SOUS-SECTION 1 CHAMP D'APPLICATION
B. IMPOSSIBILITÉ POUR LE CONTRIBUABLE DE FAIRE ÉTAT DES CESSIONS ET REMBOURSEMENTS D'OR, DE BONS OU DE TITRES EFFECTUÉS DE FAÇON ANONYME
15Aux termes des dispositions de l'article L. 16, alinéa 3, du LPF issues de l'ancien article 176 du CGI :
L'administration « peut demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. En particulier, si le contribuable allègue la possession de bons ou de titres dont les intérêts ou arrérages sont exclus du décompte des revenus imposables en vertu de l'article 157 du même code, l'administration peut exiger la preuve de la possession de ces bons ou titres et celle de la date à laquelle ils sont entrés dans le patrimoine de l'intéressé ».
16L'article 95 de la loi de finances pour 1982, n° 81-1160 du 30 décembre 1981, a complété ces dispositions ainsi qu'il suit :
Le contribuable ne peut pas alléguer la vente ou le remboursement de bons mentionnés à l'article 125-A-III bis- 2° du CGI, quelle que soit leur date d'émission, lorsqu'il n'avait pas communiqué son identité et son domicile fiscal à l'établissement payeur dans les conditions prévues aux 4° et 6° du III bis du même article. Il en va de même pour les ventes d'or monnayé ou d'or en barres ou en lingots de poids et de titre admis par la Banque de France, lorsque l'identité et le domicile du vendeur n'ont pas été enregistrés par l'intermédiaire dans les conditions prévues par l'article 211-A de l'annexe III au CGI (article actuellement abrogé).
Ce texte s'oppose à ce qu'un contribuable puisse valablement alléguer, en réponse à une demande de justifications de l'administration, la vente d'or ou le remboursement de bons dans les situations suivantes :
- en ce qui concerne les cessions d'or, lorsque l'identité et le domicile du vendeur n'ont pas été constatés par l'intermédiaire ;
- en ce qui concerne les bons anonymes, lorsque, lors de la perception des intérêts, le bénéficiaire a opté pour l'anonymat.
Ces dispositions concernent les cessions intervenues à compter du 1 er janvier 1982.
17L'article 95 de la loi de finances pour 1985, n° 84-1208 du 29 décembre 1984, a étendu, à compter du 1 er janvier 1985, les dispositions prévues par l'article 95 de la loi de finances pour 1982 précité aux opérations portant sur les titres de même nature que les bons mentionnés à l'article 125-A III bis -2° du CGI. Il s'agit essentiellement des bons ou contrats de capitalisation visés à l'article 125-0 A du CGI.
18Le décret n° 86-744 du 21 mai 1986 a rétabli l'anonymat sur les transactions d'or monnayé, d'or en barres ou en lingots.
Suite à cette disposition, le I de l'article 27 de la loi de finances rectificative pour 1986 (loi n° 86-824 du 11 juillet 1986) a complété l'article 537 du CGI relatif aux obligations des intermédiaires intervenant dans les transactions d'or en rendant facultative la mention de l'identité du vendeur ou de l'acheteur sur le registre de garantie. En outre, les transactions sur l'or peuvent être effectuées par tout moyen de paiement.
Par ailleurs, le II de l'article 27 de la loi de finances rectificative pour 1986 a modifié l'article L. 16 du LPF relatif aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, en facilitant la preuve de la levée de l'anonymat. Ainsi, les mots : « dans les conditions prévues par l'article 211-A de l'annexe III au Code général des impôts » ont été remplacés par les mots : « ou lorsqu'elles ne sont pas attestées par la comptabilité de l'intermédiaire ».
I. Règles relatives aux cessions Intervenues avant le 1 er janvier 1982
1. Champ d'application.
19Ce régime s'applique aux négociations de valeurs ou aux transactions sur l'or intervenues avant le 1 er janvier 1982.
2. La preuve de la cession.
20Lorsqu'en réponse à une demande de justifications, un contribuable fait état de ces opérations, il lui incombe bien évidemment d'en démontrer la réalité.
a. Levée de l'anonymat.
21Il appartient au contribuable d'autoriser l'organisme financier ou l'intermédiaire qui a participé aux opérations à lever l'anonymat.
Cet anonymat n'est pas d'ordre public ; il ne s'agit que d'une facilité accordée au contribuable par une réglementation particulière. Il peut donc être levé à la demande d'un contribuable qui y trouve son intérêt (cf. CE, arrêt du 5 avril 1978, n° 3011, RJ III, p. 86). Les organismes financiers ou les intermédiaires ne peuvent refuser de donner suite à ces demandes.
b. Justifications à produire.
22Afin de démontrer la réalité de l'opération, le contribuable doit produire des attestations nominatives qui peuvent être délivrées soit au moment où il effectue les opérations d'achat ou de vente des valeurs ou de l'or, soit ultérieurement.
Les attestations doivent être suffisamment précises et circonstanciées pour qu'il soit établi avec certitude que le contribuable :
- a acquis les bons anonymes ou l'or avant la période contrôlée, si nécessaire ;
- a procédé à la vente ou a bénéficié d'un remboursement des bons ou a négocié des avoirs en or au cours de la période examinée (cf. CE, arrêt du 5 avril 1978, n° 3011, déjà cité).
En pratique, les attestations doivent donc comporter :
- le nom du souscripteur, de l'acquéreur ou du vendeur ;
- la nature de l'opération (achat, souscription, vente, remboursement, échange) ;
- la date de l'opération ;
- la qualité et la quantité de biens qui ont fait l'objet des transactions (nature et numéros des bons ou poids des lingots d'or) ;
- le montant de l'opération et le mode de règlement ;
- la référence aux documents tenus par l'établissement financier ou l'intermédiaire au vu desquels l'attestation a été établie de façon à en permettre le contrôle ultérieur.
Bien entendu, le nom et la qualité de la personne qui a signé l'attestation doivent être clairement précisés.
Lorsque le contribuable refuse de fournir ces attestations, ou que ces documents ne présentent pas les précisions susvisées, le service doit rejeter les explications fournies.
c. Le contrôle des attestations.
23Bien entendu, l'administration peut être amenée à contrôler la portée réelle des attestations même formellement correctes. Les agents des Impôts ont la possibilité d'examiner, notamment en exerçant le droit de communication, si les précisions figurant sur l'attestation constituent bien la transcription de données figurant dans les documents comptables ou extra-comptables détenus par l'établissement financier ou l'intermédiaire.
II. Règles relatives aux opérations réalisées depuis le 1 er janvier 1982
1. Opérations concernées.
24 a. La vente et le remboursement intervenus depuis le 1 er janvier 1982 des bons mentionnés au 2° du III bis de l'article 125-A du CGI, quelle que soit la date d'émission de ces bons, et, par conséquent, quel que soit le taux du prélèvement libératoire de l'impôt sur le revenu, sur les produits de placements à revenu fixe qui a été ou qui sera appliqué. Les cas concernés sont les suivants :
- bons du Trésor sur formule ;
- bons de la caisse nationale du crédit agricole ;
- bons d'épargne de La Poste ;
- bons à cinq ans du crédit foncier de France ;
- d'une façon générale, bons de caisse émis par les établissements de crédit. Depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984, sont regroupées sous le vocable « établissements de crédits », les banques, les banques mutualistes et coopératives, les caisses d'épargne et de prévoyance, les caisses de crédit municipal, les sociétés financières et les institutions financières spécialisées (cf. BOI 5 I-4-98 ).
S'y ajoutent, depuis le 1 er janvier 1985, les bons ou contrats de capitalisation visés à l'article 125-0 A du CGI. Ces bons ou contrats de capitalisation sont souscrits auprès des sociétés dites « de capitalisation » moyennant le versement d'un intérêt ou produit qui n'est pas distribué chaque année mais capitalisé jusqu'à l'échéance du bon ou contrat. Le souscripteur s'engage à verser soit une prime unique, soit des primes à versements libres ou périodiques. Les bons ou contrats comportent une possibilité de remboursement anticipé, moyennant une diminution du rendement attendu (cf. BOI 5 I-4-98 ).
b. Les ventes d'or monnayé ou d'or en barres ou en lingots de poids et de titre admis par la Banque de France .
25Ce sont les transactions d'or monnayé ou d'or en barres ou en lingots de poids et de titre admis par la Banque de France qui peuvent être effectuées sous le régime de l'anonymat, à l'exception de celles qui sont réalisées au cours de ventes publiques.
Il s'agit des ventes portant sur :
- les diverses pièces d'or faisant l'objet d'une cotation sur le marché officiel de l'or à Paris ;
- les lingots et barres cotés sur le même marché.
2. Preuves à apporter.
a. La levée de l'anonymat
26Pour qu'elles puissent être invoquées, le cas échéant, par le contribuable, les opérations visées ci-dessus doivent s'accompagner de la levée de l'anonymat. Celle-ci s'effectue selon les modalités suivantes :
1° Pour les bons émis jusqu'au 31 décembre 1997.
• Au regard du prélèvement libératoire de l'impôt sur le revenu.
27Pour pouvoir faire état du remboursement de bons en réponse à une demande de justifications du service, le contribuable doit, aux termes de l'article 95 de la loi de finances pour 1982, avoir indiqué son identité et son domicile fiscal lors du paiement des intérêts.
Cette disposition s'applique quelle que soit la date d'émission du bon et, par conséquent, quel que soit le taux du prélèvement libératoire appliqué aux intérêts versés.
Jusqu'au 31 décembre 1984, les établissements payeurs devaient communiquer à l'administration l'identité et le domicile fiscal des bénéficiaires et le montant des intérêts payés.
Depuis le 1 er janvier 1985, en vertu de l'article 92 de la loi n° 83-1179 du 29 décembre 1983 (codifié à l'article 242 ter -1 du CGI), ils sont tenus de déclarer sur un formulaire unique l'identité et l'adresse des bénéficiaires ainsi que, par nature de revenus, le détail du montant imposable et de l'avoir fiscal ou du crédit d'impôt, le revenu brut soumis à un prélèvement libératoire et le montant dudit prélèvement, le montant des revenus exonérés.
• Au regard du prélèvement d'office sur les bons et titres anonymes.
28Depuis le 1 er janvier 1982, les détenteurs de bons doivent, s'ils veulent conserver l'anonymat acquitter un prélèvement assis sur le montant nominal des bons. Initialement fixé à 1,50 %, son taux a été porté à 2 % à compter du 1 er janvier 1984 (CGI, art. 990 B).
Ce prélèvement résulte d'une option qui s'exerce normalement lors du paiement des intérêts, c'est-à-dire à la même date que celle concernant le prélèvement libératoire d'impôt sur le revenu.
Bien que ces options soient, en principe, distinctes, la logique doit normalement conduire le contribuable à faire un choix identique - au regard de la levée de l'anonymat - pour le prélèvement libératoire d'impôt sur le revenu et pour le prélèvement sur les bons et titres anonymes.
Toutefois, en ce qui concerne les bons émis avant le 1 er janvier 1982 dont les intérêts ont été intégralement précomptés, c'est à la date de remboursement du bon que le détenteur doit faire connaître s'il entend ou non conserver l'anonymat au regard de ce dernier prélèvement.
En effet, l'article 990-C du CGI (issu de l'art. 10-III de la loi de finances pour 1982) prévoit qu'à défaut de versement d'intérêt après le 1 er janvier 1982, c'est au remboursement du bon que le prélèvement est effectué lorsque le bénéficiaire ne fait pas connaître son identité.
Dans cette hypothèse, le contribuable peut donc avoir conservé l'anonymat au moment du paiement des intérêts, acquitté le prélèvement au taux majoré et décidé de lever cet anonymat à l'occasion du remboursement pour échapper au prélèvement sur les bons et titres anonymes. Dans ce cas, il conviendra, par mesure de tolérance 1 de l'autoriser à faire état de ce remboursement.
2° Pour les bons émis à compter du 1 er janvier 1998.
29L'article 97 de la loi de finances pour 1997 n° 96-1181 du 30 décembre 1996, codifiée notamment au 9° du III bis de l'article 125 A du CGI, modifie le régime fiscal des bons ou titres de même nature en réservant le régime fiscal de droit commun, c'est à dire le régime du nominatif, aux bons souscrits dès l'émission à titre nominatif et qui ne font pas l'objet d'une cession à titre onéreux jusqu'à la date de leur remboursement. Ce nouveau dispositif a été commenté au BOI 5 I-4-98 .
Dans la mesure où les dispositions de l'article L. 16 du LPF ne font pas référence au 9° du III bis de l'article 125 A du CGI, l'impossibilité de faire état de la cession ou du remboursement de bons ou titres anonymes n'est pas applicable au bons et contrats de capitalisation visés par l'article 97 de la loi de finances pour 1997.
Il n'en demeure pas moins que lorsque pour expliquer un enrichissement ou un crédit bancaire, un contribuable fait état de négociations sur de tels bons, il doit conformément au dispositif général de l'article L. 16 du LPF, démontrer la réalité de ces opérations (cf. ci-dessus n° 20 à 23 et ci-après n° 31 ).
1 Bien que l'article 95 de la loi de finances pour 1982 ne vise pas la levée de l'anonymat faite au regard de ce prélèvement mais seulement celle prévue à l'article 125-A-III bis -4° et 6° du CGI en ce qui concerne le prélèvement libératoire d'impôt sur le revenu.