exploitation ou des parts d'une société de personnes mentionnée au n° 4 ci-dessus prenne l'engagement de poursuivre personnellement l'exercice de l'activité de cette exploitation pendant au moins cinq ans.
1. Forme de l'engagement.
21Le bénéficiaire de la mutation à titre gratuit doit joindre son engagement de poursuivre l'activité à la déclaration de bénéfices produite au titre de l'année de la transmission. Cet engagement, rédigé sur papier libre, doit comporter les indications suivantes :
- date du début de l'exploitation par l'héritier, le donataire ou le légataire ;
- date à laquelle la mutation à titre gratuit est intervenue ;
- engagement de poursuivre l'exploitation ;
- le cas échéant, mention de l'option pour le paiement différé ou fractionné des droits.
2. Conditions tenant à la poursuite de l'exploitation.
22Le 4° quater du 1 de l'article 39 du CGI, auquel renvoie le 7° du 1 de l'article 93 du même code, subordonne la déduction des droits de mutation à titre gratuit à la condition que l'exploitant prenne l'engagement de poursuivre l'activité en participant de façon personnelle, continue et directe à l'accomplissement des actes nécessaires à cette activité pendant les cinq années suivant la date de transmission de l'entreprise. Le délai de cinq ans pendant lequel l'entreprise est exploitée est calculé de date à date.
23Le respect de cette condition suppose que le repreneur soit, lorsqu'il y a lieu, titulaire des qualifications ou des diplômes requis pour l'exercice de la profession et accomplisse effectivement des actes et diligences caractérisant l'exercice de cette profession.
Bien entendu, la présence de salariés dans l'exploitation ne fait pas obstacle à l'application du régime, dès lors que le repreneur exerce des actes nécessaires à cette activité.
Il n'est pas indispensable que le repreneur accomplisse tous les actes nécessaires à l'activité mais seulement certains d'entre eux à condition qu'il ne s'agisse pas d'actes isolés, mais d'un ensemble d'actes représentatifs d'une des fonctions inhérentes à l'exploitation.
24En tout état de cause, la déduction visée au 7° du 1 de l'article 93 du CGI ne saurait être pratiquée lorsque la gestion de l'exploitation est confiée à un tiers aussi bien en droit - par le biais d'une convention - qu'en fait (cf. toutefois n° 13 en cas de reprise de l'exploitation par une indivision).
En particulier, la poursuite de l'activité sous forme de location-gérance ou en vertu d'un contrat comparable 3 n'est pas susceptible d'ouvrir droit à la déduction des droits de mutation à titre gratuit, y compris lorsque l'activité reprise était déjà exercée sous cette forme par l'exploitant précédent.
Il en va de même lorsque la gestion de l'exploitation a fait l'objet d'une convention aboutissant à en déléguer la responsabilité.
25D'une manière générale, les définitions des notions de participation personnelle, continue et directe aux actes nécessaires à l'activité, retenues pour l'application du 1° bis du I de l'article 156 du CGI, sont transposables. Sur ce point, il conviendra de se reporter à la DB 4 A 3.
1 Le régime de l'évaluation administrative est supprimé à compter de l'imposition des revenus de l'année 1999.
2 Cf. DB 7 A 4321, n°s 56 et suivants.
3 Par contrat comparable, il y a lieu d'entendre toute convention par laquelle le propriétaire d'une exploitation concède à un tiers, moyennant le paiement de redevance ou gratuitement, la jouissance des moyens nécessaires à son exploitation. Tel est le cas du contrat de location de clientèle libérale ou du commodat portant sur une telle clientèle.