Date de début de publication du BOI : 07/06/1999
Identifiant juridique : 4B3511
Références du document :  4B351
4B3511
Annotations :  Lié au BOI 4B-1-01
Lié au Rescrit N°2010/63
Supprimé par le BOI 4B-1-07

SECTION 1 TRANSMISSION D'UNE ENTREPRISE INDIVIDUELLE PAR VOIE D'APPORT EN SOCIÉTÉ (CGI, ART 151 OCTIES)

SECTION 1  

Transmission d'une entreprise individuelle par voie d'apport en société

(CGI, art 151 octies )

1Le développement et la transmission d'une entreprise individuelle peut rendre nécessaire la transformation de cette entreprise en société, notamment pour permettre de faire appel à des capitaux extérieurs.

Or, la transformation d'une entreprise individuelle en société entraîne la taxation immédiate des plus-values constatées à l'occasion de la réalisation de l'apport et cette imposition est de nature à faire obstacle à la réalisation de l'opération.

Pour remédier à cette situation, l'article 12 de la loi de finances pour 1981, n° 80-1094 du 30 décembre 1980 -codifié aux articles 151 octies et 809-I bis du CGI-, a institué un mécanisme inspiré pour partie du régime des fusions défini à l'article 210-A du CGI et qui permet d'éviter l'imposition immédiate des plus-values constatées du fait de l'apport en société des éléments de l'actif affectés à une activité professionnelle exercée à titre individuel.

2Le nouveau régime opère une distinction entre les plus-values afférentes à des biens non amortissables et celles afférentes aux biens amortissables qui sont déterminées de manière séparée :

- l'imposition des plus-values sur biens non amortissables est reportée au moment de la transmission à titre onéreux des droits sociaux reçus en rémunération de l'apport de l'entreprise ou jusqu'à la date de cession de ces biens si elle est antérieure ;

- l'imposition des plus-values sur biens amortissables (matériels, équipements, immeubles, etc.) est effectuée au nom de la société bénéficiaire de l'apport ; elle est étalée sur une période de cinq ans comme dans le régime de faveur des fusions.

En contrepartie, les amortissements et les plus-values ultérieurs sont calculés par la société d'après la valeur attribuée aux immobilisations lors de l'apport.

Enfin, le droit de mutation afférent à la prise en charge du passif dont sont grevés les apports énumérés à l'article 809-I-3° du CGI est ramené à 8,60 %.

3Ce régime, qui concerne les apports réalisés à compter du 1er avril 1981, est applicable sur simple option du contribuable en cas de transformation d'une entreprise individuelle en société de personnes ou à responsabilité limitée à gérance majoritaire ou encore en cas de constitution d'une société civile à objet professionnel ; cette société ne doit pas être préexistante. Dans les autres cas, et notamment s'il y a apport à une société préexistante ou à une société anonyme, un agrément préalable est nécessaire pour constater que l'opération répond à une nécessité économique et n'est pas uniquement réalisée à des fins fiscales.

Corrélativement, les dispositions de l'article 41 du CGI en tant qu'elles prévoyaient la non-imposition des plus-values constatées en cas de transformation d'une entreprise individuelle en société de famille (ainsi que les dispositions de l'article 93 quater-II du même code relatives aux apports de clientèle ou d'éléments d'actif à des sociétés civiles professionnelles) ont cessé de s'appliquer aux opérations réalisées à compter du 1er avril 1981.

4Par ailleurs, l'article 24 de la loi de finances rectificative pour 1994 (n° 94-1163 du 29/12/1994) a aménagé le dispositif prévu à l'article 151 octies en permettant à l'apporteur d'opter pour l'imposition immédiate de la plus-value à long terme globale afférente aux éléments amortissables au taux prévu au 1 du I de l'article 39 quindecies du CGI, pour les apports réalisés à compter du 1er janvier 1995 (cf. DB 4 B 3512 n° 19 ).

L'article 25-I-2° de la même loi a institué un obligation déclarative annuelle à la charge de l'apporteur consistant en la production d'un état annexé à sa déclaration annuelle de revenus et comportant les éléments nécessaires au suivi du report d'imposition, pour les apports réalisés à compter du 1er janvier 1994 (cf. DB 4 B 3511, n° 15 ).

5Les dispositions de l'article 151 octies sont également applicables à l'apport à une société par un exploitant agricole individuel, de l'ensemble des éléments de l'actif immobilisé, à l'exception des immeubles, si ceux-ci sont immédiatement mis à dispositions de la société bénéficiaire de l'apport dans le cadre d'un contrat écrit et enregistré visé aux articles L. 411-1, L. 411-2 et L. 416-1 du code rural (ces dispositions s'appliquent aux apports réalisés à compter du 1er janvier 1996 ; Loi de finances rectificative pour 1995, art. 31, cf. DB 4 B 3511 n° 15 ).

6Les règles d'imposition des plus-values afférentes aux immobilisations amortissables et non amortissables, prévues en cas d'apport d'une activité individuelle en société réalisé dans le cadre de l'article 151 octies, ont été étendues par l'article 28-III-1° de la loi de modernisation de l'agriculture n°95-95 du 1er février 1995 aux contrats de crédit-bail mobilier et immobilier, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1995 (cf. B 3512 n° 32 et suiv. ).

SOUS-SECTION 1  

Champ d'application des dispositions de l'article 151 octies du CGI

1Le champ d'application du régime de report d'imposition des plus-values constatées en cas d'apport d'une entreprise individuelle à une société est délimité en fonction de la qualité de l'apporteur, du contenu des apports et de la forme de la société bénéficiaire de la transmission.

  A. QUALITÉ DE L'APPORTEUR

2Pour entrer dans le champ d'application de l'article 151 octies du CGI, les apports doivent être réalisés par des contribuables exerçant une profession, c'est-à-dire qui réalisent habituellement des opérations pour leur compte et dans un but lucratif. Cette profession peut être industrielle, commerciale ou artisanale, libérale ou agricole.

D'une manière générale, la profession consiste dans l'exercice à titre habituel et constant d'une activité de nature à procurer à celui qui l'exerce le moyen de satisfaire aux besoins de l'existence. Bien entendu, cette profession doit être effectivement exercée, ce qui suppose l'accomplissement d'actes précis et de diligences réelles. Pour bénéficier des dispositions de l'article 151 octies, l'apporteur doit donc gérer une entreprise (ou un cabinet libéral, ou une exploitation agricole).

En conséquence, ne sont pas considérés comme exerçant une véritable activité professionnelle, notamment les loueurs en meublé n'ayant pas la qualité de loueur professionnel au sens de l'article 151 septies dernier alinéa du CGI 1 , les loueurs d'immeubles industriels ou commerciaux munis de leurs équipements, les particuliers qui se livrent par l'intermédiaire de sociétés de gestion, à la location de wagons, containers, etc., ainsi que les loueurs de fonds de commerce.

Toutefois, l'apport d'un fonds de commerce à la société qui l'exploite en vertu d'un contrat de location-gérance peut bénéficier des dispositions de l'article 151 octies si les conditions requises sont satisfaites (cf. ci-dessous n° 16 ).

3Il n'est pas exigé que l'apporteur soit assujetti à un régime réel d'imposition 2 . Bien entendu l'activité doit être exercée à titre individuel ; les dispositions de l'article 151 octies ne peuvent trouver à s'appliquer aux apports effectués par des personnes morales.

4Ainsi, la question s'est posée de savoir si dans le cas où deux vétérinaires ayant exercé leur activité libérale pendant de nombreuses années en société de fait non immatriculée au registre du commerce qui ont constitué entre eux une société civile professionnelle ayant pris effet le 1er janvier 1987 et à laquelle ils ont apporté leur activité libérale, l'administration pouvait considérer comme « personne morale » une société de fait, exerçant depuis une quinzaine d'années, sans aucun statut et non immatriculée au registre du commerce, alors qu'une telle société de fait n'avait pas, juridiquement, de personnalité morale et ne représentait que la juxtaposition de deux affaires individuelles.

Dans la réponse ministérielle n° 21766 faite à M. BARRAU, député (JO, débats AN 2 avril 1990, p. 1509) il a été répondu que les articles 1873 du code civil et 238 bis L du code général des impôts appliquent à la société de fait les règles de droit privé et fiscal des sociétés en participation, c'est-à-dire des sociétés de droit dont elle présente les caractéristiques (art. 1871-1 du code civil). En conséquence, l'article 151 octies du code général des impôts, réservé aux apports d'entreprises individuelles, ne s'applique pas au cas particulier. L'opération décrite semble s'analyser en la transformation d'une société de fait en une société civile professionnelle. Au regard du droit privé, cette opération emporte création d'un être moral nouveau. Toutefois, si elle ne s'accompagne pas de modifications importantes du pacte social, il est possible, sous certaines conditions, de ne pas tirer toutes les conséquences fiscales qui s'attachent habituellement à une telle opération. En effet, il est admis, en matière d'impôts directs, de ne procéder ni à la taxation immédiate des bénéfices réalisés avant la transformation et non encore imposés, ni à l'imposition des plus-values latentes sur les éléments inscrits à l'actif du bilan fiscal de la société créée de fait, si ces éléments sont repris pour la même valeur à l'actif de la société transformée.

5Toutefois, l'article 151 octies-lV, issu de l'article 31 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 (JO du 5 janvier 1991), prévoit que les dispositions des I et II de l'article 151 octies s'appliquent aux plus-values dégagées à raison des éléments d'actif immobilisés apportés dans le cadre d'une fusion par des sociétés civiles professionnelles ainsi qu'aux plus-values résultant pour les associés de ces sociétés de l'attribution qui leur est faite des parts de la société absorbante.

Cas particuliers.

1. Apport réalisé par une indivision successorale.

6L'apport d'une entreprise exploitée par plusieurs héritiers en indivision successorale à une société de droit peut être placé sous le régime prévu à l'article 151 octies du CGI, sous réserve, bien entendu, que l'ensemble des conditions mises à l'application de ce régime soient remplies. Lorsque ce régime est applicable sur option, celle-ci doit être formulée par chaque héritier apporteur. Elle vaut engagement de respecter les obligations prévues à l'article 151 octies (cf. RM Gilbert Gantier, JO, déb. AN du 13 décembre 1982, n°s 11962 et 18889, p. 5145).

Le report d'imposition et l'étalement portent alors sur les plus-values dégagées sur les éléments figurant au bilan de l'entreprise exploitée par l'indivision 3 .

Dans cette hypothèse, la circonstance que les plus-values nées de l'inscription d'éléments affectés à l'activité professionnelle de l'exploitant décédé au bilan de l'indivision successorale (cf. ci-dessous n° 19 ) ont elles-mêmes été soumises aux dispositions de l'article 151 octies ne fait pas obstacle à l'application du régime spécial en cas d'apport de ces éléments à une société de droit. Dans cette situation, les plus-values sur éléments non amortissables dont l'imposition est reportée lors de la transmission consécutive au décès continuent d'être reportées jusqu'à revente, par la société de droit, des biens apportés ou jusqu'à revente par l'héritier de sa participation dans la société de droit.

2. Apport d'une activité antérieurement transmise sous le bénéfice des dispositions de l'article 41 du CGI.

7Lorsque, après transmission à titre gratuit de l'entreprise, l'exploitation est continuée conjointement par plusieurs héritiers ou donataires, la plus-value placée sous le régime de l'article 151 octies comprend, en outre, la plus-value constatée lors du décès ou de la donation.

  B. CONTENU DE L'APPORT

8L'apport doit, ainsi que le précise l'article 151 octies, porter sur l'ensemble des éléments de l'actif immobilisé affectés à l'exercice de l'activité professionnelle, ou sur une branche complète d'activité.

Les éléments de l'actif immobilisé sont les biens et valeurs destinés à rester durablement sous la même forme dans l'entreprise.

Trois conditions doivent donc être remplies :

- les biens doivent être inscrits à l'actif de l'entreprise ;

- les biens doivent être affectés à l'exploitation ;

- l'ensemble de ces biens (ou une branche complète d'activité) doit être apporté à une société.

1. Inscription à l'actif.

9a. Cette condition est notamment respectée lorsque les biens figurent :

- pour les entreprises industrielles, commerciales ou artisanales soumises au régime du bénéfice réel normal, sur le bilan joint à la déclaration de résultats (tableau n° 2050) ;

- pour les entreprises industrielles, commerciales ou artisanales soumises au régime simplifié d'imposition, sur le tableau des immobilisations et des amortissements de la déclaration de résultats (déclaration n° 2031), ou en ce qui concerne les exercices ouverts à dater du 1er janvier 1983, sur le bilan abrégé ;

- pour les entreprises industrielles, commerciales ou artisanales relevant du régime du forfait (jusqu'en 1998) sur le tableau d'immobilisations et d'amortissements de la déclaration n° 951 ou 951 M.

10  b. Toutefois, s'agissant des entreprises commerciales, industrielles ou artisanales, l'attention du service est appelée sur le fait que le critère retenu d'affectation à l'exploitation (cf. n° 11 ci-après) est indépendant de l'inscription ou de la non inscription du bien au bilan de l'entreprise. En effet, l'exploitant individuel, lorsqu'il est soumis à un régime de bénéfice réel normal, peut inscrire à son bilan des biens non affectés à l'exploitation ; les plus-values dégagées lors de l'apport en société, de tels biens ne peuvent pas bénéficier des dispositions de l'article 151 octies du CGI.

11c. Par ailleurs, il peut arriver que l'exploitant apporte à la société des biens immobiliers ou autres qui ne figurent pas à l'actif de son entreprise et qu'il avait conservés dans son patrimoine privé (cas notamment des terres agricoles) [cf. 5 E 3223, n°s 80 et suiv.]. Dans cette situation, les plus-values afférentes à ces biens ne peuvent pas, non plus, être placées sous le régime de l'article 151 octies du CGI.

1   L'article 151 septies, dernier alinéa du CGI définit les loueurs en meublé professionnels comme ceux qui sont inscrits au registre du commerce en cette qualité et qui réalisent plus de 150 000 F de recettes annuelles ou retirent de cette activité au moins 50 % de leurs revenus (cf. ci-avant DB 4 B 212, n°s 26 et suiv. ).

2   L'article 151 octies concerne donc notamment les forfaitaires (jusqu'en 1998) et les contribuables placés sur option sous le régime simplifié d'imposition dans le cas où ceux-ci ne pourraient pas bénéficier de l'exonération prévue à l'article 151 septies du CGI (cf. DB 4 B 212 ).

3   Solution applicable, bien entendu, si l'opération dégage des plus-values. Dans le cas où il n'y a pas de modification des valeurs comptables.