Date de début de publication du BOI : 30/04/1998
Identifiant juridique :

B.O.I. N° 83 du 30 AVRIL 1998


INTRODUCTION


1.L'article 209 B du code général des impôts institué par l'article 70 de la loi de finances pour 1980 et dont les mesures d'application sont codifiées aux articles 102 S à 102 Z de l'annexe II au code déjà cité, a pour objet de dissuader les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés de localiser une partie de leurs bénéfices dans des sociétés établies dans un Etat ou territoire situé hors de France où elles sont soumises à un régime fiscal privilégié au sens de l'article 238 A du même code.

2.Il prévoit à cet effet que lorsqu'une entreprise passible de l'impôt sur les sociétés détient directement ou indirectement 25 % au moins des actions ou parts d'une telle société, cette entreprise est soumise à l'impôt sur les sociétés à raison des résultats bénéficiaires correspondant aux bénéfices de la société étrangère retenus dans la proportion des droits sociaux qu'elle y détient Ces bénéfices font l'objet d'une imposition distincte des autres résultats de l'entreprise française. Ils ne peuvent donc être compensés avec les résultats des autres activités de cette entreprise.

3.L'entreprise française peut néanmoins s'affranchir de cette taxation si elle établit que les opérations de la société étrangère n'ont pas principalement pour effet de permettre la localisation de bénéfices dans un pays où ils sont soumis à un régime fiscal privilégié. Cette condition est réputée remplie notamment lorsque la société étrangère a principalement une activité industrielle ou commerciale effective et qu'elle réalise ses opérations de façon prépondérante sur le marché local.

Ce dispositif a été commenté dans une instruction du 15 février 1983 (B.O.I. 4 H-2-83).

4.Il a fait l'objet d'un premier aménagement qui a limité le champ des exceptions automatiques à l'imposition instituée par l'article 209 B en supprimant la clause d'exonération qui bénéficiait aux entreprises françaises dont la filiale étrangère répondait à la condition d'activité effective et, en outre, réalisait ses opérations de façon prépondérante avec des entreprises avec lesquelles il n'existait pas de lien de dépendance (loi de finances rectificative pour 1990, art. 20, B.O.I. 4 H-9-92 ).

5.L'article 107 de la loi de finances pour 1993 poursuit l'aménagement de ce dispositif.

Le champ d'application du dispositif est étendu sur trois points.

Il concerne désormais les personnes morales françaises qui détiennent, directement ou indirectement, une participation au moins égale à 10 % ou dont le prix de revient est au moins égal à 150 millions de francs dans une société établie hors de France et soumise à un régime fiscal privilégié au sens de l'article 238 A du code général des impôts ; cette disposition tend à harmoniser les seuils d'application du dispositif prévu à l'article 209 B et du régime des sociétés mères.

Il est également élargi aux profits réalisés hors de France par l'intermédiaire soit d'un établissement sans personnalité juridique ou d'un cycle complet d'activité (entreprise). Jusqu'à présent, seuls les bénéfices localisés dans des sociétés ou des personnes morales assimilées à des sociétés étaient susceptibles d'être concernés par l'application de l'article 209 B.

L'appréciation du pourcentage de détention que possède la personne morale française s'effectue en prenant en compte, outre les actions ou parts, les droits financiers et les droits de vote résultant du fractionnement des droits attachés aux titres représentatifs de la participation détenue directement ou indirectement par la personne morale française ; les droits sociaux de même nature détenus dans le cadre d'une communauté d'intérêts, sont également pris en compte pour apprécier ce pourcentage, étant précisé que cette dernière fait l'objet d'une définition limitative.

Certaines dispositions existantes sont précisées ou confirmées.

Le nouveau texte confirme que la condition relative au caractère privilégié du régime fiscal s'apprécie au niveau de la société, de l'entreprise ou du groupement établi hors de France

Les règles fiscales françaises qui ne sont pas applicables pour la détermination du résultat bénéficiaire de la structure établie hors de France et imposable en France en application des dispositions de l'article 209 B sont limitativement prévues par le texte de loi.

6.Un décret en Conseil d'Etat n° 94-282 du 5 avril 1994 (J.O. du 12 avril 1994) pris pour l'application de l'article 209 B modifie par ailleurs les dispositions des articles 102 S à 102 Z de l'annexe II au code général des impôts qui fixent les conditions d'application du dispositif légal.

7.Le nouveau dispositif visé au I bis de l'article 209 B s'applique à raison :

- des créations ou acquisitions d'établissements intervenues à compter du 30 septembre 1992 ;

- des acquisitions ou souscriptions d'actions, parts, droits financiers ou droits de vote intervenues à compter de cette même date ayant pour effet de conférer à la personne morale la détention de 10 % ou, si ce taux est déjà atteint, de la maintenir ou de l'augmenter ;

- des acquisitions ou souscriptions de participations faites à compter de la même date permettant de porter à 150 millions de francs le montant du prix de revient de la participation détenue par la personne morale ou d'augmenter le montant de la participation si le seuil de 150 millions est déjà atteint.

Les nouvelles dispositions du II bis s'appliquent, à compter du 30 septembre 1992, aux personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés mentionnées au I bis.

8.Les dispositions existantes codifiées aux I et II de l'article 209 B continuent par ailleurs de s'appliquer aux entreprises qui y sont mentionnées pour la détermination des résultats des exercices ouverts jusqu'au 31 décembre 2002 sauf pour ce qui concerne les règles nouvelles concernant l'appréciation de la détention directe et indirecte et du régime fiscal privilégié et celles concernant la détermination des résultats bénéficiaires de la société étrangère, qui sont applicables pour la détermination des résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 1992.

9.Il résulte de la combinaison de ce principe avec les règles d'entrée en vigueur du nouveau dispositif que les entreprises françaises qui, avant le 30 septembre 1992, se sont implantées sous forme de filiales dans un pays où elles sont soumises à un régime fiscal privilégié, n'entraient pas dans le champ d'application du dispositif existant de l'article 209 B et qui seraient passibles du nouveau dispositif (participation égale ou supérieure à 150 millions de francs ou supérieure à 10 %) demeurent en dehors du champ d'application de l'imposition instituée par l'article 209 B.

10.Toutefois, elles sont passibles du nouveau dispositif si elles accroissent le prix de revient de leur participation ou si, directement ou indirectement, elles effectuent, après le 30 septembre 1992, une opération dont l'effet est de maintenir ou d'augmenter le taux de leur participation.

11.La présente instruction a pour objet de commenter ces dispositions législatives et réglementaires. Elle constitue l'ensemble des commentaires de l'administration relatifs à l'application de l'article 209 B, à l'exception toutefois du paragraphe 2 du II de l'instruction du 6 mars 1992 (B.O.I. 4 H-9-92 ) dont les commentaires demeurent applicables, et elle annule et remplace l'instruction du 15 février 1983 (B.O.I. 4 H-2-83) et les I et II, paragraphe 1, de l'instruction du 6 mars 1992 déjà citée.


CHAPITRE PREMIER :

CHAMP D'APPLICATION


12.L'imposition prévue au I de l'article 209 B vise l'ensemble des entreprises françaises passibles de l'impôt sur les sociétés qui détiennent directement ou indirectement 25 % au moins des actions ou parts d'une société établie dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France et qui sont soumises à un régime fiscal privilégié au sens mentionné à l'article 238 A du code général des impôts.

13.L'imposition prévue au I bis de l'article 209 B concerne les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui exploitent une entreprise hors de France ou détiennent directement ou indirectement 10 % au moins des actions, parts, droits financiers ou droits de vote dans une société ou un groupement, établi hors de France, ou détiennent dans une telle société ou groupement une participation dont le prix de revient est égal ou supérieur à 150 millions de francs, si cette entreprise, cette société ou ce groupement est soumis à un régime fiscal privilégié au sens mentionné à l'article 238 A déjà cité.

14.Le champ d'application de ce nouveau dispositif est étendu en ce qui concerne les conditions relatives à la personne morale française et les conditions relatives à la structure établie hors de France et soumise à un régime fiscal privilégié.


SECTION 1

Conditions relatives à l'entreprise ou à la personne morale susceptible d'être soumise aux dispositions de l'article 209 B


15.Ces conditions concernent l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés de l'entreprise ou de la personne morale ainsi que la participation détenue directement et indirectement par cette personne dans la structure établie hors de France.


  A. ENTREPRISE OU PERSONNE MORALE PASSIBLE DE L'IMPOT SUR LES SOCIETES


16.Les dispositions du I et du I bis sont équivalentes sur ce point.

Elles sont susceptibles de s'appliquer aux sociétés et autres organismes passibles de l'impôt sur les sociétés au taux normal de 33,1/3 % même s'ils ne sont pas effectivement soumis à cet impôt (entreprises nouvelles bénéficiant du régime de l'article 44 sexies du code général des impôts, sociétés implantées dans des zones franches ou en zones d'entreprises et placées sous les dispositifs prévus aux articles 44 octies, 44 decies ou 208 quinquies du même code, sociétés membres d'un groupe fiscal...).

17.Les dispositions de l'article 209 B concernent également l'entreprise située en France au sens d'établissement ou succursale d'une personne morale dont le siège est situé hors de France lorsque les droits (actions, parts, droits financiers et les droits de vote) représentatifs de la participation dans la structure établie hors de France et soumise à un régime fiscal privilégié sont inscrits à l'actif du bilan fiscal de cet établissement.


  B. CARACTERISTIQUES DE LA PARTICIPATION DETENUE PAR LA PERSONNE MORALE



  I. Quotité de la participation


  1. Prix de revient de la participation

18.Le nouveau dispositif du I bis est susceptible de s'appliquer si le prix de revient de la participation détenue par la personne morale est égal ou supérieur à 150 millions de francs. Cette mesure a pour objectif de permettre l'application de l'imposition prévue à l'article 209 B dans la situation où la personne morale, en raison du montant de sa participation, peut bénéficier du régime des sociétés mères prévu à l'article 145 du code général des impôts.

19.Conformément aux dispositions de l'article 38 quinquies de l'annexe III au code déjà cité, le prix de revient s'entend selon le cas, du coût d'acquisition, de la valeur d'apport ou de la valeur vénale si la participation est acquise à titre gratuit. Le prix de revient comprend également les sommes regardées, sur le plan fiscal, comme un complément du coût d'acquisition (abandons de créances ou subventions à caractère financier...).

Exemple d'application

20.20 sociétés françaises totalement indépendantes acquièrent chacune 5 % du capital d'une société établie hors de France qui est soumise à un régime fiscal privilégié en lui apportant chacune 160 millions de francs ; chacune d'entre elles entre dans le champ d'application de l'article 209-B-I bis et est susceptible d'être soumise à l'impôt sur les sociétés et aux contributions visées aux articles 235 ter ZA et 235 ter ZB du code général des impôts (cf. B.O.I. 4 L-1-95 et 4 L-5-97 ) à raison de 5 % des résultats de la société étrangère.

  2. Pourcentage de participation

21.Même si le prix de revient de sa participation n'atteint pas 150 millions de francs, la personne morale entre dans le champ d'application du nouveau dispositif si elle détient, directement ou indirectement, 10 % au moins des actions, parts, droits de vote ou droits financiers dans une société ou un groupement établi hors de France qui est soumis à un régime fiscal privilégié au sens de l'article 238 A du code général des impôts.

22.Ce pourcentage de 10 % correspond à une adéquation des seuils d'application du régime des sociétés mères et de l'imposition instituée par l'article 209 B.

Toutefois, il peut exister des situations dans lesquelles le régime des sociétés mères s'applique sans qu'il soit possible de mettre en oeuvre le dispositif prévu à l'article 209 B.

Exemple :

23.10 investisseurs, personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés et qui sont des résidents de France, détiennent chacun 10 % du capital d'une société holding X 1 dont le siège est situé hors de France, qui détient elle-même 99 % du capital d'une société FP située dans un Etat où elle est soumise à un régime fiscal privilégié ; le solde du capital de FP est détenu par un non-résident.

Chacun des investisseurs est censé pouvoir se prévaloir du régime des sociétés mères en ce qui concerne les dividendes payés par X 1, conformément aux dispositions des articles 145 et 216 du code général des impôts.

Toutefois, aucun d'eux n'entre dans le champ d'application de l'article 209 B puisqu'ils détiennent individuellement 10 % x 99 % = 9,9 % du capital de FP.

24.L'attention est appelée sur la possibilité de recourir à la procédure de répression des abus de droit visée à l'article L 64 du livre des procédures fiscales chaque fois qu'il résultera de l'examen des circonstances de fait que les parties concernées se sont placées dans ce type de situation favorable par le recours à un montage organisé afin d'échapper à l'imposition prévue à l'article 209 B.

25.Enfin, une personne morale entre dans le champ d'application du dispositif préexistant (art. 209 B-I) si elle détient, directement ou indirectement, 25 % au moins des actions, parts, droits de vote ou droits financiers d'une société (notamment sociétés de capitaux, sociétés en participation, sociétés de fait, sociétés de personnes, « joint ventures », « partnerships », entités assimilées) établie hors de France qui est soumise à un régime fiscal privilégié au sens de l'article 238 A déjà cité.