CHAPITRE 4 DISTRIBUTIONS EFFECTUÉES PAR LES SOCIÉTÉS COOPÉRATIVES
CHAPITRE 4
DISTRIBUTIONS EFFECTUÉES
PAR LES SOCIÉTÉS COOPÉRATIVES
1Le présent chapitre a pour objet d'exposer les dispositions particulières relatives au régime fiscal des distributions effectuées par les sociétés coopératives.
2Il est rappelé, au préalable, qu'aux termes de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, les sociétés coopératives ont essentiellement pour objet :
- de réduire, au bénéfice de leurs membres et par l'effort commun de ceux-ci, le prix de revient et, le cas échéant, le prix de vente de certains produits et services ;
- d'améliorer la qualité marchande des produits fournis à leurs membres ou de ceux produits par ces derniers et livrés aux consommateurs.
3Avant l'entrée en vigueur de la loi n° 92-643 du 13 juillet 1992 relative à la modernisation des entreprises coopératives les sociétaires devaient avoir la double qualité d'associés et de coopérateurs. Les coopératives ne pouvaient, en principe, admettre les tiers à bénéficier de leurs services, à moins que les lois particulières qui les régissaient ne les y autorisent.
4Elles ne pouvaient servir à leur capital qu'un intérêt fixe dont le taux déterminé par leurs statuts étaient au plus égal à 8,5 % l'an.
5La loi n° 92-643 du 13 juillet 1992 déjà citée a eu pour objet essentiel de renforcer les fonds propres des sociétés coopératives en leur donnant la faculté d'ouvrir leur capital à des associés non-coopérateurs.
Ainsi, les coopératives régies par la loi de 1947 peuvent désormais admettre, sur option statutaire et dans certaines limites, des associés non coopérateurs dont la participation est limitée (cf. 4 H 1121, n°s 9 à 11 ).
6Par ailleurs, en application de la loi n° 87-416 du 17 juin 1987 sur l'épargne, les sociétés coopératives peuvent émettre des certificats coopératifs d'investissement dont la rémunération doit au moins être égale à celle versée aux parts sociales.
De même, pour faciliter la collecte de fonds auprès des associés non coopérateurs et des coopérateurs eux-mêmes, la loi du 13 juillet 1992 rend plus attractive l'épargne investie dans les coopératives :
- le taux maximum de rémunération du capital est aligné sur le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées publié par le ministre de l'économie. Toutefois, le total des intérêts versés par les sociétés coopératives ouvrières de production (SCOP) ne peut excéder ni le total des dotations aux réserves, ni les sommes allouées aux salariés au titre de la ristourne ;
- les coopératives, à l'exclusion des coopératives agricoles, artisanales, maritimes et de transports, peuvent émettre des parts à intérêt prioritaire sans droit de vote ; toutefois, ces parts ne peuvent être souscrites que par des associés non coopérateurs ;
- les parts à avantages particuliers dont les avantages sont déterminés par les statuts, peuvent être souscrites par tous les associés ;
- les établissements de crédit coopératif ou mutualiste peuvent émettre des certificats coopératifs d'associés (CCA) ; ces titres ne peuvent être détenus que par les associés de ces établissements et par les sociétaires des coopératives associées ;
- les certificats coopératifs d'investissement (CCI), les CCA et les parts à intérêt prioritaire ne peuvent représenter ensemble plus de 50 % du capital ;
- les coopératives autres que les coopératives agricoles, maritimes, artisanales de transports et les SCOP peuvent revaloriser les parts sociales en incorporant une fraction des réserves ;
- les statuts des SCOP et des coopératives agricoles, maritimes, artisanales et de transports peuvent prévoir l'attribution à l'associé sortant, en sus de son remboursement de la valeur nominale de ses parts, d'une fraction des réserves dans la limite du barème en vigueur fixant le taux de majoration applicable aux rentes viagères.
7Aux termes de l'article 206-1 du CGI, les sociétés coopératives et leurs unions sont en principe, quel que soit leur objet, passibles de l'impôt sur les sociétés.
8Certaines bénéficient, toutefois, d'exonérations instituées en leur faveur, sous certaines conditions, par l'article 207-1, 2°, 3°, 3° bis , 4°, 7° et 8° du code précité.
9Les caractères distinctifs des organismes qui ont adopté le statut de coopérative ainsi que leur régime fiscal au regard de l'impôt sur les sociétés sont étudiés de manière détaillée dans la division H de la présente série (cf. 4 H 112 , H 1312 , H 1322 et H 138 ) à laquelle il convient de se reporter.
10Les distributions des sociétés coopératives -que ces sociétés soient ou non effectivement assujetties à l'impôt sur les sociétés- doivent, en droit strict, être soumises aux dispositions relatives à l'avoir fiscal et au précompte dans les conditions de droit commun.
En effet, les « dividendes » distribués par les sociétés françaises soumises au régime fiscal des sociétés de capitaux donnent droit, en règle générale, au profit des actionnaires ou associés ayant leur domicile réel ou leur siège social en France à un avoir fiscal uniformément égal à la moitié des sommes reçues, quelle que soit l'origine de ces sommes.
En contrepartie, les sociétés distributrices doivent acquitter un précompte égal au montant de l'avoir fiscal sur toutes les distributions de dividendes réputées prélevées, du point de vue fiscal, sur des bénéfices n'ayant pas supporté l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun ou sur des résultats d'exercices clos depuis plus de cinq ans (cf. 4 J 132 ).
11De même, lorsqu'ils ont le caractère de dividendes, les produits distribués par les coopératives agricoles et leurs unions (rémunération des parts des non-coopérateurs ou des certificats coopératifs d'investissement, remboursements de parts, etc.) autres que l'intérêt statutaire servi aux parts des coopérateurs, ouvrent droit à l'avoir fiscal et donnent lieu, le cas échéant, au précompte dans les conditions de droit commun.
12Les dividendes redistribués par les sociétés coopératives et leurs unions sont soumis à l'impôt de distribution dans les conditions de droit commun.
La redistribution ouvre droit elle-même à l'avoir fiscal. La société coopérative délivre aux bénéficiaires des certificats d'avoir fiscal dans les conditions prévues aux articles 80 et 81 de l'annexe II du CGI. La redistribution fait l'objet d'un paiement distinct.
En outre, si la société coopérative bénéficie du régime des sociétés mères et filiales, le précompte éventuellement dû (lors de la redistribution) est diminué du montant des avoirs fiscaux reçus de la filiale dans les conditions prévues à l'article 146-2 du CGI (cf. 4 J 1322, n°s 36 à 41).
13Enfin, l'article 9 de la loi n° 91-5 du 3 janvier 1991 qui a aménagé les dispositions qui régissent les organismes coopératifs agricoles permet désormais aux SICA de distribuer à leurs associés, en sus du versement des ristournes et des intérêts statutaires, tout ou partie des dividendes qu'elles ont reçu au titre de leurs participations.
Sur le plan fiscal, ces redistributions de dividendes sont soumises aux mêmes règles que celles applicables aux distributions de dividendes.
14Cependant diverses mesures dérogatoires ont pour objet d'exclure du régime fiscal de droit commun les distributions opérées par certaines sociétés coopératives.
Ces dispositions particulières sont étudiées dans les trois sections suivantes qui concernent respectivement :
- l'intérêt statutaire alloué aux parts sociales ;
- la répartition des excédents de bénéfices (ristournes) ;
- les dispositions applicables en cas de remboursement d'apports en cours de société, de dissolution ou de transformation des sociétés coopératives.
SECTION 1
Intérêt statutaire alloué aux parts sociales
1Avant l'entrée en vigueur de la loi n° 92-643 du 13 juillet 1992 relative à la modernisation des entreprises coopératives, l'intérêt statutaire que les sociétés coopératives pouvaient verser à leurs sociétaires à l'exclusion de tout dividende était limité en principe à 8,5 % l'an à l'exception des sociétés coopératives agricoles dont les statuts devaient prévoir la limitation à 6 % net au maximum de l'intérêt versé au capital souscrit par les associés coopérateurs.
C'est l'assemblée générale qui décidait, en fonction des résultats de l'exercice clos, s'il y avait lieu d'attribuer un intérêt au capital et qui, le cas échéant, en fixait le taux dans la limite de 8,5 %.
En application de l'article 10 de la loi n° 92-643 du 13 juillet 1992 déjà citée, le taux maximum de rémunération du capital est désormais aligné sur le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées publié par le ministre de l'économie.
Dans les coopératives agricoles les statuts peuvent toutefois fixer le taux de l'intérêt versé aux parts des associés non-coopérateurs à deux points au-dessus de celui des parts des associés coopérateurs (art. L. 522-4, al. 3 du code rural).
L'intérêt statutaire ne peut être servi que si des excédents ont été réalisés au cours de l'exercice. Toutefois, les statuts peuvent prévoir qu'en cas d'insuffisance des résultats d'un exercice, les sommes nécessaires pour parfaire cet intérêt sont prélevées soit sur les réserves, soit sur les résultats des exercices suivants, sans toutefois aller au-delà du quatrième 1 .
2Cet intérêt doit, en droit strict, être soumis aux dispositions relatives à l'avoir fiscal et au précompte dans les conditions de droit commun.
3Toutefois, eu égard au caractère particulier de certains des produits en cause, il est admis que les dispositions susvisées ne sont pas applicables aux intérêts statutaires versés par certaines sociétés coopératives.
4Après avoir rappelé les règles fiscales de droit commun applicables aux intérêts statutaires versés par la généralité des sociétés coopératives, on examinera les dispositions particulières intéressant certaines de ces sociétés.
La présente section est complétée de précisions relatives d'une part aux obligations des sociétés coopératives et, d'autre part, à la situation des bénéficiaires des intérêts versés.
A. RÈGLES DE DROIT COMMUN
5Les intérêts statutaires alloués à leurs sociétaires par les sociétés coopératives ou unions de coopératives sont, en principe, soumis en tous points au régime fiscal des distributions de dividendes faites par des sociétés françaises. Notamment le précompte est exigible dans la mesure où l'imputation fiscale desdits intérêts est opérée sur des sommes n'ayant pas supporté l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun ou qui ont été soumises à cet impôt au titre d'exercices clos depuis plus de cinq ans. Corrélativement, les intérêts statutaires versés à leurs membres par les sociétés coopératives ouvrent droit à l'avoir fiscal.
B. DISPOSITIONS PARTICULIÈRES À CERTAINES SOCIÉTÉS COOPÉRATIVES
I. Sociétés coopératives agricoles
6Le régime juridique et le régime fiscal des sociétés coopératives agricoles sont étudiés à la division H de la présente série à laquelle il convient de se reporter ( 4 H 1312 ).
7L'intérêt statutaire versé par les sociétés coopératives agricoles et leurs unions bénéficie d'un régime particulier (cf. 4 J 1311, n° 3) :
- les sociétés coopératives agricoles et leurs unions sont dispensées d'acquitter le précompte même lorsque les sommes versées proviennent de bénéfices exonérés d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 207-1 (2° et 3°) du CGI ;
- corrélativement, les bénéficiaires des intérêts mis en paiement ne peuvent bénéficier de l'avoir fiscal.
Toutefois, les sociétés coopératives et leurs unions peuvent renoncer à ce régime. La renonciation doit présenter un caractère irrévocable et prend effet à compter de la date de la réception par le service des impôts du lieu du principal établissement de la coopérative d'une lettre de renonciation expresse. Dans ce cas, la distribution d'intérêt ouvre droit à l'avoir fiscal dans les conditions de droit commun et donne lieu, le cas échéant, au paiement du précompte.
II. Organismes d'habitation à loyer modéré
8L'intérêt statutaire versé par les sociétés anonymes coopératives de production d'HLM, qui sont en droit de bénéficier de l'exonération d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 207-1-4° du CGI et qui se conforment pour leurs distributions aux dispositions légales ou réglementaires qui les régissent, n'ouvre pas droit à l'avoir fiscal. Corrélativement ces sociétés sont dispensées d'acquitter le précompte.
C. OBLIGATIONS DES SOCIÉTÉS COOPÉRATIVES
9Les sociétés coopératives sont en principe tenues d'établir dans les conditions de droit commun le modèle unique de déclaration des opérations sur valeurs mobilières prévu à l'article 242 ter du CGI, pour les paiements d'intérêts de parts faits à leurs sociétaires (cf. 5 A 61).
Cependant, les sociétés coopératives payant elles-mêmes les intérêts de leurs parts sont dispensées d'établir des relevés lorsque le montant des intérêts payés au sociétaire n'excède pas 40 F. La mesure est applicable à tous les organismes de coopération et de mutualité soumis au contrôle des agents des administrations financières.
1 Il est à noter qu'aux termes de l'article R* 523-2 du Code rural, les statuts des sociétés coopératives agricoles peuvent prévoir que les sommes nécessaires pour compléter l'intérêt statutaire d'un exercice sont prélevées sur une provision spécialement constituée à cet effet par l'assemblée générale, par prélèvement sur les excédents du ou des exercices antérieurs.