Date de début de publication du BOI : 07/06/1999
Identifiant juridique : 4B123
Références du document :  4B123
Annotations :  Lié au Rescrit N°2009/54

SECTION 3 CESSION D'ÉLÉMENTS DE L'ACTIF IMMOBILISÉ

  III. Échange d'éléments de l'actif

30  Tout échange, même sans soulte, par une entreprise, d'éléments de son actif immobilisé contre d'autres éléments présente le caractère d'une opération de vente suivie d'un achat. Il s'ensuit que la plus-value (ou moins-value) résultant éventuellement de cette opération -et qui est calculée par différence entre la valeur réelle du bien reçu en échange et la valeur comptable du bien cédé- doit être prise en compte pour la détermination des résultats imposables de l'exercice en cours à la date de l'échange, conformément aux dispositions de l'article 38 du CGI.

Échange sans soulte de zones de ramassage réalisé par les entreprises laitières.

31La règle exposée ci-dessus est applicable, de plein droit, aux échanges de zones de ramassage de lait auxquels procèdent certaines entreprises laitières. De tels échanges portant sur des éléments incorporels du fonds de commerce, les plus-values correspondantes entrent normalement dans le champ d'application des articles 39 duodecies à 39 quindecies du CGI.

Toutefois, les échanges dont il s'agit sont parfois réalisés à l'instigation des pouvoirs publics qui, en appliquant une politique d'harmonisation des zones de collecte, recherchent une amélioration de productivité de l'industrie laitière. Or, une taxation immédiate et systématique, même à taux réduit, des plus-values -le plus souvent élevées- acquises par les éléments faisant l'objet de semblables échanges pourrait aller à l'encontre de ces objectifs.

Aussi a-t-il été décidé d'adopter en ce qui concerne les échanges allant dans le sens de ces mêmes objectifs, une mesure de tempérament inspirée de la solution relative aux échanges sans soulte d'actions figurant à l'actif d'entreprises (cf. ci-dessous n° 69 ). Il est rappelé que cette solution consiste - lorsque de tels échanges sans soulte sont en réalité le moyen juridique de parvenir à une meilleure spécialisation ou à une concentration d'entreprises- à autoriser chacun des coéchangistes à ne pas constater la plus-value réalisée à l'occasion de l'échange, en inscrivant à son bilan les éléments reçus en échange pour la même valeur comptable que celles des éléments remis à l'échange.

Une solution identique doit donc être appliquée aux entreprises laitières qui procèdent à un échange sans soulte de zones de ramassage, à la condition que l'opération donne lieu à l'établissement, par les services centraux du ministère de l'Agriculture (direction de la production, des marchés et des échanges extérieurs) d'une attestation spécifiant que l'échange considéré a été conclu en vue de favoriser une rationalisation de la gestion respective des entreprises intéressées.

Cette attestation est transmise, par l'intermédiaire des directeurs départementaux de l'Agriculture, aux directions des Services fiscaux dont dépendent les entreprises en cause.

Le service doit donc s'abstenir de procéder à la taxation des plus-values réalisées par chacune des entreprises à l'occasion des opérations d'échanges effectuées et justifiées dans de telles conditions, à la condition, bien entendu, que ces entreprises ne constatent pas lesdites plus-values et inscrivent à leur bilan les zones de ramassage reçues en échange pour la valeur comptable que comportaient les zones remises en échange.

  IV. Renonciation à un élément incorporel du fonds de commerce

32La renonciation, moyennant une redevance ou une indemnité, à un droit commercial ou à un élément incorporel de l'actif d'une entreprise doit être assimilée à une cession entrant dans les prévisions de l'article 38 du CGI.

Ainsi, dans le cas d'une société concessionnaire de la distribution de l'eau qui, moyennant une redevance annuelle, a fait apport à un syndicat de communes des biens meubles et immeubles lui appartenant et affectés par elle à l'exploitation des concessions dont elle était titulaire, il a été jugé :

- d'une part, que ceux des éléments apportés qui provenaient du domaine concédé et seraient revenus gratuitement aux collectivités concédantes en fin de concession doivent être regardés, au même titre que les éléments du domaine privé, comme faisant partie de l'actif immobilisé de l'entreprise, dès lors qu'ils ont été régulièrement portés en comptabilité ;

- d'autre part, que, dans la mesure où elle compense la renonciation de l'entreprise à se prévaloir à l'avenir des droits qu'elle tenait des concessions antérieures, la redevance en cause rémunère l'abandon d'un droit d'exploitation rattachable aux éléments incorporels de son actif immobilisé ;

- et qu'en conséquence, la plus-value née de l'abandon dudit actif a, dans les deux cas, le caractère d'une plus-value de cession (CE, arrêt du 24 mars 1965, req. n° 52147, RO, p. 317).

33 Une situation d'exclusivité qu'elle soit contractuelle ou de fait, ne confère à l'entreprise qui en bénéficie un droit susceptible d'être considéré comme un élément incorporel de son actif immobilisé que si, notamment, elle est susceptible de se poursuivre normalement pendant une assez longue période.

Tel n'est pas le cas d'un contrat de distribution exclusive de films d'une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction auquel il peut être mis fin sans indemnité le 31 décembre de chaque année et qui ayant pris effet le 1er janvier 1963, a été résilié en juin 1967. L'indemnité de résiliation a pour objet de compenser la perte de recettes subie jusqu'au 31 décembre 1967 et a le caractère d'une recette d'exploitation (CE, arrêt du 13 décembre 1978, req. n° 6920).

En revanche, l'indemnité qu'une entreprise reçoit du nouveau bénéficiaire de l'exclusivité de la fourniture d'un client important présente, en raison de l'assurance et de la stabilité relative d'un certain volume de vente durant une assez longue période, le caractère d'un prix de cession d'un élément incorporel de l'actif immobilisé soumis au régime des plus-values de l'article 39 duodecies du CGI (CE, arrêt du 9 mars 1979, req. n° 8911).

La seconde espèce peut être rapprochée des arrêts du 6 mars 1974, requête n° 90039, et du 19 mars 1975 ; requête n° 95677, la première de l'arrêt du 21 décembre 1977, requête n° 3997.

Arrêt du 6 mars 1974, requête n° 90039, RJ n° II, page 56.

34Une solution identique à celle de l'arrêt du 9 mars 1979 avait été retenue à l'égard d'une société de publicité qui, organisant des salons d'exposition, a conclu avec une entreprise concurrente un accord par lequel elle a décidé, moyennant le versement d'une indemnité, de renoncer à participer, pendant dix ans, à l'organisation d'expositions dans un secteur commercial déterminé ainsi qu'à utiliser le sigle sous lequel le salon était organisé et s'est, d'autre part, engagée à inviter sa clientèle d'exposants à participer aux nouveaux salons qui seraient organisés désormais par son cocontractant.

Il a été jugé que, par cette convention, la société s'était privée durablement d'une source de profits et avait cédé la clientèle qu'elle s'était constituée dans cette branche de son activité et qu'en conséquence la somme perçue devait être regardée comme compensant, pour la société cédante, non une perte temporaire de recettes, mais l'abandon ou la cession d'éléments incorporels de son actif. Le profit ainsi réalisé. entre donc dans le champ d'application du régime particulier d'imposition des plus-values.

Arrêt du 19 mars 1975, requête n° 95677, RJ n° II, page 47.

35La Haute Assemblée s'est également prononcée sur le cas d'un contribuable qui, étant titulaire d'un contrat conclu pour deux ans et renouvelable par tacite reconduction en vertu duquel une grande marque connue lui concédait l'exclusivité de la distribution de ses produits dans une grande ville, renonce, par un avenant, à cette clause d'exclusivité et s'oblige, en cas de vente de son droit au bail, à interdire pendant deux ans à l'acquéreur de vendre des articles de la même catégorie.

Au cas particulier, il a été jugé que, par cette convention, l'intéresse s'est privé de la source régulière de bénéfices que constituait le monopole de la distribution des produits de cette marque et a ainsi cédé, moyennant une indemnité, un élément incorporel de l'actif immobilisé de son exploitation commerciale. En conséquence, ladite indemnité ne constitue pas une recette d'exploitation mais une plus-value à long terme au sens de l'article 39 duodecies du CGI.

Arrêt du 21 décembre 1977, req. n° 3997.

36Une entreprise avait conclu avec la SNCF une convention l'autorisant à utiliser un emplacement compris dans le domaine public ferroviaire (embranchement particulier) puis, ayant décidé d'abandonner cet emplacement, elle a présenté à l'agrément de la SNCF une autre société laquelle a été autorisée, par une nouvelle convention, à occuper l'emplacement devenu vacant.

Jugé que l'indemnité versée à cette occasion par cette dernière société à l'ancien occupant doit, eu égard au régime même de la domanialité publique 1 , être regardée pour le bénéficiaire non comme le prix de cession d'un élément incorporel de son actif immobilisé, susceptible de bénéficier du régime des plus-values prévu aux articles 39 duodecies et quindecies du CGI, mais comme un profit commercial passible de l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun.

  V. Cession d'éléments de l'actif résultant d'un partage

37En règle générale, toute opération de partage doit, en principe, être assimilée à une cession au sens de l'article 38-1 du CGI, lorsqu'elle se traduit par la sortie éléments de l'actif immobilisé d'une entreprise industrielle, commerciale ou artisanale. Dans ce cas, elle donne lieu à la réalisation de profits imposables (ou des pertes déductibles), qui entrent dans le champ d'application du régime particulier des plus-values (ou des moins-values).

Il en est ainsi des plus-values (ou moins-values) réalisées (ou subies) par une société -qu'il s'agisse d'une société de personnes ou de capitaux- lors du partage, des éléments d'actif immobilisé, entre ses associés ou actionnaires, en cours ou en fin d'exploitation.

Le fait générateur à retenir est l'acte de partage et la plus-value imposable est égale à la différence entre la valeur réelle des éléments au moment du partage et leur valeur nette comptable.

Ainsi, dans le cas d'une société anonyme constituée sous le régime des sociétés de construction institué par la loi du 28 juin 1938, mais ayant pour objet l'acquisition d'un terrain en vue de sa division par fractions destinées a à l'occasion de l'attribution de certaines parcelles à divers actionnaires, qui se sont retirés par anticipation, doivent être rattachées aux résultats de l'exercice au cours duquel l'attribution a été constatée dans un acte authentique, et, de ce fait, est devenue définitive. À cet égard, il n'y a pas lieu de tenir compte de la circonstance que la réduction de capital résultant de l'annulation des actions correspondant aux terrains attribués et la modification des statuts qui en était la conséquence n'ont été approuvées par l'assemblée générale des actionnaires qu'au cours de l'exercice suivant (CE, arrêt du 10 novembre 1971, req. n°s 75584 et 75585, RJ, n° II, p. 178).

38Indépendamment du cas général visé ci-dessus du partage de l'actif social d'une société commerciale, un partage peut également résulter d'une fin d'indivision, d'une dissolution de communauté ou d'une succession.

Dans ces différents cas et sous réserve de l'application, le cas échéant, des dispositions spéciales de l'article 41-II du CGI en cas de transmission à titre gratuit d'entreprise individuelle (cf. ci-après DB 4 B 35 ), l'opération de partage entraîne en principe les mêmes conséquences qu'une cession en ce qui concerne l'imposition des plus-values éventuellement dégagées à cette occasion (cf. DB 4 A 5122).

39S'agissant plus particulièrement du partage d'une communauté conjugale, il y a lieu de considérer qu'une communauté entre époux comportant des éléments d'actif professionnel constitue au plan fiscal une indivision. Or, la cessation d'une indivision équivaut à une cession d'entreprise à l'égard du seul indivisaire qui se retire et non à l'égard de celui qui continue l'exercice de l'activité.

Par suite, dans la situation où un couple ayant exploité ensemble un fonds de commerce, inscrit au registre du commerce au nom du mari, divorce, et où l'exploitation est poursuivie par la femme :

- le mari doit être soumis à l'impôt au titre de l'année de réalisation du partage, à raison des plus-values dégagées sur ses droits indivis dans le fonds, lesquelles sont déterminées compte tenu de l'estimation donnée à ces droits pour la formation des lots ;

- il n'y a pas, en revanche, cessation d'entreprise pour la femme continuatrice de l'exploitation, qui acquiert à la date du partage, les droits précédemment possédés par son conjoint dans la propriété du fonds.

Cette solution s'applique également dans le cas d'époux mariés sous le régime de la communauté légale dont dépend un fonds de commerce qui adoptent un régime de séparation des biens. L'attribution du fonds à l'un des conjoints, qui continue seul l'exploitation, entraîne cession d'entreprise pour celui qui se retire ainsi de l'exploitation indivise. Par suite, les plus-values dégagées sur ces droits indivis sont imposables en tenant compte, pour leur détermination, de l'estimation faite lors de l'attribution du fonds au conjoint.

40De plus, en réponse à une question posée par M. Delevoye, sénateur (J.O. Sénat du 24 février 1994, P. 432), l'administration précise qu'une communauté entre époux comportant des éléments d'actif professionnel doit être regardée comme constituant sur le plan fiscal une indivision. La cessation de cette indivision est un événement qui entraîne cessation d'entreprise à l'égard du seul indivisaire qui se retire et non à l'égard de celui qui poursuit l'exercice de l'activité, même s'il y a versement d'une soulte par ce dernier. Dès lors, dans la situation exposée, le conjoint qui abandonne ses droits sur le fonds est soumis à l'impôt au titre des plus-values professionnelles. Les dispositions des articles 151 septies et 202 bis du code général des impôts s'appliquent à cette plus-value dans les conditions de droit commun.

À cet égard, il est précisé que la condition selon laquelle le chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise au cours de l'exercice de la cession et de l'exercice précédent doit être inférieur au double des limites du forfait 2 s'apprécie par référence au chiffre d'affaires réalisé par la communauté et non au niveau de chaque conjoint (cf. DB 4 B 212, n° 10 à 12 ). Même si les conditions de cette exonération ne sont pas remplies, il est observé qu'en tout état de cause, seul le conjoint qui abandonne ses droits dans le fonds est imposé et non celui qui poursuit l'activité.

Par conséquent, la doctrine précédemment exprimée (cf. DB 4 A 6122, n° 4, datée du 1er septembre 1993), selon laquelle dans le cas où le fonds de commerce est attribué à l'époux commerçant, à charge de soulte, les plus-values acquises par les éléments du fonds de commerce n'ont pas à être soumises à l'impôt à l'occasion de la dissolution de la communauté, sous réserve que l'exploitant, s'il est soumis au régime du bénéfice réel, n'apporte aucun changement aux évaluations comptables de ces éléments, est rapportée à compter du 9 octobre 1996.

41En revanche, en cas de transfert d'exploitation d'un fonds de commerce d'un époux à l'autre, sans dissolution de la communauté conjugale et sans qu'il soit mis fin à l'indivision, il est possible d'admettre qu'en matière d'impôt sur le revenu les règles spécifiques relatives à la taxation des plus-values constatées à la date de la transmission ou à l'imposition immédiate des plus-values antérieures ne trouvent pas à s'appliquer. Pour bénéficier de cette situation, l'exploitant placé sous un régime réel d'imposition ne doit apporter aucune modification aux évaluations comptables des divers éléments de l'actif immobilisé. provenant de l'ancien exploitant.

Licitation comportant clause d'attribution.

42La plus-value réalisée à l'occasion de la cession d'un élément de l'actif n'est imposable qu'au titre de l'exercice au cours duquel la propriété du bien cédé a été transférée au cessionnaire.

Lorsqu'en cas d'adjudication d'un bien sur licitation, le cahier des charges comporte une clause d'attribution en vertu de laquelle si l'adjudication est prononcée au profit d'un colicitant, celui-ci ne sera pas considéré comme adjudicataire mais se verra attribuer le bien en cause lors du partage définitif, la cession est reportée à la date où l'acte de partage est effectivement devenu définitif par la ratification de toutes les parties.

Dès lors, c'est au titre de l'exercice au cours duquel cette ratification est intervenue et non au titre de l'exercice au cours duquel il a été procédé à l'adjudication que la plus-value correspondante doit être imposée (CE, arrêt du 21 novembre 1980, req. n° 12736).

1   Les règles de la domanialité publique interdisaient au bénéficiaire de l'autorisation d'occupation accordée par la SNCF de céder cette autorisation à un tiers.

2   Toutefois, le régime du forfait est supprimé pour la détermination des résultats des années 1999 et suivantes. Désormais, pour l'application des régimes d'exonération de plus-values prévus aux articles 151 septies et 202 bis, les recettes à prendre en considération ne doivent pas excéder le double des limites d'application du régime des micro-entreprises prévu à l'article 50-0 du CGI, appréciées toutes taxes comprises.