B.O.I. N° 12 DU 26 JANVIER 2010
BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS
13 L-1-10
N° 12 DU 26 JANVIER 2010
INSTRUCTION DU 12 JANVIER 2010
AVIS RENDUS PAR LE COMITE DE L'ABUS DE DROIT FISCAL
SEANCES N
0S
3 ET 4 DE L'ANNEE 2009
(LPF art. L. 64)
NOR : BCF Z 10 00008 J
Bureau JF-2B
PRESENTATION
Dans le cadre de la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du LPF, le litige peut être soumis, à la demande du contribuable ou de l'administration, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. Les avis rendus par le comité de l'abus de droit fiscal font l'objet d'un rapport annuel adressé au Ministre par le Président du comité et qui est reproduit sous la forme d'un BOI. Afin d'assurer une information plus complète et plus rapide, les avis rendus par ce comité sont également publiés. La position qu'entend adopter l'administration sur chacun des dossiers soumis à l'avis du comité est indiquée à titre informatif. Il est rappelé que lorsque l'administration ne se conforme pas à l'avis du comité, il lui appartient d'apporter la preuve du bien-fondé de la rectification. Le présent BOI porte sur les avis rendus au cours des séances du second semestre de l'année 2009. |
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Le Chef du Service juridique de la fiscalité
Jean-Pierre Lieb
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Séance n° 3 du 24 septembre 2009
1. Affaire n° 2009-07 concernant Mme F .
« Par un acte en date du 3 mars 2000, M. P. a cédé à Mme F. la pleine propriété (sous réserve d'un droit d'usage et d'habitation du vendeur sa vie durant) d'une maison lui appartenant ainsi que les meubles et bien mobiliers la garnissant, au prix de 2 880 000 F (dont 2 800 000 F au titre des biens immobiliers), payable pour partie comptant (940 000 F), le solde (1 860 000 F) étant converti en une rente viagère annuelle de 84 000 F, payable par mensualités de 7 000 F.
M. P. est décédé le 3 avril 2001 à l'âge de 79 ans.
Par une proposition de rectification en date du 22 janvier 2008 le service a notifié sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales à Mme F. la remise en cause du caractère onéreux de l'acte du 3 mars 2000.
Le Comité observe que les moyens tirés de la prescription du droit de reprise de l'administration et de l'irrégularité de la procédure d'imposition relèvent, en ce qu'ils touchent non à la caractérisation de l'abus de droit mais à la régularité de la procédure d'imposition, de la seule compétence du juge de l'impôt.
Sur le fond, le Comité relève qu'il n'est pas contesté que Mme F. a acquitté par la comptabilité du notaire la partie du prix payable comptant et qu'elle a réglé ensuite les arrérages de la rente jusqu'à la date du décès du crédirentier.
Il note que si de nombreux retraits des comptes bancaires de M. P. ont été effectués dans l'année ayant suivi la vente pour des montants supérieurs au prix acquitté comptant en la comptabilité du notaire et aux montants payés de la rente viagère, l'administration se borne à alléguer la vraisemblance de l'appréhension des sommes par Mme F., sans apporter d'éléments suffisamment probants à l'appui de cette allégation.
Il relève enfin que l'état de santé de M. P., aussi sérieux fût-il dans l'année ayant suivi la vente, ne pouvait être regardé, au vu des éléments soumis au Comité, comme privant le contrat de rente viagère de tout aléa.
Il s'ensuit que l'administration ne démontre pas que l'acte du 3 mars 2000 dissimulait en réalité une donation.
En conséquence le Comité est d'avis que l'administration n'était pas fondée à mettre en œuvre les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales. »
Nota : l'administration a décidé de ne pas se ranger à l'avis émis par le Comité. En effet, contrairement à ce qu'a indiqué le Comité :
- s'agissant de l'absence de contrepartie, l'administration ne s'est pas bornée à établir la vraisemblance de l'appréhension des sommes retirées des comptes du défunt par l'acquéreur, mais a établi de façon incontestable que la rente viagère payée au vendeur avait été rétrocédée à l'acquéreur par des retraits effectués par ce dernier sur des comptes bancaires du cédant. L'absence de contrepartie réelle a également été corroborée par la démonstration de la modicité du prix de vente.
- s'agissant de l'absence d'aléa dû à l'état de santé du cédant, la jurisprudence constante de la Cour de cassation considère que le fait pour l'acquéreur de connaître l'état de santé déficient du vendeur suffit à démontrer que le contrat de rente viagère qui a été conclu était dépourvu de tout caractère aléatoire, ce qui est le cas d'espèce.
2. Affaire n° 2009-08 concernant M. B .
« M. B., qui exploitait depuis 1971 à titre individuel un fonds de commerce de vente de tissus et de confection a, en 2004, donné ce fonds en location gérance à son épouse.
Le 28 septembre 2007, par un acte enregistré le 5 octobre 2007, il a cédé ce fonds de commerce à la SARL CL. Cette société avait auparavant, par un acte du même jour mais enregistré le 4 octobre 2007, acquis auprès de Mme B. les droits résultant du contrat de location gérance dont cette dernière était titulaire depuis 2004.
La plus-value réalisée lors de cette cession a été déclarée par M. B. comme exonérée sur le fondement des dispositions du VII de l'article 238 quindecies du code général des impôts en vertu duquel sont exonérées les transmissions d'entreprises individuelles ayant fait l'objet d'un contrat de location gérance, sous la condition notamment que la transmission soit réalisée au profit du locataire.
L'administration, qui a admis que les autres conditions prévues par ce texte étaient par ailleurs satisfaites, a néanmoins considéré que l'acte par lequel la SARL CL était devenue locataire gérante du fonds de commerce de M. B. ne lui était pas opposable, dans la mesure où cet acte n'avait eu d'autre but que de permettre le respect formel de la condition relative à la qualité de l'acquéreur et n'avait donc été passé que dans un but exclusivement fiscal.
En conséquence, l'administration a procédé, sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, à l'imposition de la plus-value de cession réalisée par M. B.
Après avoir entendu ensemble les époux B. et leur conseil ainsi que le représentant de l'administration fiscale, le Comité note que l'acte de cession du contrat de location gérance passé entre Mme B. et la SARL CL a pris effet le même jour que l'acte de cession du fonds de commerce et que l'administration avait constaté qu'ainsi, cette société avait acquis sa qualité de locataire pour la perdre aussitôt, de façon concomitante lors de la passation de cession du fonds de commerce.
Cependant, le Comité relève que le fonds de commerce était exploité, jusqu'en 2004 par M. et Mme B., cette dernière en tant que conjoint collaborateur, et que les deux conjoints avaient organisé leur départ à la retraite de façon échelonnée, compte tenu des circonstances qui étaient propres à la situation de chacun des deux époux au regard de leurs droits à la retraite et qui faisaient obstacle à une cessation simultanée de leur activité.
Par ailleurs, il résulte des éléments apportés lors de l'audition de M. et Mme B. et non contredits sur ce point par l'administration, que Mme B., exploitant le fonds en location gérance au moment où ce fonds a été mis en vente, avait, pendant la période comprise entre la promesse de vente et la signature de l'acte authentique, procédé à la transmission de son savoir-faire professionnel au bénéfice de la société, laquelle exerçait antérieurement son activité dans un secteur entièrement distinct. Ainsi qu'il a été exposé dans les écritures du contribuable, complétées sur ce point par les observations présentées lors de la séance du Comité, cette transmission a pris la forme de la présentation de la SARL CL aux fournisseurs, à une représentation commune de l'entreprise, par l'ancien et le nouvel exploitant, à un salon professionnel ainsi que par des conseils actifs prodigués par Mme B. dans la gestion quotidienne de l'exploitation. Enfin, il est constant que Mme B. s'est abstenue de procéder à une vente massive du stock avant la cessation de son activité, ce qui a permis au repreneur de poursuivre l'exploitation du fonds dans des conditions commerciales normales. Ces circonstances établissent que cette transmission du savoir-faire de l'ancien locataire au futur acquéreur a bien commencé antérieurement à la vente du fonds, dès la signature de la promesse de vente, et s'est poursuivie après la réalisation de cette transmission, ce qui a permis d'assurer la pérennité du fonds de commerce cédé.
Le Comité observe que l'intention du législateur, qui a instauré l'exonération codifiée à l'article 238 quindecies du code général des impôts en faveur d'opérations de cession d'entreprises individuelles, était, précisément, de favoriser la pérennité de petites et moyennes entreprises commerciales, notamment lors du départ à la retraite de l'ancien exploitant.
Ainsi, au vu des circonstances très particulières de l'affaire, les actes passés lors de la cession de l'entreprise de M. B. ne peuvent être regardés comme ayant été passés en vue d'une application littérale du texte de l'article 238 quindecies du code général des impôts à l'encontre des objectifs poursuivis par le législateur, nonobstant la concomitance des actes par lesquels la SARL CL est devenue successivement locataire, puis propriétaire du fonds de commerce qui, en l'espèce, n'est pas de nature à révéler, à elle seule, l'existence d'un abus de droit.
En conséquence, le Comité émet l'avis qu'au cas particulier, l'administration n'était pas fondée à mettre en œuvre la procédure de l'abus de droit fiscal prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales. »
Nota : l'administration a décidé de ne pas se ranger à l'avis du Comité. En effet, l'administration considère que le fait que la société CL ait revêtu la qualité de locataire gérant durant un instant de raison s'est traduit concrètement, pour cette société, par une impossibilité d'exploiter véritablement le fonds de commerce avant d'en devenir la propriétaire. Ainsi, la cession des droits attachés au contrat de location gérance, dépourvue de justification économique, n'a eu d'autre motivation que celle de respecter formellement une condition posée par le législateur pour bénéficier d'un régime fiscal de faveur.
3. Affaire n° 2009-09 concernant M. et Mme C .
« M et Mme C. ont constitué la SCI V. le 19 juillet 2003 qui a acquis une villa le 25 août 2003 dans laquelle des travaux de rénovation représentent 41 % de sa valeur d'acquisition, l'ensemble étant financé par des emprunts bancaires.
La SCI V. a conclu un bail avec les époux C. le 26 novembre 2003 afin d'y loger leurs enfants ; cette villa est devenue leur résidence principale à compter du 1er juillet 2006 jusqu'en octobre 2008.
L'administration a relevé les faits suivants :
- les époux C. détenaient le contrôle exclusif de la SCI V. propriétaire de l'immeuble qu'ils ont pris à bail ;
- cet immeuble constituait le seul actif de cette société ;
- les époux C. ont supporté, par des avances en compte courant, les intérêts des emprunts ayant financé les travaux ;
- aucune démarche n'a été entreprise par les époux C. en vue de la location de cet immeuble auprès d'un tiers.
L'administration a donc estimé que la constitution de la SCI et la conclusion d'un contrat de bail avec ses associés avaient pour seul objectif de faire échec aux dispositions du II de l'article 15 du code général des impôts en permettant l'imputation et le report de déficits fonciers sur leurs autres revenus relevant de la catégorie des revenus fonciers.
Au vu de ces éléments ainsi portés à sa connaissance, le Comité émet l'avis que l'administration était fondée à mettre en œuvre la procédure de l'abus de droit fiscal prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales.
Par ailleurs, le Comité estime que les époux C. doivent être regardés comme ayant eu l'initiative principale des actes constitutifs de l'abus de droit et, en outre, ont été les principaux bénéficiaires au sens du b) de l'article 1729 du code général des impôts. Il émet donc l'avis que l'administration est fondée à leur appliquer la majoration de 80% prévue par ces dispositions. »
Nota : l'administration a pris note de l'avis favorable du Comité.
Séance n° 4 du 26 novembre 2009
4. Affaire n°2009-11 concernant Mme B .
« Par un acte en date du 17 mars 2000, M. C. a cédé à Mme B. la pleine propriété (sous réserve d'un droit d'usage et d'habitation du vendeur sa vie durant) de sa résidence principale au prix de 42 686 € (280 000 F) converti en une rente viagère annuelle de 9 680,97 € (63 503 F), payable par mensualités de 807 € (5 291,91 F).
M. C. est décédé le 16 juin 2001 à l'âge de 87 ans.
Par une proposition de rectification en date du 7 novembre 2006, le service a notifié sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales à Mme B. la remise en cause du caractère onéreux de l'acte du 17 mars 2000.
En premier lieu, le Comité observe que le moyen tiré de la prescription du droit de reprise de l'administration relève, en ce qu'il touche non à la caractérisation de l'abus de droit, mais à la régularité de la procédure d'imposition, de la seule compétence du juge de l'impôt.
En second lieu et sur le fond, le Comité relève que, si des quittances correspondant aux arrérages de la rente viagère exigibles entre la date de l'acte et celle du décès ont été produites, il est établi que le crédirentier n'a encaissé aucune somme qui lui aurait été remise par Mme B. de ce chef.
Il observe que, si la débirentière a, les 30 mai et 1er juin 2001, soit 15 jours avant le décès, acquitté la somme globale de 12 096 €, correspondant à 15 mensualités de la rente, somme qui, cette fois, a été encaissée sur les comptes de M. C., elle a cependant reçu entre juillet 2000 et juin 2001 plusieurs chèques de M. C. à titre de cadeau pour un montant total de 80 796 €.
Il note à cet égard qu'entre le 30 mai et le 5 juin 2001, le compte de M. C. a ainsi enregistré 12 096 € de crédits en provenance de Mme B. mais également dans le même temps 57 929 € de débits au profit de l'intéressée.
Dès lors, le Comité estime que M. C. a ainsi manifesté son intention de ne recevoir aucune contrepartie au transfert de propriété de son bien immobilier et que l'intention libérale a été suffisamment caractérisée par l'administration qui, dès lors, était fondée à mettre en œuvre les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige.
Enfin, le Comité relève que Mme B. est la seule bénéficiaire de l'acte du 17 mars 2000 constitutif d'un abus de droit et qu'elle n'entre pas ainsi dans les prévisions des dispositions du b) de l'article 1729 du code général des impôts, issu de l'article 35-VI de la loi 2008-1443 du 30 décembre 2008, permettant de réduire à 40 % le taux de la majoration encourue lorsque le contribuable n'a pas été le principal bénéficiaire de cet acte. Il émet donc l'avis que l'administration est fondée à lui appliquer la majoration de 80 % prévue par ces dispositions. »
Nota : l'administration a pris note de l'avis favorable du Comité.
5. Affaire n°2009-10 concernant la SAS L
« La société L a acquis le 22 décembre 2004 auprès de la société X 25,20 % des titres de la société C, le prix d'acquisition s'élevant à 601 540 €.
La société L, qui a entendu se prévaloir du régime des sociétés mères prévu aux articles 145, 146 et 216 du code général des impôts, a pris l'engagement formel, alors exigé par l'article 54 de l'annexe II à ce code, de conserver les titres acquis pendant une durée minimale de deux ans.
Le 28 décembre 2004, la société L a reçu une distribution de la société C d'un montant de 528 611,82 € et a constitué le 31 décembre 2004, date de clôture de l'exercice 2004, une provision pour dépréciation des titres de la société C à hauteur de 547 287 €.
Cette distribution a ainsi été placée sous le régime des sociétés mères et a par suite été retranchée du bénéfice net total de la société L à concurrence de la somme de 502 181 € correspondant à la somme perçue sous déduction d'une quote-part de frais et charges de 5%.
L'administration a constaté qu'à la date de l'acquisition par la société L des titres, effectuée entre sociétés contrôlées par les mêmes personnes, la société C, dont l'actif immobilisé était passé de 7 030 188 € au 30 juin 2003, date de clôture de son exercice, à 123 919 € au 30 juin 2004, ne détenait plus aucun actif corporel ou incorporel, n'exerçait plus aucune activité économique mais disposait de liquidités importantes. Elle a estimé que, sous le couvert d'une acquisition de titres de cette société suivie à bref délai de la distribution importante de dividendes par celle-ci, la société L avait en fait réalisé une opération qui, dans son ensemble, dissimulait une réalité économique et financière différente. Elle a relevé, d'une part, que la société L n'ignorait pas que, lors de l'acquisition des titres de la société C, celle-ci n'avait plus d'activité économique, de sorte que cette acquisition ne présentait aucun intérêt économique et que l'objectif poursuivi par la société avait été uniquement de rechercher l'exonération des dividendes en utilisant à cette fin et de manière abusive le régime des sociétés mères ce qui lui a permis d'éluder la soumission à l'impôt sur les sociétés de la somme de 502 181 €. Elle a constaté, d'autre part, que cette distribution massive avait été suivie de la constitution à la clôture de l'exercice d'une provision pour dépréciation des titres de participation, déductible de son résultat et ayant entraîné la création d'un déficit fiscal reportable de 520 586 € au 31 décembre 2004. Elle en a déduit que l'opération d'acquisition des titres de la société C ne correspondait à aucune réalité économique mais visait exclusivement à l'obtention d'un avantage exclusivement fiscal au travers d'une situation artificiellement créée. A cet égard, l'administration a noté que le caractère artificiel des opérations était également révélé par l'absence de mouvement financier autre que la circulation d'actifs à l'intérieur du groupe, constitué par des sociétés contrôlées par les mêmes personnes, dans la mesure où l'achat des titres auprès de la société X avait été enregistré au passif du compte courant de cette société le 22 décembre 2004 et où la société L avait remboursé la société X par l'achat, pour un montant de 561 660 €, d'obligations émises par une société luxembourgeoise.
L'administration a donc mis en œuvre la procédure de répression des abus de droit et a ainsi refusé, sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, l'application du régime des sociétés mères et filiales ce qui s'est traduit par une rectification du résultat de la société L de la somme de 502 181 € au titre de l'exercice clos en 2004.
Après avoir entendu ensemble les représentants de la société et de l'administration fiscale, le Comité a relevé :
- que la société L avait souscrit l'engagement de conserver les titres de la société C pendant deux ans afin de bénéficier du régime des sociétés mères ;
- que les opérations de cession ont été effectuées entre sociétés contrôlées par les mêmes personnes ;
- que la société C, dont les réserves ont été distribuées, était vidée de toute substance et n'avait plus d'activité opérationnelle selon les indications données par l'administration.
Si, en séance, le conseil de la société L s'est prévalu sur ce dernier point du fait, dont le dossier soumis au Comité fait apparaître que la société n'en a jamais fait état antérieurement au cours de la procédure de rectification ou dans ses observations écrites au Comité ainsi qu'il lui était pourtant loisible de le soutenir, que la société C était cotée sur un marché réglementé, qu'elle devait procéder à une distribution de dividendes en novembre 2009 et en a déduit que cette société aurait ainsi poursuivi son activité de manière effective, il n'a toutefois apporté devant le Comité aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation de l'administration selon laquelle cette société, dont l'actif était uniquement composé de trésorerie, n'exerçait plus en 2004 aucune activité économique.
Par suite, le Comité a déduit de l'ensemble des éléments ainsi portés à sa connaissance que, dans le cadre des opérations successives décrites ci-dessus et formant un tout indissociable, la société L avait souscrit l'engagement formel de conservation des titres pendant une durée de deux ans dans le but exclusif d'atténuer ses charges fiscales grâce à une application littérale des dispositions fiscales relatives au régime des sociétés mères à l'encontre des objectifs poursuivis par le législateur lorsqu'il a adopté ce régime lequel permet, afin d'éviter une double imposition, de ne pas soumettre à l'impôt sur les sociétés dû par la société mère, sous déduction d'une quote-part de frais et charges de 5%, les dividendes qu'elle a reçus de sa filiale, mais suppose une poursuite effective de l'activité de la filiale pendant deux ans au moins après son acquisition.
En conséquence, le Comité émet l'avis que l'administration est fondée à mettre en œuvre la procédure de répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige.
Enfin, le Comité estime que la société L doit être regardée comme ayant eu l'initiative principale des actes constitutifs de l'abus de droit au sens du b) de l'article 1729 du code général des impôts. Il émet donc l'avis que l'administration est fondée à appliquer la majoration de 80 % prévue par ces dispositions. »
Nota : l'administration a pris note de l'avis favorable du Comité.
6. Affaire n°2009-14 concernant la SA Y
« La société Y a acquis le 30 novembre 2003, 50 % des titres de la société A, le prix d'acquisition s'élevant à 1 700 000 €.
La société Y, qui a entendu se prévaloir du régime des sociétés mères prévu aux articles 145, 146 et 216 du code général des impôts, a pris l'engagement formel, alors exigé par l'article 54 de l'annexe II à ce code, de conserver les titres acquis pendant une durée minimale de deux ans.
Le 22 décembre 2003, la société Y a reçu une distribution de la société A d'un montant de 1 500 000 € et a constitué à la clôture de l'exercice 2003 une provision pour dépréciation des titres de la société A à hauteur de 1 489 277 €.
Cette distribution a ainsi été placée sous le régime des sociétés mères et a par suite été retranchée du bénéfice net total de la société Y à concurrence de la somme de 1 425 000 € correspondant à la somme perçue sous déduction d'une quote-part de frais et charges de 5%.
L'administration a constaté qu'à la date de la cession des titres, effectuée entre sociétés contrôlées par les mêmes personnes, la société A, ne détenait plus aucun actif corporel ou incorporel, s'était séparée de son personnel et n'exerçait plus aucune activité économique mais disposait de liquidités importantes. Elle a estimé que, sous le couvert d'une acquisition de titres et de la distribution de dividendes, la société Y avait en fait réalisé une opération qui, dans son ensemble, dissimulait une réalité économique et financière différente. Elle a relevé, d'une part, que la société Y n'ignorait pas que, lors de l'acquisition des titres de la société A, celle-ci n'avait plus d'activité économique, de sorte que cette acquisition ne présentait aucun intérêt économique et que l'objectif poursuivi par la société avait été uniquement de rechercher l'exonération des dividendes en utilisant à cette fin et de manière abusive le régime des sociétés mères ce qui lui a permis d'éluder la soumission à l'impôt sur les sociétés de la somme de 1 425 000 €. Elle a constaté, d'autre part, que cette distribution massive avait été suivie de la constitution, à la clôture de l'exercice le 31 décembre 2003, d'une provision pour dépréciation des titres de participation s'élevant à 1 489 277 €, déductible de son résultat et ayant entraîné une majoration du déficit fiscal reportable. Elle en a déduit que l'opération d'acquisition des titres de la société Y ne correspondait à aucune réalité économique mais visait exclusivement à l'obtention d'un avantage exclusivement fiscal au travers d'une situation artificiellement créée.
L'administration a donc mis en œuvre la procédure de répression des abus de droit et a ainsi, sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, refusé l'application du régime des sociétés mères et filiales, d'une part, et rejeté la déduction de la provision de 1 489 277 €, d'autre part ce qui s'est traduit, compte tenu de l'annulation des corrections extra-comptables effectuées par la société, par une rectification du résultat de l'exercice clos en 2003 de la société Y de la somme de 1 414 277 €. Le déficit déclaré au titre de cet exercice a ainsi été ramené de - 1 456 774 € à - 42 497 €.
Après avoir entendu ensemble les représentants de la société et de l'administration fiscale, le Comité a relevé :
- que la société Y avait souscrit l'engagement de conserver les titres de la société A pendant deux ans afin de bénéficier du régime des sociétés mères ;
- que la société A disposait d'importantes réserves à la suite de la cession de son activité de boucherie en gros ;
- que les opérations de cession de titres ont été effectuées entre sociétés contrôlées par les mêmes personnes ;
- que la société A, dont les réserves ont été distribuées, était vidée de toute substance et n'exerçait plus aucune activité ;
- que cette filiale n'avait eu aucune activité postérieurement à cette distribution.
Par suite, le Comité a déduit de l'ensemble des éléments ainsi portés à sa connaissance, que, dans le cadre des opérations successives décrites ci-dessus et formant un tout indissociable, la société Y avait souscrit l'engagement formel de conservation des titres pendant une durée de deux ans dans le but exclusif d'atténuer ses charges fiscales grâce à une application littérale des dispositions fiscales relatives au régime des sociétés mères à l'encontre des objectifs poursuivis par le législateur lorsqu'il a adopté ce régime lequel permet, afin d'éviter une double imposition, de ne pas soumettre à l'impôt sur les sociétés dû par la société mère, sous déduction d'une quote-part de frais et charges de 5%, les dividendes qu'elle a reçus de sa filiale, mais suppose une poursuite effective de l'activité de la filiale pendant deux ans au moins après son acquisition.
En conséquence, le Comité émet l'avis que l'administration est fondée à mettre en œuvre la procédure de répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige.
Enfin, le Comité estime que la société Y doit être regardée comme ayant eu l'initiative principale des actes constitutifs de l'abus de droit au sens du b) de l'article 1729 du code général des impôts. Il émet donc l'avis que l'administration est fondée à appliquer la majoration de 80 % prévue par ces dispositions. »
Nota : l'administration a pris note de l'avis favorable du Comité.
7. Affaire n°2009-12 concernant la SAS D
« La société D a acquis le 1er décembre 2003, la totalité des titres de la société A, société de prestations de services pour entreprises, pour un prix de 2 247 126 €.
La société D, qui a entendu se prévaloir du régime des sociétés mères prévu aux articles 145, 146 et 216 du code général des impôts, a pris l'engagement formel, alors exigé par l'article 54 de l'annexe II à ce code, de conserver les titres acquis pendant une durée minimale de deux ans.
Le 16 décembre 2003, la société D a reçu une distribution de la société A d'un montant de 1 109 692 € et a constitué à la clôture de l'exercice le 31 décembre 2003 une provision pour dépréciation des titres de cette société à hauteur de 992 208 €.
Cette distribution, placée sous le régime des sociétés mères, a été retranchée pour son montant du bénéfice net total de la société D qui a omis d'effectuer une déduction au titre de la quote-part de frais et charges de 5%.
Le 31 mars 2004, la société A a fait l'objet d'une transmission universelle de patrimoine au profit de la société D avec effet rétroactif au 1er janvier 2004. Cette absorption ayant été placée sous le régime fiscal des fusions, la provision pour dépréciation des titres de la société A constatée à la clôture de l'exercice 2003 a fait l'objet d'une reprise à la clôture de l'exercice 2004 et a été déduite extra-comptablement pour la détermination du résultat fiscal de l'exercice. Ces opérations ont conduit à la constatation au 31 décembre 2004 d'un déficit de 967 571 € dont le report en arrière a permis à la société D de devenir titulaire d'une créance sur le Trésor public de 322 524 €.
L'administration a relevé qu'à la date de la cession des titres, la société A ne détenait plus aucun actif corporel ou incorporel, n'employait plus de salariés et n'exerçait plus aucune activité économique mais disposait de liquidités importantes nées de la cession antérieure de ses actifs. Elle a estimé que sous le couvert d'une acquisition de titres et de distributions de dividendes, opérations en apparence ordinaires, la société D avait en fait réalisé une opération dont l'objectif était exclusivement fiscal dès lors qu'il était manifeste qu'elle n'avait jamais eu l'intention d'animer la société A pas plus qu'elle n'avait eu l'intention de valoriser sa participation, les titres de cette société ayant été dépréciés par voie de provision compte tenu de la distribution de dividendes dont l'incidence fiscale a été neutralisée grâce au régime des sociétés mères. Elle en a déduit que l'opération appréciée dans sa globalité n'avait pu être inspirée par aucun autre motif que celui de minorer le résultat de la société D et par suite d'éluder l'impôt correspondant.
L'administration a mis en œuvre la procédure de répression des abus de droit et a ainsi, sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, refusé l'application du régime des sociétés mères et filiales. Elle a réintégré au résultat de l'exercice clos en 2003 la somme de 1 109 692 € correspondant aux dividendes regardés comme abusivement déduits de ce résultat par application de ce régime.
Après avoir entendu ensemble les représentants de la société et de l'administration fiscale, le Comité précise, en premier lieu, qu'il ne lui appartient pas dans le cadre de ses attributions de se prononcer sur le régime fiscal de la provision déduite par la société D et sur l'existence d'un avoir fiscal.
Le Comité a, en second lieu, relevé :
- que la société D a acquis les titres de la société A, société devenue entièrement liquide moyennant une légère décote et ayant fait l'objet trois mois plus tard d'une transmission universelle de patrimoine et que, compte tenu de la rémunération qui lui était servie à raison de l'achat de la société A, l'intérêt économique de cette opération ayant donné lieu à une restructuration repose seulement sur l'avantage fiscal qui peut en résulter à l'issue de cette restructuration ;
- que la société D avait souscrit l'engagement de conserver les titres de la société A pendant deux ans afin de bénéficier de ce régime ;
- que la société D a procédé dès l'acquisition des titres à une distribution ayant porté sur 47 % des fonds propres de la société A et que les apports de la société D ont été remboursés dès le 31 mars 2004, la société A ayant fait l'objet d'une transmission universelle de patrimoine avec effet rétroactif au 1er janvier 2004 ;
- que cette filiale n'a exercé aucune activité entre la date de son acquisition et la date de la transmission universelle de son patrimoine à son actionnaire unique dès l'exercice suivant.
Par suite, le Comité a déduit de l'ensemble des éléments ainsi portés à sa connaissance et des circonstances rappelées ci-dessus que la société D avait souscrit l'engagement formel de conservation des titres pendant une durée de deux ans dans le but exclusif d'atténuer ses charges fiscales grâce à une application littérale des dispositions fiscales relatives au régime des sociétés mères à l'encontre des objectifs poursuivis par le législateur lorsqu'il a adopté ce régime lequel permet, afin d'éviter une double imposition, de ne pas soumettre à l'impôt sur les sociétés dû par la société mère, sous déduction d'une quote-part de frais et charges de 5%, les dividendes qu'elle a reçus de sa filiale, mais suppose une poursuite effective de l'activité de la filiale pendant deux ans au moins après son acquisition.
En conséquence, le Comité émet l'avis que l'administration est fondée à mettre en œuvre la procédure de répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige.
Enfin, le Comité estime que la société D doit être regardée comme ayant eu l'initiative principale des actes constitutifs de l'abus de droit au sens du b) de l'article 1729 du code général des impôts. Il émet donc l'avis que l'administration est fondée à appliquer la majoration de 80 % prévue par ces dispositions. »
Nota : l'administration a pris note de l'avis favorable du Comité.
8. Affaire n°2009-13 concernant la SAS Z
« La société P a acquis le 20 mars 2003 pour un prix de 2 220 291 € la totalité des titres de la société G, ayant pour objet la gestion de valeurs mobilières. Elle a revendu ces titres pour un prix de 2 220 000 € le 28 avril 2003 à la société Z.
La société Z, qui a entendu se prévaloir du régime des sociétés mères prévu aux articles 145, 146 et 216 du code général des impôts, a pris l'engagement formel, alors exigé par l'article 54 de l'annexe II à ce code, de conserver les titres acquis pendant une durée minimale de deux ans.
Le 5 mai 2003, la société Z a reçu une distribution de la société G d'un montant de 1 674 000 € et a constitué à la clôture de l'exercice le 31 décembre 2003 une provision pour dépréciation des titres de cette société à hauteur de 1 422 058 €. Elle a estimé que cette dotation relevait du régime fiscal des moins-values à long terme et l'a imputée sur une plus-value de 805 820 € retirée de la cession des titres d'une autre société.
Cette distribution, placée sous le régime des sociétés mères, a été retranchée pour son montant du bénéfice net total de la société Z qui a omis d'effectuer une déduction au titre de la quote-part de frais et charges de 5%.
Le 1 er janvier 2004, la société G a fait l'objet d'une transmission universelle de patrimoine au profit de la société Z qui a elle-même fait l'objet, le 25 novembre 2004 avec effet rétroactif au 1 er janvier 2004, d'une transmission universelle de patrimoine au profit de la société P.
L'administration a relevé qu'à la date de la cession des titres, la société G ne détenait plus aucun actif corporel ou incorporel, n'exerçait plus aucune activité économique mais disposait de liquidités importantes. Elle a estimé que sous le couvert d'une acquisition de titres et de distributions de dividendes, opérations en apparence ordinaires, la société Z avait en fait réalisé une opération dont l'objectif était exclusivement fiscal dès lors qu'il était manifeste qu'elle n'avait jamais eu l'intention d'animer la société G pas plus qu'elle n'avait eu l'intention de valoriser sa participation, les titres de cette société ayant été dépréciés par voie de provision compte tenu de la distribution de dividendes dont l'incidence fiscale a été neutralisée grâce au régime des sociétés mères. Elle en a déduit que l'opération appréciée dans sa globalité n'avait pu être inspirée par aucun autre motif que celui de minorer le résultat de la société Z et par suite d'éluder l'impôt correspondant.
L'administration a mis en œuvre la procédure de répression des abus de droit et a ainsi, sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, refusé l'application du régime des sociétés mères et filiales. Elle a réintégré au résultat de l'exercice clos en 2003 la somme de 1 674 000 € correspondant aux dividendes regardés comme abusivement déduits de ce résultat par application de ce régime. Le solde de la moins-value à long terme, soit 616 238 €, n'ayant fait l'objet d'aucune imputation, l'administration a, compte tenu de l'asymétrie entre la rectification effectuée sur les dividendes imposés au taux de droit commun de l'impôt sur les sociétés et la constatation d'une charge déductible traitée fiscalement à long terme, décidé de ramener finalement la rectification proposée de 1 674 000 € à 711 257 €, sous réserve que la société s'engage à renoncer à toute utilisation du solde de la moins-value non utilisée.
Après avoir entendu ensemble les représentants de la société et de l'administration fiscale, le Comité précise, en premier lieu, qu'il ne lui appartient pas dans le cadre de ses attributions de se prononcer sur le régime fiscal de la provision déduite par la société Z et sur l'existence d'un avoir fiscal.
Le Comité a, en second lieu, relevé :
- que la société Z a acquis les titres de la société G, société devenue entièrement liquide moyennant une légère décote et ayant fait l'objet sans délai d'une transmission universelle de patrimoine et que, compte tenu de la rémunération qui lui était servie à raison de l'achat de la société G l'intérêt économique de cette opération ayant donné lieu à une restructuration repose seulement sur l'avantage fiscal qui peut en résulter à l'issue de cette restructuration ;
- que la société Z avait souscrit l'engagement de conserver les titres de la société G pendant deux ans afin de bénéficier de ce régime ;
- que la société Z, en procédant dès l'acquisition des titres à la distribution de la quasi-totalité des réserves de la société G, avait vidé de toute substance cette filiale qui n'exerçait plus aucune activité ;
- que cette filiale n'a eu aucune activité après cette distribution et avant la transmission universelle de son patrimoine à son actionnaire unique dès l'exercice suivant.
Par suite, le Comité a déduit de l'ensemble des éléments ainsi portés à sa connaissance et des circonstances rappelées ci-dessus que la société Z avait souscrit l'engagement formel de conservation des titres pendant une durée de deux ans dans le but exclusif d'atténuer ses charges fiscales grâce à une application littérale des dispositions fiscales relatives au régime des sociétés mères à l'encontre des objectifs poursuivis par le législateur lorsqu'il a adopté ce régime lequel permet, afin d'éviter une double imposition, de ne pas soumettre à l'impôt sur les sociétés dû par la société mère, sous déduction d'une quote-part de frais et charges de 5%, les dividendes qu'elle a reçus de sa filiale, mais suppose une poursuite effective de l'activité de la filiale pendant deux ans au moins après son acquisition.
En conséquence, le Comité émet l'avis que l'administration est fondée à mettre en œuvre la procédure de répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige.
Enfin, le Comité estime que la société Z doit être regardée comme ayant eu l'initiative principale des actes constitutifs de l'abus de droit au sens du b) de l'article 1729 du code général des impôts. Il émet donc l'avis que l'administration est fondée à appliquer la majoration de 80 % prévue par ces dispositions. »
Nota : l'administration a pris note de l'avis favorable du Comité.